To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > News and Press Room > Press Conferences and Scrums > Conférence de presse de M. Michel Samson, vérificateur général par intérim

Advanced search in the News and Press Room section

Start date must precede end date.

Conférence de presse de M. Michel Samson, vérificateur général par intérim

Dépôt du Rapport du Vérificateur général du Québec à l’Assemblée nationale pour l’année 2014-2015

Version finale

Wednesday, June 11, 2014, 11 h 15

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Onze heures seize minutes)

Le Modérateur : …commencer, M. Samson. On va passer avec, d'abord, la présentation, ensuite une période de questions en français suivie d'une période de questions en anglais. M. Samson.

M. Samson (Michel) : Oui. Merci. Mesdames et messieurs, bonjour. Ce matin, le président de l'Assemblée nationale a remis aux députés deux rapports concernant les résultats de travaux effectués durant la dernière année. L'un est intitulé Vérification de l'optimisation des ressources et l'autre, Rapport du Commissaire au développement durable.

Je vais vous présenter les principaux constats formulés pour l'émission de vérifications figurant dans le premier rapport, et le Commissaire au développement durable, M. Jean Cinq-Mars, prendra ensuite la parole pour vous transmettre les constatations les plus importantes de son rapport.

Le tome intitulé Vérification de l'optimisation des ressources inclut une vérification particulière portant sur la réalisation et l'exploitation d'aires de service du réseau autoroutier québécois. Cette vérification résulte d'une demande formulée par l'ancien gouvernement, par le Conseil du trésor, en avril 2013, en vertu de l'article 36 de la Loi sur le Vérificateur général du Québec.

J'ai donc regardé de près l'entente concernant la réalisation et l'exploitation en partenariat public-privé de sept aires de service sur le réseau autoroutier québécois.

Dans le chapitre 2 de mon rapport, j'explique comment les lacunes relevées à chacune des étapes menant à la signature de l'entente de partenariat ont contribué à fragiliser ce projet qui est l'un des premiers PPP signés au Québec. Par exemple, les négociations permises avec le candidat sélectionné ont donné lieu à des modifications notables au modèle financier.

Malgré une participation financière publique plus élevée que prévu, le modèle financier est demeuré… Pardon. Le modèle financier est demeuré fragile. En outre, les garanties accordées par le ministre des Transports du Québec ont augmenté les risques assumés par ce dernier.

Je traite, dans le chapitre 3, des activités d'acquisition de biens et services accomplies par le Centre de services partagés du Québec, soit le CSPQ. Après huit ans d'existence, ce dernier n'est pas encore devenu le centre d'excellence qu'il devrait être et il n'est toujours pas la référence dans son domaine. Dans un contexte où la gestion des finances publiques s'avère difficile, je soulève l'importance pour le CSPQ de revoir son offre de service en matière d'acquisition. Il doit l'arrimer aux besoins prioritaires de ses clients et l'orienter sur les meilleures économies potentielles du point de vue gouvernemental.

Dans le chapitre 4, j'aborde la gestion que fait la commission scolaire du Chemin-du-Roy du Complexe sportif Alphonse-Desjardins. Je conclus que des mesures s'avèrent nécessaires afin d'éviter que la commission scolaire ne se trouve dans une situation qui la mènerait à investir davantage de fonds publics dans le projet. À titre d'illustration, au cours des cinq dernières années, le complexe sportif a engendré des déficits annuels pour la commission scolaire variant de 700 000 $ à 1,2 million. D'ailleurs, je me questionne d'emblée sur le lien entre le projet et la mission éducative de la commission scolaire. D'autre part, le modèle d'affaires selon lequel la plupart des risques lui sont attribués ainsi que le suivi qu'elle effectue de la gestion du complexe sportif présentent des lacunes. Notons qu'elle a confié cette gestion à un mandataire.

Je fais état des conclusions de ma vérification portant sur les traverses et dessertes maritimes exploitant en partenariat dans le chapitre 5 de mon rapport. Mes travaux ont été menés auprès de la Société des traversiers du Québec. Je souligne notamment la difficulté qu'a la STQ à établir clairement sa vision d'ensemble du mode d'exploitation à privilégier pour les services liés à chaque traverse et desserte maritime, que ce soit pour le transport des personnes ou pour celui des marchandises. Le choix d'exploiter elle-même les traverses qui étaient auparavant en partenariat n'est pas appuyé sur une analyse complète. De plus, la démonstration n'est pas faite que c'est le mode d'exploitation le plus avantageux. D'autre part, le suivi de la performance des partenaires et l'information fournie au conseil d'administration et au ministère des Transports font l'objet de certaines réserves.

Dans le chapitre 6, je me suis intéressé à la gestion des médicaments et des services pharmaceutiques. Je me suis penché sur des enjeux liés à l'approvisionnement en médicaments, notamment le prix de ceux-ci. En effet, j'ai relevé dans plusieurs cas des écarts de plus de 10 % pour un même médicament. Les ruptures d'approvisionnement et le contenu des listes de médicaments dans les établissements ont aussi mobilisé mon attention. Je mets également en lumière le manque de contrôle a posteriori de l'usage des médicaments, ce qui ne permet pas de s'assurer de leur utilisation optimale.

Le chapitre 7 de mon rapport est consacré à l'administration provisoire que fait Revenu Québec des produits financiers non réclamés. D'après moi, des ajustements sont nécessaires afin de favoriser la récupération des produits financiers non réclamés par leurs ayants droit et d'assurer la remise à l'État de ceux pour lesquels les ayants droit demeurent introuvables. Par exemple, un faible pourcentage de détenteurs effectue des remises de produits financiers non réclamés, et Revenu Québec utilise peu les moyens d'intervention à sa disposition pour améliorer la situation.

Le dernier chapitre de mon rapport présente les résultats d'un suivi d'une vérification menée en 2010 concernant la sélection des immigrants travailleurs qualifiés. Je tiens à souligner les efforts du ministère pour donner suite à mes recommandations, puisque, pour six des sept recommandations, soit 86 %, les progrès sont satisfaisants.

