(Douze heures six minutes)
M. Roberge : Bonjour. Alors, on
est ici ce matin parce qu'on a réussi, finalement, à interpeller le ministre de
l'Éducation et le gouvernement à propos de ces décisions et de ces coupures en éducation.
C'est quand même formidable de voir que, pendant deux heures, ils ont encore
nié l'évidence qu'on voit partout au Québec, c'est-à-dire qu'il y a des
coupures directes aux services aux élèves qui se vivent dans les écoles. Encore
ce matin, le ministre nous a balancé des généralités en nous disant qu'il
voulait s'assurer que les services soient protégés. On sait très bien, quelqu'un
qui dit d'un côté de la bouche qu'il veut protéger les services, de l'autre
côté, il dit aux commissions scolaires comment couper dans les services… Et ça
se vit sur le terrain en ce moment, ça se vit aujourd'hui, ça s'est vécu la
semaine dernière, ça va se vivre encore la semaine prochaine. On aurait aimé
tenir une commission parlementaire spécifiquement là-dessus. Le Parti libéral a
refusé cette commission parlementaire. C'est bien dommage, mais, de toute façon,
la vérité, on le sait, là, le gouvernement libéral est dans une logique
comptable, de coupures, et ça se vit malheureusement au quotidien par des
coupures directes aux services.
Et j'insiste sur une chose, c'est qu'on a
un taux de décrochage de 25 % en ce moment. On ne peut pas se permettre le
luxe de couper dans les mesures d'aide à la réussite. Déjà… puis, au XXIe
siècle, on ne peut pas avoir un jeune sur quatre qui n'a pas un diplôme ou même
une attestation de secondaire V. Et déjà, là, ce niveau de mauvaise préparation
pour le marché du travail n'est pas suffisant pour les libéraux. Ils coupent.
Ils nous ont dit ce matin qu'ils souhaitent avoir un taux de réussite de
80 %, donc augmenter le taux de réussite, mais, en même temps, ils
coupent. Et on voit qu'à la commission scolaire des Découvreurs on va couper
dans une mesure visant la persévérance scolaire. Alors, comment on peut penser
augmenter la persévérance scolaire et couper dans une mesure favorisant la
persévérance scolaire? C'est l'art libéral de gérer l'éducation, c'est à rien
n'y comprendre.
À la commission scolaire des Capitales… de
la Capitale, pardon, on coupe dans les activités sportives et parascolaires, et
ça, au secondaire particulièrement, et pour les garçons particulièrement, c'est
ce qui retient les jeunes à l'école. Le jeune de 16 ans ou de 15 ans sur le
bord de décrocher, souvent, reste à l'école à cause de son activité
parascolaire, de son équipe sportive souvent, et, à la commission scolaire de
la Capitale, bien, il va y en avoir moins cette année que l'an prochain. À quoi
on peut s'attendre? Bien, on peut s'attendre à ce que notre taux de réussite
baisse, ce qui serait absolument dramatique. Alors, on navigue totalement à
contre-courant. C'est totalement incohérent, ce qu'on a vécu ce matin.
M. Caron (Régys)
: M.
Roberge, vous avez évoqué le Titanic pendant l'interpellation. Est-ce que le
réseau de l'éducation est en train de couler?
M. Roberge : Il s'en va vers
l'iceberg en ce moment, là. Quand je vous dis qu'on a 25 % de décrocheurs
et qu'on coupe dans nos services d'aide à la réussite, je vous dirais qu'on
navigue vers l'iceberg. Je ne vous dirai pas que le Titanic est en train de
couler en ce moment, là, mais il est le temps de donner un coup de barre. Et M.
Bolduc semble dire que les icebergs n'existent pas.
M. Caron (Régys)
: Est-ce
que le… n'est pas en train… n'est pas devant le choix suivant : On
redresse les finances publiques ou on maintient les services? Dans les deux
cas, il y a quelque chose dont on doit renoncer.
M. Roberge : On ne peut pas
renoncer aux services directs aux élèves. On ne peut pas atteindre le déficit
zéro sur le dos de la réussite scolaire. Ça serait vraiment, vraiment manquer
de vision, parce que qu'est-ce qui est le moteur de l'économie, bien, c'est le
savoir. Donc, on ne peut pas atteindre le déficit zéro sur le dos de la
main-d'oeuvre de demain. Ça, ça serait vraiment de scier la branche sur
laquelle on est assis.
M. Chouinard (Tommy)
:
Est-ce que la réforme qui est en préparation actuellement… il y a des mesures,
dans ça, qui rejoignent certaines idées caquistes. Est-ce que vous voyez ça
d'un bon oeil, cette réforme-là?
M. Roberge : Excusez-moi, je
ne vois pas de quelle réforme… les libéraux font en ce moment sinon que de
couper dans les mesures d'aide à la réussite.
M. Chouinard (Tommy)
:
Vous n'avez pas lu, là, au sujet de la fusion, de l'abolition des commissions
scolaires, de la coupure… les coupes dans le financement public des écoles
privées?
