(Onze heures vingt-quatre minutes)
Mme David (Gouin) : …mesdames,
messieurs, mais je vais dire, messieurs, bonjour. Écoutez, mon collègue et moi,
ce matin, nous voulons simplement rappeler qu'aujourd'hui se vit une journée
très importante au Québec, une journée de manifestation, certainement
pacifique, qui va avoir lieu cet après-midi, manifestation de dizaines de
milliers de personnes. Ce seront surtout des étudiants et étudiants, mais
j'aimerais rappeler qu'il y aura, à côté d'eux, auprès d'eux, beaucoup de
professeurs. Je sais que certains ont décidé aujourd'hui de ne pas aller
travailler et d'être aux côtés des étudiants et étudiants. Je sais que plusieurs
parents seront aux côtés aussi des jeunes. Il y aura des gens d'organismes
communautaires, il y aura des syndicalistes. Les gens du conseil central de Montréal,
par exemple, m'ont confirmé qu'ils auraient plusieurs personnes présentes à la
manifestation. Je crois qu'elle sera importante.
Je tiens à signaler que Québec solidaire
sera présent, a convié ses membres à y aller. Nous voulons et nous savons que
ce sera une grosse manifestation et nous comprenons très bien pourquoi cette
manifestation a lieu, et c'est pour ça que nous l'appuyons. C'est vraiment une
manifestation de dizaines de milliers de personnes contre l'austérité,
l'austérité qui, comme je l'ai dit au ministre Blais ce matin, touche, entre
autres et énormément, l'éducation. C'est extraordinaire d'avoir un ministre qui
ne trouve rien de mieux à dire qu'il faudrait expulser deux, trois étudiants
par jour pour calmer tout ça, pendant que ce ministre, visiblement, n'est même
pas capable de se battre réellement, là, ou n'en a pas la volonté, de se battre
au Conseil des ministres et devant le président du Conseil du trésor pour
conserver un budget qui a juste un minimum de bon sens.
Ce ministre accepte le gel du budget du
ministère de l'Éducation, deuxième ministère le plus important au Québec,
ministère qui touche particulièrement la jeunesse, c'est-à-dire l'avenir du
Québec. Et on s'étonne après ça que les jeunes et de plus en plus de parents, de
plus en plus de gens qui se sentent concernés, soient fâchés contre un
gouvernement qui jamais, jamais n'a annoncé qu'il allait faire ce genre de
chose et qui se découvre, chaque jour, de nouvelles raisons pour imposer une
austérité sans bon sens, comme l'a dit notre si grand poète.
Alors, j'invite vraiment… nous invitons la
population du Québec à se joindre à la manifestation de cet après-midi. Elle
est importante. C'est la force du nombre. C'est à force de, oui, manifester,
d'aller dans la rue, de s'exprimer dans toutes les régions du Québec… et ce
n'est pas fini, il y a le printemps après, il y a l'automne. C'est à force
d'avoir des dizaines de milliers de personnes, des centaines de milliers de
personnes, que ce gouvernement finira, comme d'autres avant lui, par reculer
sur l'austérité.
M. Gagné (Louis) : Vous dites
que le gouvernement s'en prend aux jeunes, notamment en gelant le budget de l'éducation.
Ce matin, MM. Coiteux et Couillard disaient pourtant qu'ils sont les véritables
alliés des jeunes, de la jeunesse, parce que, grâce à leurs mesures les jeunes
vont hériter d'une carte de crédit moins remplie, si vous voulez. Alors,
comment vous percevez ce message-là?
Mme David (Gouin) : Mais c'est
extraordinaire dire des choses comme ça. Ça, c'est comme le ministre Blais, en
réponse à une de mes questions sur l'école primaire, secondaire, qui dit qu'il
fait tout ce qu'il peut pour l'école primaire et secondaire. Mais, attendez,
là, quand on est rendus à voir des professeurs — et ça n'est pas un
exemple, mais il y en a des centaines — acheter du matériel scolaire
parce qu'ils n'en ont pas assez pour pouvoir éduquer les petits enfants dans
leurs classes… C'est ça qu'on appelle un ministère de l'Éducation qui se tient
debout et qui donne les moyens à l'école publique d'éduquer correctement tous
nos enfants? Ça n'a aucun sens. Ce gouvernement n'est pas un allié de la
jeunesse, je pense qu'il faut que ça soit clair, ni de leur… ni des professeurs
qui font leur gros possible pour pallier aux insuffisances gouvernementales.
