(Quatorze heures vingt minutes)
M.
Caire
: D'abord,
dire que ce projet de loi là, même s'il y a là-dedans des objectifs qui sont
intéressants, c'est-à-dire souhaiter une meilleure prise en charge par les
médecins omnipraticiens, c'est, de notre avis, un projet de loi qui va beaucoup,
beaucoup, beaucoup trop loin. De fait, c'est une... ce n'est ni plus ni moins
qu'une mise en tutelle, pour nous, là, des médecins omnipraticiens par le
ministre de la Santé, ce qui n'est absolument pas, mais absolument pas
nécessaire, même considérant l'objectif, compte tenu des circonstances.
Et là où nous sommes totalement en
désaccord avec le ministre de la Santé, c'est quand il dit que tous les autres
moyens ont été essayés et qu'ils ont échoué. C'est totalement faux. Et
là-dessus je pense que le ministre de la Santé a perdu une extraordinaire
occasion lorsqu'il a renégocié la convention collective avec les médecins
omnipraticiens. Il avait l'occasion là de discuter de la prise en charge, mais
il n'était obsédé que par le report de la dette envers les médecins omnipraticiens,
et il a totalement évacué cette question-là qui pourtant était importante et
qui aurait très bien pu être adressée à ce moment-là avec la Fédération des
médecins omnipraticiens.
Donc, on utilise un canon pour tuer une
mouche, là, ni plus ni moins, et, de ce côté-là, je pense que ce projet de loi
là a beaucoup de chemin à faire avant d'être acceptable.
De l'autre côté, on s'adresse, évidemment, à
la question de la procréation médicalement assistée, et le projet de loi amène
des balises qui sont intéressantes, qui sont nécessaires. Par contre, ce que je
trouve déplorable, c'est qu'on sort du panier de services un traitement qui
pourtant est reconnu pour son efficacité — et là je parle de la
fécondation in vitro — parce qu'on continue de financer
l'insémination artificielle, mais la fécondation in vitro est totalement
sortie du panier de services. Je pense qu'il aurait été souhaitable qu'on
puisse permettre une ou deux tentatives de fécondation in vitro.
Écoutez, si on est d'accord avec le fait que
ces traitements-là doivent être réservés aux personnes qui présentent une
condition médicale, donc que la santé reproductrice est compromise et qu'il est
normal, à ce moment-là, que le système de santé les accompagne, avec des
limites, avec des paramètres très stricts, de refuser le meilleur traitement
aux patients, je pense que c'est difficilement acceptable dans les
circonstances. Et j'essaie d'imaginer, là, si on faisait ça pour d'autres types
de maladies ou de conditions médicales, où on refusait, comme ça, aux patients
le meilleur traitement, ne serait-ce que quelques tentatives, comme je l'ai
dit. Parce qu'effectivement, médicalement, on peut penser qu'après deux
tentatives les chances de succès sont assez limitées, voire inexistantes, et
donc, là, il ne faut pas non plus abuser du système, puis on est bien d'accord
avec ça, mais je pense que, là, le ministre fait une erreur en ne permettant
pas qu'il y ait au moins une ou deux tentatives de fécondation in vitro.
Et là on amène aussi toutes sortes de
paramètres, là, comme la période de relations sexuelles. Je m'excuse, je vois
difficilement, là… puis il y a plein de blagues qui me viennent en tête, là. Je
ne sais pas s'il va falloir se mettre un compteur au moment de… mais bon. Bref,
je vois difficilement comment on peut, j'oserais dire s'introduire dans le
traitement ou dans la relation entre le couple infertile et son médecin
traitant. Je pense qu'il faut quand même, là, faire confiance aux
professionnels de la santé, là, pour conduire et administrer les traitements…
le plus pertinent et le meilleur traitement possible.
Donc, il y a des choses là-dedans qui
m'apparaissent un peu friser le ridicule, là, même si je comprends l'objectif,
puis même si je suis d'accord, là, qu'il faut mettre des barèmes, puis même si
je suis d'accord qu'on a abusé du système, puis ça a été un bar ouvert, puis il
faut resserrer les critères. Je pense que, là, il n'y a pas juste une volonté
de resserrer les critères, là, puis d'avoir des paramètres plus serrés, je pense
qu'il y a une volonté aussi, là, d'économiser de l'argent. Et le contexte s'y
prête bien parce que, bon, ça a soulevé un tollé, on le sait, puis maintenant
de retirer des éléments du panier de services qui m'apparaissent, moi, être
pertinents, compte tenu de l'état de santé des gens de qui on parle, je pense
que c'est un peu malheureux de la part du ministre.
Là-dessus, je vais attendre vos questions.
Journaliste
: M. Caire,
est-ce que vous avez l'impression qu'on fait de la politique d'austérité sur le
dos des couples infertiles?
M.
Caire
: Bien
oui. Oui, parce que, comme je vous dis, imaginez-vous qu'on en arrive à la
conclusion que certains traitements de chimiothérapie sont trop onéreux et
donc, à partir de là, on va en permettre certains autres parce qu'ils coûtent
moins cher, ce serait le tollé. Ce serait le tollé. Je veux dire, les gens
diraient : Voyons, ça n'a pas de... Et, comme je vous dis, dans la mesure
où on dit : Les gens qui ont accès à la procréation médicalement assistée
sont les seuls gens qui ont une condition médicale, ça, on est d'accord avec
ça. Je veux dire, si vous n'êtes pas malade, le système de santé n'a pas à vous
soigner ou n'a pas à vous accompagner dans une démarche qui n'est pas
conditionnée par le fait que vous êtes malade. Mais, du moment où vous êtes
malades, on doit vous permettre d'avoir accès aux meilleurs traitements. Et la
fécondation in vitro, c'est le meilleur traitement. Donc, comme je dis, on
aurait dû limiter, mais peut-être à une, deux tentatives.
