(Onze heures quarante minutes)
Mme
Ouellet
:
Donc, bonjour. Une bonne nouvelle aujourd'hui. Donc, je félicite le ministre
Poëti des Transports du Québec de corriger son erreur et celle de son premier ministre, M. Couillard, en
appuyant notre motion pour le maintien du nom de Champlain pour le pont de
remplacement. Encore la semaine passée, M. Poëti
nous annonçait une consultation pour un changement de nom, et cela malgré le
rappel de l'histoire du président français, M. Hollande.
Nous comprenons donc aujourd'hui que, cette semaine,
M. Poëti est revenu à la raison et qu'il met de côté son projet de
consultation.
Avec la motion du Parti québécois, nous faisons
un grand pas aujourd'hui, dans le dossier du
pont Champlain, pour notre histoire et notre mémoire. Samuel de Champlain est
considéré comme le père de la Nouvelle-France, un grand explorateur qui a
exploré, en 1603, le fleuve Saint-Laurent.
Maintenant, nous
demandons à M. Poëti de défendre avec vigueur — pas d'attendre d'être convoqué par M. Lebel — donc, de défendre avec vigueur la position unanime de
l'Assemblée nationale du Québec pour le maintien du nom de Champlain pour le
pont de remplacement auprès du gouvernement canadien, mais plus particulièrement auprès de M. Lebel, le
ministre québécois. Nous demandons aussi à M. Poëti
d'arrêter d'être attentiste et de se mettre en mode proactif pour exiger le
retrait du péage pour le pont de remplacement. Merci.
Journaliste
: ...
M. Lisée
: On va tous
parler. Ça, c'est la mauvaise nouvelle. C'est la mauvaise nouvelle, on va tous
parler.
Bon, écoutez, donc, l'Assemblée nationale
a voté d'une seule voix aujourd'hui. C'était important parce qu'au cours des
dernières semaines on a assisté à un genre de bande dessinée de Denis Lebel et
de Robert Poëti, les Dupond et Dupont du pont Champlain. Je dirais même, je
dirais plus qu'ils se sont fait la course dans la controverse et le ridicule, à
savoir : Est-ce que ce serait Maurice Richard? Est-ce que ce serait un
autre pont? Est-ce que ce serait une consultation?
Qui ferait la consultation? M. Poëti disait : Bien, il faut
une consultation, mais c'est fédéral. Il ne savait
pas que, pour M. Lebel, ce n'est même pas
terminé. M. Lebel continue à dire qu'il cherche un nom pour ce
qu'il appelle le nouveau pont.
Alors, au-delà du ridicule de la
situation, il faut voir la stratégie derrière ça. Le gouvernement fédéral veut
nous faire croire qu'il y a un nouveau pont sur le Saint-Laurent, c'est le nom
qu'il lui donne, parce que, lorsqu'il y a un
nouveau pont, on peut mettre un péage. Et donc ça a été une erreur politique
importante pour le gouvernement québécois du Parti libéral d'embarquer
là-dedans en ne disant pas, dès le premier jour : C'est un pont existant
qui a déjà un nom — d'ailleurs, c'est un nom qui est très proche de
notre histoire — et il n'est pas question de faire autre chose.
Donc, aujourd'hui, je suppose que le premier
ministre Couillard a rabroué son ministre — il prend toujours le
temps, dans une journée, qu'il soit en Chine ou au Québec, pour rabrouer un
ministre, et c'est une très bonne habitude
parce qu'il a beaucoup de rabrouage à faire — mais maintenant, donc, il a donné
l'indication qu'on pouvait voter sur cette motion. Ça ne détruit pas le dommage
causé pendant les deux semaines de controverse
où le gouvernement québécois ne s'est pas tenu
debout, mais au moins ça fait avancer le dossier.
Et maintenant,
comme le dit ma collègue Martine, on veut que
non seulement M. Poëti, mais aussi M. Couillard avisent le
gouvernement fédéral et le premier ministre fédéral, qui
est le seul décideur à Ottawa. Et c'est lui qui avait
eu l'idée — on le pense bien, on le
dit bien — de nommer des ponts en l'honneur de joueurs de
hockey parce que c'est sa grande passion. Et c'est très bien qu'il s'intéresse
au hockey, mais on aimerait qu'il s'intéresse aussi à l'histoire. Alors, je
pense que, là,la balle est dans le camp de M. Poëti et de
M. Couillard pour montrer un peu d'épine
dorsale historique face au Canada et de demander que,
rapidement, le gouvernement canadien confirme
que ce pont existant gardera son nom existant.
M.
Bergeron
:
Alors, c'est lequel avec un d, lequel avec un t?
M. Lisée
: Je lance le concours.
M.