En terminant, je veux faire le point sur les travaux que j'ai entrepris à la suite de l'élargissement de mon mandat pour la vérification de l'optimisation des ressources. Depuis le 14 juin 2013, je peux effectuer des vérifications de l'optimisation des ressources auprès des entreprises du gouvernement sans qu'une entente soit conclue au préalable avec le conseil d'administration, à l'exception de la Caisse de dépôt et placement du Québec. À ce jour, j'ai entrepris des travaux de revue des activités auprès de quatre sociétés d'État, soit Hydro-Québec, Loto-Québec, la Société des établissements de plein air du Québec et la Société des alcools du Québec. Dans trois de ces sociétés, les travaux se déroulent bien. J'ai toutefois des préoccupations sur la position d'Hydro-Québec par rapport aux travaux que je veux y mener. En effet, la société d'État interprète de façon restrictive et contraignante les pouvoirs qui sont dévolus au Vérificateur général. Or, cette position est incompatible avec la recherche d'une plus grande transparence et d'une efficacité accrue de l'administration publique. Mon but est simple : c'est celui d'obtenir, de la part d'Hydro-Québec, une collaboration semblable à celle que j'ai établie avec les autres entités dans lesquelles j'effectue des travaux.

Je vous remercie de votre attention. J'invite maintenant M. Jean Cinq-Mars à vous faire part des résultats de ses travaux.

M. Cinq-Mars (Jean) : Bonjour, mesdames et messieurs. Ce matin, j'ai rencontré la Commission de l'administration publique et j'ai présenté mon rapport qui contient quatre chapitres.

Le premier chapitre est un chapitre qui porte sur mes observations sur l'application du développement durable. Vous savez que le développement durable a été… la loi a été adoptée en 2006, et on a une stratégie qui a été adoptée en 2008 et qui devait prendre fin en 2013. Cependant, elle a été prolongée jusqu'en 2013. Alors, l'année actuelle est une année charnière pour le développement durable, étant donné qu'on doit adopter une nouvelle stratégie sur le développement durable pour, au plus tard, décembre 2014.

Alors, pour examiner l'application de la stratégie gouvernementale et examiner si l'administration publique avait intégré les principes de développement durable, j'ai examiné, dans l'administration, quels étaient les principes et les pratiques qu'on avait pour la gestion du risque. Je me suis référé à plusieurs vérifications qui avaient été faites antérieurement par moi et d'autres collègues au bureau du Vérificateur général pour tirer des conclusions.

Les principales conclusions sont à l'effet qu'une culture de prévention et de gestion du risque est à changer. En effet, lorsqu'on examine la problématique du risque au niveau planétaire, on s'aperçoit que la mondialisation a apporté des risques nouveaux, des risques de contamination dus aux changements climatiques. Certaines maladies tropicales font maintenant apparition dans des pays beaucoup plus nordiques. Le transport de marchandises, la circulation des personnes amènent également des risques beaucoup plus importants. On a tous vécu les conséquences de la crise économique de 2008‑2009, si bien que, lorsqu'un pays a des difficultés économiques, à ce moment-là, les autres pays peuvent avoir des effets néfastes.

Également, au Québec, on a fait face à plusieurs sinistres récemment, qu'on pense à l'incendie à L'Isle-Verte en janvier dernier, la conflagration à Lac-Mégantic l'été dernier, la légionellose à Québec, les inondations l'an dernier… il y a deux ans le long du Richelieu, si bien qu'on a une gestion des risques qui doit être revue. La gestion du risque est une préoccupation dans plusieurs pays. J'ai consulté des analyses qui ont été faites par la Banque mondiale. On recommande de plus en plus que le pays centralise la gestion du risque et qu'on crée des postes de responsable du risque près du président ou du premier ministre dans les pays. Dans les multinationales, une approche similaire est adoptée. On recommande la création d'un poste de responsable du risque très près du président des entreprises pour faire face aux risques multiples et aux risques qui peuvent avoir des effets domino l'un envers l'autre.

Lorsqu'on examine le développement durable, c'est un peu la même situation. On avait fait un balisage des meilleures pratiques l'an dernier et on avait observé que les pays où le développement durable avait fait des plus grandes avancées, le poste de contrôleur ou de gestionnaire au développement durable était très près de celui du premier ministre ou du président.

Nous avons également effectué trois vérifications spécifiques. La première concernait l'application de la Loi sur le développement durable. Il y avait quatre entités qui ont été vérifiées : la Commission des normes du travail, le ministère de la Culture et des Communications, le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, et la société de développement des entreprises sociales. Toutes ces entités ont mis en place certaines mesures pour faire avancer l'application du développement durable, mais ce que l'on a constaté, c'est que des mesures avaient été mises en place, mais de façon partielle, si bien que l'appropriation du développement durable par ces entités n'avait pas fait de grands progrès.

Le troisième chapitre de mon rapport traite des terres du domaine de l'État et de la gestion du foncier. Je vous rappelle qu'au Québec 92 % du territoire est du territoire public, contrairement à des pays européens où c'est l'entière totalité du territoire qui est un territoire privé. Ici, l'État a un rôle fondamental de gestion des terres publiques. Alors, on a examiné toute la question qui touche l'octroi des droits fonciers, c'est-à-dire la vente, la cession à titre gratuit, les échanges ou la location. Au départ, on a observé qu'il y avait cinq régions sur 13 qui avaient un plan d'aménagement du territoire. C'est équivalent à un plan d'urbanisme, donc dire que c'est cinq régions qui avaient l'équivalent d'un plan de développement qui identifiait les priorités d'affection du territoire.

Au sujet de la vente des terrains, on a constaté que le ministère n'avait pas développé de ligne directrice pour informer ses différents employés, à travers les régions, au niveau des ventes de terrains.

Au niveau des ventes, on doit souvent utiliser la notion de valeur marchande. Alors, sur cet aspect, on s'est aperçu qu'il y avait également des lacunes, si bien qu'on n'a pas de garantie que les ventes ont été faites dans le meilleur intérêt des citoyens.

