(Quinze heures vingt-six minutes)
Mme
Maltais
:
Alors, bonjour. Nous avons appris que le gouvernement prépare un bâillon sur le
projet de loi n° 28 et, pour se justifier, nous croyons qu'il entretient
la confusion sur ce type de projet de loi habituel que sont les projets de loi
pour adopter les mesures budgétaires.
Tout d'abord, quelques repères historiques
sur les projets de loi qui donnent suite au budget. Il y a une habitude ici.
Ces projets de loi, en général, sont déposés de cinq à huit semaines après que
le ministre des Finances ait fait lecture du budget, donc mai-juin, usuellement.
Ensuite, ils comprennent habituellement entre 250 et 500 articles, mais
surtout, ils ne font jamais, mais au grand jamais, l'objet de consultations.
C'est la première fois que ça arrive. Et ils sont adoptés sur division; c'est
normal, les oppositions, évidemment, n'appuyant pas le budget, n'appuient pas
le dépôt… la loi qui suit le budget, mais ils sont adoptés de façon régulière,
sans qu'il y ait de grand débat ou de bâillon.
Ces données sont importantes pour ceci.
Dans le cas qui nous occupe cette année, nous attendions le dépôt du projet de
loi à la reprise des travaux en septembre dernier, considérant qu'il y avait
effectivement un nouveau gouvernement. Mais septembre était un délai amplement
suffisant pour nous préparer cette loi que nous attendions. Étrangement, ce
projet de loi a été déposé le 26 novembre, soit près de six mois plus tard,
tout juste avant la fin de la session, et, surprise, plusieurs mesures
importantes ne faisant pas partie du budget, mais alors là pas du tout, étaient
incluses dans ce projet de loi.
Depuis le dépôt même de ce projet de loi,
à la fin novembre dernier, toutes les oppositions ont condamné l'utilisation
de ce type de projet de loi mammouth. Toutes. Ensuite, pour la première fois,
on a été obligés de faire des consultations, qui ont été assez importantes. Près
de 50 groupes ont été entendus en janvier et en février. Pourquoi? Parce que ce
projet de loi contenait des choses dont personne n'avait jamais entendu parler.
Lors du débat sur le principe, la présidence de l'Assemblée nationale,
d'ailleurs, a reconnu que plusieurs principes sont contenus dans ce projet de
loi. La loi mammouth, elle a été, à toutes fins utiles, validée par la
présidence de l'Assemblée nationale.
Les mesures budgétaires représentent 223
articles. Ça, c'est assez standard. Mais la partie concernant l'augmentation
des tarifs de service de garde représente 18 articles. C'était à la ministre
Charbonneau de défendre ces mesures dans un projet de loi. D'ailleurs, elle
était récemment encore en étude sur des projets de loi qui la concernaient.
Pourquoi ces mesures n'étaient-elles pas dans sa loi?
La partie concernant la santé ne
représente que 20 articles. Ça aurait été possible au ministre Barrette de les
défendre.
La partie concernant la gouvernance
municipale en matière de développement régional et local a 71 articles. C'est
tout à fait l'habituel projet de loi omnibus des Affaires municipales. C'était
à Pierre Moreau de le défendre, mais il n'est pas présent, comme les autres
ministres que je viens de nommer. Il n'est pas présent autour de la table.
Sur les mines, trois petits articles. Nous
aurions eu l'occasion de voir le ministre délégué défendre sa loi.
M. Marceau
: Oui. En
plus de ça, le projet de loi n° 28 contient des dispositions qui viennent
modifier les règles qui gouvernent notre démocratie. Il va y
avoir — enfin, c'est ce qui est prévu dans le projet de loi
n° 28 — publication d'un rapport préélectoral qui serait préparé par
le ministre des Finances et qui ferait l'objet d'une vérification par le
Vérificateur général.
Quant à l'idée d'avoir la publication d'un
rapport préélectoral, on est d'accord, on trouve que c'est une bonne idée. Par
ailleurs, que ce soit le Vérificateur général qui évalue la plausibilité des
hypothèses utilisées par le ministère des Finances, ça, c'est un élément qui ne
nous convient pas. Nous, on a déjà exprimé le fait qu'on préférerait qu'un
directeur parlementaire du budget soit responsable de ça. En fait, nous, on
considère que le Vérificateur général est la meilleure institution pour
regarder le passé, pour faire le travail rétrospectif, et, pour ce qui est
prospectif, pour ce qui est du futur, vaut mieux avoir recours à ce à quoi tout
le monde a recours à travers le monde, c'est-à-dire un directeur parlementaire
du budget. Donc, même si on est d'accord avec l'idée d'un rapport préélectoral,
il y a un désaccord quant aux modalités, quant à la façon de faire.