Bergeron
:Enfin, mille milliards de mille sabords, je pense
que ce qu'il faut... ce dont il faut se désoler par rapport à ce qu'on a vu au
cours des derniers jours, des dernières semaines, c'est qu'il semble qu'il nous
faille toujours pousser le gouvernement dans ses derniers retranchements pour
qu'il daigne défendre les intérêts du Québec face au gouvernement fédéral. On a
un gouvernement qui capitule ses responsabilités en les renvoyant béatement au
gouvernement fédéral. On l'a vu dans le dossier du transport du pétrole lourd,
on l'a vu, hier encore, en Chambre, lorsque, dans le
dossier du pont, M. Poëti a dit que ça relevait du fédéral. À quelque part, M. Poëti a essayé
de nous faire la démonstration hier qu'il était fédéraliste. Je pense que la
seule démonstration qu'il a réussi à faire, c'est qu'il est obséquieux.
M. Lisée
: Qu'est-ce
que ça veut dire?
M.
Bergeron
:
Obséquieux, une traduction libre pour M. Poëti :
lavette, carpette. Je ne crois pas qu'aucun gouvernement libéral, que ce soit
sous Jean Lesage, sous Robert Bourassa, Daniel Johnson, même Jean Charest, se
soit montré aussi aplaventriste à l'égard du gouvernement fédéral, et je pense
que c'est extrêmement dommageable pour les intérêts
du Québec.
Alors, comme le disait mon collègue, je
pense qu'on s'attend à ce que ce gouvernement démontre un peu d'épine dorsale et qu'il défende… qu'il se tienne
debout pour défendre les intérêts des Québécoises et Québécois. Il est
extrêmement malheureux qu'il nous ait fallu deux semaines de controverse pour
qu'on comprenne enfin que le nom de Samuel de Champlain
est indissociable non seulement de l'histoire du Québec, mais de l'histoire du Canada et qu'il ne serait être question
d'aucune façon que nous remplacions le nom de Champlain
pour ce pont de remplacement.
M. Ouellet (Martin)
: Avez-vous été surpris du virage apparent du Parti
libéral dans ce dossier-là? Parce que, justement,
compte tenu des propos tenus hier par M. Poëti,
on aurait pu s'attendre à ce que la motion ne soit pas débattue. Bien, elle n'a pas été… elle a été acceptée sans
débat, mais…
Mme
Ouellet
: Écoutez,
déjà, hier, on voyait qu'il n'a pas rappelé sa consultation.Il n'a pas dit
qu'il ne la ferait pas, mais il ne l'a pas rappelée. Donc,
on ne savait pas exactement à quoi s'attendre ce
matin. C'est une belle surprise, effectivement.
M. Lisée
: C'est sûr
qu'en politique le ridicule ne tue pas, mais il peut, disons, blesser
profondément, et probablement qu'ils se sont
rendu compte qu'ils étaient blessés profondément.
M.
Bergeron
: Parce
que la question est de savoir : Qu'est-ce qui,
aujourd'hui, justifie le fait qu'ils aient donné leur appui à cette motion et que, la semaine dernière, ils aient refusé leur consentement à une motion qui non seulement
demandait le maintien du nom de Samuel de Champlain,
mais qui réitérait l'importance pour notre histoire
de ce personnage central? Alors, qu'est-ce qui a changé? Encore une
fois, c'est probablement au gouvernement libéral
d'expliquer ses contradictions.
Mme
Ouellet
: Et
on sent… juste en complément, et on sentait quand même, à l'intérieur du Conseil
des ministres, différents points de vue. Donc, on a le leader du gouvernement qui avait exprimé
son opinion, que c'était le même lien, et donc
ça devait être le même nom. Donc, on voyait qu'il y avait des points de vue
différents, et donc peut-être que le Conseil des ministres a réussi à ramener M. Poëti à la raison.
M. Lessard (Denis)
:
Quelle serait votre position si le fédéral nommait un autre endroit, un autre
ouvrage fédéral au nom de Champlain pour rebaptiser à son gré le pont…
Mme
Ouellet
:
C'est ce pont-là. C'est un pont de remplacement, ce n'est pas un nouveau pont.
Et ce choix-là a été fait lors de la construction du pont Champlain pour toutes
sortes de raisons documentées, et nous avons ce pont Champlain là, et c'est en
droite ligne avec Jacques Cartier, les explorateurs.Et nous voulons garder le nom de Champlain
pour le pont de remplacement, pour le pont Champlain, et je pense que c'est
tout à fait normal, c'est notre histoire, c'est notre mémoire…
M. Lessard (Denis)
: Mais Champlain pourrait être… sa mémoire pourrait
être soulignée ailleurs…
Mme
Ouellet
:
Bien, sa mémoire est…
M. Lessard (Denis)
:
…un autre équipement…
M.
Bergeron
:
Elle pourrait aussi être soulignée ailleurs...
Mme
Ouellet
:
Elle est déjà soulignée ailleurs.
M.
Bergeron
:
...mais il est hors de question de changer le nom de ce pont.
