(Neuf heures six minutes)
Mme Bois (Geneviève) : Bonjour à
tous, merci d'être avec nous ce matin. Merci d'être venus pour ce point de
presse où on lance notre campagne 10 dans 10. Je m'appelle Geneviève Bois, je
suis la porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. Je
suis avec ma collègue, Mme Mélanie Champagne, qui est directrice des questions
d'intérêt public à la Société canadienne du cancer, puis aujourd'hui, on est là
pour introduire une campagne dans laquelle on lance un objectif au Québec, on
lance un objectif au gouvernement du Québec, qui est de viser 10 % de
tabagisme dans 10 ans. Une publicité a été publiée ce matin dans sept
quotidiens : LaPresse, Le Soleil, La Tribune,
LeDroit, Le Nouvelliste, Le Quotidien et La Voix
de l'Est, qui a été endossée par plus de 50 groupes du domaine large de la
santé, des groupes qui endossaient cet objectif ambitieux là de réduire le
tabagisme au Québec.
Pourquoi on lance cette campagne? Pourquoi
on demande tout ça? En fait, il est grand temps, au Québec, là, de se donner un
objectif concret de réduction du tabagisme. On ne peut pas simplement se
contenter du statu quo. Et donc c'est le but de la campagne, le 10 dans 10. Le
taux de tabagisme au Québec, en ce moment, est de plus de 20 %.
Mme Champagne (Mélanie) : On
lance cette campagne-là après plus de neuf ans d'inaction législative au Québec
et malgré que le tabagisme demeure la première cause de mortalité, et c'est 100 %
évitable. On entend, des fois, dire que la lutte au tabagisme est gagnée. Je ne
pense pas qu'on puisse dire ça aux 200 personnes qui meurent à chaque semaine
du tabac. Il n'y a aucun autre produit de consommation qui tue tant de gens.
C'est une catastrophe perpétuelle qui ne fait pas la manchette. Et pourtant, je
ne sais pas si vous avez déjà vu quelqu'un qui décède d'une maladie reliée au
tabagisme, mais c'est beaucoup de souffrances. On parle de pas capable de manger
seul, pas capable de se laver. C'est épouvantable, et il faut que ça cesse.
En 2012, le Dr Couillard disait avec
raison que le tabagisme demeure un fléau. On est bien d'accord avec lui, et le
fléau, c'est que ça n'a pas changé depuis huit ans. Ça, ça veut dire que, si le
tabagisme stagne depuis huit ans, que pour chaque personne qui meurt il y a un
fumeur de remplacement, et c'est un jeune. Et les jeunes commencent, en
moyenne, à 12 ans et demi. 12 ans et demi, c'est l'été entre le primaire et le
secondaire. Ce n'est même pas encore des adolescents. C'est des enfants qui
commencent à fumer.
Le tabagisme est responsable du tiers des
journées d'hospitalisation, le tiers des lits sont occupés par des patients
dont la maladie est liée au tabagisme. Ça nous coûte aussi collectivement
4 milliards par année à un moment où les finances publiques n'en peuvent
plus, sont à bout de souffle. 4 milliards par année contre 1 milliard
de taxes que ça rapporte, je pense qu'il faut arrêter de dire que c'est payant
pour le gouvernement.
Et je pense que je terminerai en disant
que 650 jeunes s'initient au tabagisme à chaque semaine. Et ça, c'est la
semaine passée; la semaine prochaine, ça va continuer. Alors, on doit se doter
d'un objectif ambitieux, et très clair, et précis sur où on veut aller dans la
lutte au tabagisme au Québec.
Mme Bois (Geneviève) : Il est
grand temps, au Québec, qu'on se fixe des objectifs qui sont concrets puis qui
sont chiffrés de réduction du tabagisme. Un problème qui est aussi grave que
celui du tabagisme, qui est aussi dramatique, qui est aussi perpétuel, qui
cause autant de souffrances, mais aussi de coûts à notre société, on ne peut
pas se permettre de ne pas traiter un problème de cette taille-là avec un grand
sérieux. Puis là avoir du sérieux quand on en vient au tabagisme, c'est de se
dire où on veut aller, qu'est-ce qu'on vise au Québec. On ne peut pas se
permettre de rester à 21 % pour toujours. On ne veut pas que cette
catastrophe-là, que 10 000 personnes par année, ça se répète année après
année. Donc, nous, on propose de viser 10 % dans 10 ans.
