(Quinze heures trente-cinq minutes)
Mme Vallée
:
Alors, bon après-midi.Évidemment, nous sommes
ici, cet après-midi, pour… dans le dossier
concernant la collision mortelle qui impliquait un policier, au cours de
laquelle un enfant de cinq ans a trouvé la mort et dossier pour lequel, à la
lumière du rapport d'enquête indépendante, le Directeur des poursuites
criminelles et pénales a décidé de ne pas porter d'accusations.
Je tiens à
réaffirmer devant vous aujourd'hui qu'en aucun temps je n'ai été
impliquée dans le processus d'évaluation du dossier. De plus, en aucun temps,
je n'ai été informée du contenu du dossier d'enquête indépendante, incluant sa
trame factuelle, ni de l'enquête qui a été menée par le policier impliqué, et
tout ça afin de préserver l'indépendance du DPCP et de ses procureurs.
Cependant, comme ministre, comme citoyenne,
comme mère de famille, je suis très sensible à la situation qui est vécue par
les victimes. Je suis donc intervenue de façon
responsable au cours des derniers jours, dans les limites des pouvoirs
qui me sont conférés, sans substituer mon
opinion à celle du DPCP et sans l'influencer.
Ainsi, la semaine dernière, je me suis
assurée qu'un procureur rencontre la famille de la victime pour leur expliquer
de… la décision de ne pas entreprendre de poursuites
criminelles et pour répondre à leurs questions,
comme ils étaient en droit de s'y attendre. De plus, je me suis assurée que le
processus de prise de décision ne reposait pas sur une seule personne pour
garantir la rigueur du processus et que toutes les personnes qui y
participaient aient toute la compétence et toute l'expérience nécessaires. J'ai
également tenu à m'assurer que les procureurs qui ont participé à la prise de
décision étaient à l'abri de toute influence externe, policière ou politique.
Enfin, j'ai demandé au DPCP, par la voix de l'un de ses porte-parole, d'expliquer, vendredi dernier en point de presse,
les motifs pour lesquels il a décidé de ne pas entreprendre les poursuites. Je
dois souligner que cet exercice n'a jamais été réalisé auparavant au Québec.
À la lumière des explications fournies, la
décision prise par le DPCP repose sur son appréciation des éléments du dossier
d'enquête et de sa capacité de prouver tous les éléments constitutifs de
l'infraction. Rappelons que, selon les propos du DPCP, l'analyse des procureurs
est objective et critique, et que le procureur doit être moralement convaincu
qu'une infraction a été commise, que le prévenu l'a commise et être
raisonnablement convaincu de pouvoir établir la culpabilité du prévenu.
Toutefois, à la lumière des faits nouveaux
et des déclarations des témoins des derniers jours, la Directrice des
poursuites criminelles et pénales m'a informée ce matin de son intention de
demander un complément d'enquête. Considérant que la preuve devra être évaluée
de nouveau et afin de préserver la crédibilité et l'indépendance du DPCP, j'ai
demandé à la directrice de confier à des procureurs indépendants l'évaluation
du dossier.
Nous tenons à préserver la confiance du
public en cette importante institution, et c'est
pourquoi nous en sommes venus à la conclusion, d'un commun accord, qu'il serait
opportun de soumettre le dossier à des procureurs indépendants, un groupe
composé notamment d'un juge à la retraite. Ce comité de procureurs révisera
donc la preuve au dossier et formulera ses recommandations quant à la prise de
poursuites criminelles à la directrice. Et, dans un souci de transparence, ces
recommandations seront rendues publiques.
Je tiens à réitérer toute ma confiance en
l'institution indépendante qu'est le DPCP ainsi que ses quelque
500 procureurs, qui effectuent un travail
colossal en conservant toujours les victimes au coeur de leurs préoccupations.
En terminant, le Directeur des poursuites
criminelles et pénales a été créé en 2007 afin qu'il agisse de façon
indépendante dans l'évaluation des poursuites criminelles et pénales.
L'expérience des dernières années a démontré qu'on réclame fréquemment de la Procureur
général qu'elle intervienne dans les dossiers du Directeur des poursuites
criminelles et pénales. Il m'apparaît aujourd'hui nécessaire d'identifier un processus
décisionnel qui permettra d'assurer le maintien et la confiance du public dans
les décisions du DPCP tout en préservant son indépendance. C'est pourquoi j'ai
demandé à l'équipe du ministère de la Justice de me suggérer des modifications
législatives afin de préciser dans quelles circonstances le Procureur général
doit intervenir.
Vous comprendrez qu'il est de ma responsabilité
de respecter l'indépendance institutionnelle du DPCP, mais en parallèle de
cette responsabilité existe celle d'assurer le maintien de la confiance de la
population envers notre système judiciaire. C'est donc dans le souci de
maintenir cet équilibre que je suis intervenue aujourd'hui.
Pour la suite, compte tenu des travaux en
cours, vous comprendrez que je ne commenterai pas davantage le dossier. Je vous
prie de vous référer à la présente déclaration et au communiqué qui vous a été
remis. Je vous rappelle également que les recommandations des procureurs
externes seront rendues publiques. Je vous remercie de votre attention.
(Fin à 15 h 40)