(Douze heures trente-trois minutes)
Mme
Hivon
:
Bonjour, tout le monde. Alors, merci d'être ici.
À la suite des questions que j'ai posées
ce matin au ministre de l'Enseignement supérieur, M. Bolduc, je tenais, donc, à
vous rencontrer pour expliciter un peu à quel point ce qui se passe en ce
moment est une véritable gifle à l'égard des étudiants.
D'abord, on a appris mardi, dans l'énoncé
budgétaire, qu'il y avait une coupe de 30 millions de dollars qui se
faisait sur le dos des étudiants. C'est par l'abolition de la prime au travail.
Donc, la prime au travail, elle est supprimée uniquement, spécifiquement, pour
les étudiants qui sont à temps plein, et c'est une mesure, donc, qui va priver
les étudiants de près de 30 millions de dollars. Quand on sait à quel
point le revenu des étudiants, le fait qu'ils travaillent n'est généralement
pas un luxe, mais souvent une manière de survivre, comme étudiant, de joindre
les deux bouts, donc de les priver de cette prime qui était une mesure de
soutien supplémentaire, c'est absolument inacceptable. D'autant plus qu'on se
souvient très bien que le gouvernement libéral nous a habitués à faire des
étudiants une cible de choix, mais, bien franchement, on ne pouvait pas
s'imaginer qu'après le printemps 2012 ils reviennent avec une mesure qui les
cible aussi directement.
Donc, aujourd'hui, on tentait d'avoir des
réponses de comment le ministre de l'Enseignement supérieur, après avoir laissé
passer des coupes records dans le réseau des cégeps et des universités, aujourd'hui,
n'a pas réussi à freiner son collègue des Finances pour cette coupe
additionnelle qui concerne les étudiants. Mais ce qui est particulièrement
odieux et où on ajoute l'insulte à l'injure, c'est que ce matin, en plus, on
apprend dans Le Soleil que le conseil d'administration de l'Université
Laval a décidé de bonifier la rémunération des hauts dirigeants de l'université,
c'est-à-dire leur rémunération d'après mandat. Et, en plus, de connaître tout
le contexte des coupes qui, en ce moment, sont de l'ordre de 200 millions
pour le réseau des universités, pour l'Université Laval en soi, c'est au moins
40 millions de coupes, ça apparaît comme quelque chose d'absolument,
spectaculairement, mal fondé.
Et ce qu'on a demandé ce matin au ministre
de l'Enseignement supérieur, c'est : Avait-il été informé de cette
décision de l'Université Laval, quand on sait que, lorsqu'on était au gouvernement,
on a décidé, justement, dans la foulée de toutes ces primes, bonis,
rémunérations excessives que l'on voyait, dans différentes histoires qui se
succédaient, être attribués notamment aux recteurs des universités, on avait décidé
de freiner la chose en édictant une nouvelle règle? Donc, c'est la règle 5.10
qui dit qu'avant d'adopter ou modifier une politique, un règlement ou une disposition
particulière concernant la rémunération et les conditions d'un ou des membres
de la haute direction des universités, l'établissement doit soumettre le projet
pour approbation au ministre.
Or, le ministre nous a avoué en Chambre que
c'est ce matin, en lisant le journal, qu'il a appris ces modifications de
conditions de rémunération des hauts dirigeants de l'université. Donc, on est
face à une situation où, passez-moi l'expression, le ministre s'en est
fait passer une et toute une, particulièrement dans le contexte d'austérité
qu'on connaît dans les universités, et particulièrement cette semaine, où on
coupe 30 millions sur le dos des étudiants.
Donc, ce qu'on demande clairement au
ministre Bolduc aujourd'hui, c'est de rappeler l'université à l'ordre, de s'assurer
que cette décision ne pourra pas aller de l'avant, d'autant plus qu'il n'a même
pas été informé, donc que cela s'est fait en contravention de ce qui est prévu
à la règle qui découle, donc, de la loi sur les universités. Merci. Je peux
maintenant répondre à vos questions.
M. Boivin (Simon)
: Est-ce
qu'il a le pouvoir, le ministre, justement, de demander que la décision soit
renversée, compte tenu de l'autonomie des universités?
Mme
Hivon
:
C'est clair que les universités ont une autonomie, mais justement, cette
autonomie-là n'est pas sans limite aucune, et, pour qu'elles reçoivent les
subventions qui sont les leurs, il y a certaines règles. Et la règle 5.10 a été
inscrite comme une règle supplémentaire, donc un devoir d'information et
d'autorisation du ministre de l'Enseignement supérieur. Donc, non seulement il
n'y a pas eu information, comme on l'a constaté par les réponses du ministre,
mais, bien sûr, il n'y a pas eu autorisation, ce qui veut dire, bien sûr, que
ça permet au ministre d'agir pour ramener l'université dans le droit chemin.