En 1998, la Loi sur le tabac a été adoptée
pour la première fois au Québec, puis on était perçus, partout dans le monde,
comme un leader. On était le leader du contrôle tabagique. En 2005, quand la
loi a été révisée par Dr Couillard, encore une fois, c'était une loi qui était
ambitieuse, c'était une loi qui était forte, avec des mesures portantes. Encore
une fois, c'était une loi qui a été vue, de par le monde, comme un exemple à
suivre.
Malheureusement, on a perdu cette place de
leader depuis plusieurs années. Le tabagisme stagne. On n'a pas de nouvelles mesures
depuis neuf ans. Pendant ce temps-là, d'autres pays ont continué d'innover,
puis c'est des pays qu'on devrait voir comme des modèles pour le Québec. Je
pense à l'Australie, qui a atteint un taux de tabagisme de 12,8 %, le plus
bas au monde, grâce à une politique rigoureuse au niveau du prix, l'emballage
neutre et standardisé puis des campagnes de prévention qui sont percutantes. Je
pense aussi à la France qui récemment s'est visée… s'est donnée trois objectifs
très précis pour dans cinq, 10 et 20 ans. C'est un modèle qui est vraiment à
suivre pour le Québec, puis on espère qu'au Québec aussi on va justement se
doter d'un objectif comme ça, qui est ambitieux et porteur.
10 % dans 10 ans, c'est baisser de
1 % par année. C'est quelque chose qu'on a déjà fait au Québec. On a déjà
baissé de 1 %, le tabagisme, par année. Pour chaque pourcentage qu'on
diminue au Québec, c'est 41 millions de dollars récurrents qui vont être
économisés par l'État. On pense qu'il est vraiment temps de reprendre cette
ambition qu'on avait en 1998 et en 2005, de retrouver cette ambition-là de réduire
le tabagisme au Québec,et puis de la garder bien vivante pour atteindre ce
message porteur là.
Merci beaucoup. Je vais maintenant céder
la parole aux trois députés qui nous accompagnent. D'abord, Mme Diane Lamarre,
du Parti québécois; puis M. Sébastien Schneeberger, de la Coalition avenir
Québec; et puis finalement M. Amir Khadir, de Québec solidaire. Merci.
Mme Lamarre : Merci beaucoup.
Écoutez, les 200 patients dont on a parlé, les 200 personnes qui décèdent par
année, moi, dans ma pratique, j'ai fait beaucoup de soins palliatifs, et, pour
moi, ces personnes-là, elles ont un nom, elles ont un visage, elles ont des
souffrances que j'ai vues réellement, et c'est terrible. Et c'est… Si on était
conscients davantage de tout ce que ça comporte comme conséquences, le fait de
fumer, alors que c'est une des causes évitables, c'est la cause évitable qui
génère le plus de décès et sans compter les années de difficultés
respiratoires… Il y a des gens qui sont en perpétuelle situation… comme s'ils
avaient toujours à courir après leur souffle. comme s'ils étaient en train de
se noyer, pratiquement. Alors, c'est très, très dur, ce type de conséquence du
tabagisme.
On ne porte pas de jugement sur les gens
qui fument oui qui ont commencé à fumer il y a plusieurs années parce qu'on
n'avait pas les connaissances qu'on a maintenant. On espère de tout coeur que
ces gens-là vont faire la démarche, et plusieurs d'entre eux la font, et on les
félicite. Mais on doit travailler sur nos jeunes. Il n'y a plus aucune raison
pour qu'un jeune commence à fumer en 2014, et ça, il faut que le message soit
clair. C'est un produit toxique qu'on met dans nos poumons et qui va causer des
conséquences désastreuses.
Alors, je pense qu'on doit vraiment, vraiment
passer rapidement à notre révision législative. On a besoin de ces mesures-là,
et il y a des mesures concrètes dans ça qui sont… qui ont des impacts sur la population.
Alors, on appelle la ministre déléguée à vraiment passer rapidement en mode
révision de la législation et on joint la coalition pour assurer qu'on va
atteindre notre objectif de 10 % dans 10 ans. Je pense que c'est quelque
chose qui est un beau défi pour les Québécois. On aime relever ces défis-là, et
je pense qu'on est capables, tous ensemble, d'y arriver avec une collaboration,
une compréhension des enjeux et surtout avec la perspective de protéger nos
jeunes pour qu'ils ne commencent jamais à fumer. Je laisse la parole à M.
