(Seize heures seize minutes)
Mme Roy (Arthabaska)
:
Je vais débuter ce point de presse là en faisant une rapide chronologie. C'est
le 1er avril, la première fois que j'ai demandé une commission d'enquête
publique sur l'industrie de la construction, les liens avec les partis
politiques et maintenant avec le syndicat. Sur plusieurs demandes que j'ai fait
après, répétées, c'est seulement six mois après cette demande-là que le Parti
québécois a décidé d'emboîter le pas. S'il y a eu des centaines de questions du
Parti québécois entre avril 2009 et septembre 2009, il y a eu plusieurs
périodes de questions, et on n'a jamais demandé cette commission d'enquête là.
Donc, je pense qu'il faudrait qu'on
remette ça en état puis qu'on se dise... parce que les écoutes électroniques
qui nous ont appris qu'on avait un deal, comme on dit, avec Blanchet et qu'on
va essayer d'empêcher la commission d'enquête d'avoir lieu sont concomitantes
avec le mois d'avril 2009, le moment où je demandais pour la première fois
publiquement une enquête sur la construction. Bon.
Ces enregistrements-là sont... Ça a pris
six mois, 38 périodes de questions et 300 questions avant qu'ils demandent une commission
d'enquête. Maintenant, moi, je pense que la première ministre doit répondre.
J'ai compris, dans ces enregistrements-là, que Michel Arsenault était la
courroie de transmission entre la FTQ ou ses différentes factions et Pauline
Marois. M. Arsenault va venir témoigner plus tard à la commission d'enquête et,
comme il est... on peut présumer qu'il y aura aussi des auditions d'écoute
électronique compromettante.
J'aimerais que la première ministre
s'explique aux Québécois, s'il y a lieu, avant qu'on entende ça par le biais de
la commission. Je ne vous dis pas que c'est le cas, mais je ne voudrais pas que
ça arrive. Je pense que la première ministre est sommée de s'expliquer. Quels
sont les liens entre elle et la FTQ-Construction? Est-ce que c'est ça qui a
entraîné un délai de six mois avant qu'elle demande une commission d'enquête?
Le Modérateur
: Questions?
M. Lavoie (Gilbert)
: Il
y a un de vos collègues, qu'on ne nommera pas ici, qui a souvent laissé
entendre que la commission avait d'autres enregistrements téléphoniques des propos
de M. Arsenault faisant état de ses conversations avec Mme Marois. Est-ce que
vous êtes au courant de ces...
Mme Roy (Arthabaska)
:
Je ne suis pas au courant de ça, mais ce n'est pas un secret de Polichinelle,
là, que les hauts placés de la FTQ ont été sous enquête électronique. Des
milliers et des milliers de conversations ont été entendues. Pour le reste, je
ne peux rien présumer.
M. Lavoie (Gilbert)
:
Vous êtes avocate. Est-ce qu'à prime abord vous avez... vous savez qu'une
commission d'enquête ça peut entendre plein de déclarations qui sont niées le
lendemain. Est-ce que vous donnez de la crédibilité à ce que vous avez entendu
aujourd'hui?
Mme Roy (Arthabaska)
:
Parce que c'est un... Il y a une différence entre un témoignage puis une écoute
électronique. L'écoute électronique, quand on ne sait pas qu'on est sous écoute
électronique, il y a plus de chance qu'on ne travestisse pas la vérité. Et puis
quand les paroles dites t'incriminent, bien, il y a plus de chance aussi que ce
soit la vérité que lorsque tu essaies de te discriminer. Donc, c'est comme ça
que, moi, je l'analyse. J'analyse toujours les déclarations dans ce sens-là.
M. Robillard (Alexandre)
:
Bien, qu'est-ce qui fait que, selon vous, ils auraient changé leur fusil
d'épaule à partir de septembre?
Mme Roy (Arthabaska)
:
Bien, à ce moment-là, moi, il y a deux... c'est mes hypothèses, il y a deux
hypothèses. À ce moment-là, il n'y a personne, au mois de septembre, qui
pensait que Jean Charest allait céder à la pression. Vous les avez vues, les
réponses des ministres, là, jusqu'à la toute dernière minute, Jean Charest ne
voulait pas céder. Vous souvenez-vous de Pierre Moreau qui avait donné son
entrevue à Tout le monde en parle le jeudi; le dimanche, il disait qu'il
n'y avait pas de commission d'enquête? Vous souvenez-vous du scrum de Jean-Marc
Fournier, le matin même du discours de Jean Charest à son conseil... là où il
avait annoncé sa première version de la commission Charbonneau? Il ne le savait
pas. Donc, jusqu'à la dernière minute, tout le monde a été convaincu que le
premier ministre ne céderait jamais.
M. Robillard (Alexandre)
:
Donc, il aurait tenu, quoi, un double discours?
Mme Roy (Arthabaska)
:
Bien, c'est-à-dire que, quand tout le Québec réclame une commission d'enquête,
tu es le parti de l'opposition, à un moment donné, politiquement, on n'a plus
le choix, là, il faut embarquer dans la marche du peuple qui voulait une
commission d'enquête.
M. Lavoie (Gilbert)
:
M. Blanchet est quand même un... n'est pas en politique. Il est le conjoint de
quelqu'un qui est en politique, mais il a le droit de faire des affaires quand
même et des ententes avec le Fonds de solidarité.
Mme Roy (Arthabaska)
:
Il n'y a aucun problème qu'il fasse des affaires avec le Fonds de solidarité.
Le problème, c'est que, s'il fait ces affaires-là dans le but de pouvoir
influencer son épouse, c'est là qu'est le problème.
M. Lavoie (Gilbert)
:
Vous voulez dire s'il utilise le pouvoir de son épouse.
