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Conférence de presse de M. Michel Samson, vérificateur général par intérim

Dépôt du Rapport spécial du Vérificateur général du Québec à l’Assemblée nationale pour l’année 2014-2015

Version finale

Tuesday, June 3, 2014, 15 h

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Quinze heures neuf minutes)

M. Samson (Michel) : …remis aux députés les résultats de ma vérification particulière portant sur l'évolution du solde budgétaire du gouvernement pour l'année 2014‑2015 jusqu'au 7 avril 2014, soit jusqu'à la date des élections générales.

Le rapport découle d'une demande que le gouvernement m'a faite au moyen d'un décret adopté le 24 avril 2014. Le 26 mai, j'ai remis mon rapport au gouvernement pour qu'il puisse, s'il le juge à propos, en tenir compte dans la préparation de son budget.

Cet appel des parlementaires me demandant de réaliser des travaux sur l'état des finances publiques était le deuxième en moins d'un an. On se souviendra qu'en février dernier j'ai publié un rapport portant sur l'analyse de la mise à jour économique et financière de novembre 2013. Cette situation illustre à quel point les utilisateurs de l'information budgétaire requièrent, dans certaines circonstances, une assurance additionnelle quant au contenu de ces documents. Une réflexion à ce chapitre s'impose. Si les parlementaires jugent pertinent que le Vérificateur général examine les documents budgétaires produits dans l'année précédant les élections, comme le fait le Vérificateur général de l'Ontario et tel que le suggèrent MM. Luc Godbout et Claude Montmarquette dans le rapport qu'ils ont récemment remis au gouvernement, je leur offre ma collaboration.

Mon mandat visait à apprécier la qualité de l'information transmise au nouveau gouvernement par le ministère des Finances et le Secrétariat du Conseil du trésor quant à l'évolution du solde budgétaire pour 2014‑2015. Le 7 avril 2014, ces deux organisations ont informé le nouveau gouvernement que des efforts substantiels devaient être faits pour respecter le solde budgétaire déficitaire prévu de 1 750 000 000 $ en 2014‑2015. Deux raisons ont alors été invoquées : les revenus inférieurs à ceux prévus dans le budget déposé en février 2014 et des dépenses révisées à la hausse. Mes travaux confirment que les plus récentes données recueillies par le ministère des Finances montrent effectivement une baisse des revenus prévus. De plus, les prévisions ne comportent pas toujours de marge… de marge de prudence, pardon, pour contrer les soubresauts de l'économie.

Au chapitre des dépenses de programmes, je constate que l'information détenue par le Secrétariat du Conseil du trésor établissait clairement, et ce, depuis l'automne dernier, l'ampleur des efforts à déployer pour respecter l'objectif prévu. Au 7 avril, ces efforts étaient inférieurs de 400 millions de dollars à ceux établis en novembre 2013. Globalement, les efforts à fournir pour atteindre la cible relative au solde budgétaire en 2014‑2015 atteignent près de 4 milliards de dollars. Ce montant n'a presque pas évolué entre novembre 2013 et avril 2014.

Le point et le budget montraient une vision limitée de l'état des finances publiques. Ces deux documents ne présentaient ni le montant total des efforts à fournir ni ne fournissaient d'indications claires et complètes quant aux mesures envisagées pour atteindre l'objectif budgétaire déficitaire de 1 750 000 000 $. À ma connaissance, cette situation n'est toutefois pas nouvelle puisqu'il n'est pas dans les pratiques au Québec de faire état de ces informations dans les documents budgétaires.

Au chapitre des efforts à déployer, j'ai constaté que, dès janvier 2014, les ministères ont reçu des budgets préliminaires pour l'année 2014‑2015 amputés d'environ 1,8 milliard de dollars par rapport au coût de reconduction des programmes. Le Secrétariat du Conseil du trésor a discuté avec les ministères au sujet de différentes mesures applicables pour faire face à cette réduction. Cependant, celles-ci n'avaient pas été entérinées par des décisions politiques. Quoi qu'il en soit, si le gouvernement désire conserver la cible prévue du solde budgétaire pour la présente année, soit 2014‑2015, des efforts devront être fournis et des décisions devront être prises, et ce, pour un montant totalisant près de 4 milliards de dollars.

J'estimais, à la suite de ma vérification sur le point de novembre 2013, que cette prévision n'était pas raisonnable. Je l'ai alors qualifiée d'ambitieuse. Le présent rapport confirme ce jugement en y ajoutant un nouvel éclairage. En effet, mon rapport met en lumière le fait que certains risques non négligeables devraient être pris en compte pour bien comprendre l'état des finances publiques au 7 avril 2014. Parmi ceux-ci figure la divergence d'opinions que j'ai eue avec le ministère des Finances concernant la comptabilisation des dépenses de subvention. Cette divergence pourrait occasionner des dépenses additionnelles d'environ 1 milliard de dollars et, par conséquent, d'efforts additionnels à fournir pour atteindre le solde budgétaire prévu en 2014‑2015.

