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Point de presse de M. Alexandre Cloutier, porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice

Version finale

Thursday, November 13, 2014, 11 h 22

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Onze heures vingt-quatre minutes)

M. Cloutier : Alors, bonjour à tout le monde. Vous aurez compris que je suis insatisfait de la réponse qui a été donnée aujourd'hui par le leader du gouvernement, qui était, à l'époque, l'ancien ministre de la Justice.

Ce qu'il y a de nouveau, c'est qu'on a le détail de l'information que Mme Kovachich a transmis à l'ancien ministre de la Justice, et on peut lire le type d'information qui a été communiquée au paragraphe 110 de l'avis, ou du jugement, ou plutôt du rapport du comité d'enquête qui a été rendu public. Permettez-moi de vous en lire des extraits :

«Compte tenu de la fonction de Procureur général du Québec qu'occupe le ministre, Me de Kovachich s'estime autorisée à l'informer du détail de l'affaire. Elle lui indique donc la nature des procédures, les raisons pour lesquelles elles ont été prises ainsi que l'identité des parties impliquées. Le ministre l'assure de son soutien et l'informe qu'il demandera à son sous-ministre, Me Denis Marsolais, de communiquer avec elle à ce sujet.»

C'est là qu'arrive la réponse du ministre, et il dit : Lorsque j'ai eu ça, j'ai transféré ça à mon sous-ministre.

Juste pour qu'on se rappelle ce qui se passe, tu as la présidente du Tribunal administratif du Québec, consciente qu'elle est dans une situation délicate, le moins qu'on puisse dire, qu'elle souhaite engager des sommes pour payer ses frais d'avocat dans un dossier qui lui est pourtant personnel, consciente de la problématique dans laquelle elle se retrouve, prend le téléphone et décide d'appeler le ministre de la Justice. Le ministre de la Justice se fait expliquer les raisons pour lesquelles... se fait expliquer le détail de l'affaire, se fait dire l'identité des parties, bref le ministre de la Justice a tout en main pour prendre une décision. Alors, ce qu'il fait, c'est qu'il refile ça au ministère de la Justice, puis le ministère de la Justice dit : L'administration de la justice, c'est le Tribunal administratif. Alors, la décision qui est prise par le gouvernement de l'époque, c'est de dire : Ça appartient au TAQ de décider ce qu'il en est, sauf que la présidente se retrouve dans une situation où elle est à la fois juge et partie.

Alors, le ministre de la Justice aurait dû agir, aurait dû minimalement demander un avis externe, s'assurer qu'on ne se retrouve pas dans cette situation où Mme de Kovachich est à la fois juge et partie et réclamer... et donc prévenir. Alors, ce qui fait en sorte qu'aujourd'hui on parle d'une facture de 200 000 $, mais, bien évidemment, on ne compte pas là-dedans les travaux du Vérificateur général, on ne compte pas là-dedans les travaux du Conseil de la justice et toutes les sommes et les frais qui ont été transférés aux Québécois, tout ça en raison du fait qu'il y a eu clairement un manquement. Le ministre de la Justice aurait dû sonner l'alarme, aurait dû sonner l'urgence lorsqu'il a vu que la procureure… ou plutôt la présidente du Tribunal administratif l'appelait personnellement pour lui expliquer un cas qui était vraiment exceptionnel.

M. Lacroix (Louis) : Mais M. Fournier, là-dedans, dit que, selon ce que lui aurait dit Mme de Kovachich, la réputation du tribunal était en cause là-dedans, du TAQ. Alors, c'est… Est-ce que vous achetez cet argument-là pour…

M. Cloutier : En fait, ce que M. Fournier dit, il dit : ce n'est pas vrai que je n'ai rien fait. La preuve, il cite le rapport du Vérificateur général dans lequel, effectivement, le Vérificateur général confirme qu'il a demandé l'avis du ministère de la Justice. Le problème, c'est qu'il ne s'est pas questionné qu'est-ce que le ministère de la Justice allait faire, alors qu'il savait très bien que Mme de Kovachich se retrouvait dans une position où elle devenait à la fois juge et partie, ce qui est, bien évidemment, inacceptable.

M. Lessard (Denis) : Est-ce qu'il ne pouvait pas accepter l'argument que l'image ou la réputation du tribunal allait être altérée par cette cause-là?

