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Point de presse de M. Philippe Couillard, premier ministre

Version finale

Friday, February 5, 2016, 13 h 15

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Treize heures vingt et une minutes)

M. Couillard : Alors, bonjour à tous, toutes. Merci d'être avec nous. Je suis bien sûr accompagné de plusieurs collègues : Jean-Marc Fournier, David Heurtel, Nicole Ménard, Gerry Sklavounos et Marie-Claude Nichols. On a eu un très bon caucus, en fait, un excellent caucus. De nombreux sujets ont été abordés, discutés de façon très approfondie par la députation, une députation que, je dois dire avec grande fierté, est engagée, également connectée aux véritables besoins des familles du Québec à coûts terme et également à long terme.

Le Québec va mieux. Le Québec va dans la bonne direction. On est deuxième au Canada en 2015 pour la création d'emplois, deuxième au Canada. Ça fait quelques années qu'on n'a pas entendu quelque chose comme ça. On a créé… Le tiers des emplois canadiens ont été créés au Québec, près de 49 000. Le taux de chômage, on l'a vu ce matin, baisse. La création d'emploi à temps plein ce matin également reprend. C'est près de 14 000 à temps plein qui ont été créés en janvier déjà. On arrive de Davos avec quatre annonces représentant un total d'environ un demi-milliard de dollars après des annonces similaires en région et en ville : Kruger, CGI à Shawinigan, Framestore, Medicago ici, à Québec. Et la bonne nouvelle, c'est que d'autres investissements seront annoncés dans les villes, dans les grandes villes et dans les régions au cours des prochains jours et des prochaines semaines.

Il y a des avancées intéressantes qui ont eu lieu également dès le début de l'année. Ce matin, on apprenait avec beaucoup de plaisir la ratification de l'entente de principe par la FIIQ, très bonne nouvelle, parce qu'il y a des avancées très importantes pour la profession infirmière là-dedans. Et le fait qu'on ait réussi à avoir cette entente gagnant-gagnant alors qu'on rétablissait l'équilibre budgétaire, je crois, doit être souligné avec beaucoup de fierté.

On est également intervenu de façon très structurante sur la Côte-Nord avec l'acquisition de Pointe-Noire. Vous savez que Pointe-Noire, c'est le goulot d'étranglement de l'accès au port de Sept-Îles. D'avoir posé ce geste-là sera reconnu dans quelques années comme un élément déterminant qui a donné accès à l'ouverture plus grande et l'accueil plus grand des projets industriels et miniers, notamment sur la Côte-Nord. On est intervenu dans le patrimoine avec cette excellente nouvelle pour la bibliothèque Saint-Sulpice transformée en centre pour les jeunes, les jeunes entrepreneurs. Voilà une très belle façon de faire vivre le patrimoine du Québec.

La perspective de 2016, c'est de continuer à donner un nouvel élan au Québec. D'abord, l'économie qui demeure notre priorité avec, cette fois, deux vecteurs, deux forces importantes qu'il faut y ajouter, l'innovation, notamment l'innovation numérique, donc une stratégie numérique mais, plus largement, l'innovation numérique qui pénètre tous les enjeux et tous les axes de notre plan de développement économique; la stratégie, la politique énergétique également qui sera déposée sous peu; le maintien d'une gestion rigoureuse des finances publiques. Oui, on l'a vu, on est également deuxième au Canada pour la gestion responsable des finances publiques. Ça fait quelques années ou quelques décennies qu'on n'a pas entendu ça au Québec. Je pense, ça vaut la peine de le répéter, mais on va, bien sûr, continuer à gérer les finances de façon rigoureuse en dépensant un peu moins que ce que nous allons gagner de façon à dégager des marges de manoeuvre et continuer nos initiatives, notamment pour ce qui est de la formation, la formation qui est une formation à plusieurs niveaux. Oui, nos écoles primaires, secondaires, absolument, le préscolaire aussi, le collégial, l'universitaire, la formation technique pour bien tenir compte de la modernisation de l'économie et des besoins des entreprises.

Et également le soutien social. Je pense, c'est quelque chose sur lequel on a beaucoup insisté lors de notre caucus et c'est pour cette raison qu'on a demandé à notre collègue François Blais, avec ses collègues également, avec un groupe de députés qui ont manifesté un grand intérêt sur la question et également sur la question des groupes communautaires de se pencher sur la destination d'un revenu minimum garanti. Je précise que ce n'est pas pour demain, il y a des travaux à faire, il y a une trajectoire à définir, mais ça nous apparaît, ça m'apparaît d'abord une tendance qu'on voit dans plusieurs pays du monde actuellement, qui vise, d'une part, à simplifier les mécanismes et les prestations qui existent de soutien de revenu, mais également assurer la dignité des gens alors que cette économie, on le sait, est de plus en plus instable et va changer encore beaucoup au cours des prochaines années.

Je voudrais vous parler et on voudrait vous parler plus spécifiquement du Fonds vert. Il en a été question dans les médias au cours des derniers jours. C'est un instrument qui est absolument essentiel parce que, bien sûr, il permet de récolter les bénéfices du marché du carbone et de les réinvestir dans notre économie pour assurer la transition énergétique, le développement de nos entreprises de technologies vertes, l'électrification des transports et autres initiatives. Il est clair que sa gouvernance doit être améliorée. Avant même que les articles de journaux paraissent, avant même qu'on ait des rapports à cet effet-là, on avait déjà mis en marche une réflexion de réforme de la gouvernance qui doit être profonde, très ferme et également correspondre aux objectifs bien connus de toute gouvernance : plus de rigueur, plus de transparence et de reddition de comptes, des objectifs, des projets mieux définis et des mesures de résultats également mieux définis.

À cet effet, je voudrais passer la parole maintenant à M. Heurtel qui va vous en donner quelques détails et je reviendrais pour quelques mots de conclusion. David.

M. Heurtel : Merci, M. le premier ministre. Bonjour. Alors, pour donner suite aux recommandations de la Vérificatrice générale, aujourd'hui nous amorçons une réforme en profondeur du Fonds vert et particulièrement au niveau de sa gouvernance. Et, comme le premier ministre a souligné, c'est de donner plus de rigueur, plus de transparence et une meilleure reddition de comptes pour le Fonds vert. Alors, comme élément central de cette réforme, nous allons créer un conseil de gestion du Fonds vert. Ce conseil sera formé de neuf membres, dont cinq seront des membres indépendants, à l'extérieur du gouvernement.