Dans un contexte de transparence et de développement durable de nos finances publiques, il est hautement souhaitable que les parlementaires et les citoyens connaissent l'ampleur des efforts à faire pour atteindre les cibles fixées au chapitre des revenus et des dépenses. J'ai invité le gouvernement à amorcer une réflexion sur le contenu des documents budgétaires et financiers, et ce, particulièrement dans un contexte préélectoral afin de s'assurer que leur contenu répond aux besoins des utilisateurs. Je vous remercie de votre attention.

La Modératrice : Alors, on va y aller avec la période de questions. Alain Laforest, TVA.

M. Laforest (Alain) : Bonjour, M. Samson. Bonjour, madame. M. Samson, est-ce qu'on comprend que le précédent gouvernement avait totalement raté ses cibles entre autres au niveau du déficit et entre autres au niveau du contrôle des dépenses?

M. Samson (Michel) : Écoutez, on est dans le domaine des prévisions. Premièrement, on parle de 2014‑2015, donc ce sont des prévisions pour l'année en cours depuis deux mois. Mais ce qu'on constate, c'est que les documents qui ont été produits, que ça soit l'analyse de la mise à jour économique en novembre 2013 ou le budget en 2014, ne contenaient pas toutes les informations qu'elles auraient dû contenir à notre avis. C'est pour ça qu'on a… Avec les travaux qu'on a faits à ce moment-ci, on voit qu'il manquait environ 4 milliards d'effort à faire pour atteindre la cible budgétaire qui avait été prévue, la cible déficitaire de 1,75 million…

M. Laforest (Alain) : Quel sera le…

M. Samson (Michel) : Milliard.

M. Laforest (Alain) : Milliard, oui. Quel sera le principal problème que risque de vivre le ministre des Finances Leitão, le nouveau ministre des Finances, si on regarde par rapport à vos budgets, là, la hausse des régimes de retraite et la hausse des salaires? Ça, c'est de l'argent qu'on ne peut pas compresser, c'est dû, c'est obligé. Est-ce qu'il y a comme une situation, vous avez senti à votre vérification qu'il y a comme une situation qui est difficile, là, incontournable?

M. Samson (Michel) : C'est certain, lorsqu'on prend le 4 milliards d'effort à faire pour respecter le 1,75 milliard, le 4 milliards d'effort à faire, comme on le mentionne dans le rapport, il y a des mesures que le Conseil du trésor a identifiées en janvier 2014 pour 1,8 milliard. Les mesures de réduction sont en discussion avec… étaient en discussion avec les ministères concernés pour mettre en place, pour prendre des mesures pour réduire cet écart-là, mais il reste encore un 2… 4 milliards moins 1,8, environ 2 milliards encore à résorber.

C'est certain que la rémunération, écoutez, c'est 60 % des dépenses de l'État. On parle beaucoup de la rémunération des médecins spécialistes. Il y a la rémunération aussi des employés de l'État qui vient à échéance prochainement. Donc, c'est certain que ça créé une pression, d'autant plus, comme vous l'avez peut-être constaté dans notre rapport, on a un tableau pour ces deux éléments-là sur cinq ans où on voit que les progressions salariales sont croissantes d'année en année.

Donc, ce qu'on a fait, c'est qu'on a repoussé un peu les dépenses, les dépenses deviennent de plus en plus importantes à l'année subséquente. Donc, si les revenus ne sont pas au rendez-vous, vous comprenez que cette somme-là doit être prise ailleurs dans les dépenses ou ça nous crée un écart, là, encore plus profond, là. Je donne l'exemple des médecins spécialistes, l'augmentation prévue serait de 7 % en 2014‑2015, alors qu'elle était de 5,5 % environ il y a quatre ans. Donc, c'est un taux qui croît tout le temps, qui accroît, évidemment, la pression sur les dépenses.

M. Laforest (Alain) : Est-ce qu'on a frappé le mur?

M. Samson (Michel) : Écoutez, lors de mon rapport en février dernier, j'ai mentionné que des mesures structurantes devaient être prises, que je… Je réitère cette mention-là. Nous ne sommes plus à l'heure des mesures ponctuelles. Un gel des salaires ou un gel… pardon, un gel de l'embauche dans la fonction publique, pour moi, c'est une mesure qui était temporaire, mais qui ne permet pas de régler les écarts comme on a présentement. Donc, il y a vraiment une réflexion profonde qui va devoir être enclenchée.

La Modératrice : Hugo Lavallée, Radio-Canada.