M. Lacroix (Louis)
: Le
juge Mongeon, hier, dans sa décision, là, sur la demande d'injonction à l'UQAM,
a dit, et je le cite : «Les étudiants se réclament d'un droit qu'ils n'ont
pas et l'UQAM doit composer avec une prise de contrôle hostile de ses locaux…»
Qu'est-ce que vous pensez de ça, M. Khadir?
M. Khadir
: Regardez,
Québec solidaire est le seul parti à prendre la défense du mouvement étudiant
et de ses objectifs. Ça, ça ne veut pas dire qu'on partage tout ce que font les
étudiants. Les étudiants prennent des décisions qui leur appartiennent, c'est
des adultes, et ils tiennent à les prendre eux-mêmes, bien sûr, en consultant
qui ils veulent, mais, en tout cas, Québec solidaire n'est pas consulté. Donc,
pour le détail de ce qui arrive au quotidien dans leur détermination à faire
entendre leur voix aux différents intervenants, ça les appartient.
Ce qu'il faut dire cependant, c'est que le
gouvernement manque totalement de crédibilité quand il dit que c'est pour
l'avenir des jeunes qu'il fait ça, que c'est pour diminuer la carte de crédit…
le déficit sur la carte de crédit parce que, s'il en était ainsi, il mettrait
fin aux privilèges des 1 %, aux privilèges de ces gens qui ne font pas
leur juste part. Il mettrait fin au congé fiscal donné aux entreprises. Là,
vous voulez me ramener…
M. Lacroix (Louis)
: …le
droit de grève, M. Khadir.
M. Khadir
: Oui, oui,
le droit de grève…
M. Lacroix (Louis)
: Le
juge Mongeon dit qu'ils n'ont pas le droit de grève, finalement.
M. Khadir
: Écoutez,
moi, je pense que l'avis d'un juge doit être balancé dans un ensemble de
considérations d'ordre juridique et politique et je crois qu'au Québec ça fait
trois ans qu'on fait le débat, et il y a énormément d'autres gens tout aussi
compétents que ce juge qui disent que c'est au coeur de notre démocratie de
reconnaître le droit d'association, et le droit de manifestation, et le droit
de grève aux étudiants. Donc, ça sera à débattre. Moi, je ne suis pas juriste…
M. Lacroix (Louis)
:
Alors…
M. Khadir
: …mais
politiquement… Excusez-moi.
M. Lacroix (Louis)
:
Mais, s'il se trompe, est-ce que les étudiants devraient défier l'injonction
qu'il a accordée?
M. Khadir
: Vous
poserez la question aux étudiants.
M. Lacroix (Louis)
: Mais
je vous demande votre avis. Vous dites que c'est un avis du juge, puis, à votre
avis, il se trompe. Alors, est-ce que vous recommandez aux étudiants de défier
l'injonction?
M. Khadir
: Moi, je
suis un député à l'Assemblée nationale. Mon avis et mon travail consistent à
regarder qu'est-ce que les institutions de l'État, l'Assemblée, le gouvernement,
la police — parce que ça relève de nous, finalement, l'appareil
policier — pourraient faire pour aider au dialogue social, pour aider
à cheminer, à avancer dans un débat de société qui…
Il s'agit de dire : Est-ce que les services
publics, est-ce que l'éducation, est-ce que la santé, c'est des droits, et il
faut les protéger, il faut les soutenir, ou, non, il faut couper pour protéger
l'intérêt des banques et des plus riches qui cachent leur argent dans les
paradis fiscaux? C'est sûr que là-dedans il y a des détails puis il y a des
gens qui viennent avec toutes sortes de choses puis ils essaient de détourner
notre attention sur la décision d'un juge, sur la levée de certains cours, mais
ça n'a rien à voir avec l'essentiel du débat. L'essentiel du débat, c'est que
ce gouvernement n'a pas…
M. Lacroix (Louis)
: M.
Khadir, je vous pose la question parce que vous l'avez déjà…
M. Khadir
:
Laissez-moi terminer.
M. Lacroix (Louis)
: Je
comprends, mais vous ne répondez pas à ma question. Vous avez déjà, là, à
l'époque de la loi n° 78, recommandé aux étudiants de défier la loi
n° 78. Moi, je vous demande : Est-ce que vous refaites la même
recommandation de défier une décision du juge Mongeon qui dit hier que les
étudiants n'ont pas ce droit-là?
M. Khadir
: Vous avez
le droit de lever le doigt et de me demander, par injonction, de donner mon
avis là-dessus. Moi, je vous répète que l'avis du juge Mongeon lui appartient.