Schneeberger.
M.
Schneeberger
:
Alors, bon matin à tous, Mme Bois, Mme Champagne, chers collègues. Je joins ma
voix et celle de mon parti, ce matin, pour justement demander que, dans la
prochaine politique, qu'il y ait des objectifs chiffrés clairs et… parce qu'il
faut mettre des priorités, des cibles. Et surtout, qu'il y ait une approche
très coercitive et… au niveau des jeunes, au niveau des écoles… parce que, bon,
il y a des personnes, comme Mme Lamarre disait tout à l'heure, qui sont plus
âgées, qui ont développé des habitudes au niveau du tabac, on les comprend, ce
n'est pas évident d'arrêter. Mais surtout la guerre à faire, c'est vraiment au
niveau des jeunes, c'est là que… les nouveaux qui commencent au niveau des
écoles, c'est là qu'il faut mettre vraiment l'attention avec des campagnes de
sensibilisation et autres et dire, enfin pour tout, que le tabac, les
cigarettes, ce n'est pas une… c'est «out».
Alors, ça, je pense qu'au niveau de la loi
il faudra que ce soit très clair. Et c'est comme ça, tous ensemble, qu'on va
pouvoir faire une approche cohérente, et ne pas faire de la politique, mais en
faire une politique claire pour tout le monde. Merci.
M. Khadir
: Alors,
comme parti, nous sommes ici, dans le fond, avec la coalition pour lutter
contre le tabagisme, pour dire que, quand il y a une volonté politique, dans
les pays où il y a une volonté politique, et cette volonté politique a été
maintenue par des mesures législatives, par des objectifs, le tabac a reculé.
Et ce dont on a besoin, c'est d'une volonté politique renouvelée au Québec,
comme il y en a eu il y a à peu près une dizaine d'années, de vraiment prendre
des mesures qui cadrent avec les objectifs à long terme, d'où l'idée que
propose la coalition, qui n'a rien d'excessif, mais a tout du raisonnable, c'est-à-dire
de viser une réduction sensible d'ici une dizaine d'années, soit de réduire de
moitié la consommation du tabac au Québec.
On est à 20 %. Viser 10 %, c'est
dans les capacités de notre société, pourvu qu'il y ait une volonté politique,
des mesures législatives, de l'argent pour appuyer les campagnes. Je sais que
la coalition en a, l'Association pulmonaire du Québec en a, il y a des perspectives
quant à la possibilité de taxer le toxique, comme toutes les sociétés modernes
en font la promotion, que ce soit pour l'essence, que ce soit pour le tabac.
Donc, il y a une série de mesures qui ont besoin de l'intervention forte du
médicament.
Alors, comme médecin, comme pharmacienne,
comme citoyen, comme, en fait, parents et enfants de personnes dans notre
entourage qui ont souffert du tabac, qui peuvent être victimes du tabagisme, de
ce côté plus laid du capitalisme, hein… on en parle aujourd'hui à propos de CN
et du pont, mais le capitalisme, parfois, a des visages relativement laids. Et
là on a une industrie qui empoisonne notre monde, et cette industrie-là fait
énormément de bénéfices. Et ce n'est pas une politique à chaque 10 ans qui
suffit. Il ne faut pas baisser la garde, et on est là pour dire au gouvernement
du Québec : Il est temps, il est plus que temps qu'au Québec,
collectivement, politiquement, on refasse, disons, nos devoirs et qu'on agisse
politiquement avec un objectif clair, soit de réduire le tabac et son
utilisation de moitié en 10 ans. Merci.
Mme Bois (Geneviève) : Merci
beaucoup. On va prendre les questions…
M. Corbeil (Michel)
:
Vous proposez un objectif, mais je ne vois pas trop, trop les moyens. Vous
parlez vaguement de réviser la loi. C'est quoi, au juste… c'est quoi, les
moyens pour atteindre l'objectif?
Mme Bois (Geneviève) : Nous,
on propose un objectif aujourd'hui parce qu'on n'en a pas au Québec. On ne
pense pas qu'il faut réviser la loi pour réviser la loi. Il y a énormément de
mesures qui sont à notre portée, qui sont excellentes, qui sont basées sur des
données probantes, qu'on pourrait mettre en place. On en recommande plusieurs,
on a une liste de recommandations qu'on fait depuis longtemps, par rapport à la
révision de la loi, parce qu'elle se fait attendre depuis très longtemps.