M. Lavallée (Hugo) : Bonjour M. Samson.

M. Samson (Michel) : Bonjour.

M. Lavallée (Hugo) : L'ancien ministre des Finances, Nicolas Marceau, disait ce matin que vous n'aviez peut-être pas retenu la bonne méthodologie, que vous évoquiez... enfin, que les chiffres que vous nous présentez réfèrent à un déficit potentiel qui ne se serait jamais matérialisé, dans la mesure où tous les gouvernements font inévitablement des choix, ne disent pas oui à toutes les demandes de tous leurs ministères. Est-ce que le ton de votre rapport n'est pas un peu alarmiste dans ce sens-là?

M. Samson (Michel) : Non. Je pense que le ton de notre rapport est réaliste. Ce que je dirais par rapport aux propos que vous venez d'évoquer, écoutez, la façon que ça fonctionne, c'est que le Secrétariat du Conseil du trésor demande à chaque année au ministère de lui faire part de ses prévisions de dépenses pour la prochaine année. Donc, le ministère x a ses dépenses de l'année précédente. Il prend en considération les... ça peut être les taux de croissance salariale, ma clientèle qui va augmenter, ça va me coûter tant de plus, donc… avec les nouvelles politiques que le gouvernement compte mettre en place, et il transmet ses besoins... ce sont ses besoins qu'il transmet au Secrétariat du Conseil du trésor.

Le Secrétariat du Conseil du trésor fait une analyse de ces données-là et peut dire, par contre : Non, écoute, le taux de croissance de la clientèle est beaucoup trop élevé; moi, je te réduis ton montant de tant. Et, une fois que le Secrétariat du Conseil du trésor — et c'est son travail — a fait cet exercice-là, on a ce qu'on appelle les coûts de reconduction reconnus. Donc, c'est les coûts des programmes pour réaliser la mission du ministère — on pourrait définir ça comme ça — pour la prochaine année.

Évidemment, vous avez... d'un côté, vous avez les coûts de reconduction puis, de l'autre côte, vous avez... puis c'est le rôle du ministère des Finances, de fixer un objectif de dépenses de programmes. Vous le savez, on avait un taux de croissance de 2 % des dépenses de programmes.  Donc, on a un chiffre, qui est le taux de croissance des dépenses de programmes, on a le coût de reconduction reconnu par le Secrétariat du Conseil du trésor et, entre les deux, on a 4 milliards d'écart.

Donc, j'ai entendu, on disait : Le gouvernement n'est pas le père Noël. Tout à fait, le gouvernement n'est pas le père Noël, mais ce qu'il faut comprendre, ce n'est pas juste... oui, ce sont les besoins du ministère, mais après analyse du Secrétariat du Conseil du trésor. Ce n'est pas une nuance, c'est un élément important à prendre en considération.

M. Lavallée (Hugo) : Et donc, de ce que je comprends, vous souhaiteriez que le gouvernement soit plus transparent en ce qui concerne les coûts de reconduction des programmes, là, si j'ai bien lu votre rapport. Quel serait le bénéfice, donc, pour les citoyens et pour les membres de l'Assemblée nationale, donc, d'avoir accès à ces chiffres qui, sauf erreur, ne sont jamais rendus publics?

M. Samson (Michel) : Effectivement, à notre connaissance, ces données-là n'ont jamais été publiées par quelque gouvernement que ce soit. Donc, ce n'est pas seulement depuis un an, c'est probabement... écoutez, je n'ai pas un historique des 100 dernières années, mais je peux vous dire que depuis très longtemps on ne publie pas ces données-là.

Par contre, la situation financière a beaucoup évolué au cours des dernières années. On est à l'heure des choix difficiles, et je pense que cette information-là doit être communiquée autant à la population qu'aux parlementaires pour qu'ils soient en mesure de faire les bons choix.

Écoutez, dans le budget de février 2014, si vous examinez le budget de 2014, on mentionne que l'écart à résorber pour atteindre le déficit de 1,75 milliard… l'écart à résorber est de 150 millions, et nous, on arrive à 4 milliards. Ça fait qu'il y a un écart. Tu sais, on ne parle pas d'une marge d'erreur, disons, minime, là. Ça fait que, nous, on est convaincus que cette information-là permet une meilleure reddition de comptes, comme je le mentionnais, puis permettrait aux utilisateurs, aux parlementaires de débattre des bonnes choses puis de faire les choix en conséquence. Par la suite, les décisions qui sont prises appartiennent aux parlementaires, puis c'est tout à fait correct, mais ils auront toute l'information requise pour faire les bons choix. La population réalisera aussi les choix difficiles devant lesquels le gouvernement est placé puis les choix qu'il doit faire.

