(Douze heures deux minutes)
M. Gaudreault
: Alors,
bonjour à tous. Je voudrais d'abord vous faire un rappel des faits concernant
le dossier de Cacouna. Nous, on a relevé, là, à l'Assemblée nationale, la
première question que j'ai posée au ministre Heurtel concernant les bélugas…
relève… était, c'est-à-dire, le 22 mai dernier. Ai-je besoin de vous
rappeler que le projet d'Énergie Est de TransCanada, c'est un des… c'est le
plus gros projet pétrolier au Canada, c'est dans l'actualité, ça mobilise la population,
les groupes depuis plusieurs mois. Tout le monde sait — sauf, on
dirait, le ministre Heurtel — que le béluga est une espèce
fragilisée, qu'elle est une espèce dont la survie est menacée.
En septembre, il y a eu une injonction
très sévère de la juge Roy de la Cour supérieure, qui était littéralement une
gifle au ministre Heurtel, à l'effet que l'émission du certificat
d'autorisation était déraisonnable. Et souvenez-vous que la réaction du
ministre à ce moment-là, c'était quoi? C'est qu'il blâmait les fonctionnaires,
notamment une fonctionnaire de peu d'expérience. On pourra en reparler tout à
l'heure, là, mais il s'en remettait… il avait dit que c'était la responsabilité
des fonctionnaires.
Aujourd'hui, en Chambre, aveu important de
la part du ministre à l'effet qu'il a commis des erreurs de gestion dans ce
dossier-là. Donc, c'est un aveu qu'il avait renoncé, qu'il avait nié sa
responsabilité ministérielle l'automne dernier en mettant ça sur le dos des
fonctionnaires. Il a fait cet aveu-là aujourd'hui.
Le rapport d'enquête interne sur ce
dossier… D'abord, on pourrait aussi discuter de ce rapport d'enquête, là, je
pourrai répondre à vos questions là-dessus, mais il nous informe que le
ministre a été informé à plusieurs reprises — à plusieurs
reprises — du processus d'autorisation sur la question des forages à
Cacouna, donc il ne peut pas dire qu'il n'était pas au courant. Alors,
aujourd'hui, il nous a admis qu'il avait renoncé à sa responsabilité
ministérielle.
Donc, conclusion, conclusion : le
ministre Heurtel n'a plus d'affaire à l'Environnement. Il y a un remaniement
qui s'en vient, là, hein? C'est un secret de Polichinelle, il y a un
remaniement qui s'en vient. La seule chose qu'il reste à faire à M. Couillard,
le premier ministre, c'est de retirer la responsabilité de l'Environnement à
M. Heurtel. Voilà.
Mme Dufresne (Julie)
:
En même temps, le rapport, quand on le lit attentivement, ne le blâmait pas
directement, mais que… implicitement, peut-être, en disant que le sous-ministre,
nécessairement, devait autoriser…
M. Gaudreault
: Mais
vous avez vu que, dans le rapport fait par Transports Québec, déjà là, c'est…
on pourrait se questionner là-dessus, mais ils disent, de façon opportune, je
dirais, que ce n'est pas dans le mandat de ce rapport, de cette enquête
d'analyser les gestes des élus. Mais pourtant ils disent dans le rapport que le
ministre a été informé à plusieurs reprises du processus. C'est normal, ça.
Moi, comme ministre des Transports, là, j'en signais des tonnes, là, des
dossiers pour des expropriations, pour des investissements de quelques milliers
de dollars sur des coins de rue sur des chemins nationaux.
Alors là, c'est le mégadossier, là. La
question du port de Cacouna puis du pipeline d'Énergie Est, on ne peut pas dire
que… à moins de vivre dans le bois comme un ermite, là, tout le monde au Québec
connaît ça, là. Puis lui, là, il a un processus d'autorisation pour obtenir un
certificat d'autorisation quand il tombe sur son bureau, puis après ça il nous
dit que c'est la faute des fonctionnaires, donc il a renoncé à sa
responsabilité ministérielle. Ce principe est fondamental dans notre droit
parlementaire. La seule chose que le premier ministre doit faire, c'est de le
tasser dans le remaniement qui s'en vient.
Mme Dufresne (Julie)
:
Donc, vous demandez, essentiellement, sa démission ou, en tout cas, qu'il
change de… qu'il ne soit plus titulaire de l'Environnement.
M. Gaudreault
: Bien,
regardez, on pourrait… démission, renonciation, remaniement, il faut qu'il s'en
aille de l'Environnement.
Mme Dufresne (Julie)
:
Mais qu'est-ce que ça dit pour la suite des choses, par contre, pour le dossier
de TransCanada? Parce qu'on sait — le ministre Arcand a d'ailleurs
écrit à l'ONE là-dessus — qu'ils travaillent encore sur un nouveau plan
qui va vraisemblablement toucher ce qui est dans les limites du territoire du
Québec.
M. Gaudreault
: Oui. Bien,
premièrement, vous savez que nous, on ne reconnaît pas la juridiction de l'ONE
là-dessus, hein? Nous, on dit que c'est seulement le Québec… J'ai déposé un
projet de loi là-dessus, le projet de loi n° 390, qui passionne les
journalistes, le projet de loi n° 390, qui affirme la compétence unique du
Québec en matière d'environnement. Ça, c'est notre position.