Et ce qu'il est important de souligner également, c'est que, parmi ces cinq membres, il y aura la présidence qui sera assurée par un membre externe. Et la mission de ce conseil de gestion, c'est de s'assurer que les allocations du Fonds vert et les choix qui seront faits dans les ministères, les projets qui seront financés seront les projets qui nous permettront d'atteindre les meilleures réductions d'émission de gaz à effet de serre, ils vont nous permettre également d'avoir des indicateurs de performance précis. Donc, comme on l'a dit, une reddition de comptes rigoureuse, mais également s'assurer, justement, qu'il y ait une meilleure coordination entre les projets qui sont choisis par les ministères pour s'assurer qu'on tire le maximum des investissements, bref, qu'on sait où l'argent va et quels sont les résultats concrets qu'on en tire dans l'objectif plus grand d'atteindre nos cibles de réduction de gaz à effet de serre.

C'est important également de préciser que le comité-conseil sur les changements climatiques jouera un rôle important et avisera le conseil de gestion et qu'il y aura, dans l'ensemble de cette gouvernance, un rapport direct qui sera fait au ministre de l'Environnement et évidemment au Conseil des ministres.

Donc, avec cette gouvernance-là, une gouvernance moderne, une gouvernance axée sur une gestion par projets, on va pouvoir amener encore une fois plus de rigueur, plus de transparence, une meilleure reddition de comptes et savoir concrètement… et s'assurer, plutôt, qu'on va pouvoir savoir comment concrètement chaque projet nous apporte les meilleures réductions possibles en émissions de gaz à effet de serre.

M. Couillard : Merci, David. C'était important de procéder rapidement à ces changements. Certains peuvent entrer en vigueur dès maintenant et, bien sûr, quelques-uns demandent des changements législatifs qui seront incorporés à la révision de la loi sur la protection de l'environnement que M. Heurtel pilote actuellement.

Alors, oui, le Québec va mieux, le Québec est dans la bonne direction. On a une équipe engagée, bien connectée au Québec et on va continuer. Le message que je donne, c'est qu'on va continuer notre action avec beaucoup de détermination, moderniser notre économie, une véritable économie du XXIe siècle, prendre soin des gens les plus vulnérables pour qu'il y ait le moins de monde possible laissé pour compte dans cette grande révolution industrielle qu'on va connaître au cours des prochaines années et, je répète, parce que c'est la base même, c'est la pierre d'assise de notre succès, continuer à gérer de façon rigoureuse et responsable les finances publiques du Québec. Merci.

Le Modérateur : Nous en sommes maintenant à la période de questions. On va commencer avec des questions en français, micro de gauche. Veuillez vous identifier ainsi que le média que vous représentez. Mme Dufresne.

Mme Dufresne (Julie) : Bonjour à tous, M. le premier ministre. C'est difficile de ne pas parler de l'impression de dissension qu'il y a à l'issue de ce caucus, particulièrement sur la question d'Anticosti. Avez-vous eu l'impression que tous les députés vont dans la même direction que vous?

M. Couillard : Vous savez, le caucus, c'est un lieu de consensus, et le consensus, il est là. Et pourquoi le consensus se crée? Parce que les débats se font avec franchise, avec beaucoup de franchise et beaucoup d'énergie de part et d'autre des enjeux. Mais le caucus, dans le système parlementaire qui est le nôtre, c'est le lieu d'arbitrage suprême. Ça veut dire qu'on discute, on adopte des orientations, on est tous solidaires de ces orientations.

J'ai au contraire, moi, senti énormément de cohésion dans le caucus au cours de ces deux journées, et il y a eu de nombreuses interventions. Nicole s'est même amusée à les relever, il y a eu plus d'une centaine d'interventions des députés sur l'ensemble des sujets. Et je peux vous dire que le climat est excellent. Moi, je suis très content de l'équipe de députation qu'on a actuellement.

Mme Dufresne (Julie) : J'ai une question un peu technique, si vous me permettez…

M. Couillard : Un peu quoi?

Mme Dufresne (Julie) : Technique, sur un décret qui a été adopté en 2012 pour la création de Ressources Québec, qui est une filiale d'Investissement Québec. Ça a été un décret, donc, adopté sous le gouvernement libéral. Est-ce que, de votre compréhension, ça couvrait l'exploitation et l'exploration pétrolière sur l'île d'Anticosti?

M. Couillard : Non. Le décret qui créait Ressources Québec visait à créer un fonds d'investissement en capital, dont une bonne partie — d'ailleurs, ça a donné lieu au fonds Mines Hydrocarbures — est investi dans les projets de ressources naturelles.

Mais votre question me permet de rappeler qu'il faut absolument distinguer Anticosti puis les hydrocarbures. On n'est pas opposés à l'exploitation responsable des hydrocarbures au Québec. D'ailleurs, il y a des projets qui vont de l'avant, on les connaît, je les ai encore mentionnés il y a quelques heures à peine. Alors, il ne s'agit pas de ça, il ne faut pas faire de rapport là. Et je pense que ce qui est absolument terrible, c'est d'avoir permis une fracturation hydraulique sur une île dans le milieu du golfe du Saint-Laurent sans aucune étude environnementale préalable. Je pense qu'il n'y a personne qui aurait posé un geste semblable. C'est regrettable. Maintenant, on est pris avec les conséquences, mais on va les gérer de façon responsable.

Le Modérateur : Micro de droite.

Journaliste : ...libéral, M. Couillard.

M. Couillard : De ne pas faire de la fracturation hydraulique, non; de faire un fonds ressources, oui; de faire en sorte, même, qu'Hydro-Québec puisse se sortir du pétrole, ce qui est une excellente nouvelle, oui. Mais jamais il n'a été question de fracturation hydraulique et encore moins de faire des explorations... sans exploration et sans test et sans étude préalable. Et je connais assez bien Jean Charest et sa passion pour l'environnement pour vous dire que jamais il n'aurait autorisé quelque chose de semblable.

Le Modérateur : Micro de droite.

M. Lecavalier (Charles) : Bonjour, M. le premier ministre. Il y a un rapport du Vérificateur général, qui a été publié en juin 2014, assez dur sur la gestion du Fonds vert. Pourquoi avoir attendu 20 mois avant de présenter cette réforme-là?

M. Couillard : Bien, écoutez, des fois, il faut se donner le temps de réfléchir puis d'être certain qu'on prend les bonnes orientations. Je pense qu'on est arrivés là. La bonne nouvelle, c'est qu'après ces débats-là il y a de nombreuses options qui ont été étudiées, qui ont été présentées, qui ont été débattues, et on a voulu garder ça le plus simple possible, mais également se concentrer sur les objectifs que j'ai indiqués tantôt.

