(Onze heures quarante-neuf minutes)
Mme David (Gouin) : Alors,
voici venu le temps des bilans. Je pense qu'on se sent tous et toutes un peu
comme des enfants qui terminent l'école! Mais, quant à nous, je tiens à
souligner une fois de plus, c'est important de le redire, que nous ne sommes
pas en vacances aujourd'hui à 5 heures, nous rentrons dans nos circonscriptions,
où nous avons beaucoup de travail à faire.
Alors, quel est le bilan que tirent les députés
solidaires de la session qui s'achève? Écoutez, on a une phrase pour définir le
type de gouvernement devant lequel on se trouve : c'est un gouvernement
libéral qui est fort avec les faibles et qui est faible avec les forts. Je vais
vous l'expliquer. Ce gouvernement, fort et même dur avec les faibles, coupe,
hein, on le sait, dans les services publics, dans l'éducation, dans la santé, même
dans l'aide sociale. Mais, quand il s'agit des forts, des privilégiés, des
puissants, des pétrolières, des minières, là on déroule le tapis rouge, et ça s'est
fait encore cette semaine. Est-ce que les banques, est-ce que les médecins, est-ce
que les contribuables à revenus très élevés ont été touchés par les mesures
d'austérité? Pas une seconde, mais le peuple, les gens ordinaires, travailleuses,
travailleurs, eux et elles, oui, beaucoup.
Devant, donc, un contexte difficile, disons-le,
Québec solidaire est un parti qui se tient debout, et les députés solidaires en
particulier. Je pense que tout le monde admettra que nous faisons preuve, les
trois députés, de cohérence et de ténacité. Sur l'austérité, nous avons été
intraitables, nous plaidons pour un État fort, une économie solidaire, des
services publics universels et accessibles pour réduire les inégalités.
Avec trois députés seulement, on réussit à
faire avancer des dossiers. Chacun de nous a déposé un projet de loi cet hiver :
Manon Massé, sur les pensions alimentaires — vous savez qu'elles sont
coupées à l'aide sociale, pour les femmes à l'aide sociale, ce qui est
parfaitement discriminatoire; Amir Khadir est revenu à la charge avec son
projet de loi pour réduire le coût des médicaments — le gouvernement
n'a pas appelé ce projet de loi, mais il faut convenir qu'après des années de
travail très tenace de notre collègue le gouvernement, enfin, convient qu'il y
a du gaspillage dans le coût des médicaments et commence à prendre des mesures
pour le réduire; et, quant à moi, évidemment, je suis très fière de l'adoption
du principe du projet de loi n° 492 sur la protection des locataires
aînés. Vous vous rappelez que ça a été un très long processus. Il faut vraiment
être tenaces à Québec solidaire, mais je pense que cet automne nous y serons, je
pense que nous aurons un projet de loi qui va davantage protéger les locataires
aînés.
De plus, on a agi avec
vigueur — ma collègue en particulier — sur la consignation
des bouteilles à la SAQ; on va finir par y arriver. Sur les règlements
applicables aux personnes trans qui veulent changer d'état civil, ma collègue a
été très impliquée aussi. Mon collègue Amir Khadir, très impliqué sur le projet
de loi n° 20, qui fait… comment je dirais, qui s'occupe d'un vrai
problème, mais apporte des fausses solutions, et moi-même sur le projet de loi
n° 10, en faisant adopter des amendements qui protègent davantage la
mission des organismes communautaires. Ça, c'est avec trois députés, alors
imaginez ce que ça serait si on était 63.
Nous sommes le seul parti de gauche
écologiste, féministe et souverainiste, tout ça ensemble, à l'Assemblée
nationale. Le PLQ, bien, il a volé le programme de la CAQ. La CAQ se cherche,
et on ne peut pas vraiment compter sur la Coalition avenir Québec pour défendre
un modèle québécois social-démocrate. Quant au PQ, il vient d'élire un chef qui
est l'un des plus dignes représentants du milieu des affaires et qui a été l'un
de ses patrons les plus durs.