Au niveau des dossiers industriels et économiques, sur 18 des 22 dossiers qu'on a examinés, on a observé que les données socio-économiques ou les données de développement durable étaient absentes des dossiers.

L'évaluation foncière est également un secteur où il y a peu d'utilisation… d'évaluation formelle. Les frais d'administration également, on s'est aperçu qu'il y avait eu des lacunes. En fait, les frais ont été adaptés en 2010, mais, lorsqu'on regarde ces frais par rapport à ceux qui existaient en 1989, en appliquant un facteur d'inflation, on s'aperçoit que les frais de 2010 sont inférieurs à ceux de 1989.

Enfin, pour les loyers de villégiature, on s'est aperçu qu'en 2010 les loyers étaient passés d'une tarification de 8 % à 6 %. Alors, si bien, ce qu'on conclut de ce rapport, c'est que, bien entendu, les utilisateurs des terres ne paient pas, finalement, les coûts que ça implique à l'État.

La dernière vérification touche la question du Fonds vert. C'est un fonds qui a été créé en 2006. Il y a eu 2,1 milliards qui ont été investis. La dernière année, le Fonds vert a rapporté 339 millions. La raison pour laquelle on a fait l'évaluation du Fonds vert, c'est qu'on aborde maintenant le début d'une nouvelle mesure, c'est-à-dire le commerce des permis d'échange de carbone, si bien que le gouvernement estime avoir des revenus encore plus importants à partir de ce commerce que ce qu'on a eu à partir des taxes sur… c'est-à-dire, des redevances sur les produits pétroliers.

Alors, notre objectif était de vérifier s'il y avait des mécanismes de gestion efficaces pour atteindre les objectifs. Est-ce qu'il y avait une gestion efficiente des ressources? On a examiné trois ministères. Alors, ce qu'on a conclu, c'est qu'il y a une gestion qui n'est pas axée sur des objectifs. Il y a très peu d'information publique sur le Fonds vert. Si vous allez sur le site du ministère, vous allez voir qu'il y a simplement une description du fonds sans détails du fonctionnement. Ensuite, les projets qui ont été financés, souvent, ont été faits sans appel d'offres, sans critère de sélection et sans objectif précis et mesurable. Et enfin il y a eu très peu de suivi sur les résultats des projets, est-ce que les projets ont donné les résultats pour lesquels le gouvernement avait accordé un financement. Je vous remercie.

Le Modérateur : Donc, nous allons passer maintenant à la période de questions avec Hugo Lavallée de Radio-Canada.

M. Lavallée (Hugo) : Bonjour, M. Samson. On sent bien, dans votre rapport, la difficulté que vous avez à obtenir la collaboration d'Hydro-Québec. Ils ne vous remettent pas certains documents, prétendent que vous ne pouvez pas recevoir les documents antérieurs à l'adoption de la loi.

Comment on qualifie ça? Est-ce que c'est de l'obstruction à votre travail? Est-ce que vous avez déjà vu ça de la part d'autres entités sur lesquelles vous faites des enquêtes, une telle attitude?

M. Samson (Michel) : Écoutez, ce qu'il faut comprendre, c'est tout de même… c'est la première… ce mandat-là est nouveau, quand même, auprès des entreprises du gouvernement. Donc, je pense qu'il y a peut-être des cultures d'entreprise qui existent, et on ne nous connaît pas tellement bien, mais je pense que c'est à force de s'expliquer, de demander, d'expliquer comment on veut procéder qu'on va arriver à nos fins. Puis, comme je l'ai bien mentionné, mon but est simple, dans le fond, c'est d'obtenir la même collaboration d'Hydro-Québec que j'obtiens des autres sociétés, des ministères et des organismes quand je réalise des mandats, donc ni plus ni moins. Et j'en ai discuté ce matin avec les membres de la Commission de l'administration publique, parce que, présentement, vous comprenez que, si on me refuse l'accès à tout document antérieur à juin 2013, je ne peux pas réaliser mon mandat. Je ne peux pas faire une vérification qui porte juste sur six mois. Je dois prendre connaissance des années antérieures comme on le fait toujours. Donc, présentement, c'est une limite importante à mon mandat.

M. Lavallée (Hugo) : Mais donc est-ce que vous avez déjà vu ça dans d'autres entités sur lesquelles vous enquêtez?

M. Samson (Michel) : De cette façon-là, non.

M. Lavallée (Hugo) : Quel recours vous avez si la situation ne change pas? Est-ce que vous pourriez, par exemple, prendre… déposer un recours devant les tribunaux?

M. Samson (Michel) : Écoutez, je pense que… je ne suis pas certain qu'on a quelque chose à gagner de s'en aller devant les tribunaux pour l'instant. Ma première démarche était d'en faire mention dans mon rapport, d'en faire mention à l'Assemblée nationale, de sensibiliser les membres de la Commission de l'administration publique. Ils ont été très à l'écoute de mes propos. Je vais voir les suites qu'ils vont donner à ce qui s'est discuté ce matin, lors du huis clos, mais j'ai espoir qu'Hydro-Québec va comprendre nos façons de faire, et on va pouvoir travailler comme on le fait partout ailleurs.

M. Lavallée (Hugo) : Concernant les haltes routières maintenant, on a vraiment l'impression que l'analyse qui a été faite pour favoriser le partenariat public-privé était un peu biaisée en faveur du partenariat public-privé. On dit que les dépenses de maintien des actifs en mode conventionnel ont été surévaluées, les frais de financement aussi. Est-ce qu'effectivement vous avez l'impression que l'analyse a été biaisée d'une quelconque manière?

