(Treize heures une minutes)
M.
Caire
:
Alors, bonjour. Aujourd'hui, on voulait évidemment faire le bilan du voyage du premier
ministre en France, mais vous comprendrez que, compte tenu de la crise qui
sévit maintenant dans le réseau de la santé, je vais aussi commenter ces
événements-là.
D'abord, sur le voyage du premier ministre,
dire toute la déception de voir le premier ministre qui a choisi le tourisme
plutôt que le développement économique. On constate maintenant, avec les très
faibles résultats de sa mission, que le développement économique n'était pas
l'objet de cette mission-là. Il ne nécessitait certainement pas que six ministres,
que cette délégation royale là accompagne le premier ministre. Un voyage qui a
commencé par un incident diplomatique, il faut bien le dire, le premier
ministre, là… qui a été gênant pour l'ensemble de la population du Québec par
ses déclarations qui ont été reprises par les médias français, et qui se
termine en queue de poisson, là, avec un maigre 19 millions d'investissement,
peut-être une centaine d'emplois dans les ententes, dont certaines notamment
concernant l'université de Rimouski pour lesquelles les acteurs principaux ne
sont même pas au courant. Donc, un peu d'improvisation là aussi.
Mais vous comprendrez qu'aujourd'hui ce qui
capte l'attention, c'est la crise qui sévit au CHUM suite au comportement
totalement inacceptable, totalement déplacé du ministre de la Santé Gaétan
Barrette. D'abord, ce qu'on apprend, c'est que le ministre s'est livré à de
l'ingérence, de l'intimidation, du chantage sur la personne de Jacques Turgeon
pour obliger le maintien en poste du Dr Harris comme chef du département de
chirurgie. C'est un comportement totalement inacceptable dans une démocratie comme
la nôtre. Quand un ministre se permet de faire de l'ingérence, de la
microgestion, surtout un ministre qui vient de s'attribuer des pouvoirs
exceptionnels, des pouvoirs immenses, un pouvoir de vie ou de mort sur l'ensemble
des administrateurs du réseau, et qu'on voit qu'il s'en sert non pas pour le
bénéfice des patients, mais pour son bénéfice personnel et pour le bénéfice de
ses amis, l'empereur Barette nous a fait la démonstration qu'il se servait du
réseau de la santé et non pas qu'il servait le réseau de la santé.
Un ministre qui a un comportement
récidiviste comme celui-là, de notre avis, ne peut plus occuper les fonctions
de ministre de la Santé. C'est la raison pour laquelle nous demandons aujourd'hui
au premier ministre du Québec, Philippe Couillard, de démettre Gaétan Barrette
de ses fonctions de ministre de la Santé. J'attends vos questions.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Vous dites qu'il se servait du réseau de la santé. Avez-vous d'autres exemples
que la nomination de M. Harris?
M.
Caire
: Oui.
On sait, dans d'autres dossiers, que le ministre a fait preuve de la même
intimidation pour forcer des administrateurs à se taire. Malheureusement, parce
que ces administrateurs-là sont dans une situation extrêmement précaire, sans
mauvais jeu de mots, compte tenu du fait qu'ils sont à risque de ne pas voir
leur poste reconduit, vous comprendrez que je tairai les noms et les
organisations, mais nous savons pertinemment que d'autres administrateurs ont
été sommés de se taire, de cesser de parler publiquement sur des dossiers, je
dirais, litigieux, qui impliquent Gaétan Barrette ou des décisions de Gaétan
Barrette.
Et donc c'est la raison pour laquelle je parle
d'un ministre récidiviste et c'est la raison pour laquelle je parle d'un
ministre qui se sert du réseau de la santé, parce que la raison pour laquelle
il souhaitait la reconduction du Dr Harris dans ses fonctions, c'est
évidemment en fonction du lien d'amitié qui unit les deux personnes.
M. Bélair-Cirino (Marco) : Ce
n'est pas d'avoir un homme de confiance qui réalise les mandats qui lui sont
donnés par le ministre, qui optimise les façons de faire au CHUM?
M.
Caire
: Écoutez,
là, ce qu'on comprend, c'est que le Dr Harris était contesté de tous :
de ses pairs et de la direction du CHUM. Donc, le désir de le voir quitter
cette fonction-là était partagé par l'ensemble des partenaires. Je vois
difficilement comment quelqu'un qui fait une aussi belle unanimité contre lui
pourrait être celui qui serait à l'origine de l'augmentation de la performance.
Non, non, soyons sérieux, là, Gaétan Barrette s'est servi de son poste pour
aider un ami.
