(Onze heures quarante minutes)
M. Couillard : Alors,
bonjour. M. Paradis et moi, on vient redire à quel point on est déçus de voir
que le gouvernement a voté hier contre une motion que Pierre Paradis a
présentée, qui demandait, encore une fois, le dépôt d'un budget — puis
je vais insister sur les détails, les mots sont importants — un
budget en bonne et due forme, c'est-à-dire pas un résumé, pas un énoncé, un
vrai budget, incluant un budget des dépenses, avant que la première ministre ne
déclenche des élections. Il est clair que, malgré ce qu'elle nous a dit à la
période de questions, il y a une ambiance électorale, je pense que vous l'avez
noté vous-mêmes, assez nette. On s'en va en élections. Moi, ce que je décode du
vote d'hier du Parti québécois, c'est qu'ils s'en vont en élection puis qu'il
n'y aura pas de budget avant l'élection.
Et je pense, pour les gens qui nous
écoutent, pour les Québécois et les Québécoises qui gagnent leur vie, là, puis
qui envoient de l'argent à Québec, qu'on n'ait pas de budget au Québec depuis
2012, qu'on s'apprête à aller en élection avec des engagements électoraux,
alors qu'on n'a même pas l'heure juste sur les finances publiques, c'est
totalement inacceptable, c'est un manque de respect envers la population. Vous
avez vu qu'on est revenus sur cette question aujourd'hui. Ce n'est pas un
détail, ce n'est pas une question banale, c'est une question assez
fondamentale. Je vous invite à vérifier dans vos archives c'est quand la
dernière fois qu'un gouvernement est allé en élection sans budget. Ça remonte à
très longtemps.
M. Robitaille (Antoine)
:
Ce n'est pas en 2008?
M. Couillard : Sans budget
voté. Sans budget déposé.
M. Robitaille (Antoine)
:
O.K., parce qu'en 2008 vous êtes partis en élection, le Parti libéral…
M. Couillard : En 2003, le
Parti québécois a fait la même chose, mais, au moins, ils ont déposé un budget,
dont on a vu par la suite qu'il y avait un trou de 4 milliards à
l'intérieur, là, mais il y a eu un dépôt de budget.
M. Robitaille (Antoine)
:
En 2008, le déclenchement est après la mise à jour de Mme Jérôme-Forget, non?
M. Couillard : T'étais là,
Pierre.
M.
Paradis
:
2008, oui, après la mise à jour.
M. Robitaille (Antoine)
:
Donc, il n'y avait pas de budget…
M. Couillard : Autre
question.
M. Lacroix (Louis)
:
Mais vous ne croyez pas au scénario du 20 février, M. Couillard?
M. Couillard : Moi, je ne
crois aucun scénario, j'attends, c'est madame… Ce qui est dans l'air
actuellement, ce n'est pas nous autres qui déclenchons les élections, c'est Mme
Marois et le Parti québécois.
M. Dutrisac (Robert)
:
…aujourd'hui sur la question du temps que ça prendrait pour revenir à
l'équilibre budgétaire. Le gouvernement soutient que, finalement, l'état des
finances publiques est conforme, à l'heure actuelle, à la mise à jour. S'ils
déposent un budget, là, avant les élections et que l'image des finances
publiques est semblable à celle de la mise à jour, combien de temps ça
prendrait pour rétablir l'équilibre budgétaire?
M. Couillard : D'abord, on ne
connaît pas les chiffres. Puis, vous parlez de la mise à jour, on va avoir le
rapport du Vérificateur général sur la mise à jour probablement la semaine
prochaine — on en a entendu parler aujourd'hui qu'il y aurait ce
dépôt-là — et là on va voir l'ampleur du trou dans lequel est plongé
le Québec. Je vous rappelle que tous les énoncés, tous les documents qui
viennent du ministre des Finances actuel ont tous comporté de nombreuses
erreurs, des erreurs majeures sur l'emploi, sur la croissance économique, sur
les dépenses du gouvernement. On a une déviation, dans les dépenses, de
75 %, d'environ 830 millions. Alors, le niveau de crédibilité de ce
gouvernement, quand il dépose des budgets ou des documents budgétaires qui ne
sont pas vérifiés, est extrêmement faible. D'ailleurs, le passé est garant de
l'avenir, ça a été la même chose en 2003. On assiste exactement à la même
manoeuvre.
Maintenant, ce que j'ai dit sur l'équilibre
budgétaire, puis je le redis, je craignais que le Québec soit entraîné dans un
déficit qui dépasse un an, deux ans et peut-être trois ans, et c'est ce qu'on
voit actuellement. La mise à jour de l'automne nous amène vers un déficit.