La Coalition avenir Québec pense comme
nous. Québec solidaire, on ne le sait pas. On ne les a pas vus, on ne le sait
pas. Mais j'aimerais rappeler ici que les modifications aux règles gouvernant notre
démocratie, aux règles du jeu, il est d'usage, là, que ces règles soient
modifiées à, peut-être pas l'unanimité, mais, en tout cas, dans un très fort
consensus des députés de l'Assemblée nationale. Il est d'usage, là, c'est une
tradition qui est bien ancrée… Et, si on peut imaginer qu'un parti utilise sa
majorité pour faire passer des projets de loi, appelons-les normaux et
habituels, on peut, dans ce cas-ci, déplorer très, très fortement l'usage d'une
majorité, puis encore plus dans le cadre d'un bâillon, pour imposer des
changements aux règles du jeu qui nous gouvernent. Alors, je voulais tout
simplement que ça soit clair pour tous.
Mme
Maltais
:
Parce que qu'est-ce qui empêchera maintenant le gouvernement de travailler à sa
guise dans, par exemple, les circonscriptions ou les mandats au DGE? Parce que
là il touche aux façons de faire en campagne électorale.
Alors, vendredi, on nous annonce un
bâillon. Il n'y aura qu'une seule loi, comme nos règles le prévoient, une seule
loi qui sera discutée, débattue. Donc, un seul ministre est porteur de cette
loi, mais personne n'est dupe, personne n'est dupe dans l'Assemblée
nationale. C'est en contravention totale avec le règlement de l'Assemblée
nationale, adopté à l'unanimité en 2009 et qui avait été utilisé de façon
consensuelle depuis 2002, à l'effet que, lorsqu'il y a un bâillon, il y a une
loi, mais, quand on est rendus avec cinq lois à l'intérieur de la même, ça
devient complètement à l'opposé des règles de l'Assemblée nationale, les règles
utilisées depuis 2002. Aucun gouvernement jusqu'ici n'avait dérogé à cette
entente.
Alors, nous demandons le temps, d'abord,
d'examiner attentivement cette loi, de la comprendre. Nous avons eu très peu de
temps jusqu'ici… je vais vous dire pourquoi nous avons eu peu de temps et d'y
apporter des amendements, ce qui pourrait être nécessaire. Voilà. Merci
beaucoup.
M. Lacroix (Louis)
:
Sur un autre sujet, vous accusez le premier ministre de s'être placé en conflit
d'intérêts relativement à Canadian Royalties en… Quels sont les soupçons que
vous avez à l'égard du premier ministre? Vous avez…
Mme
Maltais
:
Écoutez, ce que nous avons…
M. Lacroix (Louis)
:
Stéphane Bergeron a été clair, là.
Mme
Maltais
:
Oui. Ce que nous avons demandé, c'est : Est-ce que le premier ministre
s'est retiré? Nous attendons la réponse. Il va y avoir un débat de fin de
séance. J'espère que nous aurons la réponse. Est-ce que le premier ministre
s'est retiré pendant le débat puisqu'il était membre du conseil d'administration?
C'est la question qu'on pose. On attend une réponse. Je croyais qu'on l'aurait
automatiquement puisque ça a dû être fait au vu et au su de tout le monde. Alors,
on espère l'avoir à 18 heures, au débat de fin de séance.
M. Lacroix (Louis)
:
Pourquoi ne pas avoir attendu que le premier ministre soit présent pour poser
cette question?
Mme
Maltais
:
Nous y avons pensé. Toutefois, bon, le sujet est d'actualité. Deuxièmement,
tous les membres du Conseil des ministres ont dû voir le premier ministre se
retirer, et ce pourrait être prudent que le premier ministre ne commente pas
plus avant le dossier de Canadian Royalties puisqu'il était membre du conseil
d'administration.
Donc, on a discuté, on en a débattu puis
on trouvait même qu'au contraire que c'était pertinent que ce soit la
vice-première ministre. Nous nous attendions à nous faire dire qu'il s'était
retiré. Merci.
(Fin à 15 h 34)