D'autre part, quand le PQ s'insurge contre
l'austérité libérale, c'est sûr que c'est facile de lui rappeler que, lorsqu'il
était au pouvoir, il en a fait quasi autant. Et, de plus, jamais le Parti
québécois ne nous dit comment il financerait les services publics. C'est bien
beau, s'objecter aux coupes, mais il faut dire où est-ce qu'on va aller
chercher l'argent. Mais le PQ ne veut pas toucher aux contribuables aux revenus
très élevés et aux grandes entreprises, alors qu'à Québec solidaire nous sommes
très au clair là-dessus, vous le savez.
Il est très ambigu, aussi, le Parti
québécois, en matière pétrolière. Il y a des jours, c'est oui, il y a des
jours, c'est non. En fait, on ne sait pas exactement où il loge. À Québec
solidaire, nous sommes très au clair aussi là-dessus : c'est non à
l'industrie pétrolière au Québec, pour des raisons environnementales, sociales
et de protection du patrimoine québécois.
Dans tous ces combats, nous sommes très
loin d'être seuls. Il y a de nombreuses citoyennes et de nombreux citoyens qui
se mobilisent contre les hausses de tarifs, contre le passage d'oléoducs sur
leur territoire, mais il y a là maintenant un mouvement fort intéressant qui
est en train de prendre racine dans toutes les régions du Québec, et c'est le
mouvement Je protège mon école publique. Alors, les trois députés
solidaires, la semaine dernière, étaient présents dans des chaînes humaines
devant des écoles. Il y aura, de nouveau, chaînes humaines le 1er septembre
devant les écoles du Québec, et là il y a vraiment quelque chose qui se passe.
Le premier ministre va faire son bilan
dans quelques minutes. Alors, j'ai des questions pour lui et, si vous y
consentez, je ne détesterais pas que vous lui posiez. Quand il va répéter que tout
le monde doit faire sa part pour atteindre l'équilibre budgétaire, j'aimerais
ça lui demander qu'est-ce qu'il fait avec le 1 % des plus riches, avec les
gens qui gagnent plus de 250 000 $ par année, par exemple. Est-ce
qu'il leur demande de faire une part accrue?
Quand il va clamer que les coupes sont
nécessaires pour les générations futures, qu'est-ce qu'il va avoir à dire, le
premier ministre, sur les enfants dans nos écoles, qui sont les générations
futures et qui, en ce moment, souffrent des coupes budgétaires?
Ces coupes, d'ailleurs, vont entrer en
vigueur, pour la plupart, cet automne dans les écoles. Alors là, j'ai une
demande spéciale à faire au premier ministre du Québec, et c'est exprès que je
fais ma demande à lui et non pas au ministre de l'Éducation, parce que le
ministre de l'Éducation, il n'écoute rien. Je demande solennellement au premier
ministre de prendre un engagement ferme, très bientôt, là, avant que tout soit
décidé pour septembre, renoncer aux coupes dans les écoles du Québec. C'est un
minimum vital pour nos enfants et pour l'avenir de l'éducation au Québec. Je
demande donc au premier ministre de se faire fort, mais fort dans le sens
d'être combatif, combatif pour la protection de l'école publique au Québec.
Merci.
La Modératrice
: Pour
la période des questions, on va commencer par le micro ici, à ma droite, et
ensuite le micro de gauche, et présentez-vous avant de poser votre question,
s'il vous plaît.
M. Laforest (Alain)
:
Alain Laforest, TVA. Est-ce que vous considérez que votre message passe bien, à
trois députés?
Mme David (Gouin) : Écoutez, à
trois députés, nous considérons que notre message est de plus en plus entendu.
Il n'y a plus grand monde, au Québec, qui ignore notre existence. Je peux vous
dire qu'il y a huit ans c'était bien différent. Donc, on a fait des pas
importants.
