(Dix heures trente et une minutes)
Mme David (Gouin) : Écoutez, j'aimerais
réagir de vive voix à l'article publié par Denis Lessard dans LaPresse
aujourd'hui, article qui mentionne qu'en fait des centaines d'enfants — et
les chiffres que nous avons, nous, c'est au minimum 400 enfants, si on
parle strictement de quelques établissements scolaires — donc des
centaines d'enfants à Montréal qui vont être privés de repas chauds à 1 $
tout simplement parce que la commission scolaire de Montréal n'a plus les
moyens de les fournir.
Pourquoi la commission scolaire de
Montréal n'a plus les moyens de les fournir? Bien, tout le monde le sait, parce
que le gouvernement du Québec lui impose, comme à toutes les commissions
scolaires, des compressions qui dépassent l'entendement.
Avant de revenir plus précisément à ce que
ça signifie de ne pas avoir de repas chaud à l'école, ce qui veut dire
probablement un enfant qui va manger un petit sandwich peu nourrissant, je
voudrais signaler que j'ai entre les mains quelque chose que n'importe qui peut
se procurer sur le site du ministère de l'Éducation, le rapport de cette
fameuse firme Raymond Chabot Grant Thornton, qui a fait une analyse soi-disant
très éclairée des problèmes de la CSDM, des problèmes économiques de la CSDM,
et lui propose — pour ne pas dire lui impose, parce que le ministre
Blais est très féru de ce rapport, il l'aime beaucoup — des coupures
qui, dans certains cas, peuvent avoir des impacts importants, justement, sur
les services aux élèves.
Alors, je voudrais, par exemple, mentionner
que, dans ce qu'on appelle évidemment pompeusement un potentiel d'optimisation,
le rapport propose de réviser l'offre de services pédagogiques et de soutien
aux élèves. Moi, quand on dit des mots comme ça, là, ça me sonne des cloches.
On parle de concentrer l'offre de services sur les besoins des enfants en termes
de qualité d'interventions orientées sur les résultats concrets de réussite éducative,
etc., là, des grands mots pour dire : Est-ce qu'on pourrait s'assurer
qu'on donne simplement les services essentiels, ceux qui vont directement
concourir à la réussite éducative des élèves? Alors, il faut croire que, dans
ce secteur-là, on pense que l'aide alimentaire aux enfants les plus pauvres n'a
aucun rapport avec la réussite éducative des élèves.
On dit à la commission scolaire : Vous
devez poursuivre l'optimisation des ratios maître-élèves. Ah! tiens donc, ça, c'est
en droite ligne avec le dépôt patronal de ce que je n'appellerais même pas les
offres gouvernementales aux enseignants, de ce que j'appellerais les demandes
gouvernementales aux enseignants, c'est-à-dire, l'augmentation du ratio
maître-élèves comme si, ça, ça allait aider les enseignantes et enseignants à
mieux faire leur travail et comme si, ça, ça allait aider tous les enfants, y
compris ceux en difficulté, à bien suivre en classe. Ce rapport-là, là, il est
écrit sur mesure pour le ministre de l'Éducation. Ça n'est pas un rapport
neutre et objectif.
Je cite un autre bout : Revoir la
taille des équipes de soutien des établissements. Ah! tiens donc. Alors, je
souligne que, quelques pages plus loin, là, on voit dans des tableaux, et, dans
ces tableaux que n'importe qui peut trouver, en page 27, on va constater qu'on
veut économiser énormément d'argent, autour de 20 millions de dollars, sur
l'élimination d'un certain nombre de professionnels qui viennent en soutien aux
élèves en difficulté.
Alors, qu'est-ce que ça nous dit tout ça,
là? Ça nous dit qu'on a devant nous un gouvernement qui prône l'austérité,
c'est-à-dire des coupes frénétiques dans les services publics; un ministre de
l'Éducation, en bon soldat loyal et fidèle, qui dit à son chef : Bien,
oui, je vais les faire, les coupes en éducation, pas de problème. Et ces
coupes-là, il les fait via les commissions scolaires qui, elles, à ce
moment-là, se font engueuler par tout le monde, évidemment, parce qu'elles
coupent dans le soutien aux élèves, dans le… Elles vont probablement aller du
côté du gouvernement pour dire : le ratio maître-élèves, il est peut-être
un peu trop élevé. Quand les commissions scolaires auront à choisir entre leur
survie ou bien dire oui au gouvernement sans trop se poser de questions, c'est
sûr que ce n'est pas difficile de voir dans quel sens ça va aller. Et, entre-temps,
une commission scolaire en particulier, la mienne, celle de Montréal, se voit
obligée, et c'est évident que c'est à son plus grand regret, de cesser de
fournir de l'aide alimentaire à des enfants en grande difficulté.
Il y a des effets pervers aussi à ça, à ce
genre de mesures. Dans mon comté, un organisme, La Maisonnette des parents,
organisme familial connu dans le comté, extrêmement efficace, qui donne des
services formidables, bien, ce que ça veut dire, d'arrêter de donner des repas
à 150 élèves tous les jours, tous les midis, bien, c'est un emploi de moins,
celui du cuisinier qui travaille à temps plein, un emploi à 21 heures-semaine
d'aide-cuisinier qui disparaît aussi, et sept emplois de quelques heures par
jour de personnes qui venaient faire la surveillance des enfants.
Donc, non seulement les enfants vont être
plus mal nourris — et ça va évidemment influencer leur réussite
scolaire, tout le monde le sait qu'il y a un rapport entre les deux; un enfant
bien nourri, c'est un enfant qui apprend mieux — mais en plus on crée
de graves problèmes à des organismes communautaires et on les oblige à couper
des postes. Je vous ai parlé d'un organisme, c'est celui de mon comté, il y en
a plein d'autres comme ça à Montréal.
Alors, vraiment, là, j'exige du ministre
de l'Éducation qu'il remette de l'argent dans les services que donnent les
commissions scolaires. On parle ici de l'aide alimentaire du midi, on a déjà
parlé de l'aide aux devoirs, tous ces services qui font en sorte qu'un enfant
est entouré, entouré de gens qui l'aiment et qui prennent soin de lui, hein, un
enfant qui mange bien, un enfant que des éducateurs spécialisés vont aider,
parce que ça aussi, là, c'est remis en question. Qu'on prenne soin des enfants,
moi, c'est ce que je demande au ministre de l'Éducation, et il me semble que ça
n'est pas trop demandé à un ministre de l'Éducation que de s'occuper
d'instruire les enfants.
(Fin à 10 h 37)