Il faut quand même rappeler, M. Lecavalier, que, oui, il y a eu ces cas, que moi-même, je trouve curieux, là, les cas qui ont été publiés, je crois, dans votre journal surtout, mais le Fonds vert, il fait beaucoup de bonnes choses, là : électrification des transports... L'argent que les gens reçoivent pour se procurer un véhicule électrique, ça vient du Fonds vert. Il faut continuer, on va continuer tout ça. Mais ce que la Vérificatrice générale et nous notons, c'est d'abord, un, que malgré les dénominations, le ministre de l'Environnement a très peu, actuellement, de contrôle sur le Fonds vert à cause de la façon dont les fonds sont distribués. Il s'agit de donner à cette personne, M. Heurtel, et ceux ou celles qui lui succéderont, l'entière imputabilité et contrôle, parce que les deux vont de pair, sur les dépenses du Fonds vert et surtout d'avoir une influence extérieure du gouvernement, une influence experte qui va nous dire : Écoutez, ce projet-là, là, vous dites que c'est pour ceci, en êtes-vous sûrs, êtes-vous capables de le démontrer, êtes-vous capables de le mesurer? Et on va améliorer les choses.

Pour moi, il est essentiel de rétablir ce lien de confiance, de le maintenir avec le Fonds vert parce que c'est ce qui correspond au marché du carbone. Oui, le marché du carbone représente des transactions financières, des coûts, mais il est là pour générer cet argent-là, pour transformer notre économie. Et sa crédibilité, pour moi, est essentielle. C'est pour ça qu'on a décidé de procéder et qu'on annonce les changements aujourd'hui qui seront donc mis en place prochainement. Encore une fois, il ne faut pas noyer le bébé avec l'eau du bain, si vous me permettez l'expression, là. Il y a beaucoup de très, très bonnes choses faites avec le Fonds vert qui vont continuer à se faire.

M. Lecavalier (Charles) : Deuxième question. Je reviens justement sur un cas qui a fait beaucoup jaser. Est-ce que le Fonds vert doit financer des oléoducs, par exemple? Est-ce que c'est normal et est-ce que c'est terminé, ça, ce genre d'investissement là?

M. Couillard : Alors, à prime abord, ça n'apparaît pas logique. Cependant, soyons prudents parce qu'il faut voir les projets eux-mêmes. Est-ce qu'il est possible qu'en changeant de moyen de transport on baisse les émissions? Peut-être. Il faut voir les détails. Mais je dirais qu'à prime abord ce genre de projet là est susceptible de faire douter la population du bien-fondé des investissements. L'avantage, ça va être justement, maintenant, d'avoir des gens extérieurs, des experts qui vont nous dire : Écoutez, ce projet-là est bon, mais assurez-vous de mesurer vos objectifs, et de mesurer l'atteinte de vos objectifs, et d'en rendre compte. Je crois que c'est encore une fois d'aller dans la bonne direction.

Le Modérateur : Micro de gauche.

M. Vigneault (Nicolas) : Nicolas Vigneault, Radio-Canada. M. Couillard, vous dites que vous êtes quand même peut-être favorable à l'exploitation, vous n'êtes pas fermé à l'exploitation des hydrocarbures. Vous avez quand même dit…

M. Couillard : En général.

M. Vigneault (Nicolas) : …en général, vous avez quand même dit que l'avenir du Québec ne passait pas nécessairement par l'exploitation des hydrocarbures.

M. Couillard : Non, pas nécessairement. Non, ne passe pas par ça.

M. Vigneault (Nicolas) : Ne passe pas. Alors, vous avez été très clair. Est-ce que finalement vous n'êtes pas contre Anticosti, là, vous essayez de naviguer dans tout ça? Parce que là les investisseurs… et l'opposition dit que ça fait peur aux gens d'affaires, votre discours là-dessus.

M. Couillard : Bien, c'est totalement faux. D'abord, moi, j'arrive de Davos, personne ne m'a parlé de ça, puis tout le monde était bien content de venir investir au Québec et encore récemment, incluant dans les projets qu'on va déposer dans quelques jours. Mais je fais une distinction très nette entre Anticosti et la question des hydrocarbures. D'ailleurs, on va bientôt publier une politique énergétique où on va expliquer comment on va encadrer une exploitation qui sera toujours marginale au Québec, là, par rapport à notre consommation de pétrole, par exemple, dans des conditions de sécurité et de respect de l'environnement qui doivent être sans concession. Ça, c'est un enjeu, puis il n'y a pas beaucoup de projets au Québec. Essentiellement, ils sont sur la péninsule gaspésienne.

L'autre enjeu, c'est Anticosti lui-même ou elle-même. C'est quand même assez sérieux comme question. C'est un milieu naturel vierge. Les gens, des fois, ils disent : Bien, ce n'est pas grave, il n'y a personne ou presque personne — ils oublient les 300 personnes qui y habitent — il n'y a presque personne qui habite là, ça fait que ce n'est pas grave. Non, justement parce que c'est un milieu qui doit être préservé, il faut être doublement, doublement, doublement prudent. Et moi, quand j'étais à l'étranger, je vais le répéter, c'est le seul enjeu écologique du Québec dont on m'a parlé, sur lequel on m'a interpellé : Est-ce que c'est vrai que vous voulez faire de la fracturation hydraulique dans une île du golfe du Saint-Laurent? Est-ce que c'est vrai? On va faire les études et on va s'assurer qu'on peut les mener à bien, et ces études vont être publiées prochainement, notamment sur la question de l'eau. Les ressources hydriques de l'île d'Anticosti sont particulièrement stratégiques pour cet écosystème.

Le Modérateur : Micro de droite.

M. Laforest (Alain) : M. le premier ministre, messieurs dames, est-ce que ça veut dire que vous mettez un terme à Old Harry aussi, M. le premier ministre?

M. Couillard : Bien, Old Harry, le projet de loi qu'on a déposé, c'est un projet de loi essentiellement défensif, qui visait à s'assurer de ne pas nous mettre dans une situation où d'autres juridictions pourraient débuter une exploitation qui nous rendrait exposés aux mêmes risques environnementaux, parce que, dans le golfe, il n'y a pas de frontière, là, ce n'est pas marqué au pointillé qu'est-ce qui est d'un côté ou de l'autre, sans en avoir aucun bénéfice économique. Maintenant, je n'ai pas entendu de signal du gouvernement de M. Trudeau qu'il avait un plan d'aller de l'avant dans ce projet-là. Vous savez que c'est des projets excessivement coûteux, hein?

M. Laforest (Alain) : Mais c'est juste une précision, là. Vous êtes contre l'exploitation du pétrole sur Anticosti, là. Ne jouons pas avec les mots. Je pense être assez clair, là, vous le répétez…

M. Couillard : En passant, le projet Anticosti, ce n'est pas du pétrole, c'est du gaz naturel.

M. Laforest (Alain) : Du gaz naturel, mais il y a peut-être un potentiel pétrolier aussi, là. Il y a les deux, là. Bon, ça, vous êtes contre. Est-ce que, pour Old Harry, vous avez la même position, compte tenu qu'il y a les Îles-de-la-Madeleine qui sont là?