M. Lavallée (Hugo) : Dernière chose, dernière petite question. Vous y faisiez allusion dans vos remarques d'introduction, c'est la deuxième fois que vous êtes sollicité pour porter un regard indépendant sur un budget ou une mise au point budgétaire. Il y a beaucoup de discussions actuellement à savoir si ça ne serait pas pertinent, effectivement, de confier au Vérificateur général le mandat de faire une telle révision avant chaque élection. Il y a d'autres scénarios qui sont évoqués : un comité d'experts indépendant, un directeur parlementaire du budget.

Est-ce qu'on doit comprendre, à la lumière de vos remarques d'introduction, que, pour vous, la solution privilégiée, ce serait effectivement de vous voir confier à vous ce mandat-là que de dresser un portrait neutre de l'état des finances avant chaque campagne électorale?

M. Samson (Michel) : Écoutez, ce que je mentionne, c'est que, oui, on l'a fait deux fois au cours des six derniers mois. C'est un choix qui, évidemment, appartient aux parlementaires à l'Assemblée nationale, de décider qui réalisera ce travail-là s'il doit être fait. Mais, avec les travaux qu'on a faits dans la dernière année et l'expertise qu'il y a à l'intérieur de mon organisation, je suis convaincu qu'on est capables de faire ce travail-là, et, si le gouvernement veut en discuter, évidemment, je suis très ouvert à en discuter avec eux.

La Modératrice : Tommy Chouinard, La Presse.

M. Chouinard (Tommy) : La dernière fois où vous êtes sorti publiquement, vous aviez dit que la cible de 1,75 milliard, c'était une cible ambitieuse, et là vous arrivez avec… vous dites : Il y a un effort à faire de près de 4 milliards. Là, est-ce qu'on est rendu… Comment vous-même, le regard que vous avez porté sur les finances publiques… Est-ce que c'est parce qu'on vous a caché des choses que vous vous êtes contenté de parler d'une cible qui était ambitieuse ou c'est parce que vous n'aviez pas vu venir certaines choses?

M. Samson (Michel) : Question intéressante. Deux choses. Vous savez, un vérificateur a toujours des choix de mots posés, disons. Donc, on avait décidé, dans notre dernier rapport, que nous qualifions les prévisions soit de raisonnables, soit d'ambitieuses, soit de pessimistes. Donc, on a utilisé le mot «ambitieux».

L'écart auquel on arrive présentement, on a pu l'établir… les efforts à faire de 4 milliards, on a pu l'établir, parce que, cette fois-ci, on a eu accès aux données du Secrétariat du Conseil du trésor, chose que nous n'avions pas pu faire la dernière fois, lors de notre mandat. Donc, la dernière fois, nous n'avons pas été en mesure d'établir quels étaient les coûts de reconduction des ministères. On a travaillé uniquement avec l'objectif de dépenses de programmes fixé par le gouvernement, qui était une croissance de 2 % par rapport à l'année précédente. Donc, on ignorait quelles étaient les demandes des ministères révisées par le Conseil du trésor pour avoir les coûts de reconduction reconnus. Comme j'expliquais tout à l'heure, on n'a pas eu accès à cette information-là. Mais là on l'a eu…

M. Chouinard (Tommy) : …vous l'aviez demandé?

M. Samson (Michel) : Oui, oui, oui. Oui, on l'a demandé.

M. Chouinard (Tommy) : O.K. On vous l'a refusé?

M. Samson (Michel) : Il nous a été refusé. On nous avait dit que ce n'était pas pertinent pour nos travaux.

M. Chouinard (Tommy) : D'accord. Comment on qualifie un gouvernement qui ne donne pas à son Vérificateur général des données qu'il souhaite obtenir?

M. Samson (Michel) : Bien, écoutez, moi, j'ai dit que ce n'était pas acceptable. Je vais vous laisser le choix des mots, mais nous, on a dit que ce n'était pas acceptable. C'est certain que ça m'a limité dans mes travaux, puis on le voit bien présentement, là. Autant dans les documents de novembre 2013, l'écart à résorber dans l'analyse de la mise à jour économique était de 1 455 000 000 $, au budget, c'est 150 millions, alors qu'en réalité ça tourne autour de 4 milliards dans les deux cas. Donc, si j'avais eu accès à cette information-là, c'est la conclusion à laquelle je serais arrivé.

M. Chouinard (Tommy) : Bon, maintenant, vous avez dit que vous utilisez un vocabulaire posé, là, mais on ne peut pas oublier le fait que c'est un document, un budget qui a été déposé avant le déclenchement de l'élection. O.K. Compte tenu de ce que vous avez constaté et du fait que vous avez dit : Ce n'est pas nouveau qu'un gouvernement ne donne pas, là, certaines données, est-ce que vous êtes en mesure de qualifier le portrait des finances publiques qui a été déposé par le Parti québécois avant le déclenchement des élections?