M. Samson (Michel) : Écoutez, l'analyse, à tout le moins, a été incomplète, et les hypothèses sur lesquelles on a reposé cette analyse-là sont très, très discutables. Vous avez fait mention des frais de maintien. Et, par la suite aussi, ce qui est arrivé, c'est que, lorsqu'on a négocié avec le seul soumissionnaire, en fait, c'est que, là, on a fait des changements par rapport à l'appel de proposition. Par exemple, dans l'appel de proposition, le gouvernement ne devait pas garantir la dette, soit l'emprunt que le partenariat effectuerait, alors que, dans les négociations, maintenant, le gouvernement garantit la dette du partenaire à 100 %, ce qui est environ 30 millions. Ce n'était pas prévu dans l'appel de propositions. Il y a d'autres frais qui se sont ajoutés à ça. Ce qu'il faut comprendre, c'est que, si demain matin… je sais que c'est en cours, mais, si on résiliait le contrat, ça pourrait engendrer une dépense pour le gouvernement de 47 millions juste pour résilier le contrat, chose qui n'était pas prévue dans l'appel de propositions.

M. Lavallée (Hugo) : Une dernière chose, si vous permettez, concernant… Vous avez déposé la semaine dernière le rapport sur l'état des finances publiques. Ça a été plus ou moins bien accueilli, surtout par l'opposition officielle qui voyait une commande politique. Est-ce que vous pensez que ça peut nuire à vos chances, effectivement, de recevoir une confirmation de votre poste comme Vérificateur général permanent? Et est-ce que ça n'illustre pas un peu le problème que ça cause d'avoir un Vérificateur général intérimaire si longtemps?

M. Samson (Michel) : Écoutez, je pense que d'avoir un Vérificateur général par intérim pour une période aussi longue que deux ans et demi, effectivement, je pense que ce n'est pas… à tout le moins, ce n'est pas souhaitable. Quant à mes chances, je n'ai aucune évaluation là-dessus, parce que ce n'est pas mon choix. Comme vous le savez, c'est le choix de l'Assemblée nationale, c'est le choix des 125 parlementaires. Ce que j'ai compris par certaines motions qui ont été déposées, il n'y a pas eu de vote de non-confiance, donc je me dis, à tout le moins, la confiance est là.

Ce que je vous dirais que je trouve le plus triste un petit peu dans toutes ces discussions-là, c'est que l'organisation du Vérificateur général est une organisation qui compte 275 personnes, qui est au service de l'Assemblée nationale, et ces gens-là travaillent avec rigueur, indépendance et professionnalisme. Donc, quand j'entends qu'on remet en cause l'indépendance de cette institution, je trouve ça exagéré un petit peu, permettez-moi l'expression. Chez nous, quand on fait un mandat, on le fait avec rigueur, et les résultats sont le fruit d'un travail professionnel.

L'article qui a été utilisé par le gouvernement a été utilisé, je peux vous dire, dans les 10 dernières années, environ 10 ou 12 fois par tous les gouvernements, l'article 36 de notre loi, qui donne le pouvoir au gouvernement, soit par un décret du Conseil des ministres, soit par une demande du Conseil du trésor, de nous demander de réaliser des mandats particuliers. Ça a été utilisé, comme je vous dis, environ 10, 12 fois dans les 10 dernières années, donc tous les gouvernements l'utilisent. Le rapport sur les PPP en est un exemple, ça venait d'une demande du Conseil du trésor en vertu de l'article 36. Le rapport, souvenez-vous, que j'ai déposé cet hiver sur le Tribunal administratif du Québec était une demande en vertu de l'article 36 aussi du Conseil du trésor.

Le Modérateur : Davide Gentile, Radio-Canada.

M. Gentile (Davide) : Quant à Hydro-Québec, je sais que vous voulez être poli, on commence à vous connaître, là, vous êtes…

M. Samson (Michel) : C'est une qualité d'un vérificateur.

M. Gentile (Davide) : …vous faites preuve de bienséance, c'est bon, mais en bon français, là, vous dites quoi, là? C'est l'État dans l'État? Qu'est-ce qui se passe à Hydro-Québec? Est-ce que c'est… Est-ce qu'on est réfractaires quand vous arrivez là?

M. Samson (Michel) : Écoutez, est-ce qu'on est réfractaires, je dois vous répondre : Oui, qu'on est réfractaires, puisqu'on ne nous donne pas accès à l'information qu'on voudrait avoir. Moi, lorsqu'on me dit que ma loi a été changée le 14 juin 2013 et qu'Hydro-Québec aurait entre les mains un avis juridique qui dit que, tout ce qui est antérieur à juin 2013, ils n'ont pas à me le donner, vous comprenez que je ne peux pas fonctionner avec ça, là. Et alors que je vois dans trois autres sociétés d'État, qui ne sont pas les moindres, je vous rappelle, Loto-Québec, Société des alcools, où la collaboration est bonne, c'est excellent, on nous fournit ce qu'on nous demande, on ne nous a jamais fait part de cette entrave-là dans nos travaux.

M. Gentile (Davide) : Maintenant, votre chapitre sur les médicaments. Là, je veux juste être certain qu'il n'y a pas des virgules qui manquent, là. Le 892 %, c'était bien ça l'écart que vous constatez?

M. Samson (Michel) : Oui. Il y avait un petit tableau d'ailleurs.

M. Gentile (Davide) : Oui, j'ai vu le tableau, mais, bon, je n'étais pas fort en maths, donc je me pose la question.

M. Samson (Michel) : Non, non, c'est vraiment ça. Ça vous montre les écarts qu'il peut y avoir pour un même médicament entre deux groupes d'approvisionnement, le prix qu'on paie.

M. Gentile (Davide) : Avez-vous été étonné de voir ça, vous…

M. Samson (Michel) : Oui, oui. Bien, ce qui nous étonne… Écoutez, oui, on est étonnés de l'ampleur de l'écart, c'est bien sûr, là. Il faut dire que le 892 %, c'est l'exemple extrême, je dirais, là, mais on a tout de même... Sur un échantillon de 800 quelques médicaments, on en a 275 qui ont un écart de plus de 10 %. Donc, on en a le tiers environ qui ont plus que 10 % d'écart dans les prix pour un même fabricant. Dans le fond, c'est deux groupes d'approvisionnement qui négocient avec le même fabricant, on a des écarts de plus de 10 %. Donc, oui, ça nous étonne, mais ce qui nous étonne aussi, c'est qu'on n'ait pas procédé à des analyses soit par le ministère qui sensibilise les groupes d'approvisionnement à cette situation-là.