Mme Roy (Arthabaska)
:
S'il utilise le pouvoir... sa proximité avec Mme Marois, parce qu'on ne peut
pas dire plus près que ça, là, si cet argument-là sert à obtenir des fonds ou
de faciliter des affaires, ça, c'est problématique.
Mme McKinnon (Catou)
: Je
m'excuse, Mme Roy, je suis arrivée en retard. Can you explain
in English what you are asking for?
Mme Roy
(Arthabaska)
: Non, je ne réponds pas encore en anglais.
Mme McKinnon (Catou)
:
Ah! Schnout!
Mme Roy (Arthabaska)
:
Oui, bientôt…
Mme McKinnon (Catou)
:
J'ai oublié. O.K. Non, ça ne fait pas assez de temps.
Mme Roy (Arthabaska)
:
Ce que je suis en train de vous dire, c'est que les conversations avec M.
Arsenault ont été concomitantes avec mes premières demandes. Ce qu'on prétend
puis ce qu'on semble comprendre de ces conversations-là, c'est que, parce que
Mme Marois était chef, à l'époque, du Parti québécois et parce que son époux
avait des… faisait des affaires avec le Fonds de solidarité ou… je ne sais pas,
je pense que c'est ça, il faudrait qu'il vienne nous l'expliquer c'est quoi le
deal, eh bien, qu'il influencerait la première ministre à travers lui pour ne
pas demander une commission d'enquête. Moi, je pense que ça… Mme Marois doit
absolument nous répondre. Il n'y a pas juste ça, là. Ça lui a pris six mois à
demander une commission d'enquête, mais aussi on lui demande depuis longtemps
de séparer la gestion du fonds et du syndicat, puis elle ne fait rien.
Mme McKinnon (Catou)
:
Est-ce que vous êtes en train de dire que, quand le PQ s'est lancé dans la
demande de l'enquête, que c'était parce que quelqu'un en avait parlé? Je ne
comprends pas.
Mme Roy (Arthabaska)
:
Bien non, c'est moi qui en a parlé, le 1er avril. J'ai commencé à en demander.
Mais c'est parce que, je veux dire, c'est d'expliquer ce délai-là de six mois
de revirement de cap avant de le demander, comme premier parti de l'opposition,
alors qu'il y avait des associations qui s'étaient déjà prononcées en faveur
d'une commission d'enquête.
Mme McKinnon (Catou)
: Alors,
pourquoi vous pensez qu'il y avait eu ce délai-là?
Mme Roy (Arthabaska)
:
C'est à elle à l'expliquer puis c'est à elle à expliquer c'est quoi le deal
puis s'il y a eu des influences indues. Je pense qu'il faut qu'elle sorte de
son mutisme puis qu'elle vienne nous expliquer qu'est-ce qui s'est passé. Parce
que les personnes qui semblent être en contact avec Pauline Marois, sur cette
écoute électronique là, c'est Michel Arsenault. Il n'a pas encore témoigné. Je
présume que, lorsqu'il va témoigner, on va aussi entendre des écoutes
électroniques. Donc, je voudrais bien que Pauline Marois nous explique, plutôt
que de l'entendre sur des écoutes électroniques, s'il y a lieu.
M. Robillard (Alexandre)
:
Donc, il y a apparence de conflit d'intérêts?
Mme Roy (Arthabaska)
:
Bien là, on est trop proche, on est trop dans une… c'est presque incestueux,
tout ça. Je pense que ça nécessite des explications. On parle de la première
ministre actuelle.
Mme McKinnon (Catou)
:
…si quelqu'un… si c'est vrai que quelqu'un a demandé d'influencer le Parti
québécois pour ne pas en demander une, qu'est-ce que Mme Marois aurait dû faire
à ce moment-là?
Mme Roy (Arthabaska)
:
Bien, il faut qu'elle nous le dise. Il faut commencer par cette étape-là puis
voir qu'est-ce qu'elle a fait puis comment qu'elle s'est positionnée. Puis il
faut savoir c'est quoi le deal. Le deal, ça veut dire quoi, le deal entre
Blanchet et la FTQ?
M. Lavoie (Gilbert)
:
S'il était démontré que Mme Marois a utilisé son poste… ce genre de pression
là, est-ce que vous croyez qu'elle devrait démissionner?
Mme Roy (Arthabaska)
:
On était quatre ici, là. Je ne peux pas vous répondre à ça, mais il va falloir
graduer, là, tout ce qui va se passer dans les jours qui suivent, là. Ce matin,
quand je me suis levée, je ne pensais pas venir ici, moi, là, là. Demain, il y
aura peut-être autre chose. C'est un ensemble de preuves, comme on appelle,
circonstancielles, en droit, qui vont nous amener à nous positionner.
Mme McKinnon (Catou)
:
Et vous la connaissez depuis longtemps, Mme Marois. Pensez-vous que c'est
vraiment possible qu'il y ait eu ce lien-là, que son mari lui chuchote sur
l'oreiller : Écoute, chérie, des commissions, on n'en veut pas parce que
mes chums à la FTQ, ça ne leur dit pas?
Mme Roy (Arthabaska)
: Je ne m'immiscerai pas dans leur couple. Je ne
sais pas comment ça fonctionne chez eux et puis je ne peux pas vous dire, là,
moi... C'est parce que, là, c'est sur la place publique, c'est pour ça qu'elle
doit répondre.
Mme McKinnon (Catou)
:
Mais c'est parce que vous êtes en train de dire que vous pensez qu'elle est
capable de ça.
Mme Roy (Arthabaska)
: Je ne vous dis pas ça. Je vous dis qu'on a
allégué qu'on ferait ça. Il faut qu'elle le dise, qu'est-ce qui s'est passé. Il
faut qu'elle s'explique.
(Fin à 16 h 25)