M. Couillard : C'est un milieu naturel très fragile. Parlez aux gens des Îles-de-la-Madeleine, ils vont vous en parler abondamment. Alors, le niveau de précaution doit être excessivement élevé avant d'aller de l'avant avec un projet comme ça. Mais je répète, on ne veut surtout pas mettre le Québec dans la situation où, hors de sa volonté, une exploitation débuterait et dont on ne recevrait aucun bénéfice économique. Mais, encore une fois, je n'ai pas de signal, moi, du gouvernement fédéral actuel qu'il va y avoir une avancée de ce côté. Rappelez-vous que ce sont des projets en profondeur extrêmement coûteux. Et la question des prix actuels, bon, ne rend pas ces projets-là très rentables économiquement, ce qui est d'ailleurs le cas pour Anticosti en passant.

M. Laforest (Alain) : Votre ministre des Ressources naturelles nous a parlé environnement ce matin. En 2040 serait exploité le potentiel gazier ou pétrolier sur l'île d'Anticosti.

M. Couillard : S'il est exploité.

M. Laforest (Alain) : S'il est exploité. 2050, on doit réduire de 80 % les gaz à effet de serre. Donc, on dit, c'est un peu difficile. Quel signal vous envoyez aux autres entreprises qui ont entre autres des projets dans les basses-terres du Saint-Laurent? Et vous parlez d'Haldimand qui est en Gaspésie. Est-ce que la Gaspésie, c'est moins important qu'Anticosti?

M. Couillard : C'est une question différente parce qu'en Gaspésie il y a une multitude d'étapes qui ont été passées, y compris des études. Et d'autre part, la Gaspésie, c'est magnifique, puis j'y vais moi-même très souvent, mais il faut faire attention, là, une île, un milieu insulaire dans le golfe du Saint-Laurent, c'est un milieu tout à fait spécifique. Je ne me souviens pas de l'autre projet dont vous m'avez parlé, M. Laforest, là…

M. Laforest (Alain) : Les basses-terres du Saint-Laurent.

M. Couillard : Bien, il y a un moratoire actuellement sur la fracturation sur les basses-terres du Saint-Laurent qui est une région excessivement peuplée. Avant qu'on lève cette question, il va falloir être excessivement prudent, là, surtout à cause de la population, de la densité de population. Vous savez, plus les années passent, plus on se rend compte qu'il y a des rapports qui sortent de plus en plus sur la question de la contamination des eaux, des eaux potables, même, là, des activités sismiques liées à la fracturation. Ce n'est pas une question à prendre à la légère, là, notamment dans les zones peuplées.

Le Modérateur : Micro de gauche.

Journaliste : Bonjour, M. Couillard. M. Couillard, en rétrospective, est-ce que vous trouvez ça normal que Ressources Québec se soit engagée comme elle l'a fait auprès d'entreprises présentes sur l'île d'Anticosti, donc un dossier quand même assez sensible pour le gouvernement à l'époque, sans avertir le Conseil des ministres? Est-ce que vous trouvez ça normal?

M. Couillard : Bien, écoutez, moi, je ne reviendrai pas sur cette époque-là. Ce que je veux tout simplement répéter, puis revoyez mes déclarations comme chef de l'opposition officielle, moi, quand j'ai vu ça... Puis ça m'a frappé également de voir à quel point le Parti québécois était content d'annoncer ça, ce qui les faisait rompre avec un de leurs repères fondamentaux, en passant, la protection de l'environnement, à quel point ils se sont précipités sur cette chose-là sans prendre le temps de l'étudier correctement. On était à la veille d'une élection... en fait, c'est un contrat qui a été signé pendant une élection, une campagne électorale ou au début d'une campagne électorale.

C'est triste également en soi-même, mais, écoutez, on est malheureusement pris avec les résultats maintenant. On va les gérer de façon la plus responsable possible avec le plus de prudence possible également parce que moi, ma responsabilité, c'est, oui, de développer l'économie, mais également les grandes richesses qui sont intangibles ou moins tangibles que le PIB, je l'ai dit l'autre jour, dont un milieu naturel comme celui d'Anticosti. Alors, il faut faire l'équilibre, et les équilibres peuvent varier selon les situations.

Journaliste : Bien, en même temps, à cette époque-là, le gouvernement était en position de défense face à l'opposition qui le critiquait pour avoir cédé les permis d'exploration. Donc, vous ne trouvez pas ça bizarre qu'une agence gouvernementale s'engage vers l'exploration alors que le gouvernement lui-même justifiait sa décision?

M. Couillard : Écoutez, de toute façon, moi, j'étais content de voir Hydro-Québec se sortir du pétrole, là. Je pense qu'on peut le dire comme ça également. Qu'Investissement Québec, et c'est encore le cas aujourd'hui, prenne des participations dans des projets de ressources naturelles, je n'ai pas d'objection, y compris certains projets bien encadrés et limités d'hydrocarbures. En soi, je n'ai pas de problème. On revient encore sur la question du milieu naturel et de la fracturation hydraulique dans un milieu naturel comme Anticosti. Je crois que peu d'endroits au monde ne seraient pas extrêmement prudents devant une situation semblable.

Le Modérateur : Micro de droite.

Journaliste : Bonjour, M. Couillard, messieurs dames. Selon les nouveaux critères que vous tentez d'établir avec le Fonds vert, à votre avis, qui doit être le bénéficiaire, en fait, des investissements des différents projets qui vont être financés par le Fonds vert?

M. Couillard : C'est la population du Québec, c'est la première réponse à vous donner. On a tous intérêt à minimiser les impacts du changement climatique, qui sont déjà visibles, en passant. Parlez à nos gens des populations littorales de l'érosion des côtes, de la progression de la salinité du Saint-Laurent — M. Heurtel nous en parlait ce matin au caucus — la fonte du pergélisol dans le Nord-du-Québec, les effets y sont très visibles et très coûteux actuellement. Donc, l'ensemble de la province de Québec, notre État, va en bénéficier, la population.

Mais davantage également ça peut nous amener à transformer notre économie et à en faire une source de prospérité. On sait qu'on a une belle grappe d'entreprises vertes au Québec, dont celles qui s'occupent, par exemple, de capter les gaz à effet de serre, que ce soit dans les mines ou dans d'autres installations. Alors, ce genre de situation là va être bénéficiaire. Les entreprises qui veulent changer leur source d'énergie, par exemple du diesel mazout au gaz naturel liquéfié ou à la biomasse vont en être bénéficiaires.

Et il y a plein de critères, bien sûr, mais l'important, c'est que ces critères-là soient établis de façon très claire et que chaque projet ait une ligne avec les objectifs et la mesure de l'atteinte des objectifs.

Journaliste : Alors, en fonction de la réponse que vous venez de donner, comment est-ce que l'investissement de 25 millions et demi que vous avez annoncé à Paris pour financer des projets en Afrique, investissement qui est puisé à même le Fonds vert du Québec, va bénéficier aux Québécois?