Parce que laissez-vous pas compter d'histoire, là, l'équilibre en 2015-2016,
oubliez ça; il y a un milliard de mesures à identifier. Alors, moi, je veux
voir les véritables chiffres, je veux voir le rapport du Vérificateur général,
et on vous dira, à ce moment-là, nous, quand est-ce que l'équilibre budgétaire
va être atteint avec nous. Pour le moment, c'est 2014-2015, jusqu'à temps qu'on
ait les nouveaux chiffres.
M. Dutrisac (Robert)
:
Donc, budget pas budget, vous ne serez pas en mesure de nous dire qu'est-ce que
vous allez faire précisément pour le retour à l'équilibre budgétaire?
M. Couillard : Non, c'est
faux. Au contraire, on a déjà dit précisément qu'est-ce qu'on va même...
M. Dutrisac (Robert)
:
...parce que le budget, là, il ne sera pas avec les dépenses, s'il y en a un,
il ne sera pas avec un rapport du Vérificateur général sur le budget, donc les
chiffres… vous dites que vous n'allez pas vous fier sur ces chiffres-là. Donc,
vous ne serez pas en mesure, en campagne électorale, de nous dire comment vous
allez régler le problème.
M. Couillard : Au contraire,
on va le dire, et on l'a déjà dit, puis on va continuer à le dire. Et ça prend
un budget de dépenses. Je vous ai dit : Il n'y aura pas de budget de
dépenses. Pourquoi il n'y aurait pas de budget de dépenses? C'est quoi, cette
affaire-là? Ça prend un budget avec un budget de dépenses.
Maintenant, on a déjà dit la façon dont on
s'y prendrait et on va revenir là-dessus plusieurs fois. D'abord, la première
chose, c'est de contrôler véritablement les dépenses du gouvernement et
d'arrêter de dévier de 830 millions ou de 75 % par rapport aux
prédictions. La façon de le faire est la suivante, c'est : aucun nouveau
programme sans qu'il soit autofinancé dans le reste des dépenses du
gouvernement, protection des coûts de système de la santé et de l'éducation, en
gros, gel de tous les autres ministères. C'est ce qu'on a fait en 2003 et, en
même temps, en même temps, on a fait relever la cote de crédit du Québec, on a
créé de l'emploi, et, par la suite, vous avez vu l'évolution des choses.
Alors, c'est la façon dont on va s'y
prendre. Le passé est garant de l'avenir là-dessus. La même recette ferme,
ferme, de contrôle des dépenses, mais également tout de suite des mesures pour
créer de l'emploi et faire en sorte que la machine de l'économie reparte. Parce
que je ne comprends pas M. Marceau, je l'écoute sur l'emploi puis je n'y comprends
rien, là. Il y a 60 000… 67 000 emplois à temps plein qui ont été
perdus au Québec en 2013. Il dit : Oui, mais il y en a 30 000,
40 000 qui ont été créés. Les emplois qui ont été créés sont en majorité
des emplois à temps partiel, sont des emplois dans la construction, qui est
largement financée par les fonds publics, dans le secteur public. L'emploi dans
le secteur privé, qui est le moteur de l'économie, notamment dans les PME,
c'est la ligne plate, là, c'est l'électro-encéphalogramme plat, là. Alors,
c'est ça qui est en train de se passer, et ça prend un coup de départ dans
cette économie-là, où les gens ont perdu confiance dans le gouvernement.
M. David (Michel)
:
Mais, M. Couillard, la résolution qui a été apportée par le Conseil général du
Parti libéral en novembre, si ma mémoire est bonne, stipule qu'on va demander
au Vérificateur général de vérifier les chiffres avant d'établir le plan de
retour à l'équilibre budgétaire. Alors, le Vérificateur général, il est clair
qu'il ne pourra pas vérifier les chiffres avant l'élection.
M. Couillard : C'est clair.
C'est clair.
M. David (Michel)
: Autrement
dit, vous ne pourrez pas présenter de plan de retour à l'équilibre budgétaire
avant l'élection même s'il y a un budget qui est déposé.
M. Couillard (Philippe)
:
On va le présenter sur la base des chiffres du gouvernement puis on va répéter
à la population du Québec que, lorsqu'on formera le gouvernement, comme on
l'avait fait en 2003, on va demander au Vérificateur général ou une autorité
indépendante de vérifier les chiffres puis donner le véritable portrait.