M. Gentile (Davide) : Récemment, on a beaucoup joué dans des films où il y a des gens qui soumissionnaient, d'autres curieusement ne soumissionnaient pas. Je ne veux pas faire de parallèle indu, mais là, à la page 75, vous écrivez : Pour un même médicament, le fabricant soumissionne lors de l'appel d'offres lancé par un groupe, mais ne le fait pas pour l'autre groupe. Qu'est-ce qu'on devrait avoir comme impression de ça?

M. Samson (Michel) : Écoutez, je n'ai pas… Si on avait eu des explications satisfaisantes et bien documentées, on les aurait mises dans notre rapport. Mais comme l'analyse ne se fait pas, c'est difficile à comprendre. On n'est pas en mesure de vous dire pourquoi, mais ce qu'on constate, par contre, la conséquence de cet état de fait là, c'est que le groupe d'approvisionnement qui n'a pas reçu de soumission, bien, les centres hospitaliers doivent négocier, à ce moment-là, à des prix beaucoup plus élevés que le groupe… que l'autre groupe d'approvisionnement a obtenu. Donc, ça coûte plus cher à l'État, c'est certain.

M. Gentile (Davide) : Donc, il y a moins de compétition, là. C'est ce que vous…

M. Samson (Michel) : Il y a moins de compétition, mais il y a une source d'économie potentielle, c'est certain, à cet égard-là.

M. Gentile (Davide) : Mais vous ne pouvez pas parler de collusion.

M. Samson (Michel) : Non, je ne peux pas parler… Non, je ne peux pas parler de collusion.

M. Gentile (Davide) : Mais d'absence de volonté de concurrencer…

M. Samson (Michel) : Bien, je ne peux pas vous dire pourquoi un fabricant ne veut pas répondre à… ou un grossiste ne veut pas répondre à la soumission qui est faite par un groupe d'approvisionnement. Je pense que c'est au groupe d'approvisionnement et au ministère à se questionner. Un peu la même chose lorsqu'on lance un appel d'offres, si vous voyez que, pour la majorité de vos appels d'offres, vous avez juste un ou deux soumissionnaires, je pense qu'il faut que vous vous questionniez pour savoir pourquoi je n'ai pas plus de soumissionnaires que ça. Est-ce que je suis trop restrictif? Est-ce que c'est le marché? Est-ce que je dois changer mon approche, chose qui ne se fait pas présentement dans le domaine de la santé?

Le Modérateur : Denis Lessard, LaPresse.

M. Lessard (Denis) : Deux questions. La première, sur les médicaments : Est-ce que vous pensez que les pénuries qu'on a connues depuis deux ans auraient pu être évitées avec une meilleure gestion des stocks dans les départements de pharmacie des hôpitaux?

M. Samson (Michel) : De vous dire est-ce qu'on les aurait évitées, c'est difficile à répondre, mais sûrement qu'on aurait diminué le risque, à tout le moins. D'ailleurs, ce qu'on constate au niveau des pénuries, c'est que les groupes d'approvisionnement ont des… les deux groupes d'approvisionnement ont des pratiques différentes. Dans ses derniers appels d'offres, un groupe d'approvisionnement a exigé, de la part d'un fabricant, qu'ils aient une série de médicaments qui soient disponibles pour une période de stock, mettons aux trois mois, alors que l'autre groupe d'approvisionnement a suggéré au fabricant d'avoir un certain nombre de médicaments en stock pendant un certain temps. Un exige, l'autre suggère. Vous comprenez, ça n'a pas le même poids, et ce qui nous arrive : des pénuries de médicaments.

M. Lessard (Denis) : Deuxième question. Vous avez dit tantôt que vous avez vu les motions adoptées ou déposées. Or, il n'y a pas eu de motion de déposée parce que l'opposition officielle a refusé son consentement, n'a pas voulu dire : Nous renouvelons notre confiance en le Vérificateur général.

Est-ce que vous… Ces nominations-là sont toujours par… plus que consensus, par l'unanimité de la Chambre. Est-ce que vous accepteriez d'être Vérificateur général sur un vote de division?

M. Samson (Michel) : Question hypothétique; réponse…

M. Lessard (Denis) : Bien, s'il y a un vote partagé, est-ce que vous acceptez ou…

M. Samson (Michel) : Écoutez, ce que la loi dit, du Vérificateur général…

M. Lessard (Denis) : C'est le deux tiers.

M. Samson (Michel) : …c'est que le Vérificateur général doit être nommé aux deux tiers de la Chambre.

M. Lessard (Denis) : Puis ça vous suffit, ça.

M. Samson (Michel) : Je ne vous dis pas que ça me suffit. Il s'agirait de voir, à ce moment-là, si ça… Je ferai ma propre réflexion à ce moment-là. Je ne vous cache pas que c'est souhaitable qu'un vérificateur général soit nommé à l'unanimité. Je pense que tout le monde en convient. Mais, en même temps, je peux vous dire que le Vérificateur général du Canada, rappelez-vous la dernière nomination, mon collègue à Ottawa a été nommé à 62 % par la Chambre. Donc...

M. Lessard (Denis) : ...pas d'entacher ou de ternir la réputation d'indépendance de votre organisation?

M. Samson (Michel) : Écoutez, c'est certain que, si jamais... Premièrement, il faudrait qu'on suggère mon nom, chose que je ne contrôle pas, comme j'ai mentionné. Et, deuxièmement, on verra s'il y a un résultat de la sorte, et, à ce moment-là, je ferai ma réflexion, et c'est certain que ma décision va être prise pour le bien et le mieux de l'organisation, de l'institution du Vérificateur général. Ce n'est pas Michel Samson, là, c'est l'institution du Vérificateur général et son indépendance qui sont importantes.