M. Samson (Michel) : Bien, le portrait, on mentionne qu'à tout le moins c'est un portrait incomplet, c'est certain. C'est certain que c'est un portrait incomplet qui a été déposé. Très incomplet. Écoutez, on dit qu'il y a des écarts… Le budget mentionnait 150 millions d'écart à résorber, puis on est à 4 milliards, donc il est très incomplet.

La Modératrice : Robert Dutrisac, Le Devoir.

M. Dutrisac (Robert) : Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. Vous parlez que c'est une situation qui n'est pas nouvelle, donc à chaque année vous décrivez, finalement, un processus budgétaire où on établit… chacun des ministères, des organismes établit des coûts de reconduction des programmes.

Pour prendre vraiment la valeur du 4 milliards dont vous parlez, est-ce que vous savez quels sont les coûts de reconduction qu'on a dû comprimer dans les années passées, notamment en 2012‑2013 où on a des chiffres où on a réussi à limiter les dépenses? Il y a toujours un écart entre ce que le Conseil du trésor veut atteindre et les coûts de reconduction. Est-ce que vous connaissez l'ampleur de ces écarts-là pour les années passées, ce qui nous donnerait un éclairage par rapport à l'importance du chiffre d'aujourd'hui?

M. Samson (Michel) : Bien, non, je n'ai pas… on n'a pas ces données-là. C'était, comme vous le savez, la première fois qu'on réalisait un mandat de la sorte, puis, non, on n'a pas eu les données des années précédentes.

M. Dutrisac (Robert) : Donc, on ne sait pas si c'était 2 milliards avant ou c'était 1 milliard.

M. Samson (Michel) : Écoutez, c'est certain qu'il devait avoir un écart. Je pense, ça serait utopique de penser qu'il n'y avait pas d'écart. Mais quelle était l'ampleur de ces écarts-là? Je ne suis pas en mesure de vous le dire.

Le Modérateur : Gilbert Lavoie, Le Soleil.

M. Lavoie (Gilbert) : Oui. La raison pour laquelle le vérificateur a obtenu deux mandats de vérification, là, en moins de six mois, à toutes fins utiles, c'est parce qu'il y a eu des doutes d'émis sur la crédibilité des chiffres en provenance du ministère des Finances.

Vous dites que ce qui vous a été refusé, là, c'est les coûts de reconduction, hein?

M. Samson (Michel) : En fait, les dépenses de programmes, vous savez, qui sont transmises au Secrétariat du Conseil du trésor, l'accès à ces données-là.

M. Lavoie (Gilbert) : Est-ce que c'était un refus provenant de la filière politique ou un refus provenant du ministère des Finances?

M. Samson (Michel) : Dans notre rapport, on mentionne que c'est le ministère des Finances qui a refusé… qui a avisé le Secrétariat du Conseil du trésor de nous refuser l'accès.

M. Lavoie (Gilbert) : Alors, ce n'était pas une décision politique, c'était une décision administrative.

M. Samson (Michel) : De ce que j'en sais, oui.

M. Lavoie (Gilbert) : Est-ce que, dans une telle circonstance, le vérificateur n'a pas le pouvoir ou la possibilité de faire appel au palier politique?

M. Samson (Michel) : Oui, j'aurais pu, mais il faut se remettre dans le contexte de ce mandat-là qui, encore, comme celui qu'on vient de réaliser… qui s'est fait dans un délai quand même assez court, même très court. Et l'objectif, pour nous, c'était d'informer les parlementaires le plus rapidement possible, en temps opportun. Je pense que tout le monde savait qu'on s'en allait en élection, qu'il y aurait un budget qui soit déposé.

Donc, écoutez, oui, j'aurais pu faire des représentations auprès de, peut-être, des membres de la Commission de l'administration publique, mais ça aurait occasionné délai… probablement délai par-dessus délai. Donc, on a fonctionné avec les limites qu'on avait en indiquant, dans notre rapport, ces limites-là.

M. Lavoie (Gilbert) : On aime tenir pour acquis que la haute fonction publique, même si elle peut être légèrement politisée, là, au niveau des sous-ministres, parfois, qu'elle nous donne l'heure juste.

Est-ce que la collaboration que vous avez eue du ministère des Finances pour ce dernier rapport est totalement satisfaisante par rapport à votre expérience précédente, pour le premier rapport?

M. Samson (Michel) : C'est sûr que la collaboration qu'on a eue pour ce mandat-ci est meilleure que celle qu'on avait eue la dernière fois.

M. Lavoie (Gilbert) : Si vous aviez à refaire ça sur une base… mettons, à chaque fois, avant une campagne électorale, là, est-ce que vous demanderiez une plus grande collaboration encore ou est-ce que ce serait suffisant?