Puis je veux revenir sur une des questions
additionnelles que j'ai posées à Mme Marois. Elle s'était pourtant engagée à
donner un portrait impartial des finances publiques un mois avant une élection.
Elle a complètement abandonné cette idée, de toute évidence. Je sais que M.
Bernard Drainville, à un moment donné, avait un projet pour créer une autorité budgétaire,
ça a été rapidement balayé. Il y a quand même là, là, un élément, d'après moi,
qui doit être souligné.
M. David (Michel)
:
Mais ce que je veux dire, c'est que le plan que vous allez présenter, sur la
base des chiffres qu'on va avoir, il ne sera pas définitif. On va pouvoir en
changer le lendemain de l'élection.
M. Couillard : D'après un
rapport du Vérificateur général, pas comme ça, selon notre inspiration, là. On
va se baser sur ce que le gouvernement va mettre sur la table, s'ils mettent
quelque chose sur la table, M. David. Moi, je suis loin d'être convaincu qu'on
aura beaucoup de détails sur les finances publiques. On aura des hypothèses,
des projections, des hypothèses optimistes de croissance. Je peux déjà vous
donner la recette. Alors, on va dire : D'après ce que le gouvernement nous
met sur la table, voici l'état des finances publiques, voici le temps requis et
la méthode pour revenir à l'équilibre budgétaire.
On va arriver au gouvernement, parce qu'on
va former le gouvernement, et on demandera au Vérificateur général de regarder
les chiffres en détail.
M. Séguin (Rhéal) : À ce
moment-là, le dépôt d'un budget avant les élections n'aura aucune crédibilité,
selon vous.
M. Couillard : Il aura de la
crédibilité, surtout en matière d'éthique politique, c'est-à-dire que, pour un
gouvernement, pour demander aux Québécois d'aller aux urnes, ce n'est tout
simplement pas acceptable de ne pas avoir de budget. On critiquera le budget,
on le commentera, puis ils le défendront. C'est ça, la démocratie. D'aller en
élection sans avoir de budget, ce n'est juste pas acceptable.
M. Séguin (Rhéal) : Mais vous
l'avez dit vous-même, en 2003, il y a eu dépôt d'un budget le 11 mars,
déclenchement le 12 pour un vote le 14 avril. On est exactement dans ce même
scénario-là…
M. Couillard : Il y a donc eu
dépôt d'un budget.
M. Séguin (Rhéal) : …cette
fois-ci, et vous avez dit qu'il y avait 4 milliards… un trou de
4 milliards, donc, un budget qui n'était pas crédible lorsque vous êtes
allés au pouvoir.
M. Couillard : Et voilà… Mais
donc, ce qu'on demande…
M. Séguin (Rhéal)
:
Alors, tant qu'à avoir un budget qui n'est pas crédible, pourquoi en avoir un…
M. Couillard : Non, non. Ça,
c'est une échappatoire trop facile, là. Je rappelle également, M. Séguin, que
le dernier budget de ce gouvernement date de 2014. On est rendus en 2014.
Pourquoi on n'a pas de budget? Qu'est-ce que M. Marceau est allé dire ou
qu'est-ce qu'il s'est fait dire en décembre par l'agence de crédit à New York?
Dans une rencontre comme ça, je peux vous dire que ça chauffe, c'est certain,
et il est clair que ce gouvernement… que le gouvernement a pris des
engagements, a dû prendre des engagements par rapport aux agences de crédit
pour éviter une décote. Moi, j'aimerais ça savoir quel est l'engagement.
M. Robitaille (Antoine)
:
…un budget fictif. Un budget fictif, ça ferait…
M. Couillard : On va
commenter le budget. On va le voir, si vous me permettez, M. Robitaille, avant
de commenter. On va l'étudier, on va voir si…
M. Robitaille (Antoine)
:
…il va être fictif de toute façon.
M. Couillard : On craint
qu'il le soit, compte tenu des antécédents de la première ministre dans le
domaine, quand elle était ministre des Finances en 2003, et des antécédents
récents de son ministre des Finances sur les projections qu'il a faites. On va
donc étudier ce budget, vous allez le faire vous-mêmes. Quelle est l'hypothèse
de croissance économique? Est-ce qu'elle est crédible? Quelle est l'hypothèse
de revenus du gouvernement, de taxe à la consommation, de revenus? Est-ce que
c'est crédible? Vous êtes capables, avec vos équipes économiques également, de
faire ces analyses. On le fera nous aussi.
Le Modérateur
: On va
passer en anglais.
Mme Plante (Caroline)
:
So, even under your Government, you would bring in the Auditor General to check
the numbers on the basis that they may be false?