M. Couillard : Bien, bien sûr, ça va bénéficier aux Québécois de deux façons. D'abord, les Québécois veulent qu'on continue à exercer notre action de solidarité internationale. D'autre part, le Québec est un État qui, à la mesure de sa taille et de ses moyens, doit également assumer sa responsabilité planétaire, particulièrement envers les pays les moins favorisés ou ceux qui ont le plus de difficulté à faire ces changements-là. Et enfin parce qu'également ça présente une opportunité économique pour le Québec. Je ne sais pas si vous avez porté attention, et j'espère que ce sera fait, parce que ça a été une allocution très importante hier du président d'Hydro-Québec à la Chambre de commerce de Montréal, où il indique son intention de replacer Hydro-Québec sur la scène internationale et de mettre son initiative… son expertise, pardon, à la disposition d'autres pays, comme ça a déjà été le cas dans le passé.

Alors, de plusieurs façons c'est bénéfique pour le Québec, mais c'est une petite fraction du Fonds vert. Mais je pense que c'est un geste qui était approprié, nécessaire et, vous avez vu, largement salué par les commentateurs.

Journaliste : Mais vous êtes convaincu que les projets qui vont être réalisés en Afrique francophone vont correspondre aux critères de reddition de comptes du Québec?

M. Couillard : Alors, voilà la question, et c'est pour ça qu'à l'époque… à l'époque — il y a quelques semaines, quand on a lancé cette initiative-là, on a également annoncé la formation d'un comité de gestion de cette initiative, qui va être présidé par Jean Lemire, qui est une personnalité très connue au Québec, active dans ces… actif, bien sûr, dans ces milieux-là. Et ce comité, David pourra vous en parler ultérieurement, va commencer ses travaux. Et on veut s'assurer justement qu'on ait un contrôle et une appréciation à faire sur les projets qui seront présentés pour obtenir des fonds.

Le Modérateur : Micro de gauche.

Journaliste : Bonjour, M. le premier ministre. Bonjour messieurs dames. M. Couillard, vous avez remanié votre cabinet la semaine dernière voulant donner un nouveau visage à votre gouvernement, le visage de la prospérité. Dans la même semaine, vous vous retrouvez avec un projet bloqué, des investisseurs qui se sentent floués, un siège social qui quitte avec le pouvoir décisionnel qui s'en va avec. Ce n'est pas une bonne semaine pour vous sur le plan économique, M. Couillard.

M. Couillard : Regardez, là, vous me parlez de RONA, puis je vais répéter que, moi, je suis préoccupé par les travailleurs, leurs familles, les commerçants. Mais je vais répéter ce que j'ai dit parce qu'il faut bien qu'on se mette ça en tête, nous, les Québécois, là. Il ne faut qu'on soit toujours défensif et développer parfois, malgré ce que certains nous disent, cette mentalité d'assiégés permanents, là.

Oui, cette transaction a été faite, mais elle est consensuelle. Le conseil d'administration, sur lequel il y a la Caisse de dépôt, sur lequel, à 30 %, il y a les commerçants participants, ont unanimement voté pour la transaction. Et il y a des avantages potentiels. Bien sûr, il faudra vérifier que l'entreprise suit ses engagements. Mais je répète que, quand je vois Saputo, quand je vois CGI, quand je vois Couche-Tard, est-ce que je devrais dire : Allez-y pas parce que je ne veux pas que vous touchiez aux autres fleurons des autres pays? Bien non. Nous, les Québécois, on est capables de conquérir les marchés également et d'être présents, et c'est ce qu'on doit faire. La meilleure réponse à la situation de RONA, c'est d'avoir d'autres Couche-Tard, d'autres Saputo, d'autres CGI et, nous aussi, de conquérir les marchés.

Journaliste : Dans ce dossier-là, est-ce que la prise de profits, l'offre alléchante ne l'a pas emporté sur la nécessité de protéger ce pouvoir, non pas les sièges sociaux, mais le pouvoir décisionnel de garder des emplois au Québec? Parce que là, la décision à prendre sur le futur des emplois va se prendre en Caroline du Nord, M. Couillard.

M. Couillard : De la même façon que les décisions des acquisitions de Couche-Tard vont se prendre par Couche-Tard. C'est la nature même des acquisitions. Je pense qu'il faut également rappeler une évidence, il ne s'agit pas d'un OSBL gouvernemental, là, il s'agit d'une entreprise privée avec un conseil d'administration. Alors, restons dans les limites de la réalité. À partir du moment où ce conseil d'administration décide, de façon consensuelle, de faire une transaction, je pense qu'il faut répéter qu'on est dans une économie ouverte et qu'on veut encore une fois que les Québécois jouent ce rôle-là également à l'étranger.

Journaliste : Au sujet d'Anticosti, votre ministre des Ressources naturelles nous disait ce matin : Nous allons honorer le contrat d'Anticosti. Est-ce qu'honorer le contrat ça veut dire, à un moment donné, lorsqu'on découvre qu'il y a une ressource, on dit : On n'exploite pas, mais on compense les investisseurs?

M. Couillard : Je n'aurais pas d'autre commentaire sur ce que M. Arcand a dit que ce qu'il a dit. La prochaine étape, le prochain rendez-vous qu'on a pour discuter de ce projet-là, ce sera lorsqu'on recevra les études d'hydrogéologie quant aux ressources d'eau douce, notamment sur Anticosti, qui vont être absolument critiques. Je rappelle que, encore une fois, il ne s'agit pas uniquement d'un projet de forage, il s'agit d'un projet de fracturation hydraulique sur une île dans le Saint-Laurent.

Le Modérateur : Micro de droite.

M. Croteau (Martin) : Bonjour, M. le premier ministre. Bonjour, tout le monde. Martin Croteau de LaPresse. M. le premier ministre, quelle mesure votre gouvernement envisage-t-il pour réduire le nombre de cas de fugues et pour mieux protéger les adolescentes qui résident dans les centres jeunesse et plus particulièrement dans le Centre jeunesse de Laval?

M. Couillard : Oui. Écoutez, moi, je suis excessivement préoccupé, très préoccupé par cette situation-là, bien sûr, par solidarité fondamentale envers ces jeunes qui sont dans des situations dramatiques et évidemment leurs familles. Vous avez vu les témoignages des parents.

Bon, alors, une fois qu'on a dit ça, c'est essentiel de le dire, mais il faut aller dans l'action, et l'action ici, elle doit être à la fois ferme mais à la fois préventive. Alors, c'est pour ça qu'à la fois le ministère de la Sécurité publique et les forces policières doivent jouer leur rôle, mais à la fois nos services sociaux pour s'assurer d'agir en amont. S'il y a des choses à corriger à l'intérieur de ce centre jeunesse, il faut qu'elles soient corrigées rapidement et sans compromis, et c'est pour ça que ces deux branches du gouvernement doivent travailler ensemble et c'est ce qui va être fait.