Il n'y a pas une seule mesure qui va
réduire le tabagisme de 21 % à 10 % au Québec. Il va falloir une
politique qui est cohérente. C'est certain qu'une politique cohérente, ça va
devoir passer par une révision de la Loi sur le tabac. Dans cette révision-là,
il va falloir qu'il y ait un certain nombre de mesures. C'est certain qu'il
faut continuer de s'intéresser au prix, on a les cigarettes les moins chères au
Québec de tout le Canada, mais il va falloir s'intéresser aussi à
l'aromatisation des produits. Si les jeunes commencent à 12,7 ans, c'est parce
qu'il y a des petits cigares à la cerise puis qu'il y a des cigarettes au
menthol qui sont attirantes, qui sont mises dans des emballages qui ont l'air
d'un emballage de jouet. Donc, il va falloir s'attarder à l'emballage, à
l'aromatisation, au prix, à la prévention. Il y a plusieurs choses auxquelles
il faut s'attarder.
Les mesures, elles sont déjà là. Par
contre, on pense qu'il ne faut pas juste mettre en place les mesures, il faut
aussi dire où est-ce qu'on veut aller. On ne pense pas qu'on peut continuer de
stagner avec 1 %. C'est inacceptable qu'on accepte, année après année, que
10 000 personnes de plus décèdent du tabagisme. C'est tout à fait à notre
portée de changer le cours des choses, c'est simplement une question de
volonté. Il y a des États où ça a été fait, on pense qu'on peut le faire au
Québec. On a déjà eu cette capacité-là. Malheureusement, en ce moment, on ne le
fait plus.
M. Corbeil (Michel)
:
Vous n'êtes pas rassurés par la ministre qui dit : La révision, ça va aller…
je dépose un projet de loi…
Mme Champagne (Mélanie) : On
est très contents, en fait, que la ministre se soit avancée sur la révision
d'un projet de loi. Ceci étant dit, ça passe par un objectif. Tout plan, tout
bon plan passe par : on se dote d'un objectif chiffré puis, après ça, on
prend les moyens pour y arriver.
Il y a quelques années, au Québec, on
s'est donné un objectif chiffré, un objectif administratif, je dirais, qui
était de 16 %, d'atteindre 16 % de taux de tabagisme en 2012. On est
à 21 % environ et on a dépassé 2012 parce qu'on n'a jamais eu objectif
politique. Là, ce qu'on demande, c'est une révision politique. Après ça, on
déterminera les objectifs pour y arriver.
En même temps, on a quand même vu passer
trois gouvernements depuis la dernière révision de la Loi sur le tabac. On
attend toujours. Donc, c'est très encourageant de voir que Mme Charlebois
s'avance, mais on aimerait maintenant qu'elle aussi chiffre ses objectifs pour y
arriver.
M. Khadir
: Bien, si je
peux me permettre, Michel, votre question vient justement cerner pourquoi la
coalition mise sur des objectifs plutôt que des mesures. Il y a 10 ans, on a
adopté des mesures puis on s'est contenté de dire : Les mesures sont en
place, ça y est, la bataille est gagnée. Mais les mesures en elles-mêmes, si
elles ne sont pas rattachées à l'atteinte d'objectifs, peuvent se perdre, et
c'est ce qui est arrivé. C'est qu'actuellement on stagne parce qu'il n'y a pas
eu de volonté politique attachée à l'atteinte… la déclaration qu'on doit
atteindre un objectif au bout de tout ça, d'où l'importance d'insister que, si
on fait tout ça dans le fond, ce n'est pas juste pour mettre des mesures en
place, mais c'est pour arriver à quelque chose. Et je pense que c'est très
raisonnable, compte tenu de ce que d'autres pays ont fait, de viser 10 points
de réduction, donc de passer de 20 % à peu près à 10 % en 10 ans.