M. Cloutier : La responsabilité du…

M. Lessard (Denis) : …l'affirmation de la présidente du TAQ.

M. Cloutier : Bien, il devait absolument demander un avis externe, considérant… Écoutez, là, quand la présidente du tribunal prend la peine d'appeler directement le ministre de la Justice, là, c'est parce qu'il se passe quelque chose. Quand… Puis là, en plus, il n'a pas juste été informé de façon superficielle, ce n'est pas moi qui le dis, là, c'est le paragraphe 110° de la décision. Alors, ce qu'on comprend, c'est qu'il était au courant de l'ensemble de l'oeuvre. Il était donc apte à porter un jugement, aurait dû avoir un avis externe, donc, sur l'interprétation qui lui était donnée, les faits dans lesquels Mme Kovachich se retrouvait, et puis ensuite prendre une décision pour s'assurer qu'on ne se retrouve pas dans le scénario complètement absurde dans lequel on est, où les contribuables québécois ont à la fois payé pour Mme Kovachich pour sa défense…

Mme Dufresne (Julie) : Quel genre de décision est-ce qu'il aurait dû prendre?

M. Cloutier : Il aurait dû d'abord s'assurer de la version de Mme de Kovachich, aurait dû demander un avis externe et aurait dû intervenir pour se rendre compte, à l'évidence même, qu'elle était dans une situation où elle devait juger elle-même si, oui ou non, on allait accorder ces frais-là, ce qui n'a aucun bon sens, tout le monde en convient. Puis il a la responsabilité de défendre l'ensemble du système judiciaire pour s'assurer, comme vous le savez, de l'indépendance…

M. Lessard (Denis) : Il y a plusieurs mois, le ministre a… le ministre St-Arnaud a continué de payer les factures, il était au courant de toute cette histoire-là. Et pourtant on l'a interpellé plusieurs fois, puis il n'a pas bougé. Son seul geste, ça a été d'arrêter de payer les factures.

M. Cloutier : Avec égard, vous oubliez de mentionner qu'il y a aussi eu une demande que le Vérificateur général fasse enquête. Depuis, on a eu le rapport du vérificateur en 2014, et, parallèlement à ça, il y a eu aussi une demande pour que le conseil de la justice du Québec se penche, et le rapport nous a été transmis hier.

Maintenant, là, nous avons tous les documents entre les mains et faites le croisement entre le rapport du Vérificateur général et la décision du conseil, ce que je viens de vous lire, c'est le paragraphe 110, à l'effet qu'on sait maintenant que Mme de Kovachich a informé le détail de l'affaire en lui donnant la nature des procédures, les raisons pour lesquelles elles ont été prises ainsi que l'identité des parties.

M. Lacroix (Louis) : Quel est l'intérêt de M. Fournier, dans ce cas-là, d'avoir…

M. Cloutier : En fait, ce qui est arrivé…

M. Lacroix (Louis) : C'est-u négligence ou il l'a fait par intérêt, à votre avis?

M. Cloutier : Non, mais… je ne prétends pas qu'il y avait un intérêt quelconque dans ce dossier-là. Ce que je dis, c'est qu'il n'a pas agi. Il s'en est lavé les mains, a donné ça à l'administration de la justice, il a dit : Gérez ça. Mais le problème, c'est que tout le monde a dormi au gaz. Il le savait qu'il y avait… qu'on se retrouvait dans une situation d'à la fois juge et partie, puis il n'a rien fait. Il est ministre de la Justice, il a la responsabilité de défendre le système judiciaire et il n'a pas donné suite à ça. Il ne s'est pas assuré que les fonctionnaires avaient une situation qui était satisfaisante puis, à la limite, même, de contre-vérifier la version de…

M. Lacroix (Louis) : Donc, c'est une négligence. Selon vous, c'est une négligence.

M. Cloutier : Absolument. Absolument, c'est une forme de négligence, effectivement.

M. Dutrisac (Robert) : Sauf que, bon, c'est un peu normal qu'un ministre avec un problème, conscient d'un problème, s'adresse à son sous-ministre pour dire : Règle-moi ça.

M. Cloutier : Je suis d'accord. Oui. Le problème, c'est la solution. Quand tu es ministre, non seulement tu consultes, mais c'est le fun de savoir aussi c'est quoi, la solution qui est recommandée. Puis là, là, il le savait, le problème. Ce n'est pas comme s'il ne connaissait pas la nature. Ce n'est pas comme s'il y avait juste : Ah! je pense qu'il y a un problème dans ce dossier-là, réglez-moi le. Bien non, il connaissait tout le détail. Alors, il savait qu'il y avait urgence en la demeure, donc qu'il devait agir avec toute la précaution nécessaire. Puis, en plus, il est Procureur général du Québec. Alors, veux veux pas, le degré de profondeur avec lequel il doit travailler ce genre de dossier là, c'est avec la prunelle de ses yeux. On parle de l'intégrité du système de justice.