M. Samson (Michel) : Bien, ce qu'on demanderait, puis on le mentionne un peu dans notre rapport, c'est que ça soit mieux structuré et ordonné. Parce qu'il faut comprendre que… Écoutez, on a eu le mandat le 24 avril, on a reçu les premiers documents de la part du ministère, du Secrétariat du Conseil du trésor, le 1er mai. J'ai transmis un projet de rapport le 26 mai. Donc, on a eu trois semaines pour faire nos travaux. Donc, les gens étaient très sollicités puis, en même temps, vous savez, les gens, autant aux Finances qu'au Trésor, étaient en préparation d'un budget qui va être déposé demain.

Donc, c'est sûr que ça crée une pression partout. Les gens veulent collaborer avec… voulaient collaborer avec nous, mais ils ont des impératifs, eux aussi, de préparer le budget. Donc, c'est sûr que, si on venait qu'à mieux… mieux établir cette façon de faire là, disons, pour la veille d'une campagne électorale ou en année préélectorale, il faudrait que ça soit mieux structuré et ordonné, dans un tel contexte, pour que ça se fasse correctement pour tout le monde, là.

M. Lavoie (Gilbert) : Une petite dernière, si vous permettez. Lorsqu'on vous a dit que ce n'était pas pertinent, votre mandat, les informations que vous demandiez, est-ce que ça venait du sous-ministre, ou d'un subalterne, ou d'un…

M. Samson (Michel) : Écoutez, est-ce que ça venait du sous-ministre, d'un sous-ministre adjoint? Ça venait, je dirais, de l'équipe de la haute direction du ministère. Je ne pourrais pas vous dire exactement.

La Modératrice : Régys Caron, Le Journal de Québec.

M. Caron (Régys) : Oui, bonjour. Vous dites, M. Samson, que c'était une décision de la machine administrative, mais êtes-vous convaincu qu'il ne s'agit pas d'une commande politique? Parce que, sous un gouvernement sortant, vous avez un mandat où on vous refuse de l'information, puis, par hasard, on se rend compte que cette information-là était défavorable au gouvernement sortant. Arrive un nouveau gouvernement qui vous donne un nouveau mandat, comparable au précédent, et lui… bon, soudainement, woups, l'information sort parce que, justement, l'information est défavorable au gouvernement qui a été battu. Est-ce qu'il n'y a pas une notion politique là-dedans? Avez-vous la conviction que tout ça est purement administratif?

M. Samson (Michel) : Écoutez, moi, mes interlocuteurs… nos interlocuteurs, lorsqu'on réalise un mandat, c'est l'appareil administratif, ce sont les sous-ministres, sous-ministres adjoints. C'est avec eux qu'on échange, c'est avec eux qu'on discute. Donc, je ne suis pas en mesure de répondre à votre question.

M. Caron (Régys) : O.K. Maintenant, un écart de 4 milliards, est-ce qu'on n'est pas devant un état de fait qui révèle que le gouvernement a perdu le contrôle des dépenses?

M. Samson (Michel) : Je pense qu'on a repoussé des décisions pendant plusieurs années, et ça nous rattrape. Je vous redonne l'exemple de la hausse des rémunérations, que ce soit des médecins ou de la fonction publique, où on a un taux de croissance qui augmente d'année en année. En fait, les dépenses deviennent de plus en plus importantes l'année suivante, donc on repousse toujours un montant important l'année suivante, et là, à ce moment-là, il faut que les revenus soient au rendez-vous. Si les revenus ne sont pas là, on n'a pas le choix, on doit prendre cet argent-là ailleurs dans les dépenses et réduire d'autres dépenses. On est confrontés à ça un petit peu.

M. Caron (Régys) : Le président du conseil… l'ancien président du Conseil du trésor, chef de l'opposition, disait tout à l'heure au salon bleu — corrigez-moi si je suis dans l'erreur, là — que vous avez signé, dans les comptes publics, pour 13‑14, un rapport dans lequel il y avait augmentation des dépenses de 1,3 %.

M. Samson (Michel) : 1,2 %, oui.

M. Caron (Régys) : 1,2 %, bon. Avez-vous l'impression d'avoir été bien informé en signant ce rapport-là?

M. Samson (Michel) : Tout à fait. Tout à fait. Écoutez, quand je signe ce rapport-là, il faut comprendre que c'est le rapport sur ce qu'on appelle les comptes publics, les états financiers du gouvernement. Je ne signe pas une opinion en disant que le taux de croissance des programmes a été de 1,2 %, là, je signe qu'à tous égards ou à toutes fins… toutes fins étant égales, les chiffres qui apparaissent dans les états financiers du gouvernement sont corrects et reflètent la réalité.