Est-ce que nos messages, par ailleurs,
sont entendus du gouvernement? Bien, dans certains cas, oui. Je viens de le
démontrer, il y a des dossiers qui avancent grâce à nous, on est quand même
contents. Je vous rappelle qu'on a aussi fait un petit... on appelle ça un
petit pense-bête, là, donc un résumé des projets de loi ou des mesures quand
même positives adoptées récemment et auxquelles on a largement contribué, je
pense entre autres à la politique sur le harcèlement sexuel, ici même, à
l'Assemblée nationale, évidemment le projet loi n° 492, les médicaments,
la justice fiscale et les abris fiscaux. Nous sommes très, très heureux de voir
que le gouvernement libéral a décidé d'avoir un mandat d'initiative, là, sur
l'évasion fiscale et les paradis fiscaux. Donc, cet automne, une commission parlementaire
va se pencher là-dessus, bravo! Je rappelle qu'Amir Khadir a été, de loin, le
premier député à l'Assemblée nationale à parler de ces choses il y a maintenant
six, sept ans.
Alors, Québec solidaire, avec ses trois
députés, et par leur ténacité, finit par faire avancer des dossiers, oui.
M. Laforest (Alain)
:
M. Legault a laissé entendre tantôt qu'il y a une place pour une troisième
voix. Vous avez attaqué M. Couillard, vous avez attaqué le Parti québécois,
est-ce qu'il y a une place pour une quatrième voix à l'Assemblée nationale et
au Québec ou il y aura un besoin de fusion dans le futur?
Mme David (Gouin) : Écoutez,
la démocratie, c'est de permettre le pluralisme des idées, hein? Alors, si la
CAQ a quelque chose à offrir d'original et de différent du Parti libéral, la
CAQ a sa place au Québec. En fait, tous les partis politiques ont leur place au
Québec, là, moi, je ne porterai pas de jugement là-dessus. Maintenant, je pense
que le problème de la CAQ, et il n'y a pas que moi qui le dit, c'est que, de
plus en plus, c'est copie conforme Parti libéral-CAQ. Alors, moi, je pense que,
des deux côtés, ils auront des questions à se poser.
Journaliste
: Bonjour.
Bonjour, Mme Massé, Mme David. Vous avez entendu l'hommage de
M. Aussant aux funérailles de M. Parizeau, La fin des exils. Est-ce
que vous pensez que ça vous concerne et comment est-ce que vous recevez ce
message-là?
Mme David (Gouin) : D'abord,
je veux vous dire que j'étais présente à la cérémonie et que le message de
M. Aussant était une merveille d'intelligence et de sensibilité. Vraiment,
là, j'ai fait partie des gens qui se sont levés pour applaudir.
Je pense que M. Aussant va lui-même revenir
d'exil, ça paraît assez évident. Moi, je l'invite à considérer sérieusement que
nous serions très heureux de travailler avec lui à Québec solidaire. J'espère
qu'on aura l'occasion de lui dire en personne.
Et, pour le reste — parce que je
pense que je comprends le sens de votre question — il y a des
moments; des moments, par exemple, où la souveraineté est vraiment à l'ordre du
jour et où un référendum se pointe à l'horizon, il y a des moments où il existe
une telle chose qui s'appelle le camp du oui. Nous y serons. Je l'ai toujours
dit, nous l'avons toujours dit, on n'a pas changé d'avis. Mais est-ce que, là,
maintenant, Québec solidaire va se saborder et se fusionner avec le Parti
québécois? Vous savez bien que la réponse, c'est non. Québec solidaire existe
parce que nous croyons, nous, d'ailleurs, un peu comme Jacques Parizeau, que la
souveraineté doit marcher sur deux pattes : l'appel du pays, de
l'indépendance, et la social-démocratie, au minimum.
Journaliste
: Vous avez
dit, dans votre préambule, que la CAQ se cherche. Vous avez peut-être entendu
M. Legault, là, qui trouve la période assez difficile. Comment vous…
Pensez-vous qu'à l'automne, justement, avec la fin des exils, combinée… bon,
puis le message souverainiste du Parti québécois, et le fait la CAQ soit dans
une situation difficile, est-ce que vous entrevoyez un changement dans
l'échiquier politique au cours de la prochaine session à venir?
Mme David (Gouin) : Je n'en
suis pas du tout convaincue, mais je nous laisse réfléchir à tout ça durant
l'été, puis on verra cet automne.
M. Croteau (Martin)
:
Bonjour, Mme David. Je reviens sur la première question de ma collègue. On
a parlé du discours de M. Aussant, on a vu M. Duceppe reprendre du
service, M. Péladeau qui arrive un poing brandi, là, et qui ne fait pas de
doute, là, quant à sa volonté de faire l'indépendance. À quel point sentez-vous
une pression sur vous, sur vos membres et sur vos électeurs pour rentrer dans
le rang, si j'ose dire, là, et aller rejoindre le Parti québécois?