M. Robillard (Alexandre) : Est-ce que c'était approprié que Mme de Kovachich téléphone ou s'adresse directement au ministre?

M. Cloutier : C'est une bonne question que vous posez. Je sais que les présidents d'un tribunal se parlent. Ce n'est pas clair… Je ne veux pas trop questionner ça, ça fait partie du jugement. Ce que je comprends, c'est qu'on peut interpréter ça comme demandant un avis au ministre, mais ce qui est sûr, c'est qu'elle l'a appelé pour l'informer. Elle ne l'a pas appelé parce que… Elle l'a appelé parce qu'elle savait qu'il y avait un problème, puis elle savait qu'elle avait besoin d'être guidée, puis elle… En réalité, on a remis ça au tribunal administratif.

M. Robillard (Alexandre) : On parle souvent de séparation des pouvoirs, des choses comme ça. Ça, est-ce que…

M. Cloutier : Absolument, mais, en même temps, dans l'administration de la justice, c'est normal qu'un ministre de la Justice parle parfois, je ne sais pas, moi, à la juge en chef de la Cour du Québec, pour des raisons plus administratives.

Mme Dufresne (Julie) : Oui, mais là ce n'était pas une raison administrative, c'est un cas personnel.

M. Cloutier : Non, non. Là, on est d'accord, bien oui, mais, en plus... Absolument, d'autant plus que tout le détail a été donné.

M. Lacroix (Louis) : Dans les circonstances, est-ce que vous croyez que la sanction est suffisante, c'est-à-dire six mois de suspension sans salaire? Est-ce que c'est suffisant face, justement, à une négligence aussi importante?

M. Cloutier : Là, ce qu'on veut savoir, c'est : Est-ce qu'il y a des procédures qui sont entamées auprès du Conseil du trésor pour récupérer les sommes? Parce que, là, tout le monde sait que ce sont des sommes... On parle de plus de 200 000 $, mais, en réalité, c'est plus des millions de dollars qui sont en jeu si on prend tous les frais qui ont été assumés par l'État inutilement dans ce dossier-là. Et ce qu'on... Donc, est-ce que les procédures ont été entamées? Puis ensuite on veut que M. Fournier s'explique... son inaction qui entache malheureusement tout le processus judiciaire.

M. Lessard (Denis) : …ce qu'on veut savoir aussi, c'est : Est-ce que vous estimez que la sanction est suffisante?

M. Cloutier : C'est-à-dire que la recommandation qui est donnée dans le rapport qui a été rendu public hier, c'est une suggestion qui est faite à partir de la jurisprudence. Mais, honnêtement, je ne veux pas moi-même questionner...

M. Lessard (Denis) : Bien, le rapport... pourrait suggérer la destitution...

M. Cloutier : Mais ils ont choisi de ne pas le faire. Ils ont choisi de ne pas le faire, eu égard à la jurisprudence applicable. Je fais confiance à l'indépendance des personnes qui étaient en place et qui ont soumis à la ministre que, dans ce scénario-là, la meilleure décision, c'était celle-là.

Par contre, si vous voulez faire un parallèle qui est intéressant, c'est que, là, justement, il y a une faute importante qui a été commise, qui est documentée à la fois par un rapport du Vérificateur général, qui est bonifié par l'avis ou le jugement qui a été rendu... — comment qu'ils appellent ça? Excusez-moi, je vais utiliser le bon mot — le rapport du comité, puis, parallèlement à ça, vous avez Me Magnan qui se fait recommander juge en bonne et due forme avec une procédure indépendante; la ministre de la Justice décide d'intervenir pour annuler, donc écarter Me Magnan de la nomination, sans invoquer quelque motif que ce soit; et ici, vous avez Me de Kovachich, dans lequel il y a clairement une situation de gestes graves qui ont été posés et documentés, puis, en bout de course, c'est une suspension de six mois.

Ce que je veux dire, c'est qu'on est clairement dans une situation de deux poids, deux mesures, et c'est pour ça que je vais continuer à talonner la ministre de la Justice dans le dossier de Me Magnan, parce que, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas donné de réponse, ça donne clairement l'impression que c'est pour des raisons arbitraires qu'on a agi...

Mme Dufresne (Julie) : Mais quel parallèle vous faites avec le dossier de Me Magnan? Je ne suis pas certaine de le comprendre.