M. Lessard (Denis) : ...vous partagez, est-ce que ça mine la réputation d'indépendance de...

M. Samson (Michel) : On va attendre. Je pense que c'est vous qui avez l'habitude, les journalistes, de dire que, quoi, 24 heures en politique, c'est une éternité? Ou il y a un proverbe un peu comme ça. Donc, on parle peut-être à l'automne qu'il y aurait possiblement un candidat de présenté. Donc, on a quatre, cinq mois devant nous. On verra, tu sais. Les choses peuvent changer rapidement, vous savez.

Le Modérateur : Charles Lecavalier, QMI.

M. Lecavalier (Charles) : Bonjour. Vous écrivez dans votre rapport qu'il y a des établissements de santé qui ont accepté des ristournes qui sont non conformes à la loi. La première question : Est-ce que c'est un euphémisme pour dire illégal? Et ça, est-ce que ça vous étonne? Est-ce que vous croyez que c'est répandu dans tout le réseau de la santé, ces ristournes-là qui sont données aux centres de… aux pharmacies des hôpitaux, des CSSS?

M. Samson (Michel) : Le premier point, quand vous dites que c'est non… on écrit que c'est non conforme à la loi, ça fait qu'effectivement, si ce n'est pas conforme à la loi, c'est illégal. Donc, ce n'est pas un euphémisme, là, c'est un état de fait. On ne respecte pas la loi ou la réglementation en vigueur.

Est-ce que c'est répandu dans le réseau? Je ne peux pas vous répondre. Mais, écoutez, on a fait cinq établissements, on a vu ça dans plusieurs établissements. À tout le moins, je pense que le ministère doit se poser la question puis faire des travaux en conséquence ou faire des demandes dans les différents établissements, particulièrement les plus importants, pour voir si on retrouve la même situation.

M. Lecavalier (Charles) : Vous dites aussi que les établissements vérifiés n'ont pas encadré les pratiques relatives aux visites des représentants pharmaceutiques pour éviter des pressions indues. Ça veut dire quoi? Comment est-ce qu'on peut empêcher ces pressions-là? Est-ce que vous vous êtes fait dire qu'il aurait pu y avoir des pressions exercées par les représentants?

M. Samson (Michel) : Bien, pour nous, ça représente un risque. Il y a un risque potentiel d'influence ou… pour certains médicaments ou peu importe. Écoutez, ce qu'on a constaté, c'est que, par les gens qu'on a rencontrés, tant le personnel que les gestionnaires de certains centres hospitaliers, ces gens-là n'étaient même pas au courant qu'il existait un code d'éthique et de déontologie pour leur propre établissement. Donc, déjà là, on se dit : Il y a un petit problème, là. Normalement, tu devrais être au courant de ton code d'éthique pour ton propre établissement puis agir en conséquence. Donc, si tu n'es pas au courant de ce qui est défendu ou ce que ton code dit, c'est difficile par la suite pour toi de réagir face à des situations plus éthiques ou qui peuvent mettre en cause ton indépendance.

M. Lecavalier (Charles) : Dernière petite question. Là, vous dites qu'il y a présence de médicaments non homologués par Santé Canada sur les listes et qu'il y a des médicaments qui sont non recommandés par l'INESSS. Est-ce que ça doit cesser? Qu'est-ce que ça veut dire?

M. Samson (Michel) : Non. Bien, en fait, ce qu'on dit, c'est que, vous savez, il y a une liste, ce qu'on appelle… je ne veux pas tomber dans le trop… dans le technique, mais il existe une liste provinciale de médicaments, qui compte environ 8 000 médicaments. Chaque établissement, par la suite, établit ce qu'on appelle sa liste locale ou la liste de chaque établissement. On peut trouver 2 000 à 3 000 médicaments sur cette liste-là. Ces médicaments-là, normalement, sont tous reconnus, homologués Santé Canada, reconnus par l'INESSS. Il peut arriver qu'un médicament qui n'est pas reconnu, par exemple, pour Santé Canada, va être utilisé dans un établissement. À ce moment-là, il y a une autorisation qui est donnée par le conseil des médecins, dentistes, pharmaciens de l'établissement et l'autorisation est donnée pour utiliser ce médicament-là pour un patient bien précis.

Ce qu'on a constaté, c'est qu'il y a des établissements qui, une fois qu'ils ont cette autorisation-là, ils mettent ce médicament-là sur la liste locale. Donc, à ce moment-là, ce qui peut arriver, c'est que ce médicament-là est utilisé pour d'autres patients sans qu'on ait obtenu le consentement de ces patients-là. Ce qui nous a préoccupés à cet égard-là, c'est que, sur les cinq établissements qu'on a vérifiés, il y en a seulement deux qui ont été en mesure de nous identifier les médicaments qui n'étaient pas, disons, homologués ou reconnus par Santé Canada et l'INESSS sur leurs propres listes locales. Donc, les trois autres n'ont pas été en mesure de nous les identifier. C'est ça qui est préoccupant aussi.

Et, en même temps, je ne suis pas capable de vous dire… L'autre question, c'est : Est-ce que ça met la santé des gens en danger? Je ne suis pas capable de vous répondre, dépendamment du type de médicament, mais ce qui est certain, c'est qu'on devrait obtenir l'autorisation du patient avant d'utiliser ce médicament-là.

M. Séguin (Rhéal) : Robert Dutrisac, Le Devoir.

M. Dutrisac (Robert) : Oui. J'aimerais revenir sur la vérification que vous avez faite du solde budgétaire du gouvernement. Vous avez dit… 10 ou 12 fois, le gouvernement vous a demandé de faire des vérifications particulières. Les cas que vous avez cités, il s'agissait d'entités publiques, parapubliques avec des fonctions bien précises. Dans le cas qui nous concerne, est-ce que vous n'avez pas été entraîné sur le terrain politique puisqu'il s'agissait, en réalité, de faire une vérification des données financières fournies par l'ancien gouvernement?