L'essentiel du débat politique qu'on mène aujourd'hui, c'est l'austérité. C'est
des coupures massives d'une ampleur inégalée. C'est des politiques qui plongent
l'Europe tout entière dans le marasme économique. C'est des politiques que tous
les experts internationaux indépendants et des prix Nobel disent être nuisibles
à l'économie, à l'avenir de nos sociétés. Puis les étudiants dehors, là, qui
aujourd'hui manifestent avec leurs parents, avec les… disent exactement ça,
qu'on a besoin d'une autre politique que l'austérité. Ce gouvernement-là n'a
pas dévoilé son itinéraire, hein? Ce gouvernement-là n'a pas dévoilé son
itinéraire, et il se promène, et il prend des décisions ici, dans ces couloirs,
toujours contraires à ce qu'il a projeté lorsqu'il est venu au pouvoir. C'est ça
sur lequel on doit juger.
M. Croteau (Martin)
:
Un commentaire sur un autre sujet. Sur l'abandon du terminal de Cacouna par
TransCanada, êtes-vous rassurés par cette décision-là?
Mme David (Gouin) : Bien,
c'est une excellente nouvelle, et on les prend, les bonnes nouvelles. Il n'y en
a pas beaucoup de ce temps-ci. Moi, je pense que c'est une très bonne nouvelle.
Les gens de Cacouna, les gens du Bas-Saint-Laurent méritent beaucoup mieux en
termes d'emplois, dans des emplois verts, dans des emplois qui les mèneront à
développer toutes sortes de nouvelles technologies. Ils méritent vraiment mieux
que ce port en eaux profondes.
Moi, j'y suis allée à Cacouna, j'ai vu cet
endroit splendide. Ça n'avait aucun sens, c'était dangereux, c'était mauvais pour
le fleuve, mauvais pour la reproduction des bélugas. C'est donc une excellente
nouvelle. Et, si j'en crois les articles que je lis, en fait, il n'y aura pas
de port pétrolier au Québec, ce qui est doublement une bonne nouvelle.
Ça ne met pas fin à tout le débat sur le
pétrole. Parce que d'aucuns veulent inverser le cours du pétrole, là, dans les
pipelines, veulent transporter du pétrole des sables bitumineux à travers des
milliers de kilomètres de pipeline à travers le Québec pour aller vendre ce
pétrole ailleurs. Vous le savez très bien, à Québec solidaire, nous nous y
opposons. Nous croyons que ça recèle de nombreux dangers. Nous ne voulons pas
transporter ce pétrole des sables bitumineux, avec tous les dangers que ça
représente pour les terres, pour les nappes phréatiques, pour la population du
Québec. Nous croyons que le Québec doit aller ailleurs en termes de
développement énergétique. Et nous avons d'ailleurs présenté, durant la
dernière campagne électorale, un très beau plan de sortie progressive, bien
pensé, du pétrole. Le pétrole, c'est le XXe siècle; le XXIe siècle sera celui
des énergies vertes.
M. Croteau (Martin)
:
Donc, l'abandon du terminal ne rend pas l'oléoduc Énergie Est plus acceptable à
vos yeux?
Mme David (Gouin) : Absolument
pas.
Mme Plante (Caroline)
:
Do you think that CPE managers should cancel their training event at Château
Frontenac?
Mme David (Gouin) :
I think they have the responsibility to… think themselves about it. It's their
responsibility, it's not our. I think it's a little bit ridiculous to see all
deputies, except us, vote for a motion here, in the National Assembly, on a
situation with whom we don't have all the details. We have one article in one
newspaper. We know that, for example, the other parties, not us, when they make
their caucuses, they go in a very luxury hotel, you know, big hotels, not cheap
hotels, and that is paid by the National Assembly. So that is paid by public
funds. We know that the doctors — with respect for my colleague — make
many, many meetings, big events, who cost a lot of money, in very beautiful and
very expensive hotels. With what? With public funds. So, you know…
M. Khadir
: It's supported by public funds.
Mme David (Gouin) :
Yes. So, you know, finally, I think people in day care have the responsibility
to have training, and, in fact, they have no choice, it's a rule. So they must
do this training. Where do they have to go, with what kind of teams, that is
their responsibility. I am sure that they will think about it and they will
make their decisions.
Mme Plante (Caroline)
:
You recognize that, from an image point of view, one
day after threatening to cut meals in day-care, it doesn't look good.
M. Khadir
: Of course, this wasn't planned,
but sure it's… we deplore some choices that are made, that, even if you go in
the details and they are not so bad, but the image is very, very damaging for
these superior administrators, which doesn't mean that, you know, those who
work every day on CPEs are involved in that decision. But we are very… it's
very «déplacé», inappropriate for us, for the Liberal Party, to associate
ourselves with the Liberal Party, to condemn them, because the Liberal Party is
practicing… just last September, they were gathering in a very expensive hotel
at the cost of the State.