M. Couillard : First, we will introduce a way to have an independent picture of
public finances before an election. We will do it. I think people... Quebeckers are fed up of this dance, you
know. The new government comes
and says : I wasn't sure it was so bad, I didn't know it was so bad,
therefore I cannot do this, and this, and that. And the previous government
says : No, no, it was all OK. People are fed up of that, I'm also fed up
of this game, as a citizen. I want an independent person to present such a picture before an election.
Mme Plante (Caroline)
: So are you saying that everybody had inaccuracies in it, to be... a
PQ budget, a Liberal budget? All the budgets have inaccuracies...
M. Couillard : All budgets are based on premises. You know, the Minister of Finance decides with his team.
And it's also a political
decision, by the way, it's not a purely technical decision. What is my forecast
for economic growth, for GDP? What is my forecast for revenues? What about
consumption? What about exports? What about other sources of income, crown
corporations? How much money are we going to get from those sources of
revenues? And then, based on those premises, here's my budget.
Now, the flaw in any budget
is always in the premises. So this is what we're going to look very carefully
at. And when we will form the Government, because
we will form the Government, we'll ask the Auditor General to look at the
public finances in a very detailed way, and do it rapidly, do it fast, so he
can immediately start working on the public finances and Québec's economy.
Mme Plante (Caroline)
:
If Mr. Marceau's budget is flawed, why have a budget, why expect a budget at
all?
M. Couillard : Are we trying to give them an excuse not to present a budget? I
don't accept that. It's their job to table a budget. We will judge, you will
judge, the media will judge if the budget is credible or not. Maybe it will be
a very good budget, a very credible. We'll see.
M. Robitaille
(Antoine)
: So, it could be.
M. Couillard : Everything is possible under the sun, my friend.
Journaliste
:
Mr. Couillard... Oh! Sorry, Kevin.
M. Dougherty (Kevin)
:
Mr. Couillard, in the past, I can recall differences of opinion between Liberal
Finance Ministers and the Auditor General. So there is always... You know,
Léo-Paul Lauzon refers to accounting as an occult science, not an exact science
and, you know...
M. Couillard : There are not that many exact sciences around. I can tell you that.
M. Dougherty (Kevin)
:
...there are different ways of doing things, there are different ways of
looking at figures. But, in Ottawa, they have a budget director, who they
ignore, but, you know, is that something that you could...
M. Couillard : That is something we're looking at. We want an independent
institution...
M. Dougherty (Kevin)
:
Rather than the Auditor General...
M. Couillard : Well, the debate now is between the two solutions, a budget
parliamentary officer or just giving another mandate to the Auditor General.
There as pros and cons for both options, and we'll come back to this during the
campaign.
M. Authier (Philip)
: Mr. Couillard, Mr. Drainville just said in a scrum, regarding the
comments that you made at your event last night, Bill 60 is a manner of…
M. Couillard : It's fuel. It fuels fundamentalism, yes.
M. Authier (Philip)
: Is that, first of all, the first time you've said that?
M. Couillard : No, I've said it many times. Many times. The best weapon against
extremism, fundamentalism is freedom.
M. Authier (Philip)
: And he says that you're all over the map when with your position on
the charter and that you're fuelling… that fuels the fundamentalists, because they thrive on that, and that your
policy is basically an open bar. He just said it 30 seconds ago. He says
your policy is an open bar for the fundamentalists.
M. Couillard : Well, it's totally the reverse. If you tell
a woman : Go home, we don't want you here, we don't like what you wear on
your head, we don't like the way you dress, she will go home, she will be
isolated and then she will become the pray of people who want to take her in
their movement.
Now, on our position, we
have been very clear. First, we want to protect Québec's patrimony, heritage,
we want to… not to fire anyone, please, in our hospitals, our schools, our
day-care centers. We also want accommodations to be provided with guidelines
and we will not accept garments that totally hide women in the public services.
We've said it, we will repeat it, it's very simple. People can accept it, not
be in agreement with it, that's it, that's our position. Now, his position is
one of the worst policies I've seen tabled in Québec. And, honestly, I was
shocked, I said it, I remember, M. David was shocked when I said it, that,
coming from René Lévesque's party, I was shocked to see such a socially
retrograde policy being tabled in Québec. Merci.
Mme Plante (Caroline)
:
Mr. Couillard, should the province have an inspector general, like in Montréal?
Should there be a provincial one?
M. Couillard : We'll deal with the municipality first and we'll see how it goes.
Thank you.
(Fin à 11 h 53)