Maintenant, considérant que le dossier est
devant l'Office national de l'énergie, mais qu'il y a les trois quarts du… en
tout cas, au moins la moitié du tracé qui va changer parce que TransCanada a
annoncé qu'ils ne feraient plus de port à Cacouna, ça veut dire que, de Lévis
jusqu'à la frontière du Nouveau-Brunswick, ils ne savent plus trop où il va
passer, le tuyau. Donc, le…
Mme Dufresne (Julie)
:
Mais il va passer, là.
M. Gaudreault
: Oui,
mais c'est absurde parce que l'ONE continue de faire son travail, prépare ses
audiences, etc. Donc là, il faut arrêter tout ça le temps d'avoir le bon tracé.
Parce qu'il y a quelqu'un, là, peut-être, qui a une terre agricole à quelque
part entre Lévis puis la frontière du Nouveau-Brunswick, puis il ne sait pas si
le pipeline va passer sur sa terre ou il va passer chez son voisin.
Mme Dufresne (Julie)
:
Mais est-ce que vous dites comme, par exemple, Greenpeace le dit : Il faut,
en fait, que TransCanada refasse une demande complète parce qu'en fait le
projet a été à ce point modifié que c'est un nouveau projet?
M. Gaudreault
: Bien, ça
a l'envergure d'un nouveau projet. Quand on dit, là — vous connaissez
le territoire québécois comme moi, là — entre Lévis puis la frontière
du Nouveau-Brunswick, là, ce n'est pas deux, trois kilomètres, là, c'est de
très nombreux kilomètres. C'est un tout nouveau projet, alors on ne peut pas,
là, travailler sur le coin de la table avec ce projet-là.
M. Croteau (Martin)
:
On sait que TransCanada cherche maintenant un nouveau site le long du
Saint-Laurent pour établir un port méthanier. À la lumière de ce que vous venez
de dire sur le ministre Heurtel, de quelle manière est-ce que le ministère de
l'Environnement… le ministre de l'Environnement devra travailler la prochaine
fois que TransCanada demande l'autorisation de faire des forages exploratoires?
M. Gaudreault
: Bon, il
y a plusieurs éléments dans ce que vous dites. Premièrement, ce que je
comprends, moi, de TransCanada, c'est qu'ils n'ont pas encore renoncé à ne pas
faire de port au Québec, hein? Ils ont toujours gardé la porte ouverte à ce que
ça soit juste un tuyau sans port, mais en même temps ils entretiennent
l'ambiguïté en disant : Peut-être Baie-des-Sables, peut-être telle place,
peut-être telle place. Bon, alors, déjà là, on ne le sait pas trop, donc, déjà
là, c'est un nouveau projet.
Maintenant, pour les certificats d'autorisation,
bien, le minimum, c'est que le ministre s'y intéresse et qu'il prenne toutes
les informations scientifiques. Là, ce n'est pas un certificat d'autorisation
pour l'agrandissement d'un cabanon, là, dans un quartier résidentiel, c'est un
certificat d'autorisation pour des forages éventuels pour passer un pipeline
qui va traverser des cours d'eau potable, qui va traverser des terres
agricoles, qui va traverser des milieux fragiles, des milieux humides. Donc là,
le minimum, là, c'est que le ministre prenne toutes les informations
scientifiques, qu'il se documente, qu'il donne les ressources nécessaires à son
ministère.
D'ailleurs, ça m'amène à dire que les coupures
d'austérité du gouvernement libéral dans le ministère de l'Environnement sont
particulièrement grosses. C'est les plus fortes de tous les ministères, donc
diminution de ressources. Alors, tout ça nous pose des questions.
M. Robillard (Alexandre)
:
M. Gaudreault, peut-être juste une précision. Si vous dites que M. Heurtel
est discrédité à ce point-là, pourquoi vous êtes disposé à attendre son départ
ou à laisser son départ à un prochain…
M. Gaudreault
: Ah!
bien, s'il démissionne cet après-midi, moi, je vais être content, là.
M. Robillard (Alexandre)
:
O.K., non, c'était juste… parce que vous n'exigiez pas sa démission, là.
M. Gaudreault
: Bien, c'est
parce que… Écoutez, vous et moi, on le sait bien, là, qu'il y a un remaniement,
là, qui s'en vient, c'est gros comme un autobus, là. Alors, je pense qu'il doit
nécessairement passer à la trappe du remaniement, minimalement, mais, s'il nous
annonce cet après-midi qu'il s'en va, on s'en reparlera, mais moi, je…
M. Croteau (Martin)
:
Comment vous qualifiez son passage à l'Environnement?
M. Gaudreault
: Je le
qualifie de problématique, minimalement. Je n'ai jamais senti un ministre de
l'Environnement qui avait le plaisir profond de faire ce travail. C'est ce que je
pense. J'ai toujours senti qu'il le faisait par défaut. Voilà. Merci.
(Fin à 12 h 10)