M. Roberge : Je ne pense pas
que ça soit une politique de réforme.
M. Chouinard (Tommy)
:
…d'un ordre des enseignants, c'est quand même des choses que… l'ordre des
enseignants…
M. Roberge : Bien, je vais
vous dire, je ne pense pas qu'ils sont en train de faire une réforme. Ils sont
en train de lancer des idées à gauche, à droite. C'est un feu d'artifice de
mesures possibles, probables.
Je vais vous dire ce qu'on pense qui
devrait être fait. On pense que la prise de décision devrait se faire dans les
écoles. On pense qu'on devrait remplacer les commissions scolaires par des
centres de services plus légers, plus efficaces. Il faut des écoles autonomes.
C'est ça qu'il faut.
M. Caron (Régys)
: Mais
il y a des écoles de 25 élèves, M. Roberge. Est-ce qu'on va permettre… laisser
toute la décision se prendre dans des écoles où il y a à peine assez d'élèves
pour remplir une classe?
M. Roberge : Ces écoles-là,
là, ce sont quand même des pôles régionaux, même dans un petit, petit, petit
village. Évidemment qu'ils ne vont pas gérer le ministère de l'Éducation. Le
programme existe, le service de la paie serait au centre de services régional.
Par contre, dans cette école de 25 élèves là, là, je pense que oui, ça devrait
être eux qui devraient décider s'ils ont besoin d'un technicien en éducation
spécialisé, d'un psychoéducateur à demi-temps ou d'un orthophoniste à
demi-temps. Je pense que c'est eux qui devraient décider, pas la commission
scolaire.
M. Caron (Régys)
:
Auront-ils les budgets?
M. Roberge : Mais bien sûr
qu'il va falloir avoir les budgets. Il n'y a pas de coupe de budget dans ce que
propose la Coalition avenir Québec. On décentralise la prise de décision, on
envoie l'argent… plus d'argent dans les écoles. On veut juste que l'école
prenne la décision de qu'est-ce qu'ils ont besoin. Peut-être que, dans ces 25
élèves là, il y a deux dyslexiques. Peut-être qu'ils n'en ont pas du tout puis
qu'ils ont plus besoin de ballons puis de filets pour jouer au basketball. En
ce moment, la décision est prise à 50 kilomètres, là, puis on leur envoie du
personnel dont ils n'ont pas besoin.
M. Chouinard (Tommy)
:
Est-ce qu'il faut maintenir ou réduire le financement public des écoles privées
selon vous?
M. Roberge : Je pense qu'il
faut faire très, très attention, surtout pour les écoles en région, très, très
attention. Si on pense économiser de l'argent en coupant dans le financement
des écoles privées, bien, on risque de se retrouver avec une dépense
supplémentaire, parce que, ces élèves-là, il faut bien qu'ils aillent à l'école
quelque part, puis on risque d'assumer 100 % de la facture. Et, en ce
moment, il y a beaucoup d'écoles privées, particulièrement en région, qui sont
sur la corde raide. D'ailleurs, il y a des écoles qui ont fermé. Si on recule de
quatre, cinq ans, il y a des écoles qui ont fermé, surtout en région, et ça n'a
pas entraîné des économies pour le gouvernement du Québec, au contraire, il a
fallu assumer 100 % de la facture.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Sinon, l'exercice de ce matin a-t-il été utile?
M. Roberge : Bien, on a
peut-être vu tomber le masque, on a peut-être vu tomber le masque du ministre
Bolduc, là. On a vu qu'il n'avait pas l'intention de reprendre son ministère en
main. Je pense qu'en ce moment il a perdu le contrôle de son ministère puis il
est très confortable avec ça.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
N'a-t-il pas les mains liées par le Conseil du trésor qui le presse de faire
des coupes, de resserrer ses dépenses?
M. Roberge : Bien, je suis
d'accord avec vous pour dire que ce n'est pas la faute précisément de M. Yves
Bolduc. C'est la faute du gouvernement libéral. Il n'est que l'instrument
là-dedans, quelque part. Quand lui dit qu'on n'a pas besoin de livres dans les
écoles, O.K., ça, c'est M. Bolduc, mais les coupures qui se font en ce moment,
à l'aveugle, mur à mur, c'est une décision libérale, c'est une décision
Couillard, pas seulement une décision Bolduc. On peut bien changer de ministre,
si on garde la même politique, on est encore dans le trouble.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Pour vous, le manque à gagner dans le réseau de l'éducation s'élève à combien
de millions de dollars?
M. Roberge : En ce moment, ils
ont coupé 130 millions de services directs aux élèves. Je pense que ces
millions-là auraient dû rester. Je ne pense pas qu'il faut réinvestir et
pelleter davantage d'argent dans le réseau, je pense qu'avec une meilleure
administration du réseau on pourrait très bien répondre aux besoins des élèves.
(Fin à 12 h 14)