Mme David (Gouin) : Savez-vous
quoi? Il y a quelque chose qui est assez intéressant depuis l'entrée en scène
et l'élection de M. Péladeau à la tête du Parti québécois : nous
n'avons pas perdu de membres. Il n'y a personne qui a traversé pour s'en aller
au Parti québécois. Nous avons un bassin de plusieurs milliers de membres très fidèles
à Québec solidaire parmi lesquels, d'ailleurs, se trouvent d'anciens péquistes
qui, un jour, ont vraiment choisi de joindre nos rangs. Ces gens-là ne veulent
pas que Québec solidaire cesse d'exister, là, puis qu'on s'en aille, là, au
Parti québécois.
Par contre, je l'ai toujours dit, je le
répète, le dialogue est toujours possible, les alliances ponctuelles sont
toujours possibles, d'ailleurs on ne s'en prive pas. À l'Assemblée nationale,
ici même, il y a une semaine, nous avons, M. Jean-François Lisée et
moi, fait une conférence de presse avec un regroupement de personnes
handicapées. Vous le voyez, vous êtes aux premières loges, vous le voyez que
ces choses-là sont possibles. Et, sur la question de la souveraineté, nous
sommes ouverts à des discussions. Si un jour M. Péladeau veut discuter
avec nous, évidemment nous discuterons, nous sommes des gens de dialogue, mais
nous ne nous saborderons pas, soyons clairs.
M. Croteau (Martin)
: Quand
vous parlez d'alliance…
Mme David (Gouin) :
Ponctuelle.
M. Croteau (Martin)
: …je
ne veux pas trop verser dans les scénarios hypothétiques, mais est-ce qu'une
alliance ponctuelle pourrait, par exemple, prendre la forme d'une entente pour
ne pas présenter plus d'un candidat indépendantiste dans chaque
circonscription?
Mme David (Gouin) : Vieille
question qu'on nous posait déjà en 2012 et en 2014. Je vous rappelle que la
prochaine élection générale est en 2018, on a trois ans pour, tout le monde,
réfléchir à tout ça, pas de réponse à cette question aujourd'hui.
Pour aujourd'hui, ce que j'ai à vous dire,
c'est toujours la même chose : Nous sommes un parti de dialogue, mais nous
avons des convictions, nous avons des valeurs, nous les portons, c'est pour ça
que nous existons. Mais, sur des dossiers ponctuels, des conférences de presse
communes, des débats que nous pouvons faire, tout ça, c'est possible, mais nous
n'allons pas plus loin — et je veux être très claire là-dessus, là — nous
n'allons pas plus loin, d'autant plus que je dois dire que les débuts de
discussion, depuis deux jours, sur les projets de loi, là, entourant la
neutralité religieuse, et tout, y compris la période de questions de ce matin,
nous font penser que nous aurons un automne difficile.
Et je veux rappeler que Québec solidaire,
fervent tenant de la laïcité de l'État et des institutions publiques, veut quand
même que ce débat se tienne calmement et sereinement parce qu'il y a des gens
en cause.
M. Croteau (Martin)
:
Mais je constate que vous ne fermez pas la porte à ce scénario d'alliance. Je
constate que vous ne fermez pas définitivement la porte à une éventuelle
alliance électorale avec le PQ.
Mme David (Gouin) : C'est parce
que, M. Croteau, là, la prochaine élection est dans trois ans et demi. Le
mandat qu'un congrès nous a donné pour les élections de 2012 et 2014, c'est :
pas d'alliance. Mais, dans trois ans et demi, là, tant de choses peuvent
changer, de tous les côtés, d'ailleurs. Alors, on ne fait pas de scénario de
science-fiction. On va faire notre boulot, là, pour le moment. On continue
d'avoir nos trois députés, un parti présent sur le terrain. L'automne sera
chaud à toutes sortes de points de vue, n'en doutons pas. Allons-y avec ça pour
le moment.