M. Croteau (Martin) : Sentez-vous qu'il y a une action particulière qui doit être prise par le gouvernement à la lumière de ce qui se passe au Centre jeunesse de Laval?

M. Couillard : Je serais imprudent aujourd'hui de vous pointer un enjeu spécifique parce qu'on doit avoir toutes les informations, l'évaluation des experts là-dessus, mais je vous donne juste un exemple parmi d'autres, certains parlent de la fermeture à clé des portes. Bien, la Commission des droits de la personne, il y a quelques mois ou quelques années à peine, nous a dit qu'il ne fallait pas faire ça dans les centres jeunesse. Alors, ce n'est pas des enjeux faciles, mais je crois qu'avant tout, ici, il faut prioriser la sécurité des jeunes, leur dignité et également rassurer les parents.

M. Croteau (Martin) : J'ai une précision à vous demander sur Anticosti, si vous le permettez. Il y a eu des sondages, une douzaine de sondages stratigraphiques qui ont été réalisés. La prochaine étape, c'était le forage de trois puits par fracturation hydraulique cet été. Est-ce que vous pouvez envisager un scénario par lequel votre gouvernement délivrerait un certificat d'autorisation pour la tenue de ces forages?

M. Couillard : Ce que j'ai dit et que je répète, c'est que, je dirais, le coefficient de difficulté pour passer à cette étape est extrêmement élevé et dépendra en grande partie du résultat des études hydrologiques qui vont être bientôt données au gouvernement et qui seront publiées.

M. Croteau (Martin) : Mais vous ne fermez pas totalement la porte.

M. Couillard : La porte n'est même pas un peu entrebâillée, elle est minime, puis je voudrais, moi, tout faire pour éviter de soumettre un milieu insulaire comme Anticosti à la fracturation hydraulique.

Le Modérateur : Micro de gauche.

M. Boivin (Simon) : Oui, bonjour. Simon Boivin du Soleil. Ce matin, M. le premier ministre, on a M. Coiteux qui est venu reprendre Mme Charlebois. Un peu plus tôt, dans le dossier RONA, la sortie de Mme Anglade, votre nouvelle ministre de l'Économie a été perçue par certains comme un peu jovialiste. Est-ce qu'en rétrospective les gens qui disaient que vous auriez eu avantage à faire votre remaniement un peu plus tôt pour laisser à vos ministres le temps de se familiariser avec leurs dossiers, est-ce que ça n'aurait pas été plus opportun?

M. Couillard : Je ne crois pas parce que... Prenez le cas de RONA. C'est un événement qui est arrivé de façon rapide, hein, il faut quand même l'indiquer, même si on en parle depuis trois, quatre ans, de cette possibilité-là. Et, vous savez, c'est un geste, un remaniement ministériel, qui est très délicat, qui est très difficile, qui comprend des aspects personnels qui sont particulièrement délicats et également difficiles à vivre pour tout le monde. Il faut bien y réfléchir. Moi, ce geste que j'ai posé, ça fait littéralement des semaines et des semaines que j'y pense. Et il y a plusieurs hypothèses, on évalue plusieurs possibilités, mais on se rabat toujours au message fondamental qu'on veut envoyer. Moi, ce que je voulais envoyer comme message, c'est qu'on allait dorénavant vers la modernisation du Québec, la relance de l'économie avec davantage de présence des femmes, des jeunes et des régions. Évidemment, rien n'est parfait, mais je pense qu'on a fait un progrès quand même appréciable et, là-dessus, je suis content de ce qui a été fait.

Maintenant, encore une fois, tous mes prédécesseurs vous le diront, ce sont les décisions qui sont les plus délicates et même parfois douloureuses à prendre, mais c'est ma responsabilité de les prendre.

M. Boivin (Simon) : Maintenant, j'aimerais vous entendre sur le mandat que vous avez donné à M. Blais concernant le revenu minimum garanti. Je veux voir dans quelles mesures c'est sérieusement envisagé, cette avenue-là. Est-ce que c'est même possible d'y penser avant la fin du présent mandat? Où vous vous en allez avec le revenu minimum garanti?

M. Couillard : Bien, d'abord, c'est que je suis sérieux quand je parle de ça. Ce n'est pas une balloune qu'on lance, là. On lit, on regarde ce qui se fait dans d'autres pays. Il y a déjà eu une expérience pilote au Canada, au Manitoba, à Dauphin sur cette question-là, vous pourrez aller consulter les documents. Il y a deux pays actuellement qui ont annoncé leur intention d'aller de l'avant, dont la Finlande.

Il y a quelque chose qui m'attire dans ce concept-là, des deux côtés. D'abord, c'est que ça permet de simplifier considérablement cet enchevêtrement de prestations puis de règles qu'on a actuellement, qui est bien compliqué, hein? Vous êtes le premier, je pense, à le constater. Alors, ça, c'est pour l'aspect simplification de l'État, amélioration de la gestion de l'État. C'est bien, mais également, l'autre partie, dans cette nouvelle économie dans laquelle on s'engage, ça va être difficile pour des gens de faire le passage. Tu sais, on dit toujours : Les gens, il y aura de nouveaux emplois de créés. Mais le problème, c'est que les nouveaux emplois créés ne sont pas nécessairement là pour les gens qui ont perdu leur emploi à cause du progrès technologue. Alors, c'est là qu'on doit s'assurer d'être solidaires puis de s'assurer qu'on n'échappe pas trop de monde dans cette transition qui va avoir lieu de toute façon. Alors, ça, ça s'appelle le maintien de la dignité des gens.

Alors, d'un côté, la simplification de l'État, de l'autre, le maintien de la dignité des gens. Je crois qu'il y a une combinaison qui est excessivement intéressante. J'ai la chance inouïe de compter dans mon équipe gouvernementale un expert de la question, qui a publié un livre, comme vous le savez, là-dessus. Puis je voudrais ajouter là-dessus qu'on a déjà fait des pas dans cette direction au Québec. Carlos Leitão nous rappelait d'ailleurs au cours du caucus qu'on a, au Québec, un dispositif qui est unique en Amérique du Nord, qui est le crédit d'impôt solidarité, qui représente une distribution d'environ 3 milliards de dollars aux gens à très faibles revenus, là. Il n'y a pas beaucoup d'autres juridictions en Amérique du Nord qui ont ça, ou peu, ou pas. Mais ça, c'est un pas dans la direction d'un revenu minimum garanti.

Alors, il s'agit de faire le recensement de tout ce qu'on a comme prestations, puis je souhaite qu'on travaille avec le fédéral pour ça. D'ailleurs, j'étais content de voir que M. Duclos, le ministre fédéral de ce portefeuille-là, évoquait également l'idée de façon positive au moins. Ça vaut la peine au moins qu'on l'étudie comme il le faut, qu'on en discute et qu'on ne le rejette pas du revers de la main, loin de là.