M. Lisée
: Mais on
accepterait cependant que, si le gouvernement fédéral veut renommer l'aéroport
Trudeau l'aéroport Maurice-Richard, on serait d'accord.
M.
Lessard (Denis)
: …contentiez de
Victoria il y a deux semaines…
Journaliste
: Vous voulez l'aéroport...
M. Lisée
: Bien là, franchement, l'aéroport, ce serait même
mieux, oui.
M. Lacroix (Louis)
:Mais est-ce que vous pensez que le fédéral le fait
volontairement, de retirer le nom de Champlain,
parce qu'on ne veut pas de cette marque identitaire des Québécois?
Mme
Ouellet
: Bien, ce que nous, on a... Il y a une tactique qui
était utilisée par le gouvernement fédéral dans leur vision de dire : On
va changer le nom pour dire que c'est un nouveau
pont, et à ce moment-là imposer le péage aux
citoyens de la Rive-Sud et de Montréal,
alors qu'on sait ce que ça impliquerait comme impacts
économiques néfastes,
le péage. Les différentes études l'ont démontré,
malgré que M. Poëti ne veuille pas lire
les études — c'est assez incroyable
quand même — mais très clairement, nous, on n'embarquera pas
dans cette tactique-là et on veut garder le nom et pas de péage.
M. Ouellet (Martin)
: Oui, bien, c'est ça. Mais seriez-vous prêt à
troquer le nom pour le péage?
M. Lisée
: Non.
Mme
Ouellet
: On
n'est pas dans... Je ne pourrais même pas croire que ça commencerait... il
pourrait y avoir ce genre… puis j'appellerais
ça ce genre…
M.
Bergeron
: De braderie.
Mme
Ouellet
: …de chantage là.Ça
serait totalement inacceptable.
M. Lacroix (Louis)
: Oui, mais ma question, plus précisément… Là, vous
liez ça au péage, là. Vous dites : Nouveau pont, on
change de nom, on démontre où, bon, on peut installer un péage sur le
nouveau pont, mais vous ne voyez rien d'identitaire là-dedans, là? À votre avis, il y a...
M. Lisée
: Un manque de
respect, un manque de connaissance. C'est clair
que... Un manque de respect pour la nation québécoise et son histoire,
mais c'était une volonté purement populiste et de
tactique, comme le dit Martine, pour essayer d'avoir un péage. Au-delà
de ça, je ne pense pas qu'ils ont le machiavélisme à ce niveau-là, c'est juste
que, pour eux, ce n'est pas important, l'histoire du Québec.
M.
Bergeron
:
Mais, pour répondre... pour ajouter à ce que
viennent de dire mes collègues puis pour répondre à votre question, il est
éminemment préoccupant qu'ils se soient dit : Champlain, Maurice Richard,
c'est du pareil au même. On va donc enlever Champlain puis on va mettre Maurice
Richard. On ne peut contester l'importance historique d'un personnage comme
Maurice Richard, et je pense qu'il mérite
d'être honoré, mais c'est totalement inadmissible qu'on décide de remplacer le
nom de Champlain par celui de quiconque pour nommer ce pont de remplacement. C'est totalement inadmissible.
Mme Dufresne (Julie)
:
Sur la question du péage maintenant, que devrait-il faire pour ne plus être une
lavette, comme vous l'avez vous-même dit, pour que la question du péage ne soit
plus un enjeu?
Mme
Ouellet
:
Bien, je pense qu'il doit défendre la position du Québec. Là, ce qu'il dit,
c'est qu'il attend d'être convoqué pour voir s'il va parler avec le
gouvernement fédéral. Il faut qu'il défende les positions. Il devrait lire les études puis, au lieu de dire : Je ne veux pas
les lire, je n'ai pas besoin de les lire, il devrait se servir des études qui
sont produites pour le péage pour défendre son point de vue, faire de la pression sur le gouvernement fédéral, et ça, c'est sa responsabilité.
M.
Bergeron
: Bien, plus que ça, même,
c'est sûr qu'il va devoir défendre la position du Québec, mais je pense qu'à
quelque part il va devoir mettre ses culottes, puis il va devoir dire au
gouvernement fédéral : Si vous pensez que
nous, on va faire la perception de ce péage pour vous,
oubliez ça. Si vous pensez que nous, on va faire les aménagements au
niveau routier pour vous permettre d'installer ce péage, oubliez ça. Il faut
que le gouvernement du Québec s'affirme dans ce dossier-là pour empêcher le
gouvernement fédéral d'aller de l'avant avec son projet de péage qui va être
dommageable pour la grande région métropolitaine.
Mme
Ouellet
:
Parce que vous savez que la perception est de compétence du Québec.
Mme Dufresne (Julie)
:Oui, oui… la SAAQ.
M.
Bergeron
:
Merci beaucoup.
Mme
Ouellet
: Merci.
(Fin à 11 h 52)