Journaliste
: À quel
point y a-t-il une polarisation de l'électorat, à vos yeux, comme l'a décrit
M. Legault?
Mme David (Gouin) : Monsieur?
Journaliste
: À quel
point l'électorat est-il polarisé autour de la question nationale, comme l'a
décrit M. Legault tout à l'heure?
Mme David (Gouin) :
Honnêtement, là, je vais le dire sur une base très personnelle, moi, je pense
que, s'il y a polarisation de l'électorat en ce moment, c'est d'abord et avant
tout sur l'austérité, certaines personnes pensant que c'est une bonne chose et
beaucoup de gens — et de plus en plus de gens — pensant que
c'est catastrophique. Les gens qui ont des enfants, qu'ils soient en difficulté
ou non, les gens qui ont besoin du système de santé, les gens dont les parents
âgés sont en CHSLD, tous ces gens-là commencent à trouver que l'austérité, là,
ce n'est pas drôle du tout. Alors, je pense que la principale polarisation est
de ce côté-là.
Maintenant, sur la question nationale, la
polarisation, elle est aussi vieille que la Confédération canadienne.
Journaliste
: Oui,
bonjour. Tout d'abord, sur la question de la neutralité religieuse de l'État et
la lutte à la radicalisation, est-ce que Québec solidaire partage les mêmes
vues que le Parti québécois de 2015? Le Parti québécois a quand même cheminé en
sa…
Mme David (Gouin) : 2015?
Journaliste
: Oui, en
fait, d'aujourd'hui, en référence à celui de l'année dernière, où vous aviez
vraiment des positions opposées au Parti québécois. Aujourd'hui, en quoi vos
positions se distinguent de celles du Parti québécois?
Mme David (Gouin) : Je vais
répondre à votre question, et je le fais consciemment, de manière un peu
différente. Je vais vous dire ce qu'on pense, après on verra, vous jugerez des
différences.
Québec solidaire est un parti qui a déposé,
il y a maintenant, quoi, un an et demi, une charte de la laïcité. Je pense que
personne ne peut douter de notre intérêt pour la question. L'État et toutes ses
institutions publiques doivent être résolument laïcs, ce qui n'inclut pas seulement
la neutralité religieuse de l'État, mais la séparation des pouvoirs entre
l'Église et l'État. Et ça, ça n'est pas dans le projet de loi libéral, en
passant. Donc, premier problème.
Deuxièmement, sur les accommodements
raisonnables, les critères présentés par le Parti libéral, dans l'ensemble,
sont assez corrects, qu'on peut améliorer, mais il est invraisemblable que ça
ne touche que le secteur public et pas les entreprises privées. Donc,
là-dessus, je suis d'accord avec Mme Maltais, en passant. Le projet de loi
libéral ne touche pas les municipalités : incompréhensible, vraiment.
Donc, nous allons travailler très fort pour convaincre le gouvernement
d'inclure les municipalités.
Alors, vous voyez, déjà, nous pensons que
le projet de loi sur la neutralité religieuse de l'État apporte certains
éléments intéressants, mais il y a de graves insuffisances. Et je pense que le
gouvernement libéral, qui a eu beaucoup de difficultés à comprendre les
aspirations des Québécois sur la langue, a maintenant beaucoup de difficultés à
comprendre les aspirations de la majorité des Québécois sur la laïcité.
Il est assez désolant aussi qu'on se refuse
à déplacer ce fameux crucifix qui est sur la tête du président de l'Assemblée
nationale dans un autre endroit bien visible par tout le monde. Il y a là
quelque chose de symbolique qui est vraiment étonnant. Mais, comme le projet de
loi ne parle pas de la séparation des pouvoirs entre l'Église et l'État, ça ne
lui pose pas de problème d'avoir un élément hautement symbolique de l'alliance
entre l'Église et l'État au Québec dans les années 40. Alors, il y a
vraiment du travail à faire, là, sur ce projet de loi.
Journaliste
: Comment
vous entrevoyez le débat dans la population autour de ce projet de loi là? Le
dernier, qui a montré certaines divisions au sein de la population…
Mme David (Gouin) : Le dernier
débat a été assez terrible. Il a été émotivement très dur. Je voudrais rappeler
qu'il a été dur surtout pour nos compatriotes femmes d'origine musulmane... de
religion musulmane, pardon. Là, j'espère qu'on ne rejouera pas dans ce film-là,
là, parce que c'était trop dur.