Mme Champagne (Mélanie) : Et
j'ajouterais que le Dr Couillard, en 2005, a vraiment fait tout en son pouvoir,
à cette époque-là, pour atteindre… pour lutter contre le tabagisme. Vraiment,
la loi était costaude, la loi était ambitieuse, la loi était complète pour
l'époque, mais les temps ont changé, puis je pense que maintenant on est dû
pour une révision tout aussi ambitieuse. On ne veut pas se contenter de mesures
à la pièce, on veut vraiment quelque chose de cohérent, de global, puis 10 dans
10… 10 %, donc, dans 10 ans, c'est ce qu'on souhaite que la ministre
endosse.
M. Corbeil (Michel)
:
M. Couillard avait signé, avec M. Rochon, évidemment, le père de la Loi sur le
tabac, une lettre incitant le gouvernement de l'époque — c'était un
gouvernement du Parti québécois — à justement réviser la loi. Est-ce
que vous savez pourquoi?
Mme Bois (Geneviève) : C'est
la citation de M. Couillard qui est sur la publicité, qu'il a écrite en 2012
avec M. Rochon, avec Dr Rochon, par rapport à…
M. Corbeil (Michel)
:
Savez-vous, Mme Lamarre, pourquoi le Parti québécois n'a pas procédé à cette
révision-là? Il y a quand même eu 18 mois, il n'y a pas eu de dépôt de projet
de loi, rien, depuis…
Mme Lamarre : Bien, je sais
que c'était dans les priorités. Pendant les 18 mois où on était là, c'était
quelque chose qui était en priorité. Pourquoi ça n'a pas été complété, je ne le
sais pas, mais c'était quelque chose qui était vraiment priorisé.
Moi, je vous dirais que ce qu'on décode
aussi de ce message-là, c'est l'importance d'investir dans la santé publique.
Vous savez, la prévention et la santé publique, ce sont les grands oubliés dans
nos budgets de santé, et ça, c'est déterminant. Regardez la statistique :
un tiers des coûts encourus par les journées d'hospitalisation au Québec sont
directement attribuables au tabagisme. Écoutez, ce n'est pas banal. Donc, même
sur un plan économique, on a toutes les raisons du monde de vouloir travailler
pour que cette situation-là change au Québec. Mais tout ce qui est prévention,
il faut y accorder les budgets nécessaires, il faut y mettre l'énergie
nécessaire. Et je pense qu'on a eu des beaux succès avec des campagnes, par
exemple sur l'alcoolisme, sur l'alcool au volant, on a vu l'intensité qui a été
mise. Ça fait longtemps qu'on a vu cette intensité-là au niveau de la
prévention du tabagisme. Et il y a toutes sortes de stratégies parce
qu'effectivement il faut transformer ce qu'on est en train de réintroduire.
Il y a actuellement, du côté de
l'industrie des produits du tabac, des nouvelles stratégies qui viennent
séduire nos jeunes avec des approches qui sont très, très attrayantes, qui sont
des approches… Vous savez, quand on fait des saveurs de cigarettes
électroniques à la gomme balloune, là, ce n'est pas pour aider les gens de 60
ans à arrêter de fumer. Alors, on vient vraiment actuellement réintroduire des
stratégies pour amener les jeunes à commencer à fumer, et ça, c'est vraiment
quelque chose… Il faut réagir et il faut réagir rapidement.
M. Corbeil (Michel)
:
Si je comprends bien, la cigarette électronique, en tout cas, sinon à bannir,
c'est à…
M. Khadir
: Ça doit
faire partie de la réflexion.
Mme Lamarre : Ça doit faire
partie de la réflexion, et il y a une place pour la cigarette électronique,
mais cette place-là, elle est pour certains sous-types de fumeurs et elle n'est
certainement pas pour qu'on puisse en faire quelque chose qui est une normalité
pour les jeunes et qui est attrayant pour les jeunes. Je pense qu'on doit être
prudents, très, très prudents. Mais il y aura une réflexion à faire là-dessus.
M. Corbeil (Michel)
:
Une dernière question. Pourquoi personne du gouvernement n'est là? Est-ce que
vous avez invité la ministre déléguée à la santé?
Mme Bois (Geneviève) : En
fait, aujourd'hui, on interpelle le gouvernement. On est ravis que Mme
Charlebois se soit engagée à réviser la loi. Je ne doute pas de ses bonnes
intentions, je suis certaine qu'elle veut réviser la loi, et puis on espère que
ça va se faire rapidement au printemps, puis c'est ce qu'elle a dit aussi.
Donc, on espère que ça va se faire avec des mesures fortes.
M. Corbeil (Michel)
:
Mais vous ne l'avez pas invitée.