So we cannot give lessons
to these superiors. Actually, the Liberals are giving
them the same… this lesson that, you know, everything is due to them. Look how
they behave with the contract with Mr. Thierry Vandal. You know, when the
superior officers of the State give themselves so much advantage, how can we be
surprise to see such thing to be reproduced in society. So the example must
come from up to down, and actually there is a very bad example given by the
Liberals, by their elite to those administrators.
M. Gagné
(Louis) : …de revenir en français, peut-être juste une... Je comprends
que vous avez refusé de ramener la motion…
Mme David (Gouin) : Un petit
résumé en français, c'est ça?
M. Gagné (Louis) : Oui, c'est
ça, s'il vous plaît.
Mme David (Gouin) : Bien, en
résumé, c'est assez simple. On a réfléchi beaucoup parce qu'évidemment, à la
lecture de l'article, bon, le Château Frontenac, il y a quelque chose de
symbolique, hein, juste le nom, là. Finalement, on regarde le prix des
chambres, ce n'est pas plus élevé qu'ailleurs, ils ont certainement eu des bon
prix. On regarde les titres des conférences, bon, questionnant. Mais après on
cherche et on téléphone aux gens, on prend la peine de s'informer pour se
rendre compte que finalement c'est tout un colloque qui va permettre aux
gestionnaires de CPE d'essayer de trouver comment gérer l'austérité, dans le
fond. On peut les comprendre un petit peu.
Maintenant, comme disait mon collègue, c'est
sûr qu'au niveau de l'image ça tombe mal, etc., mais allons un peu plus dans
les détails puis rendons-nous compte que le 1 % auquel sont astreints les
employeurs pour de la formation… On les oblige, de toute façon, à organiser ces
formations. Et, de plus, nous nous sentons extrêmement mal placés, comme
députés à l'Assemblée nationale, de s'associer, par exemple, aux députés
libéraux qui, eux, se réunissent en caucus à tous les ans dans des hôtels assez
somptueux merci, tout ça aux frais des contribuables, puisque c'est l'Assemblée
nationale qui paie ces frais-là, et d'aller faire la leçon à des gens qui vont
se donner un colloque somme toute, oui, coûteux, mais pas tant que ça si vous
calculez le nombre de gens qui vont être là, les conférences et les ateliers,
si vous calculez les repas, les nuits, etc. Donc, on se calme, là, on ne sombre
pas dans ce genre de démagogie.
On souhaite, bien sûr, que les
gestionnaires de CPE, peut-être, réfléchissent à une manière de diminuer les
coûts, par exemple, mais ils ont le droit de se former et ils ont surtout le
droit de se former quand on leur impose, justement, de gérer l'austérité. Ils
ont vraiment le droit de se demander comment ils vont faire.
M. Gagné (Louis) : Même si,
au-delà de la formation, bon, ce qui a retenu l'attention, entre autres, c'étaient
des ateliers qui n'avaient pas nécessairement rapport, de prime abord, à l'éducation
des enfants, des cours de zénitude et de yoga, de...
M. Khadir
: Oui, oui.
C'est des gestionnaires. C'est des gestionnaires.
Mme David (Gouin) : Oui, oui.
Puis allez voir le contenu des ateliers, là. Alors, la directrice nous a bien
expliqué que le titre était accrocheur pour attirer les gens, mais le contenu
des ateliers, c'est vraiment comment s'organiser pour gérer nos centres à la
petite enfance avec moins d'argent, avec pas trop de stress, en mettant les
gens ensemble. Vous le savez très bien que souvent, dans les colloques,
maintenant, tous colloques confondus, hein, d'ailleurs, on essaie d'être
accrocheur. Mais il faut aller voir les contenus, il faut aller en bas du
titre, là, puis il faut parler avec les gens. Donc, je vous invite à leur téléphoner
puis à vous informer, et ils vont vous donner la même information qu'à nous.
M. Khadir
: C'est
vraiment... Moi, je suis vraiment déçu parce que ces nuances qu'apportent ma
collègue, ce sont les principes de base pour éviter de tomber dans la
démagogie. Or, moi, j'étais persuadé que les libéraux allaient refuser,
n'allaient pas donner leur consentement à cette motion de la CAQ, mais je vois
que les libéraux ne connaissent aucune limite à emprunter les idées de la CAQ,
y compris tomber dans leur démagogie.
La Modératrice
: Merci
beaucoup.
(Fin à 11 h 40)