(Treize heures quarante-deux minutes)
Mme Lamarre : Alors, bonjour.
Je suis très contente d'être ici, cet après-midi, pour souligner le recul du ministre
Barrette par rapport à l'augmentation des frais qu'il avait anticipé imposer
aux personnes qui résident dans des CHSLD. Alors, ces gens-là, ce sont autour
de 36 000 personnes, 33 000 qui sont des personnes âgées et
3 000 qui sont des gens lourdement handicapés, et, je vous dirais, de
façon assez dissimulée…
À l'étude des crédits, j'ai fait ressortir
une ligne dans des documents qui normalement, là… on en a plusieurs autres de
ces documents-là, on a l'équivalent d'à peu près 1 200 pages de texte,
mais il y a une ligne qui ne s'appelait pas «augmentation des tarifs», qui
s'appelait «révision de 2,5 % au-delà de l'indexation annuelle de la contribution
des adultes hébergés», et on voit 10,4 millions de dollars à côté, et
c'est cette ligne que j'ai mise en évidence et qui fait qu'aujourd'hui le
ministre recule par rapport au choix qu'il avait fait d'augmenter les frais
d'hébergement pour les gens en CHSLD.
Donc, ce sont des frais qui n'ont jamais été
annoncés, dont on n'a jamais parlé, mais qui étaient bel et bien prévus dans
les crédits. Alors, le ministre a annoncé ça comme une coquille. Il n'a pas
voulu nous donner l'information lors de l'étude des crédits, même si je l'ai
relancé à trois occasions, et donc on voit que par notre travail, au Parti
québécois, on a fait en sorte que le ministre recule sur cette décision qui
était un non-sens à l'endroit des gens qui vivent en CHSLD.
M. Rochon : Oui. Et on
n'abandonnera pas sur le fond des choses parce que, si le ministre a reculé,
là, sur les tarifs, s'il a entendu raison, s'il a découvert qu'on doit
respecter ses engagements dans la vie, s'il a découvert que ce n'est pas le
Vérificateur général, c'est lui qui mène le ministère, il est temps maintenant,
après qu'il ait découvert tout ça, qu'il s'attarde au service dans nos
établissements.
Encore aujourd'hui, on apprend qu'une dame
n'a pas eu de douche depuis deux ans, deux ans, faute de personnel suffisant.
Tout le monde s'entend, là, que c'est absolument inhumain. Alors, les centres
d'hébergement et de soins de longue durée, ils ne sont toujours pas les milieux
de vie de qualité que promettait, en 2003, le ministre de la Santé, qui est
devenu le premier ministre depuis ce temps-là. Alors, il faut que ce
gouvernement commence à livrer la marchandise.
Mme Lamarre : Et je vous
dirais que, dans ce dossier-là, on a réussi à coincer le ministre, à mettre en
relief cette ligne, la seule ligne, là, qui prévoyait cette récupération de
10,4 millions de dollars. On est encore préoccupés par rapport aux
modulations. On va surveiller de très près de quelle façon cette modulation-là
va être faite, mais au moins on est contents de voir que les gens qui résident
dans les CHSLD, ceux qui sont les plus vulnérables, ceux qui ont des petits
revenus sont protégés grâce à l'intervention que nous avons faite et nous
allons continuer à être très vigilants.
On invite également le ministre à ne pas
attendre qu'on le coince pour reculer, mais à faire preuve de transparence et,
s'il a d'autres endroits dans les crédits, dans ces 1200 pages qu'il nous a
remises, où il amène d'autres surcharges de frais pour des catégories de
personnes au Québec, qu'il ait l'ouverture, la transparence, d'assumer et qu'il
les annonce publiquement, qu'il les dise ouvertement à la population. Mais vous
pouvez compter sur nous pour faire faire les reculs lorsque nous trouvons des
choses de cette nature-là, une étude très rigoureuse que nous faisons. Donc, le
ministre recule aujourd'hui,et nous nous en réjouissons pour la population,
pour les gens qui habitent en CHSLD et pour leurs proches qui les accompagnent.