Mme Bois (Geneviève) : Par
contre, ce matin, on a décidé de lancer un appel au gouvernement. Il y a trois porte-parole
en matière de santé qui ont décidé de se joindre à nous. Tout comme les 50
endosseurs de cette publicité-là, c'est des groupes qui disent : L'objectif
de 10 dans 10, c'est quelque chose qu'on trouve porteur, c'est quelque
chose que, nous aussi, on veut atteindre. Je serais ravie que la ministre
dise : Oui, 10 % dans 10, c'est un objectif qu'on veut atteindre. Ça
serait idéal.
Par contre, aujourd'hui, on lance une question,
on espère que la réponse sera positive, mais on n'est pas dans les mesures, on
n'est pas dans les détails. Si la loi est révisée au printemps, c'est
excellent. Par contre, on ne veut pas réviser une loi pour réviser une loi,
c'est pour ça qu'aujourd'hui on vous parle d'un objectif. On pense qu'au Québec
on est rendus à un point où il faut se dire où est-ce qu'on veut aller, puis
nous, on pense qu'on devrait viser 10 % dans 10 ans. Il ne faut pas adopter
des mesures simplement pour adopter des mesures. Il y a des choses qui
pouvaient se faire quand on avait 40 % de tabagisme puis il y a des choses
qui ne peuvent pas se faire. À 20 %, il y a des nouvelles choses qu'on
peut faire puis il y a d'autres choses qu'on ne peut pas encore faire qu'on
pourra faire quand on sera à 10 %.
Là où on est rendus au Québec, c'est de se
dire : On veut aller là. On ne veut pas se contenter, là, de fluctuer
entre 18 % puis 25 %. On ne veut pas que le taux de tabagisme se
maintienne, puis que des jeunes fumeurs, qui ont en général 12 ans, commencent
à fumer pour remplacer ceux, de peine et de misère, qui arrêtent de fumer ou
qui malheureusement en décèdent. On veut arriver à 10 % dans 10 ans. On
pense que plus que 10 %, c'est inacceptable d'accepter ça aujourd'hui au
Québec. Un fardeau qui est 100 % évitable, on devrait toujours vouloir
perpétuellement le réduire. Le tiers de nos lits d'hôpitaux tous les jours,
tous les ans, ce n'est pas une situation qu'on doit accepter.
S'il y a un message, en fait, là, que je
voudrais réitérer ce matin, c'est que ce taux de tabagisme là de 21 %, là,
ce n'est pas une fatalité au Québec. On a comme un peu accepté qu'on était
rendus là, qu'on avait fait ce qu'on avait à faire, puis là on a arrêté. On
pourrait être à 12 % comme l'Australie, on pourrait être à 10 %, on
pourrait être à 8 % si on voulait. Il ne faut pas accepter ça comme une
fatalité puis il ne faut pas accepter ça comme une catastrophe qui continue à
arriver. On en est rendus un peu immuns, mais on ne devrait pas l'être parce que
ces 10 000 personnes là, justement, elles ont un visage, puis c'est
10 000 personnes qui meurent dans des terribles souffrances faisant
souffrir 10 000 familles.
Puis 4 milliards de dollars, dans un État
comme le Québec, ce n'est pas de l'argent qu'on a à perdre. Le tiers de nos
lits d'hôpitaux, là, ça ferait une fichue différence pour nous comme médecins
dans les salles d'urgence, ça ferait une fichue différence pour nous sur les
étages des hôpitaux. Si on veut réduire la pression sur le système de santé, la
première chose à faire puis la chose la plus importante à faire, c'est de
réduire le tabagisme.
M. Vendeville (Geoffrey) :
Que pensez-vous d'une taxe sur la cigarette électronique?
Mme Bois (Geneviève) : On n'a
pas de position sur une taxe sur la cigarette électronique parce que la
taxation du tabac, c'est une mesure qui est excessivement efficace pour réduire
la consommation. Par contre, en ce moment, on n'a pas le désir de réduire la
consommation de cigarettes électroniques. C'est un sujet, en soi, qui doit être
abordé. On veut, bien sûr, s'assurer de protéger les non-fumeurs et puis les
jeunes de ces saveurs attrayantes là, par exemple, ou d'un certain marketing,
puis la révision de la loi doit inclure la cigarette électronique, mais je suis
tout à fait confiante que la ministre va le faire et va bien le faire, là.