Mais, à ça, j'ai une exception, je mets un bémol important, parce que j'avais quand même… j'ai une restriction dans mon rapport sur les paiements de transfert ou les subventions qui sont versées aux municipalités et aux... comme vous le savez, aux municipalités et aux universités, où on a une divergence d'opinions qui représente un écart de 1 milliard avec le gouvernement là-dessus.

M. Caron (Régys) : Question technique pour ma compréhension. À la page 27 de votre document synthèse, vous dites que l'information produite par le Secrétariat du Conseil du trésor en janvier 2014 faisait état d'efforts à fournir de 3,5 milliards et d'efforts demandés au ministère de 1,8 milliard. Est-ce que ces deux montants-là s'additionnent ou si c'est un dans l'autre, là?

M. Samson (Michel) : C'est un dans l'autre.

M. Caron (Régys) : C'est un dans l'autre. O.K. Donc, on parlait de… à ce moment-là, on tablait sur un écart de 3,5 milliards en janvier 2014, écart qui est rendu à 4.

M. Samson (Michel) : C'est ça, 3,9, 4, oui.

La Modératrice : David Gentile, Radio-Canada.

M. Gentile (Davide) : Bonjour, M. le vérificateur. Dites-moi, si je comprends bien, est-ce que vous allez jusqu'à dire… ou est-ce que je comprends qu'on vous a caché 1,6 milliard ou que vous n'aviez pas les données quant à cette somme-là de 1,6 milliard? Vous dites : Le gouvernement nous avait annoncé… avoué 150 millions qu'on cherchait…

M. Samson (Michel) : 2,6, vous dites?

M. Gentile (Davide) : Non, 1,6.

M. Samson (Michel) : Non. Regardez, ce que je peux vous dire, si vous prenez le… je ne sais pas si vous êtes au même endroit que moi, mais, dans le tableau 2 du rapport, le point, si vous prenez la première colonne, Le Point, vous avez 1 455 000 000 $. C'était ce qui était inscrit dans le document d'analyse économique d'écart à résorber…

M. Gentile (Davide) : Excusez-moi, j'ai mal formulé ma question. Mais donc, dans le budget, si je comprends bien la colonne budget 2014‑2015 du tableau 2, je vois 1 654 000 000 $ qui est là. O.K.?

M. Samson (Michel) : 1 654 000 000 $, oui.

M. Gentile (Davide) : Oui. Donc, ça, ce que vous nous dites, là, c'est que ça avait été caché, ça avait été occulté, ça avait été oublié, qu'elle était…

M. Samson (Michel) : J'ai dit que ça n'a pas été… ce n'était pas divulgué dans le budget, mais ce n'est pas juste le 1,4… le 1,6, c'est le 1 783 000 000 $ en bas aussi, qui n'est pas dans le budget. Dans le budget, tout ce qu'on dit, c'est qu'il y a pour 150 millions d'écart… d'effort pour résorber l'écart qu'on a, alors que l'écart, en réalité, est de 3 627 000 000 $.

M. Gentile (Davide) : Donc, la somme qui avait été omise est de combien? Est-ce qu'on a omis une somme, et, si oui, elle est de combien?

M. Samson (Michel) : 3 627 000 000 $ moins 150.

M. Gentile (Davide) : C'est ça, je reprends la question : Est-ce qu'on a omis une somme et, si oui, de combien?

M. Samson (Michel) : On a mis une somme dans le budget, 150 millions, alors que l'effort à résorber était de 3,6 milliards.

M. Gentile (Davide) : Et ça, c'était une cachotterie? Comment on appelle ça, dans votre jargon?

M. Samson (Michel) : Bien, une... Bien, regardez, on n'a pas eu accès à ces informations-là. Donc, ce n'était pas dans le budget, on n'a pas eu accès.

La Modératrice : On va passer en anglais. Kevin Dogherty, la Gazette.

M. Samson (Michel) : Est-ce que ça va? Oui?

M. Lessard (Denis) : …quelle part est liée à ces annonces qui ont été faites à l'automne 2013 ou au printemps? Est-ce qu'on est capable de ventiler ça?

M. Samson (Michel) : Oui. Vous avez, en partie… en partie, dans le rapport, vous avez un montant parce qu'on a... Dans le 4 milliards, il y a l'assurance autonomie, politique économique Priorité emploi, politique de solidarité. Vous avez, si vous voulez le détail, là, à l'acétate 33 du... vous avez un détail, autres facteurs de croissance qui sont tous là, qui font partie du 4 milliards, en fait.

La Modératrice : Kevin Dougherty.

M. Dougherty (Kevin) : Yes. Mr. Samson, would you say that the problem is a problem of transparency?

M. Samson (Michel) : For sure, yes, yes, accountability and transparency, because, in the budget, we see that it's just $1.5 million, but in reality it's around $4 billion that the… to be need, the effort to be need.