M. Boivin (Simon) : Mais un horizon…

M. Couillard : Bien, on va commencer par… Écoutez, on va commencer par faire les évaluations de faisabilité, de progression. On va vous en rendre compte… J'ai confié ce mandat-là à M. Blais, bien sûr, mais, dans ce… Si vous me permettez, dans ce domaine de la solidarité et du soutien des personnes vulnérables, nos députés, au cours du caucus, ont manifesté une grande préoccupation envers les groupes communautaires qui exercent beaucoup d'actions sur le terrain, qui sont absolument essentielles, notamment pour les gens qui sont aux marges de la société. Alors, on a mis sur pied un groupe de députés qui va s'occuper spécifiquement de réfléchir à cette question et de nous revenir avec des recommandations. Est-ce qu'on sera en possible… possible d'en mettre quelques-unes en application dès le prochain budget? On verra. Le temps pourrait manquer un peu, mais au moins de poser certains gestes et de continuer par la suite.

Alors, vous voyez que nos discussions, oui, elles ont été économiques, elles ont été financières, elles ont été climatiques, hein, mais elles ont également beaucoup porté sur ce qui a toujours caractérisé l'engagement politique du Parti libéral du Québec. C'est une combinaison de gestion rigoureuse des finances publiques, de relance économique, mais également de préoccupation pour la justice sociale. Et ça a toujours fait partie de notre ADN, et je suis content… Moi, j'étais très fier de voir des députés se lever en grand nombre pour exprimer cette ambition-là, et puis on va faire en sorte d'aller de l'avant.

Le Modérateur : Merci. Micro de droite.

Journaliste : Bonjour, M. le premier ministre. Lors de la formation de votre cabinet ministériel, en 2014, vous aviez donné spécifiquement le mandat à M. Arcand, puis je vais vous citer : «Vous guiderez le Québec sur la voie de l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures, notamment sur Anticosti». Qu'est-ce qui, depuis de moment-là, s'est passé dans votre tête, M. le premier ministre, pour que maintenant vous ayez une position très différente?

M. Couillard : Quand je disais ça, je disais... guider sur la voie veut dire évaluer qu'est-ce qu'on va faire avec ça. Où allons-nous avez ça? On arrive plus près de la réponse. Les hydrocarbures, ce n'est pas uniquement Anticosti. Comme je vous l'ai dit tantôt, je mets Anticosti dans une catégorie à part. Il y a d'autres projets au Québec. Mais aller sur la voie de, étudier ça, ça veut dire la même chose, ça veut dire être très prudent.

Mais je vais répéter encore une fois, là, à quelques reprises, s'il le faut, je le répéterais, le Québec n'a pas… notre gouvernement, du moins, n'a pas de préjugé favorable envers le pétrole. Je lisais ça dans un article ce matin, puis ça me faisait un peu sursauter. L'avenir du Québec, ce n'est pas là qu'on va le trouver, ce n'est pas là qu'il se situe. L'avenir du Québec, c'est dans notre eau, nos ressources renouvelables, notre hydroélectricité, notre talent, notre capacité d'innover. C'est par là qu'on va atteindre la prospérité pour la prochaine génération. Il ne faut pas succomber à ces illusions de penser que de se précipiter dans les combustibles fossiles va nous assurer la prospérité, alors qu'on serait en contradiction avec nos objectifs de réduction de gaz à effet de serre.

Ceci dit, il y a bien d'autres questions à envisager et à étudier : la sécurité relative des moyens de transport des hydrocarbures, par exemple, le déplacement de sources d'approvisionnement étrangères dans la longue transition qui s'amorce, qui va être longue. Ça aussi, c'est un sujet pertinent à discuter, et ça dépasse beaucoup Anticosti. Anticosti, pour moi, c'est un sujet spécifique parce que c'est un milieu spécifique.

Journaliste : Je voudrais peut-être revenir, juste un instant, sur la lettre d'intention qu'avait signée Ressources Québec en août 2012. M. Arcand nous a dit ce matin : Écoutez, c'est une initiative de Ressources Québec. Mais, dans le décret de création de Ressources Québec, il est bien indiqué que trois ministères, trois ministres doivent être consultés avant que Ressources Québec n'engage de l'argent public, c'est-à-dire le ministère des Finances, le ministère du Développement économique et le ministère des Ressources naturelles.

Donc, comment expliquez-vous… Est-ce que vous pensez toujours que c'est Ressources Québec, de sa propre initiative, qui a proposé ça aux entreprises pétrolières?

M. Couillard : Regardez, moi, je n'étais pas là, là, et je ne peux pas vous répondre à ça. Ce que je peux dire, c'est que jamais un gouvernement libéral n'aurait autorisé un programme de fracturation, même exploration, sur l'île d'Anticosti sans étude environnementale préalable. Et je répète, je connais assez bien Jean Charest et son engagement sur l'environnement, qui remonte à la conférence de Rio, au début des années 90, je connais assez bien son engagement sur ces questions pour vous dire que ce ne serait pas arrivé comme ça. Il y aurait eu… Toutes les études qu'on fait là, là, elles auraient dû être faites avant, mais on était pressés, du côté du Parti québécois, d'engager les fonds publics à l'approche de la campagne électorale. C'est tout à fait ça que j'ai vu. C'est regrettable.

Journaliste : Est-ce que Ressources Québec était trop pressée aussi?

M. Couillard : Je pense que beaucoup de gens étaient pressés. Maintenant, on revient à la normale, on revient à la prudence et on revient à la science, et c'est l'étude hydrogéologique qui approche qui va nous donner beaucoup de réponses.

Le Modérateur : Micro de gauche. On va passer en anglais.

Mme Johnson (Maya) : Maya Johnson, CTV News. Hello everyone. Hello, Premier Couillard.

M. Couillard : Hello.

Mme Johnson (Maya) : As you know, of course, there will be funerals tomorrow for the six victims of the terror attack in Burkina Faso. You came out and condemned those terror attacks very strongly. You called it barbaric violence. You were present at the vigil for the families. We are now expecting Prime Minister Justin Trudeau to be here tomorrow. Are you disappointed that he did not come here sooner as he did, for example, go to La Loche after the shooting and that he didn't reach out to the families more quickly? Did he make a mistake?

M. Couillard : Look, I will not follow you on that line. I will just say that, after meeting with Mr. Trudeau on many occasions, I have absolutely no doubt «vis-à-vis» his human quality and the solidarity he feels «vis-à-vis» those families.