C'est un sujet qui est important puis qui est nouveau.
Par contre, la taxation du tabac, c'est
très important, c'est une des mesures qui a été la plus efficace au Québec et
partout dans le monde, puis on a encore les cigarettes les moins chères de tout
le Canada et de loin, loin derrière l'Ontario, loin derrière la moyenne canadienne.
Donc, c'est certainement une mesure qui a été sous-utilisée, là, dans les
dernières années au Québec, puis on espère un certain rattrapage. En fait,
toute hausse de taxe, en ce moment, là, c'est à peine du rattrapage parce qu'on
est tellement loin de la moyenne canadienne qu'on n'est pas encore en véritablement
hausse, mais c'est certain que c'est quelque chose qu'il va falloir aborder,
là, dans les prochaines années.
M. Vendeville (Geoffrey) : Et
puis vous parlez pour toute la coalition?
M. Khadir
: Écoutez,
c'est parce que c'est des mesures qui ne peuvent pas être prises à la pièce.
S'il faut parler de la taxe sur les cigarettes électroniques, il faut parler
aussi de leur accessibilité, si ça doit être accompagné d'une consultation
médicale pour ne pas que ça soit une introduction aux fumées, plutôt pour
mettre fin à l'usage du tabac.
Donc, je pense que ça fait partie d'une
panoplie, et c'est à dessein que la coalition tente aujourd'hui de dire :
Au-delà de ces mesures individuelles, puis on peut en nommer 10 autres, c'est
surtout une volonté d'arriver à un objectif. Parce qu'on peut installer les
mesures, si ce n'est pas rattaché à un objectif, bien, en cours de route, bien,
on ne sait pas si ça a fait l'affaire ou pas parce que, dans le fond, c'est
juste des mesures. Il faut un objectif : réduire de moitié la
consommation, atteindre une baisse de 10 %... en fait, 10 points de
pourcentage en 10 ans.
Mme Champagne (Mélanie) : Mais
je pense qu'il faut préciser aussi que, quand on taxe le tabac, pourquoi on
taxe le tabac de façon aussi importante, pas assez importante selon nous. Bien,
c'est parce que c'est pour compenser pour les coûts de santé, les soins de
santé qui sont encourus, alors que cette même logique là ne s'applique pas,
pour le moment, à la cigarette électronique. On n'a pas de données là-dessus.
Mme Plante (Caroline)
:
If I may in English. What has changed since 2005 or 2012? What's new in the
world of tobacco?
Mme Bois
(Geneviève) : Lots of things are new, and that's why actually we are
stagnating, as far as the smoking rate in Québec. Since the mid-2000… so around
2005, we started seeing a lot a flavoured products arriving on the market. It
was all over Canada but in Québec in particular. We've seen that that's really
what is getting our youth smoking now. We were actually seen the smoking rates
go down as far as cigarettes, which is a traditional way that we're looking at
smoking rates, but now we do have to look at usage of all tobacco products
because there is a significant difference.
If you look at youth,
about 12% are using cigarettes, but about 20% are using all tobacco products in
general, and that means they're using flavoured small cigars, or smokeless
tobacco, or shisha, but there are definitely not just using the cigarettes, and
the flavors are really the beginning of smoking. It's really smoking with
training wheels. You start with a small cigar that's cherry flavored or caffe
latte and then you eventually graduate to adult cigarettes. Menthol is also a
very important flavor, it's the most popular flavor amongst youth. That's what a
third of young people in Québec have smoked in the past month. They have chosen
menthol because it sooths the throat. It makes it seem better, it makes it seem
nicer to smoke. So flavored tobacco is definitely a very big part of why youth
smoking rates have not bulged.
So, as cigarettes were
going down, small cigars went up. So that's one big tactic that happened
recently. But also the packaging has been very crucial. So we've seen packages
get smaller, get prettier, get shinier, and that's why also we're pushing for
plain packaging, because right now there are many billboards. Every single
package is now a little promotional message for youth, something that they can
share together.
Mme Plante (Caroline)
: Where do e-cigarettes come in?
Mme Bois
(Geneviève) : E-cigarettes are quite
different, because they can be used in a variative way. Right now, one of the
concerns is that we're seeing a lot of promotion that resembles what we've used
to see, we were used to see before, as far as tobacco. So there definitely
needs to be some restrictions put on the type of advertising or the type of
product and who had sold you. It's not OK that it's accessible to minors
legally, right now.