M. Dougherty (Kevin) : Mr. Marceau said that this happens all the time and, if you look at the 6.7% that all the ministers wanted, that happens all the time, and they always cut them back all the time. He is saying : This is the way things are done, I mean, and we don't know this, we haven't known this before, but he says… What would you do if you were a Finance Minister?

M. Samson (Michel) : Yes, it's true, but the Secrétariat du Conseil du trésor will do a work about that. So we have the amount by the department, but the Secrétariat du Conseil du trésor examine this amount and reduce that. So it's not just the whole that the department want to have; it's examined by the Secrétariat du Conseil du trésor. So, for us, it's important too. It's not just the departments… le souhait des ministères d'avoir ces sommes-là.

M. Dougherty (Kevin) : You talk about structural changes, this is… the Government talks about changes, and, you know, we talk about a structural deficit. Do you have any idea how we can restructure… I mean, basically, you have a revenue side and a spending side and you have shortfalls on both sides, but is the solution more revenues, higher taxes or is the solution less spending? How do you do this?

M. Samson (Michel) : Yes, more… for the revenues, more taxes or not, it's the Government's choice, but what we think is that the Government will present the expenditure for maybe three, five or five next years and like… the federal Government does that. For the next five years, we have, for each department, the amount of economy that each department will be… is going to do, the amount to reduce for the next five or six years.

La Modératrice : Max Harrold, CTV.

M. Harrold (Max) : Hi there. Could you describe… Basically, the gist of your report is that there's a huge gap in what was estimated, the deficit was estimated and what it turns out. I'd like to hear that in your words.  What is that, the $4 billion? What's going on?

M. Samson (Michel) : It's the gap between the expenditure programs determined by the Government. It's increased from 2% since last year, and the gap between that, and the reconduction cost established by the department and after examination by the Secrétariat du Conseil du trésor and it's the gap between these two amounts.

M. Harrold (Max) : But from what I hear… The end result of what you're saying is it's a serious knock against the credibility of the PQ government in terms of its ability to conduct the finances. How severe is this in terms of… You know, when you look back at what the Government said and what was actually going on, how bad of a problem do you think that is?

M. Samson (Michel) : For sure, it's not a good accountability but it's not just the case for the last government. It's that we… That's the same pattern for whole governments since many, many years. And that's what we suggest to increase that, for a better «reddition de comptes», imputability…

M. Harrold (Max) : Accountability. OK. And what do you think… you talked about we're no longer at the time for small fixes, we really have to make some tough choices. Could you… I'd like to hear you say, you, know, what you think is next. What should this new government… What is it incumbent on it to do, the choices it has to make?

M. Samson (Michel) : Actually? For the Government in place? They have to… big decisions to make and a strict… decisions «structurantes sur le»… not short-term but long-term decisions to reestablish the financial situation.

M. Harrold (Max) : Thank you.

Mme Plante (Caroline) : A couple of questions and perhaps you could look at my colleagues… Very simply put, can you explain the difference between the $1.75 billion and the $5.5 billion? What is that?

M. Samson (Michel) : The $4 million?

Mme Plante (Caroline) : Very simply put.

M. Samson (Michel) : The gap between the programs, expenditure programs, goals established by the Government and the reconduction costs established by department after examination by the Secrétariat du Conseil du trésor.

Mme Plante (Caroline) : You mentioned very concretely there are programs like «l'assurance autonomie», certain things that seem to have not been budgeted. Can you maybe list those programs that are part of the $4 billion that Quebeckers didn't know about?

M. Samson (Michel) : Yes. In the report, we have a list of many items that are in the $4 billion gap, you have that in the report. So a lot of that, announces by the Government and new politics, like Priorité emploi, «politiques de solidarité», it's a… those amounts are in the $4 billion gap.

Mme Plante (Caroline) : Did the PQ hide information?

M. Samson (Michel) : If they have the information?

Mme Plante (Caroline) : Did they hide… «Est-ce qu'ils ont caché»? Did they hide information?

M. Samson (Michel) : I don't know if they hide but it's not transparent. For sure, it's not very transparency in the budget. In the budget, the gap is $1.5 billion, but what we see, what we have seen with our work, it's $4 billion. It's a big gap between this.

Mme Plante (Caroline) : And a last one. Luc Godbout and Claude Montmarquette, in April, warned that Québec was heading straight into a brick wall, because the province has a history of spending more than it earns. Do you agree with those experts?

M. Samson (Michel) : Yes.

Mme Plante (Caroline) : What's your analysis of the way the province is spending?

M. Samson (Michel) : I think that we are… they are for a big decision, for a long-term decision, just not short-term decision but to reestablish the financial situation.

(Fin à 15 h 44)

Participants

  • Samson, Michel

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