M. Samson (Michel) : Écoutez, toute vérification est basée sur les données fournies par le gouvernement actuel ou l'ancien gouvernement. Ça fait que, pour moi, peu importe l'ancien, le nouveau, je m'appuie sur les données qui sont disponibles. Puis je vous rappelle que le mandat que j'ai effectué sur l'évolution du solde budgétaire, c'est vraiment dans la continuité du mandat que j'avais déjà réalisé à l'automne dernier, dont j'avais déposé le rapport en février, où on m'avait refusé l'accès, au Conseil du trésor, aux données financières des ministères, les prévisions des ministères.

Là, j'ai eu accès, on m'a donné accès. Bon, bien, écoutez, j'ai tracé le portrait, on a tracé le portrait, l'équipe, avec toutes les données auxquelles on a eu accès au Conseil du trésor et dans les systèmes informatiques du Conseil du trésor. C'est un outil… l'article 36 de la Loi sur le vérificateur général est un outil qui est un moyen qui est à la disposition des gouvernements pour nous demander de faire des travaux particuliers. Si vous lisez comme il faut l'article, à la fin, tout ce qu'on dit, c'est que je ne peux refuser à moins que ça remette en cause mes opérations courantes. Donc, on est rendu loin, là. De dire que je ne peux pas accepter ce mandat-là parce que ça remet en cause mes opérations courantes, il faudrait que je reçoive trois, quatre mandats de la sorte en même temps, qui, là, chambouleraient tout notre planning à l'interne.

Sinon, écoutez… mais, vous le savez, je répète et je répète 10, 12 fois que notre client, c'est l'Assemblée nationale, les 125 députés. Et le gouvernement qui est en place, bien, a des élus. Ces élus-là sont mes clients aussi. Il y a un article qui me dit : Je peux avoir une demande du Conseil du trésor ou du Conseil des ministres, donc, lorsque je la reçois, je l'analyse premièrement, évidemment, pour être sûr que c'est dans mon champ de compétence — ce que j'ai amplement démontré avec le premier mandat — et, une fois que c'est dans mon champ de compétence, théoriquement, je n'ai pas vraiment de raison… je n'aurais pas de raison de refuser un mandat de la sorte.

M. Dutrisac (Robert) : Donc, en quelque sorte, vous êtes obligé de le faire de par la loi, ça, c'est très clair, mais, quand même, il s'agit d'un gouvernement qui vient de remporter la victoire, qui demande… qui questionne les chiffres du gouvernement précédent et qui vous fournit des données financières aussi, là. Je veux dire, la machine vous a fourni des données financières, c'est le gouvernement…

M. Samson (Michel) : Qui nous fournit, mais on les vérifie. On les vérifie. Ce qui est important, M. Dutrisac, c'est… soyez certain que les données qu'on nous fournit, on ne les prend pas les yeux fermés, au contraire. Si vous faites vos petites recherches au ministère des Finances et au Conseil du trésor, ils vont peut-être vous dire qu'on en pose pas mal de questions avant de mettre un chiffre dans notre rapport. Ça fait que c'est sûr qu'ils ne font pas juste nous fournir des… C'est beau nous fournir des chiffres et des données, mais il y a un travail d'analyse qui est fait chez nous pour voir : Oui, O.K., ce chiffre-là, mais qu'est-ce qui sous-tend ce chiffre-là, sur quoi vous vous basez, sur quoi vous vous appuyez? Je peux vous dire qu'il y a un travail rigoureux qui est fait, et on ne prend pas pour acquis aucune des données qui… La plus grande qualité d'un vérificateur, c'est son scepticisme professionnel, et je peux vous dire que, chez nous, il est très développé.

Le Modérateur : Marco Cirino-Bélair, Le Devoir.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Oui, bonjour. Question pour M. Cinq-Mars, si vous permettez. Comment expliquez-vous la lente implantation d'une culture de développement durable dans les ministères puis les organismes publics? Vous avez observé le travail de quatre entités. À quoi se heurte la Loi sur le développement durable?

M. Cinq-Mars (Jean) : Il y a plusieurs facteurs. Tout d'abord, les objectifs ou des objectifs précis et mesurables à atteindre pour transformer l'administration publique en une administration qui a implanté le développement durable n'ont pas été définis au départ. Les indicateurs pour mesurer les progrès de la société et de l'administration face au développement durable ont été fort critiqués par mon bureau lorsqu'ils ont été acceptés. On a trouvé que les indicateurs étaient beaucoup trop détaillés et que finalement ça ne permettait pas de voir que les investissements dans ce domaine étaient pour avoir des impacts sur le développement durable comme tel. Et ensuite, bien, il y a quand même une lenteur administrative à adopter des nouvelles pratiques, et les ministères ont adopté certains principes ou certaines pratiques administratives, mais de là à dire que les ministères ont changé leur philosophie pour faire en sorte que le développement durable soit au coeur de leurs préoccupations, de leur mandat, c'est là qu'il y a eu le plus grand problème. On a adopté des mesures pour faire en sorte qu'il y ait des communiqués, il y ait des comités en places, etc., mais des changements de pratiques dans les ministères, c'est là qu'on a eu des problèmes, les principaux.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce que vous faites face à une certaine indifférence des ministères?

M. Cinq-Mars (Jean) : Je ne dirais pas qu'on fait face à une indifférence. Je pense que des ministères ont différentes préoccupations, différentes priorités. Alors, lorsque les objectifs, au départ, ne sont pas très clairs et que les indicateurs ne le sont pas non plus, bien entendu, les ministères vont peut-être mettre un accent plutôt sur des pratiques où ils vont avoir une reddition de comptes à faire qui est beaucoup plus précise.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce que le ministère des Ressources naturelles est en train de brader les terres du domaine de l'État, selon vous?