Mme Dufresne (Julie)
:
Craignez-vous qu'il y ait une ruée dans les centres où on procède à la
procréation assistée parce que les gens vont peut-être vouloir se précipiter
avant que le projet de loi entre en vigueur?
M.
Caire
: …pour
répondre au projet de loi qui dit que, si vous avez été en cours en traitement
avant telle date, le projet de loi ne s'applique pas. Écoutez, peut-être, je ne
sais pas. Effectivement, ce n'est pas impossible que ce soit le cas. Maintenant,
là, je ne peux pas, là... on est du domaine de la prédiction, puis je ne
m'aventurerai pas là-dessus.
Je voulais vous dire aussi — j'ai
oublié un élément essentiel — nous allons exiger de la part du ministre
qu'il scinde le projet de loi en deux. Parce qu'il m'apparaît que parler de
procréation médicalement assistée et de la prise en charge des médecins de
famille dans le même projet de loi, ça m'apparaît totalement irrespectueux pour
les deux problèmes, qui sont deux problèmes réels, concrets, mais qu'on doit
traiter de façon totalement distincte parce que c'est deux problèmes
complètement distincts.
Donc, là-dessus, je suis prêt à reprendre
vos questions.
Mme Plante (Caroline)
: Mr. Caire, do you
applause Mr. Barrette for trying to change the system and improve access
to family doctors, for example?
M.
Caire
:First of all… no. First of all, I'm not sure the result of
that bill will be to increase the accessibility of the system. I'm not sure
about that. And I'm sure he don't going on the right way. I think he missed a
great occasion to have discussions with the physicians this summer. I think it
would be… he'd rather to talk with doctors than to adopt that bill.
Mme Plante (Caroline)
: In French, you said that… «la mise en tutelle», so you think that
doctors are being put under... tutorship?
Une voix
: Trusteeship.
Mme Plante (Caroline)
: Trusteeship?
M.
Caire
: Yes. I think doctors will be put under — how do you said that? — …
Une voix
: Trusteeship.
M.
Caire
: …trusteeship, yes, yes, obviously. Yes, because…
Mme Plante (Caroline)
: Even though the Minister said that he's met with doctors and they
seemed to be agreeing with him?
M.
Caire
: Well, I don't think he really tried to negotiate with physicians. I
don't try… This summer, he had the occasion to have discussions with physicians
about that problem. But he won't… He don't address that problem… he didn't
address that problem, sorry, and why now say it didn't work? I mean, you don't
try, you don't know if it didn't work. Try first and then you will see.
Mme Plante (Caroline)
: So, is this good for Quebeckers or bad for Quebecker?
M.
Caire
: My first opinion is it will be bad because I don't think physicians
will be really pleased about that bill. I don't think they will be really enjoy
to going at work next Monday. And I think this bill is disrespectful about
physicians and what they did. And, you know, that level of professional, you must have a certain level of
confidence about that, about… They are professionals,
they will do their job as professionals, they are concerned about what happens,
what they have to do for their patients. And I don't think you have to rule
about everything, you know, the number of patients, the hours you have to
accord to the patient. You know, anything, you rule about anything, anything.
Mme Plante (Caroline)
:
But, clearly, they're not doing enough. If the statistics are right and Québec
doctors are the doctors in Canada who see the less patients, the fewer
patients, like 14 patients a day as compared to 30 a day, which is the average.
M.
Caire
:
Yes, it's absolutely right.
Mme Plante (Caroline)
:
So doctors aren't doing enough.
M.
Caire
:
But that bill not considering all the reasons why it is. I mean, Quebecker physicians
do more particular acts than other physicians elsewhere in Canada. It's a
reality. So… And it's a reality we didn't… we don't… that bill don't address.
So, I think it will be better to talk with physicians to address that problem
and to try to find with them a real solution to increase the accessibility. And
then, if it doesn't work, OK, we will adopt the bill. But try first, try first.
M. Harrold (Max) :
What other acts? Give me some examples of what other acts that they perform,
please. You said…
M.
Caire
:
You know, particular…
M. Harrold (Max) :
…medical acts?
M.
Caire
:
The number of hours they spend in the emergency room in every… les soins palliatifs,
excusez-moi…
Journaliste :
Palliative care.
M.
Caire
:
…palliative care, and they have to provide… I think
it's 12 hours per week for particular act, which is particular to
Quebecker physicians.
Mme Plante (Caroline)
: But why are you defending physicians when, really, the problem is
about, you know, Quebeckers having access to a doctor?
M.
Caire
: I don't defending physicians. I just don't be… agree with the way
he tries to solve the problem. And I think it's an extreme solution, and we
don't reach that point so far. So why don't try to have a discussion with the federation
first, and then we will see, and then we will see if we have to adapt that kind of bill.
La Modératrice
:
Est-ce qu'il y a d'autres questions? Merci beaucoup à tous.
(Fin à 14 h 31)