M. Boivin (Simon)
:
Quelles peuvent être les conséquences pour l'université, advenant qu'elle a
effectivement violé cette règle-là?
Mme
Hivon
: Je
n'ai pas passé, je dois vous dire, à travers toutes les mesures correctrices
qui pouvaient être faites, mais, assurément, il y a des sanctions qui peuvent
être mises de l'avant. Ça peut aller jusqu'à la diminution de la subvention qui
est octroyée quand les règles et les règlements prévus ne sont pas suivis, donc,
par l'université. Donc, clairement, si on est en contravention de cette
règle-là, ce type de sanction là pourrait être mis de l'avant. On comprend que
c'est du droit nouveau. C'est une règle qui est en vigueur depuis peut-être un
an, un an et demi, là, je n'ai pas la date, je pourrai vérifier.
Et donc, à notre connaissance, donc, c'est
une des premières fois, en tout cas, où c'est porté à l'attention du public.
Donc, évidemment, il faudra voir comment le ministre va se comporter face à
cette situation-là qui est en contravention de la règle.
M. Boivin (Simon)
:
Comment vous qualifieriez le comportement, justement, du conseil d'administration
qui a autorisé ça dans le contexte actuel?
Mme
Hivon
:
Bien, c'est une décision qui est excessivement regrettable. Vous savez, c'est
important d'envoyer un signal clair quand on, évidemment, dénonce les coupes,
je pense, à raison, parce qu'en ce moment les universités font vraiment l'objet
de compressions majeures. On voit déjà des impacts, on voit des volontés de
diminuer le nombre de cours qui sont offerts dans certaines facultés, on voit
des possibilités de hausses de frais, de diminution d'accès aux laboratoires,
bon, toutes sortes de mesures qui sont en train de prendre place.
Or, alors qu'on est en train de vivre ça,
on voit que les hauts dirigeants décident que, bon, c'est le moment de bonifier
la rémunération pour les hauts dirigeants, c'est-à-dire le conseil de
l'université décide que c'est le moment. Donc, évidemment, je pense qu'il faut
avoir un petit peu de sensibilité par rapport au contexte, et le gouvernement
doit, lui, avoir cette vigilance.
C'est une décision, cette semaine, qui ne
tient pas la route, d'aller couper 30 millions sur le dos des étudiants. C'est
une mesure de soutien aux étudiants. Souvent, ça touche des jeunes qui font un
retour aux études, veulent se réintégrer dans un parcours académique,
universitaire, donc c'est un supplément qu'on leur donne, alors qu'ils travaillent,
que déjà c'est difficile pour eux de joindre les deux bouts. Donc, c'est
vraiment une mesure qui se doit d'être décriée parce que…
Quelles vont être les conséquences de
cette mesure-là? Est-ce que ça veut dire que les étudiants vont travailler
plus, au prix peut-être de sacrifier leur réussite scolaire, au prix peut-être,
donc, de décrocher? Parce qu'on sait que, surtout pour les étudiants de
première génération qui fréquentent l'université, le risque de décrochage est
très important. Donc, quels vont être les impacts de cette coupe de
30 millions sur le dos des étudiants?
Et pendant qu'on reçoit ça en pleine face,
que les étudiants reçoivent ça en pleine face, qu'il y a ces compressions dans
les cégeps, les universités, qui déjà ont des répercussions significatives, on
voit que la direction d'une université est déconnectée de cette réalité-là.
Donc, je pense que c'est quelque chose que le gouvernement ne peut absolument
pas accepter. Donc, on s'attend à des gestes et des explications de la part du
ministre Bolduc.
M. Dutrisac (Robert)
:
Est-ce qu'on sait combien de personnes ça touche et quelles sommes sont en
cause?
Mme
Hivon
: Ça
touche… vous voulez dire le 30 millions? Bien, en fait, c'est
30 millions…
M. Dutrisac (Robert)
:
Non, pas le 30 millions, l'histoire de la majoration, là, des salaires
des…
Mme
Hivon
:
Bien, on n'a pas tous les détails dans l'article de ce matin. Ce qu'on
comprend, c'est qu'une partie, du moins, de cette rémunération-là, c'est pour
des professeurs qui ont occupé, donc, des hautes fonctions mais qui retournent
dans leur… donc, dans leur rôle de professeur et qui, donc, voient cette
majoration d'après mandat bonifiée. Donc, c'est quelque chose qui est
difficilement explicable.
Je ne suis pas en mesure de vous dire, parce
que, compte tenu de la brièveté du temps avant la période des questions, on n'a
pas eu le temps de faire les vérifications auprès de l'université. Je ne sais
pas quel genre de collaboration on aurait à cet égard-là aujourd'hui, mais
soyez assurés qu'on va tout faire pour avoir ces explications-là.