Moi, je souhaite qu'on fasse un débat
serein, calme et qu'on aille au fond des choses, qu'on ne reste pas seulement
sur des petits épiphénomènes, là, qu'on aille au fond des choses. Voulons-nous
ou non un État laïc? Moi, je pense que c'est oui au Québec : séparation
des pouvoirs, neutralité religieuse, mais en même temps un État qui favorise le
respect des croyances et de l'incroyance. Il y a une définition de la
laïcité — je voudrais que le mot apparaisse,
d'ailleurs — et, si le gouvernement ose le faire, je pense qu'on
pourra avoir un débat intéressant et intelligent. Mais, si le gouvernement se
refuse à tout compromis, là ça va être vraiment difficile.
Journaliste
: Vous vous
dites résolument indépendantistes, vous dites également que vous ferez partie
du camp du oui.
Mme David (Gouin) : Bien sûr.
Journaliste
: Est-ce
qu'on peut penser que ce camp-là pourrait informellement être créé avant
l'échéance électorale, donc avant les élections générales de 2018? Et comment
voyez-vous votre rôle dans la promotion du projet de pays avant la prochaine
élection?
Mme David (Gouin) : Je pense
que j'ai déjà répondu à la première question, là. La prochaine élection, c'est
dans trois ans, on verra ce qu'il y a à faire. Mais nous, nous sommes déjà en
campagne pour la souveraineté. La fin de semaine prochaine, 20-21 juin,
partout au Québec, Québec solidaire distribuera des milliers de tracts appelant
nos concitoyens et concitoyennes à appuyer l'idée du pays. Nous, nous
travaillons déjà sur le terrain non pas pour convaincre les convaincus, mais
pour convaincre les non-convaincus. C'est ce que nous faisons déjà, nous.
Journaliste
: Puis, rapidement,
comment vous entrevoyez l'élection fédérale? Est-ce que vous comptez faire
comme la CAQ et faire connaître une liste d'épicerie aux partis politiques
fédéraux? Allez-vous... Vous avez certaines accointances peut-être avec, je ne
sais pas, peut-être le nouveau Bloc québécois de Gilles Duceppe ou le Nouveau
Parti démocratique de Thomas Mulcair?
Mme David (Gouin) : Il y a
déjà plusieurs mois, Québec solidaire a pris la décision de rester neutre dans
les prochaines élections fédérales, invitant, bien sûr, les Québécoises et Québécois
à voter pour des candidates et candidats progressistes. Ça tombe sous le sens,
puisque nous sommes ce que nous sommes.
Journaliste
: ...
Mme David (Gouin) :
Progressistes. Et, si nous avons à revenir là-dessus, nous tiendrons un comité
de coordination national. Il y a, effectivement, de nouveaux éléments qui sont
apparus dans le décor il y a quelques jours, nous allons y réfléchir.
Journaliste
: Bonjour. Vous
avez parlé tout à l'heure d'un référendum comme d'un moment où il peut y avoir
des alliances, vous avez dit que vous allez être du camp du oui. Quel autre
moment... Est-ce qu'une élection peut être un autre moment où il peut y avoir
une alliance, selon vous?
Mme David (Gouin) : Je
voudrais vous soumettre gentiment que vous êtes la troisième à poser de façon
différente la même question un petit peu, là. Alors, je vais faire sensiblement
la même réponse : Les élections sont dans trois ans.
Journaliste
: Je vous
parle... Ce n'est pas ça, ma question. Ma question, c'est : Est-ce qu'une
élection, c'est aussi un moment, comme un référendum, où il peut y avoir des
alliances?
Mme David (Gouin) : Si la question
est théorique...
Journaliste
:
Théorique.
Mme David (Gouin) : ...je vais
vous faire une réponse théorique : Évidemment. Mais la réponse pratique,
là, la réponse factuelle, c'est que nous avons, nous, Manon et moi, un mandat
clair de notre parti politique, adopté en congrès en 2014, c'est : pas
d'alliance électorale. Si nous avons à rediscuter de cette question, nous le
ferons en congrès.