M. Bélair-Cirino (Marco) : Maintenant
qu'il y a la démission du président du C.A. qui s'est ajoutée à celle du
directeur général, il va peut-être y avoir des administrateurs qui vont
emboîter le pas cet après-midi. Qu'est-ce que le gouvernement du Québec doit
faire face à cette situation-là où les hauts dirigeants du CHUM sont... les
postes sont présentement vacants?
M.
Caire
: La
première chose à faire, le premier ministre du Québec doit se comporter comme
un premier ministre du Québec. Il doit mesurer l'ampleur de la crise, ce qu'il
a été incapable de faire ce matin, alors qu'il s'est quasiment porté à la
défense de Gaétan Barrette, hein? Puis ça nous rappelle de mauvais souvenirs,
quand on... il y a eu le «Bolducgate», où il a qualifié cette histoire-là de
petite tempête dans un verre d'eau. Encore aujourd'hui, il minimise une crise
majeure où on vient, ni plus ni moins, de couper la tête de la direction du
CHUM, le vaisseau amiral du réseau de la santé, et le premier ministre est
incapable de prendre la mesure de la situation.
Bien, aujourd'hui, là, il doit se
rattraper, il doit se conduire comme un chef d'État, comme quelqu'un qui est
inquiet de la situation et comprendre que Gaétan Barrette n'est plus l'homme de
la situation. Il doit le démettre de ses fonctions pour ensuite rebâtir ou
rétablir les ponts avec la direction du CHUM et espérer que les gens qui
quittent aujourd'hui, peut-être, changeront de décision.
M. Gagnon (Marc-André) : La
différence, par contre, avec le cas du Dr Bolduc, c'est que M. Couillard avait
refusé, dans les dernières semaines, de lui réitérer sa confiance. Or, là, ce
matin, on a entendu M. Couillard dire carrément qu'il avait encore confiance en
le Dr Barrette. Ça vous étonne?
M.
Caire
: C'est
inquiétant. C'est inquiétant parce que, écoutez, il y a plusieurs choses dans
ce que Gaétan Barrette a fait. Premièrement, il y a eu des demi-vérités, il y a
eu manipulation des faits. Hier, il acceptait la démission et il a omis de nous
donner les motifs de cette décision, alors qu'il les connaissait parfaitement. C'était
son ingérence, c'était son intimidation à l'endroit de M. Turgeon, aux dires de
celui-ci, qui poussait M. Turgeon à offrir sa démission. Il le savait, il ne
l'a pas mentionné, il n'a rien dit, il a tenté de minimiser.
Quand M. Turgeon a fait connaître les
vraies raisons de sa démission par voie de lettre, là, Gaétan Barrette a tenté
d'arranger les choses, fidèle à son habitude, en rétablissant les ponts. Ça n'a
pas fonctionné parce qu'il était allé beaucoup trop loin, beaucoup trop loin. Et
ça a même aggravé les choses parce qu'aujourd'hui non seulement le P.D.G. du
CHUM démissionne, mais le président du conseil du trésor démissionne, en plus,
en...
Une voix
: …
M.
Caire
: Pardon,
oui, de Sainte-Justine, en qualifiant l'attitude de Gaétan Barrette de
chantage. C'est grave, c'est des mots lourds de sens qui ont été utilisés à
l'endroit de Gaétan Barrette.
Et donc le premier ministre doit prendre
la mesure de ce qui a été dit aujourd'hui par ces gens-là et doit comprendre qu'aujourd'hui
c'est le CHUM qui est en crise, mais demain ce sera le réseau de la santé au
complet. Parce qu'aujourd'hui on a la chance d'avoir des individus qui ont la
capacité de se tenir debout devant le ministre de la Santé, d'amener sur la
place publique son comportement inacceptable, ce qu'il n'avait probablement pas
évalué lui-même — je parle de Gaétan Barrette — ce qu'il
n'avait probablement pas prévu. Mais demain est-ce que tous les administrateurs
du réseau de la santé auront la même capacité à faire face à Gaétan Barrette, à
la méthode Barrette?
M. Gagnon (Marc-André) : Le Dr
Barrette est vu comme un joueur étoile du gouvernement Couillard. Est-ce que
ces événements-là font en sorte que l'étoile du gouvernement, justement, de M.
Couillard vient de pâlir?
M.
Caire
: Elle
n'a pas pâli, elle s'est éteinte. Elle s'est éteinte. Moi, je ne considère pas
qu'un ministre qui, clairement, clairement, se fait prendre la main dans le sac
à faire de l'ingérence, de l'intimidation, du chantage… ce ne sont pas mes
mots, là, ce ne sont pas mes mots à moi. Comment cet individu-là peut-il rester
en poste? À mon humble avis, c'est impossible.