On my part, I will go and meet the family in the next hours and present my sympathies privately. There is a degree of private space that the families need now. Many members of our team will be present at the funerals tomorrow, but in a very, I would say, low-key way. It's fundamentally an event for the community and for the families. And I feel still so sorry because these people were going out to do good, to make our world better. But what has reassured me is that, after that, I have not heard a single voice telling us that we should stop helping Western Africa. That's reassuring. And I know it's tough and it's horrible for families, even today. And I just want to be sure that I'll be able to speak with them privately today and that we will be represented at the funerals. But we will continue to support Western Africa, Francophone Africa in particularly because of our membership in the «Francophonie», in many areas, including climate changes as you heard before.

Mme Johnson (Maya) : You described the presence tomorrow as low-key. Do you feel that these kinds of events at times can be overly politicized?

M. Couillard : I'm always worried… I always worry about this because, as members of the Government, you have to be present at circumstances like this, but, at the same moment, you don't want to engulf the families in a political event. This is not what it's all about. So that's always in my mind. I felt the same when I attended Mr. Angélil's funerals. Then, the point was to pay homage in the name of Québec to what he did for our culture and our artistic milieu.

So each situation has to be looked at very, very specifically, but again I always ask myself this question, you know. There is this dogma that you should always be there, and be present, and be seen, and be on TV. But is it always the best, you know? That's something I always ask myself.

Mme Johnson (Maya) : Merci.

Le Modérateur : Micro de droite.

Journaliste : Hello, Mr. Couillard. Mr. Legault this morning implied that you're letting your own personal feelings about Anticosti Island cloud your judgment and that you need to honor the contract. How do you respond?

M. Couillard : You know, I think, in our world, people want to know and see that leaders exercise not only their judgment but their deep beliefs through government. So I am not ashamed of saying that, for me, protection of a natural environment like Anticosti is absolutely critical and part of my fundamentalresponsibilities. You know, frankly, I hope that one day I'll be able to tell my grandkids, my grandchildren that because of actions we took we were able to preserve such environments for them, and their children, and the children of their children. So that is what's in my mind when I think about these things.

Journaliste : Was there consensus at the start of this caucus meeting or the consensus have to be created?

M. Couillard : You know, in a caucus… by definition, caucus is a place where consensus is created. It is not infrequent that you start a discussion with very different positions in the group, but this is how our parliamentary system works. This is the space and the time where people present their case, we have a debate and we come with a consensual decision, which is, by definition, never unanimous or rarely unanimous, but is the reflection of the group itself. So it's the role… It would not be normal if consensus was predefined.

Journaliste : But are you saying there were a lot of different opinions?

M. Couillard : There's always… I cannot recall any important topic that we discussed in any of our caucuses where there were not strong manifestations of opinions on both sides of the issue. I could name a list, but I will not do that, but there are many issues on which we acted since 2014, where we had very, I would say, strongly felt discussions, and this is the way I want it to be.

Le Modérateur : Micro de gauche.

Mme Fletcher (Raquel) : Hello, good afternoon. I'm Raquel Fletcher with Global Television.

M. Couillard : Hello.

Mme Fletcher (Raquel) : This election promise of 250,000 jobs is a long way from being realised. And now that you are backing away from development at Anticosti, how are you going to, you know, fulfill that promise of creating these 250,000 jobs?

M. Couillard : You know, your question would imply that we would narrow our hope for a job creation on Anticosti, which is absolutely not the case. Québec's future will not be based on fossil fuels, will not be based on fossil fuels. Our future will be based on water, renewable resources, hydroelectricity and our creativity and innovation. That's how we're going to get to prosperity.

Now, on the pledge of hoping that the economy would create 250,000 jobs over five years, it is still, as I speak to you today, mathematically possible. Why? Because we've created almost 50,000 in the last year, short of 50 000. Just multiply it by four years and a half and having some good years, hopefully, then we could reach it. So, if at some point I believe that it's not mathematically possible, I will say that very clearly, but at the present time I still have hopes that we can get there.

Mme Fletcher (Raquel) :How did you arrive at the conclusion that the project in Anticosti was not environmentally friendly or didn't fit with your green plan?

M. Couillard : At the face of it, you know, proceeding with fracking on an island in the gulf of Saint-Lawrence is highly questionable. And then, if you move the clock further, forward towards exploitation and you calculate the number of oil wells and the number of drilling procedures, taking there the number of injections and not knowing anything about the water ressource of the island, you know, the sad commentary here is that this contract should never have been signed without prior environmental studies. And, unfortunately, this did not happen that way, and we have to settle the issue.

But I want to also say that it doesn't mean that we do not look positively at some other fossil fuel projects that we have in Québec. But again that will never meet Québec's needs so that will never, in themselves, lead Québec to prosperity. But we have a couple of projects on the Gaspé peninsula, we have stalls, which is liquid… LNG — I wanted to be sure that I have the letters in the right order — an LNG project in Bécancour, there's one with Gaz Métro around Montréal, and we're moving full steam ahead on these because they have been well designed and they have some value. But Anticosti, again… I separate Anticosti for the rest of the fossil fuel question.

Le Modérateur : Dernière question, micro de droite.

M. Hicks (Ryan) : Ryan Hicks, CBC News. Premier Couillard, we're hearing today that a fourth teenager has run away from the same Laval group home. Is this group home safe?

M. Couillard : I'm extremely preoccupied by this situation. I can not say how much I am, as a parent, as we all are, as you are maybe, I don't know, thinking about the situation in which these young girls are and their families concerns, their parents. It should never happen in a succession like this particularly, this is hard to understand and accept. This is why we have to act decisively, but with both arms. One would be the executive arm and repression, police inquiry, which, I think, is going on as we speak, but the other one is upstream action in social services and see what the processes are in this center and what should be improved.

But this is not always as simple as it sounds. I gave the example in French earlier of the question of locking the doors, which sounds as an obvious solution to the issue, but a few months or years ago, the Human Rights Commission here told us that we should not do this, because it would infringe some of these young people rights. So here you are, having to weight very conflicting principles. But again I really hope that… and I know that our ministers Mr. Coiteux and Mme Charlebois will work together on this with their colleagues and I hope that the parents can be reassured as soon as possible.

M. Hicks (Ryan) : On the Green Fund, why take these measures to tighten up the rules around how you give out this money?

M. Couillard : Because I'm not satisfied with the way the situation is now. I'm not satisfied with the fact that although the Minister of Environment is frequently pointed at for, you know, what seems to be a questionable decision, he doesn't have effective control. Therefore, how could he be accountable? So that's why we have to do this.

And the overarching reason is that this is the way through which our carbon trading system, or any carbon tax, or similar mechanism becomes credible for the public. Because remember, the logic is always the same: yes, we have carbon trading, we will get more than $3 billion between now and 2020, and this will be reinvested in our economy to create new greener jobs and help for transition and sometimes mitigation of climate change. So, if we lose credibility for the Green Fund, the whole thing crumbles. So that's why it was a high priority element for me to act on this. Merci.

(Fin à 14 h 7)

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