But it's a product that
can be used in many ways. We don't want to impact the access for adult smokers
that would like to use electronics cigarettes in a way of reducing and quitting
tobacco eventually. What we do need to keep... to be mindful of youth and
their... and non-smokers.
So what we are suggesting
at the coalition is that we actually bring electronic cigarettes within the law
on tobacco, which will do three things mainly : it would ban sales to
minors, it would ban the use and places where tobacco is currently not
permitted, and finally with limited advertising, but that would not touch
access for adult smokers whatsoever.
Mme Plante (Caroline)
: Mr. Khadir, the Government's inaction on this issue, what does it say about prevention in this
province?
M. Khadir
: Well, unfortunately, as it
was said by my colleague, Mme Lamarre, prevention is the forgotten...
prevention is, unfortunately, not very well supported in Québec. We know that what we spend in
preventive measures is allowing us to make a lot of economies downward. But
unfortunately the way our system has been managed so far is that we spend very
little on prevention. And, imagine, we understand very well that in tobacco...
for the use of tobacco, if we can just curb down only a percentage of smoking
rate in the long-term, 10 years, 15 years, 20 years from now,
we'll be saving billions of dollars. But, to our discontent, the reality is: our
governments don't put enough on
prevention.
Mme Plante (Caroline)
: Mrs. Lamarre, is this really your intention to block Bill 10… use
filibuster on Bill 10? What are your intentions?
Mme Lamarre : Oh! I will try to make my best for this bill, but, for now, we
have... we asked our minister to give us the full picture of this reform. For
now, we only have one piece of the puzzle and we can not support this because
we don't have anything that support the first article of this project, which is
increasing access, which is the major... what the population needs and asks
for. And 64 groups came and asked for this increase in accessibility, and
we don't have anything about that, and the project says that it will support
access.
Mme Plante (Caroline)
: Mr. Barrette says he has amendments already, you know, written up.
Are you going wait to see what those amendments are?
Mme Lamarre : I'm sorry.
Mme Plante (Caroline)
: Mr. Barrette has amendments to present. Are you going to wait to
see what the amendments are before choosing to block the bill?
Mme Lamarre : Je m'excuse.
M. Khadir
: M. Barrette a des amendements.
Mme Plante (Caroline)
:Il y a des amendements. Il y a des amendements qui sont écrits. Are you going to wait to see those
amendments before...
Mme Lamarre : Yes. Until now... Sorry, that was the «amendment» I didn't... For
now, the amendments that he said he would agree are mostly geographic, you
know. He will probably suggest a second CISSS in Montérégie, for example, instead of only one. He will just cut somewhere
differently or merge certain regions. So, until now, we don't have a
confirmation that he will agree to other amendments. We will ask him if he
opens it, but, as I told, we need to have a complete perspective of what is in
it because we have... we will suffer from this first part of... of the first
step of the project. And, if we don't have the confirmation and all the plan,
it's very difficult to support this kind of bill.
Mme Plante (Caroline)
: So will you block it?
Mme Lamarre : For now, we will collaborate. I will collaborate as long as I can
and I hope he will understand and he will listen, because he has to listen. He
said that we don't want to listen; he has to listen. He is the one who started
this. I asked to all the groups, almost all groups if... Have you been
consulted? He never consulted nobody. So he has to listen and to make changes,
not only cosmetic changes, but he has to really understand that this bill will
have a lot of impact and will paralyze many, many, many sectors of our health
care system, and that is not what we need. We need access for now.
M. Khadir
: If I may add something, Mr.
Barrette pretends that the Opposition is blocking his bill.
Mme Plante (Caroline)
: That's what he's saying.
M. Khadir
: Yes. But let me say
something. If this bill is passed as Mr. Barrette intends to do, the system
will be blocked for many years. The last change in structure that we introduced
in Québec, that was less
substantial than this one, brought our system to a stalemate for years. We are
just getting out of the problems we had to endure in the public system, in the
health system, because of the last one. So he will be blocking our health
system for many years if something is not done to stop his bill.
Mme Lamarre : And I think he underestimates the impact of this project, on the
way people will have to work on different things that are not patient care.
M. Khadir
: Merci
beaucoup de votre attention.
(Fin à 9 h 36)