Et comme je vous dis, ce n'est pas un cas
isolé, là. Il ne faut pas penser que Gaétan Barrette l'a échappé dans ce
dossier-là uniquement, là, puis demain matin tous les administrateurs du réseau
de la santé sont à risque de subir ce chantage-là, parce qu'ils sont tous,
tous, tous tributaires, leur emploi dépend exclusivement du bon vouloir du
ministre de la Santé. Ça, c'est les pouvoirs qu'il s'est octroyés avec le
projet de loi n° 10, et nous n'aurons aucune, aucune façon de contrôler
ça, si tant est que d'autres administrateurs n'ont pas la capacité comme MM.
Deschênes et Turgeon de faire face à l'empereur, comme ils l'ont fait
aujourd'hui.
M. Gagnon (Marc-André) : Vous
avez parlé du «Bolducgate» tout à l'heure. Il y a eu une déclaration de M. Poëti
qui a soulevé la controverse, il y a eu des épisodes avec Mme Weil aussi dans
les dernières semaines. Est-ce que c'est la crise de trop pour le gouvernement?
M.
Caire
: Bien,
c'est celle où on va voir de quel bois se chauffe le premier ministre parce
que, jusqu'à date, il a fait preuve d'une absence totale de leadership. Il a
été mou et complaisant avec ses ministres. Aujourd'hui, il a mal évalué
l'ampleur de la crise. Il a encore quelques heures pour, je pense, saisir le
pouls de ce qui se passe dans le réseau de la santé et envoyer un message
clair, non seulement au réseau de la santé, que ce que son ministre a fait est
inacceptable, mais à l'ensemble de son Conseil des ministres.
Écoutez, là, depuis le début, là, les
ministres ont les mains dans le plat de bonbons quand il s'agit de se remplir
le portefeuille avec les primes, quand il s'agit de s'octroyer des privilèges
de réfection de bureau ou je ne sais quoi, puis aujourd'hui on voit un ministre
qui va encore plus loin en abusant de son pouvoir d'une façon inacceptable.
Alors, cette crise-là va nous montrer qui est premier ministre au Québec.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Estimez-vous, rapidement, que le processus de désignation du dirigeant de
l'Institut national de santé publique du Québec, là — on a appris que
c'est la conjointe du Dr Harris qui est actuellement en poste — a été
entaché d'irrégularités? Est-ce qu'on doit faire un examen pour s'assurer que
cette personne-là a été nommée puisqu'elle est la plus compétente et qu'il n'y
a pas eu de favoritisme?
M.
Caire
:
Écoutez, je vais être très honnête avec vous, là, ce n'est pas un dossier que
je maîtrise suffisamment pour vous donner une opinion éclairée à ce moment-ci.
Comme vous le savez, là, je me suis un peu retiré des affaires du dossier de la
santé. Ceci étant dit, on aura certainement des commentaires à faire là-dessus,
là, François Paradis aura certainement des commentaires à faire là-dessus, là,
très bientôt.
Mme Plante (Caroline)
:
Mr. Caire, you say that Mr. Barrette has personally intervened at the CHUM, at…
yes, the CHUM. Wasn't he right though to want stability at the CHUM before
their big move? Wasn't he right to intervene and ask for stability?
M.
Caire
:
Well, the way he interfered in decision from the general manager discredits
himself as a minister. It's clear for us, and, so far, he ain't be able to stay
as a minister. The Prime Minister must resign him today.
Mme Plante (Caroline)
:
You are also a Finance critic. What do you think of the idea of raising the
Québec sales tax?
M.
Caire
:
Well, we're in the way to decrease tax, any tax. In the past few months, that
government increased all fees and taxes for taxpayers in an unacceptable way.
So, it's now time to give breath to taxpayers. It's not time to, you know, play
with more tax here, less tax there. It's not the way we want the Government to
manage that situation. We want the Government to decrease tax and give more
money in the taxpayers' pocket.
Mme Plante (Caroline)
:
Because if I understand correctly the logic behind increasing the sales tax to
deep, to lower the income taxes is to make, I guess, more Quebeckers pay taxes,
right? Because currently there is a large chunk of the population who doesn't
pay income tax. Is that a good logic? I mean, is there merit to that?
M.
Caire
:
But, you know… Well, I think the goal is to give back taxpayers an increased capacity
to buy products and generate economy, you know. That's the reason why I think…
we think we are more in the logic to decrease tax, any tax, to give taxpayers
more money in their pocket. That's the way we're considering the Government
would be able to increase the economic activities. Thank you.
(Fin à 13 h 14)