Mme Dufresne (Julie)
:
Mme Lamarre, bonjour.
Mme Lamarre : Bonjour.
Mme Dufresne (Julie)
:
Sur la question des soins et des bains, le Dr Barrette dit qu'il veut resserrer
les règles, s'assurer que les inspecteurs fassent les vérifications nécessaires
sans mentionner s'il y aura… ils auront les moyens de leurs ambitions, en ce
sens qu'il n'y aura peut-être pas d'ajout d'inspecteurs. Est-ce que vous avez
l'impression qu'il y a un problème ici et qu'il n'y aura peut-être pas moyen de
le régler avec ce que demande aujourd'hui M. Barrette?
Mme Lamarre : C'est sûr que,
s'il n'y a pas un lien direct avec l'augmentation des inspecteurs, avec les budgets
qu'on leur consent, eh bien, on n'arrive pas à faire… C'est des paroles en
l'air. Alors, il faut que ce soit accompagné de mesures précises.
Moi, j'étais présidente d'un ordre et
j'avais une inspection, l'inspection professionnelle. Cette inspection-là, elle
doit faire son travail, mais elle doit être soutenue. Si on engage un
inspecteur à temps partiel pour visiter tous les CHSLD du Québec ça ne donnera
pas d'impact. Et moi, j'ai été scandalisée quand j'ai entendu le ministre dire
que le lavage à la débarbouillette, il en avait déjà fait, puis que c'était
parfait. Moi, je travaille depuis des années avec des gens âgés, des gens qui
ont souvent des problèmes d'incontinence, et je vous dirais que c'est évident
qu'un bain par semaine, ce n'est pas suffisant pour ces personnes-là. Elles ne
choisissent pas d'être incontinentes, elles vivent souvent l'humiliation d'une
incontinence urinaire, parfois d'une incontinence fécale. Alors, qui
sommes-nous pour présumer qu'un bain suffit pour ces gens-là?
Je pense qu'il faut prévoir vraiment des
mesures différentes, inspections, contrôles et rehaussement. C'est de l'hygiène
fondamentale, et ça évite, je vous dirais, bien des complications, bien des
surinfections qui amènent des coûts au niveau des médicaments que les gens sont
obligés de prendre à cause d'infections fongiques et toutes sortes d'autres
infections. Alors, il faut mettre l'investissement au moment de donner le
confort et la sécurité des personnes âgées, et là je n'ai pas de garantie.
Mme Dufresne (Julie)
:
Mais juste une précision. Donc, vous parlez aussi d'argent. Vous parlez
d'augmenter les inspections, mais vous parlez de budget aussi, là.
Mme Lamarre : Bien, le budget
d'inspection, je pense que c'est quelque chose qui est modeste, mais qui doit
être significatif et qui doit s'assurer qu'on va couvrir toute la population
qui habite dans les CHSLD. Si on inspecte cinq CHSLD par année, on n'améliore
pas du tout notre garantie que les gens qui sont dans les CHSLD reçoivent bien
les services nécessaires.
Mme Dufresne (Julie)
:
Mais ce que je voulais dire, c'est : au-delà du budget d'inspection,
est-ce qu'il ne faut pas augmenter les budgets à même les CHSLD? Est-ce qu'on a
les budgets suffisants pour être capables de donner les bains suffisants, en
fait?
Mme Lamarre : Bien là, il faut
que le ministre nous le démontre, ça, s'il les a ou s'il ne les a pas, ces
budgets-là. Mais ce qui est certain, en tout cas, c'est que la consigne qui
était donnée, c'était un seul bain. Alors, un seul bain, les gens n'en
donneront pas plus. Et là, ce qu'on doit revoir, c'est l'ensemble des services.