M. Cinq-Mars (Jean) : Bien, on ne peut pas dire que le ministère est en train de brader, sauf que nous, on trouve qu'on n'a pas de preuve au dossier pour nous démontrer que les transactions ont été faites dans le meilleur intérêt, disons, du public. Lorsqu'on cite, par exemple, que les frais d'administration sont inférieurs à ce que ça coûte et de façon quand même assez importante, on s'aperçoit que finalement, bien, les gens qui ont loué des terrains ou acheté des terrains n'ont pas vraiment payé le prix. Alors, bien entendu, lorsqu'on regarde dans une situation de rareté de budget, bien, on se trouve que finalement peut-être que le ministère devrait resserrer un peu ses mécanismes de gestion pour s'assurer que ses frais administratifs soient couverts, par exemple.

Aussi, il y a une question de gestion du territoire par rapport au risque. On fait peu de suivi une fois que les terrains sont vendus ou loués. Par exemple, les terrains plutôt loués, on ne va pas voir tellement l'utilisation du terrain. Est-ce qu'on va reprendre un terrain qui est contaminé ou est-ce qu'on va prendre un terrain qui est en bon état? Je vous rappelle qu'on a déjà cité ici qu'on avait pour 3,17 milliards de terrains contaminés au bilan du Québec actuellement. Donc, on ne veut certainement pas en avoir des additionnels. Alors, le ministère, de ce côté-là, ne fait pas une gestion du risque qui est à point.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce que chaque dollar du Fonds vert est bien dépensé à l'heure actuelle?

M. Cinq-Mars (Jean) : Le Fonds vert a été un fonds substantiel dans le domaine de développement durable et de l'environnement, sauf que le Fonds vert n'est pas associé à des objectifs très précis. Le fonds sert à financer différentes activités. Alors, de dire que le Fonds vert a contribué à faire avancer le développement durable, on n'est pas fait… on est incapables de faire l'adéquation, disons, entre les investissements de 2,1 milliards et l'avancement dans le domaine du développement durable ou, par exemple, dans le domaine du changement climatique, qui est un des volets principaux du Fonds vert.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Merci. M. Samson, rapidement, est-ce que vous… exerceriez-vous votre travail différemment si vous étiez désigné Vérificateur général en titre?

M. Samson (Michel) : Non, pas du tout. Écoutez, intérim ou non-intérim, la loi est là et la loi me donne les mêmes pouvoirs, donne au Vérificateur général exactement les mêmes pouvoirs, qu'il soit en titre ou qu'il soit par intérim.

Le Modérateur : Kevin Dougherty, The Gazette.

M. Dougherty (Kevin) : Yes. Mr. Samson, chapter 6, to what extent is patent protection an issue in the prices, in these variations that we see in the price of drug purchases?

M. Samson (Michel) : What is… Pardon me, I'm not…

M. Dougherty (Kevin) : Patent protection. Les brevets. Est-ce que les brevets, c'est un facteur pour…

M. Samson (Michel) : No, I don't think… No, no, I don't think so. No.

M. Dougherty (Kevin) : OK. Now, is it possible that… You know, it seems to me that you have different... I find it interesting that you have two different groups purchasing drugs and then getting different prices from the same manufacturer. Would it be... Can you solve this problem if you're a common purchasing process?

M. Samson (Michel) : For sure. And if we... Health Department must analysis this situation and, with its conclusion, take action to do that, because the variation is wide also to 800% between two medicaments.

M. Dougherty (Kevin) : Yes, OK. A question to M. Cinq-Mars as well. We had the debate about shale gas, you've written about it as well. The new Government has talked about doing another strategic environmental assessment of all hydrocarbons and talks about… They talk about changing, you know, the social acceptability. People who have said no, they're… What they're proposing is that… maybe that people, you know, see it differently, they will change their minds. Is that a good way of doing things?

M. Cinq-Mars (Jean) : Well, that's the way that the Government chose, and I think that we'll have to wait and see the final results before we make any conclusions, because, as you know, our position is not a speculation, we're auditing. So I think that we'll let the new Government try this process and then we'll probably be a little comment at the end.

M. Dougherty (Kevin) : OK. And in this… by December of this year, the minister has to come up with a new strategy. What would you recommend? Would you… You just audit.

M. Cinq-Mars (Jean) : Well, some recommendations. I think that you can read my chapter 1, where I draw parallels between risk management and sustainable development management. We presented last year, in this audience, the fact that the countries that have made most progress with regards implementing their sustainable developments were those that had place the coordination of sustainable development very near the center of government. And I think that several countries are good examples of that. So that's one example, but there are several examples that can… our suggestions, that can be drawn from the audit that we did in the chapter 2, where we audited four entities.

M. Séguin (Rhéal) : J'aurais juste une courte question. Je veux juste savoir, M. Samson, est-ce que, dans la vérification des immigrants, les programmes d'immigrant, vous avez retracé ou avez des soupçons soit de pots-de-vin ou d'abus de pouvoir des agents de sélection d'Immigration Québec pendant la sélection des immigrants investisseurs?

M. Samson (Michel) : Non, non. Non, d'ailleurs, c'est un suivi d'un mandat que nous avions déjà réalisé en 2010-2011, et le but de cette vérification-là était de voir de quelle façon le ministère avait donné suite aux recommandations que nous avions formulées en 2010‑2011. Ce qu'on a constaté, c'est que, pour 86 % de nos recommandations, ce qui est excellent, le ministère a donné suite à nos recommandations.

M. Séguin (Rhéal) : Allez-vous entreprendre une vérification du Programme d'immigrants investisseurs pour justement évaluer la possibilité de pots-de-vin ou d'abus de pouvoir?

M. Samson (Michel) : Écoutez, vous savez, ça fait partie… Chez nous, on a un processus pour identifier les projets qu'on va réaliser dans l'avenir, donc ça fait partie d'un certain nombre de projets qui peuvent être examinés. Mais, comme vous le savez, on n'annonce pas nécessairement à l'avance les mandats qu'on réalise, donc ça va faire partie de nos réflexions, oui.

Le Modérateur : Bon, bien, merci beaucoup.

(Fin à 11 h 57)

Participants

  • Samson, Michel

Document(s) Related