Journaliste
: Peut-être
juste une petite précision sur la neutralité religieuse de l'État. M. Couillard
avait déjà déclaré, par exemple, que le tchador était un symbole d'oppression
pour la femme. On voit qu'il n'y a rien, dans le projet de loi, qui interdit ce
signe, ce symbole religieux. Selon vous, pour quelle raison le Parti libéral
n'est pas allé aussi loin qu'il l'avait laissé entendre?
Mme David (Gouin) : Bien
franchement, je l'ignore. Et j'aimerais que vous posiez la question à M. Couillard
et j'aimerais qu'il ait vraiment la franchise de vous répondre, parce que je
l'ignore. Donc, il faut lui demander à lui. D'ailleurs, je serais très
intéressée d'entendre sa réponse.
M. Pépin (Michel)
:
Bonjour, mesdames. Michel Pépin, Radio-Canada. Comment qualifiez-vous le
résultat de Québec solidaire aux dernières élections partielles? Et vous pouvez
inclure les élections partielles précédentes, si vous le voulez.
Mme David (Gouin) : Écoutez, c'était
plus décevant dans Richelieu. On est quand même plus contents du résultat de
l'élection partielle, entre autres, dans Jean-Talon. On est conscients,
cependant, très honnêtement, qu'on a du travail à faire, non seulement dans la
région de Québec, mais dans plusieurs autres régions — nous le
savons — pour faire connaître nos idées, faire apprécier nos idées,
développer des associations plus fortes sur le terrain. Tout cela, nous allons
le faire dès l'automne, partout au Québec, par le début d'une tournée qui va
durer un an, qui va nous amener dans toutes les régions du Québec pour
développer, entre autres, avec les gens, notre vision économique et connaître
leurs attentes face à Québec solidaire. Donc, nous sommes conscients du travail
à faire.
M. Pépin (Michel)
:
Vous avez quand même enregistré un résultat inférieur dans Jean-Talon et dans
Chauveau aux élections partielles par rapport aux élections générales d'avril
dernier, d'avril 2014. Est-ce que vous n'êtes pas en perte de vitesse?
Mme David (Gouin) : Non, nous
ne le pensons absolument pas. Je vous souligne que, dans Jean-Talon, la
différence est quand même assez minime. Une élection partielle, ce n'est pas
une élection facile. Les électrices et électeurs sortent moins voter
massivement. C'est beaucoup plus facile pour nous dans le cadre d'élections
générales. Donc, est-ce que nous sommes complètement satisfaits des résultats?
La réponse, c'est non, évidemment, mais pas du tout découragés, pas du tout,
vraiment. Nos candidates, en fait, et dans Chauveau et dans Jean-Talon, nous
ont dit : C'est la première étape. À partir de maintenant, nous sommes
déjà en précampagne pour 2018, et vous verrez en 2018. Non, on n'est pas du
tout découragés.
M. Pépin (Michel)
:
Comment entrevoyez-vous le climat social l'automne prochain?
Mme David (Gouin) : Lourd :
négociations du secteur public, coupes dans les écoles, coupes dans la santé, projet
de loi sur le financement à l'activité — ce qui veut dire des coupes
aussi dans toutes sortes d'établissements de santé — débat sur la neutralité
religieuse de l'État — mais tout le monde sait qu'on va assez
rapidement parler de signes religieux — lourd.
Et, en même temps, mobilisation
citoyenne — nous en sommes absolument convaincus — dans les
dossiers dont je viens de parler, mais aussi dans celui du pétrole. Je rappelle
que le gouvernement du Québec est très engagé dans ce qu'on pourrait appeler la
mise en place d'un État pétrolier, soit parce qu'on en produit, soit parce
qu'on laisse passer du pétrole sur notre territoire — sans que ça
nous donne rien, d'ailleurs — et ça, de plus en plus de citoyens s'y
objectent dans toutes les régions. Alors, automne chaud et automne où Québec
solidaire sera aux côtés des citoyens.
La Modératrice
: Merci.
Mme David (Gouin) : Merci à
vous.
(Fin à 12 h 16)