(Treize heures trois minutes)
Mme David
: Bonjour. Je
voudrais apporter des remarques, préliminaires, évidemment, on s'entend bien,
sur le projet de loi, donc, n° 491 déposé ce matin par notre collègue
Fatima Houda-Pepin, députée de La Pinière.
Je veux d'abord saluer la contribution de
Mme Houda-Pepin au débat sur la charte de la laïcité. Elle apporte de nouveaux
éléments qui devraient certainement être repris dans le débat, mais aussi dans
la future adoption d'un projet de loi pour une charte de laïcité. Elle apporte
des éléments particulièrement importants en ce qui a trait à la lutte contre l'intégrisme,
et ça, c'est une contribution particulière que je salue.
Évidemment, un projet de loi rend
difficilement compte du terreau sur lequel, souvent, se construit l'intégrisme,
que ce soit ici, au Québec, ou ailleurs, c'est-à-dire tout ce terreau social
qui fait qu'un certain nombre de jeunes, par exemple, aux prises avec le
chômage, avec la discrimination, vont être plus portés à écouter le chant des
sirènes, là, de ceux qui veulent les enrôler, les mobiliser dans une lutte à
finir contre les infidèles. Ça, un projet de loi peut peut-être en rendre
difficilement compte, mais au Québec, si on veut lutter de façon claire contre
le conservatisme religieux et contre l'intégrisme, il va falloir s'occuper de
questions de justice sociale. Elle apporte, ma collègue, donc, des éléments
importants quant à la lutte contre l'intégrisme et elle veut, par son projet de
loi, interdire les mariages forcés, la ségrégation basée sur l'identité
sexuelle ou l'appartenance religieuse, la polygamie, les mutilations génitales.
Alors, nous allons regarder, à Québec
solidaire, quel est l'état des lieux sur ces sujets. Mais il est clair que si
on s'aperçoit qu'effectivement il y a des brèches dans les lois, il faudra les
colmater sur ces sujets-là. Évidemment, on est très heureux que Mme Houda-Pepin
se joigne au rang de Québec solidaire pour... interdire, pardon, le port de
signes religieux par les personnes employées de l'État qui sont en situation
d'autorité coercitive. Et je rappelle que, là-dessus, le consensus au Québec
est généralisé, qu'on pourrait tout à fait construire une charte de la laïcité
dès maintenant, avec plein d'éléments sur lesquels nous nous entendons, y
compris celui-là. Mais le ministre Drainville s'obstine, lui, avec son gouvernement,
à faire de l'interdiction pour tous les employés de l'État du port de signes
religieux, il fait de cela le coeur, le centre, l'axe d'une politique sur la laïcité,
ce qui me paraît tout à fait absurde, et, là-dessus, nous rejoignons Mme
Houda-Pepin.
Nous soutenons, bien sûr, l'article de son
projet de loi qui interdit d'invoquer une conviction religieuse pour contester
un programme scolaire, par exemple, ou pour refuser de s'y conformer. C'est tout
à fait intéressant. Nous aurions aimé que son projet de loi aille plus loin en
matière d'accommodement. Par exemple, nous, nous proposons un critère
d'acceptation d'accommodement qui est la question de l'intégration citoyenne.
Un accommodement ne doit pas exclure, par exemple, exclure un enfant de
maternelle d'un cours de musique. Un accommodement doit inclure. Alors, ce
seront des choses, j'espère, que nous pourrons discuter avec elle. D'ailleurs,
nous nous rencontrons dès demain.
Le projet de loi de Québec solidaire sur
une charte de la laïcité intègre la dimension de la présence du crucifix à
l'Assemblée nationale. Là-dessus, je ne comprends pas du tout que Mme
Houda-Pepin ne soit pas plus claire. Elle parle d'un vote au deux tiers de
l'Assemblée nationale. Moi, je pense qu'il faut carrément dire que ce crucifix
n'a pas sa place là où il est là, au-dessus de la tête du président, et qu'il
peut être déplacé dans le bâtiment. J'observe aussi qu'il n'y a aucune mention
de la question de la prière dans des conseils municipaux ou ailleurs et il me
semble que ça, quelle que soit la sorte de prière, d'ailleurs, cela n'est pas
de mise lorsqu'il s'agit d'instances municipales ou gouvernementales. Donc, je
ne comprends pas très bien pourquoi ça n'est pas là.
J'aurai des questions à poser aussi à Mme
Houda-Pepin sur sa définition de l'intégrisme religieux, parce qu'elle en fait
une définition extrêmement stricte et qui inclut l'incitation à la haine,
l'incitation à la violence. Pour ma part, j'ai le sentiment que l'intégrisme
religieux peut être plus large que ça et ne pas nécessairement inclure ces
incitations. Donc, je voudrai en discuter avec elle, de la même façon que je
voudrai discuter de la notion même de laïcité. Mme Houda-Pepin rappelle avec
justesse que l'État doit être neutre vis-à-vis les religions, que ce soit une
religion ou plusieurs religions. Elle a raison, mais la laïcité, c'est aussi le
fait de reconnaître que l'État ne doit être influencé par aucune religion, et
la laïcité, c'est, par ailleurs, que l'État doit permettre l'expression des
convictions religieuses des citoyens, et là je réfère à la loi française qu'on
cite souvent, de 1905.
Donc, il me semble qu'il manque certaines
dimensions. Mais, une chose est certaine, ce projet de loi de Mme Houda-Pepin
est la preuve supplémentaire qu'un consensus est possible. Si nous nous basions
sur un ensemble de questions, d'articles qui font consensus, nous pourrions
adopter une charte de la laïcité avant même de nous en aller en élection, qui
est, comme je l'ai dit souvent, une campagne électorale, le pire moment pour
discuter de ce genre de choses parce qu'on est tellement partisans et que, ce
débat-là, il doit se faire dans une logique non partisane.
Alors, moi, je la salue, cette
contribution. J'espère que nous pourrons aller plus loin dans les discussions.
Il y a deux partis, en ce moment, qui se refusent à tout compromis : le
Parti libéral et le Parti québécois. Je les invite à faire preuve de plus
d'ouverture et à se baser sur les consensus qui existent au Québec autour de la
laïcité pour qu'ensemble, vraiment ensemble, nous puissions aller de l'avant.
Merci.
(Fin à 13 h 10)