Il y a peut-être des gens pour qui il y a des mesures particulières qui doivent
être prises, mais c'est sûr que, sur l'hygiène puis l'alimentation, on s'entend
pour dire qu'il faut donner les services essentiels, là. C'est le minimum, et
il faut que ce soit garanti à nos personnes âgées et à nos personnes lourdement
handicapées qui sont obligées de vivre dans des CHSLD.
M. Rochon : Je reviens à ce
je disais tantôt, là. Dès 2003, le premier ministre actuel, qui était ministre
de la Santé, a adopté une politique intitulée — je l'ai ici, là — Un
milieu de vie de qualité pour les personnes hébergées en CHSLD. Or, l'État,
il contrevient à cette politique-là à bien des égards, selon le président du
Conseil de protection des malades, M. Brunet. La norme non écrite, là, du bain
par semaine, elle ne respecte pas elle-même l'esprit de la politique.
Un autre exemple que donne M. Brunet et
qui est criant, là : dès qu'une personne ne peut se déplacer aux toilettes
seule, ce qu'on fait, c'est qu'on lui met une couche, qu'elle soit incontinente
ou pas, puis on lui dit : Fais dans ta culotte. M. Brunet dit que c'est
honteux. Je comprends que c'est honteux, c'est inhumain. Alors, maintenant, là,
qu'on a tourné la page sur l'augmentation des tarifs au-delà de l'inflation, on
peut-u s'arrêter aux soins donnés à nos aînés en CHSLD?
Mme Dufresne (Julie)
: Le
Dr Barrette fait porter l'odieux ou, enfin, jette le blâme sur les
gestionnaires de ces établissements. Alors, à qui la faute? Qui est imputable?
Mme Lamarre : Bien, vous
savez, moi, je… en commission parlementaire, on en a entendu, des gestionnaires
qui nous disaient qu'ils essayaient d'imposer certaines choses puis qu'il n'y
avait pas toujours le soutien qu'il faut. Alors, je pense qu'il y a aussi un
mécanisme d'inspection qui peut s'avérer tout à fait pertinent. On a ça pour
les universités, des processus d'agrément, on a ça pour les hôpitaux. Je pense
que, dans les CHSLD, l'agrément doit aussi permettre ça. Et des inspections
surprises, je pense que ça, ça a toujours sa place, pour s'assurer que ce qui a
été… les engagements qui ont été pris sont là.
Maintenant, lors des
inspections-surprises, je pense que là on doit redonner pleine... ce rapport-là
aux gestionnaires, et les gestionnaires doivent prendre les mesures qui
s'imposent. Je crois que les gestionnaires devraient d'eux-mêmes détecter ces
situations-là, mais je pense qu'on doit leur donner un mandat clair aussi du
pouvoir qu'ils ont sur l'ensemble des intervenants dans leur établissement.
Mme Dufresne (Julie)
:
Donc, clairement, vous êtes d'accord ou pas avec le Dr Barrette sur cet aspect
spécifique là? Est-ce que les gestionnaires doivent... on doit resserrer le
code auprès des gestionnaires aussi?
Mme Lamarre : Bien, actuellement
on n'a pas d'information à l'effet que les gestionnaires ne font pas bien leur
travail. Moi, je n'ai pas cette information-là. Et ce que je pense qui doit
être fait, c'est vraiment donner un message clair. Mais, si on a dit aux
gestionnaires... Quand on coupe les gestionnaires de plusieurs centaines de
milliers de dollars puis qu'on a à gérer un établissement... On va avoir le
même nombre de patients, alors, quand on coupe, bien on coupe, puis on oblige
les gestionnaires parfois à prendre des décisions qui ne sont pas selon leurs propres
valeurs. Mais c'est ça qu'on leur impose.
M. Rochon : L'ultime responsabilité,
là, elle revient au ministre, là. Il parlait du Vérificateur général. Dans le
cas des tarifs, là, c'était la faute du Vérificateur général. Là, c'est la
faute des gestionnaires maintenant, le manque de soins et de services? Non.
L'ultime responsabilité, l'ultime, est sur les épaules du ministre.
Mme Lamarre : Merci.
(Fin à 13 h 52)