M. Cloutier : Me Magnan, on a suivi... on a écarté un juge. On a écarté, pardon... bien oui, on a recommandé la recommandation pour qu'il devienne juge. La sanction qui est appliquée ici, c'est la suspension pendant six mois. On a écarté quelqu'un, on a fait... La ministre de la Justice n'intervient pas dans le processus de nomination. Pour qu'elle puisse le faire, ça prend des motifs graves. Ce que je vous dis, c'est qu'il y a des motifs vraiment importants dans ce dossier-là, alors qu'en bout de course il y a de la suspension, alors que, pour Me Magnan, on a écarté sa candidature, alors qu'on ne connaît absolument pas les faits. On ne…

M. Ouellet (Martin) : Vous nous disiez tout à l'heure que la sanction vous apparaissait correcte.

M. Cloutier : Ce que j'ai dit, c'est que moi… ce que je vous dis, c'est que je ne porte pas… je prends acte de la recommandation qui doit être bien justifiée. Ce que je dis, celle que je ne comprends pas, c'est celle d'avoir écarté Me Magnan.

M. Ouellet (Martin) : C'est quoi, le rapport?

M. Cloutier : Le rapport, pour moi, m'apparaît assez évident, on pourra en rediscuter si vous le souhaitez, mais, d'un côté, tu as une recommandation qui est écartée sans raison et, de l'autre côté, tu as quelqu'un qui est reconnu de faits importants et, en bout de course, c'est six mois de suspension.

M. Lacroix (Louis) : …dans le dossier de M. Magnan, là, qu'est-ce que vous soupçonnez, là… Vous avez mentionné en Chambre hier… vous avez fait un lien avec l'histoire de M. Tomassi. Est-ce que ce…

M. Cloutier : C'est que le rapport de commission Bastarache, c'est quoi l'esprit du rapport? C'est qu'on ne peut pas prendre de décision arbitraire et que toute forme de décision doit être justifiée.

M. Lacroix (Louis) : Mais alors, elle se justifie comment? Hier, vous avez fait un lien. Est-ce que vous refaites ce lien-là maintenant?

M. Cloutier : Le lien… en fait, hier, j'ai… nous cherchons des réponses parce que la ministre refuse de s'expliquer. On ne peut pas… Écoutez, ce n'est pas rien, là. Tu as la ministre de la Justice du Québec — ce n'est jamais arrivé depuis Bastarache, ce n'est jamais arrivé depuis la période des post-it — qui intervient directement dans le processus de nomination des juges pour écarter une recommandation sans raison. Alors, c'est sûr qu'il y a un problème. C'est pour ça qu'on n'accepte pas simplement…

M. Ouellet (Martin) : Vous avez lancé ça, hier, un peu… parce que vous dites : On cherche des réponses. Alors, vous avez lancé ça sans fondement?

M. Cloutier : Bien, c'est-à-dire que Me Magnan avait la responsabilité, comme DPCP, d'entamer les procédures contre Tony Tomassi. Ce que nous, on dit, c'est que ça fait des drôles de hasards. On cherche à comprendre pourquoi la ministre est intervenue dans ce dossier-là puis… C'est la première fois que ça arrive, là, depuis les post-it puis Bastarache.

Alors, pourquoi ce dossier-là? C'est quoi, les motifs? Elle peut le faire, mais uniquement si elle est capable de le justifier dans l'intérêt de la justice. Or, on n'a aucun détail, on n'a absolument aucun détail. Ce n'est pas banal, là. Regardez ce qui se passe dans les autres pays à travers le monde. Quand un ministre de la Justice intervient pour annuler un processus, là, ça ne se fait pas sur le coin d'une table.

M. Lacroix (Louis) : Mais vous pensez que l'ascendant de M. Tomassi sur le parti libéral est encore suffisamment fort pour qu'aujourd'hui, là, à cette époque-ci, la ministre écarte la candidature de celui qui a porté les accusations contre lui?

M. Cloutier : Je n'ai pas l'information. Je suis incapable de faire tous les liens que nous souhaitons faire parce que la ministre refuse de répondre. Mais soyez assurés que je vais continuer de poser des questions là-dessus parce que sinon ça entache le processus et ça donne l'impression d'une intervention arbitraire. Alors, tant qu'on ne le saura pas, on va continuer de poser…

M. Ouellet (Martin) : Avez-vous une idée des raisons, M. Cloutier? Parce qu'on entend toutes sortes de choses, là. Il y en a qui disent : C'était peut-être parce qu'il manquait de femmes, ces choses-là. Est-ce que vous avez entendu les mêmes choses?

M. Cloutier : Alors, je vais laisser la ministre de la Justice répondre, mais, si la ministre de la Justice vient ici en point de presse puis elle vous dit : C'est parce qu'il manque de femmes, objectif qui est tout à fait valable… Maintenant, est-ce que ça nécessitait d'annuler le processus dans ce cas-là lorsqu'il y a 80, 100 juges qui sont nommés par année? Merci.

(Fin à 11 h 39)

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