Mme Montgomery
(Angelica)
: So, Mrs. Hivon, why would
this… why does it look so bad to see Laval University increasing their salary
after their mandate?
Mme
Hivon
: Well, it looks really, really bad because we know we've been… of
course, we know and we've been informed for a few weeks now that the amount of
cuts that is required from the CEGEPs and the universities is… for the
universities only, close to $200 million. Only for Laval University, it's
$40 million of cuts that is requested right now. Of course, already, those
cuts are having prejudicial effects on the quality of teaching, on different
aspects of student's life, access to laboratories, for example, choices of
courses, of classes, and we see this decision.
But it's even more
outrageous because, on Tuesday, we learned, in the economical minibudget, that
the Government had decided to cut the «prime au travail» specifically for the
full-time students. So this means that the Government will retrieve from
students an amount of $30 million that was awarded to them to especially encourage
them to follow their cursus, to pursue their studies, and, when we know how difficult
it maybe for students, especially first generation students, who access
university, to keep going, not to surrender, «décrocher», surrender must be…
Une voix
: Drop out.
Mme
Hivon
: Drop out, yes, from their studies, the question is : What will
they do now. Will they work more? Will they put at risk their diploma? What
will be the impact of that? And, of course, we haven't heard anything about the
impact. So, to do this, to learn about this, this week, among the cuts for the
students, for the universities, for the CEGEPs, it's just not understandable.
Mme Montgomery
(Angelica)
: Mr. Bolduc says he has no
control over…
Mme
Hivon
: That's not true. It's true that universities have a margin of
maneuvers but there are rules that govern them, and, when we were there, we…
because you know of the many stories we heard, for example, at Concordia in
past years, about the very high remuneration of the «recteurs», of the Head of
the university, we decided to do something, and so there is a new rule, 5.10,
which is there to say that whenever there is a change in the conditions of
remuneration of the high administration of the university, the Minister has to
be informed and has to accept the change. He has to authorize it.
So what we learned this
morning from the Minister is that, of course, he didn't authorize it because he
wasn't informed. So what we are asking him is really, especially because the
times are so difficult for post secondary education and for students, to tell
us how, first, he can justify such a cut of $30 million for students, but furthermore, how can he justify this breach of
compliance with the regulations form the Université Laval that we learned this
morning.
Mme Montgomery
(Angelica)
: So you say that Laval
University is breaking the law.
Mme
Hivon
: This is what seems to be the case because there is no restriction
as to the application of the law. The remuneration is, of course, for what
you're doing now, it's for also post-mandate remuneration. It's all global. We
don't see anything in the rule that would provide for an exception.
M. Harrold (Max) : Mme Hivon, I wanted to… we're taking this at the office. I wanted
to ask you a little bit about the Polytechnique event. It seems like a very
emotional time right there.
Mme
Hivon
: Yes.
M. Harrold (Max) : Tell me a little bit about that and how important was it to do that
in the House today.
Mme
Hivon
: I think it was very important to commemorate, all the National
Assembly together, this tragedy that took place 25 years ago. It was, of
course, especially emotional because we wanted the families to be able to be
there. We wanted to show them that, 25 years later, all the elected members of
the National Assembly still feel a great deal of pain, of compassion towards
what happened, but furthermore, that we have a duty to remember what happened
and to try to make a change, a positive change, to still keep up the work, to
really make sure that men and women can be considered on an equal foot, on an
equal basis in the society and that we will try very hard to improve this
status of women in the society.
M. Harrold (Max) : So we know that the Government is waiting for the Supreme Court
decision in terms of the gun registry. What do you think the Liberal Government
could do more perhaps, that it's not doing now, in the future to… in this
regard?
Mme
Hivon
: There is a lot going on at the federal level. There is the whole
process about the gun registry, of course. Québec cannot release the pressure
on the federal Government until, you know, the decision is not given, and
until, you know, the change is not formal. There's always hope, there's always
hope to have a change of mind from the Government, federal Government.
What is really also difficult
is that, this week, the federal Government, which has been tabling a bill to
give more liberal access to some kinds of guns is debating this bill right now
at the House of Commons. So this is another bill that doesn't make any sense in
order to protect victims, to make sure that we live that we live in a security
environment. So we also ask the Québec Government to really keep its stand on
creating, if the federal Government still doesn't
want to know anything about changing its decision, to have our own registry.
And we want to make sure that this is something that will be done by the Québec
Government.
M. Harrold (Max) :
Do you that will that will happen, given the current budget crunch? That's a
lot of money.
Mme
Hivon
: I hope that… You know, at some point, you are able to focus on
things that are above everything. And I think security and I think also to
remember… to show that this didn't happen in vain, that a positive change will
come out of it when we know how the families and… how this tragedy brought
people together to have this registry. It would really be an insult to put that
aside, so I'm confident that we will see this happening. Thank you.
(Fin à 12 h 50)