(Neuf heures quarante-huit minutes)
M.
Spénard
:
Alors, bonjour, tout le monde, bon matin. Alors, d'entrée de jeu, j'ai pris un
peu tout à l'heure la déclaration de M. Lisée comme quoi qu'il s'offusquait que
le gouvernement n'ait pas rendu public le rapport qui a été déposé en février
2014 concernant les centres jeunesse, le rapport qui dit qu'il a rencontré 193
organismes d'octobre à décembre, et ils ont déposé à la députée de Taschereau,
qui était ministre dans le temps, ils ont déposé le rapport, et M. Lisée
s'offusquait que ce rapport n'ait pas été rendu public par le Parti libéral. Et
ce que je comprends difficilement, j'ai beaucoup de misère à m'expliquer
pourquoi eux ne l'ont pas rendu public puisque c'est eux qui l'avaient commandé
et c'est eux qui l'avaient depuis février 2014. Alors, je pense que c'est faire
preuve d'un peu d'étroitesse d'esprit de dire que c'est la faute du gouvernement.
Je pense, c'est la faute des deux partis qui ont piloté ce dossier-là durant ce
temps-là.
Aujourd'hui, on apprend, sous la plume de
Denis Lessard, qu'un important rapport sur l'exploitation sexuelle fut déposé
le 17 février 2014 au gouvernement du Parti québécois. Nous pouvons y
lire que les centres de jeunesse sont des lieux privilégiés de recrutement de
mineurs. On y lirait également que les jeunes filles recrutées par certains
gangs de rue sont transportées d'une ville à l'autre, vers l'Ontario et l'Ouest
canadien, pour y être exploitées sexuellement. Devant ces faits, force est de
constater que nous sommes devant un problème de traite de personnes au Québec,
et ça, la traite de personnes pour des mineurs. Le PQ savait, le Parti libéral,
qui reprenait le pouvoir deux mois plus tard, savait aussi, et ils ont choisi
tous les deux de tabletter le rapport. Nous demandons aujourd'hui que le
rapport soit rendu public dans les plus brefs délais. Les deux vieux partis
n'ont pas cru bon d'agir, ils ont baissé la garde devant les gangs de rue.
Hier, mon collègue de Borduas questionnait
la ministre de la Justice sur la baisse du nombre de procureurs affectés aux
gangs de rue. Par ailleurs, j'ai en main ici le plan d'intervention québécois
sur les gangs de rue. Ce plan est échu depuis 2014. Pourquoi le gouvernement
libéral de Philippe Couillard prend à la légère la lutte aux gangs de rue qui
sont les principaux instigateurs de l'esclavage sexuel mineur qui provient des
centres jeunesse? Le laisser-aller du gouvernement a des impacts directs sur la
vie des jeunes filles. On parle de nos enfants, de vos enfants, des miens. On
n'a pas le droit, comme société, en 2016, d'attendre un autre rapport qui va
nous dire la même chose qu'on sait déjà. La ministre ne peut se réfugier
derrière un vérificateur et des rapports qui prendront un mois, alors qu'on vit
une situation d'urgence. L'action doit être rapide, concise, précise, et des
actions doivent être prises immédiatement considérant l'ampleur du problème.
Puis il ne faut pas oublier qu'on a encore une jeune fille qu'on ne sait pas
trop où est-ce qu'elle est, qu'on n'a pas retrouvée encore et qui est peut-être
dans les mains des gangs de rue en train de faire de l'esclavage sexuel.
Alors, nos solutions. Nos solutions qu'on
veut apporter dans ce dossier-là, c'est renforcer dans l'immédiat les mesures
de sécurité au centre jeunesse Laval, assurer un suivi auprès des familles
concernées et leur fournir du support, s'assurer auprès des corps de police
concernés que tout est mis en oeuvre pour retrouver les jeunes filles, leur
demander de faire le point dans les médias régulièrement, avoir un volet
spécifique de démarchage de jeunes filles en lien avec les gangs de rue,
assurer un meilleur contrôle et la sécurité dans les centres, une meilleure
collaboration entre les intervenants, les policiers, les jeunes fugueurs et, de
grâce, préparer un nouveau plan d'intervention pour les gangs de rue. Alors, on
est ouverts à vos questions. Est-ce que, Nathalie, tu veux rajouter quelque
chose?
Mme Roy
(Montarville)
:
Bien, bonjour, tout le monde. Bien, force est de constater, mon collègue M.
Spénard l'a bien dit, nous sommes actuellement, au Québec, en face d'un
phénomène qui s'appelle la traite de personnes. Et il n'y a aucune famille
actuellement au Québec qui est à l'abri de l'oeuvre des gangs de rue. On parle
des enfants des centres jeunesse, ces belles jeunes filles qui ressemblent à
des jeunes femmes, mais ce sont des enfants. Ce sont des enfants qui sont
exploités sexuellement par les gangs de rue. Et ce qui aberrant ce matin, c'est
d'entendre le Parti québécois nous dire que le gouvernement libéral savait et n'a
rien fait. Bien, le Parti québécois non plus n'a rien fait. Alors, on est en
face de deux vieux partis qui n'ont rien fait pour protéger nos enfants et qui
étaient au courant de cette traite de personnes depuis 2014. Nous sommes en
2016. Il faut agir pour protéger nos enfants.
Et la traite de personnes, c'est quelque
chose de très grave. C'est dans le Code criminel, et, à titre indicatif, je
veux juste vous lire la définition, pour ceux qui ignorent ce que c'est, la
définition qui est donnée par la sécurité publique du Canada. Alors : «La
traite de personnes est un crime des plus ignobles, souvent décrit comme une
forme moderne d'esclavage. Elle se caractérise par le fait de recruter, de
transporter et d'abriter des personnes ou de contrôler, de diriger ou
d'influencer leurs mouvements afin de les exploiter, habituellement par
l'exploitation sexuelle ou le travail forcé. Les victimes, pour la plupart des
femmes et des enfants, sont arrachées à leur vie normale et sont forcées à
travailler ou à offrir des services sexuels par le biais de diverses [politiques]
coercitives, le tout au profit direct de leurs bourreaux. L'exploitation se
fait souvent par l'intimidation, la force, les agressions sexuelles et les
menaces à l'endroit des victimes ou de leurs familles.»
Et c'est ce qui se passe au Québec
actuellement. Il y a la traite de personnes. Ce sont nos enfants qui en sont
victimes, et le gouvernement actuel, et l'ancien gouvernement n'ont pas agi
quand on avait toutes les informations en main. Il faut agir maintenant. Aucune
famille n'est à l'abri. Si vous avez des questions concernant les centres
jeunesse peut-être mon collègue Schneeberger
peut y répondre plus précisément.
Journaliste
: Bien, à
la lumière des informations qu'on a aujourd'hui, est-ce que la solution que
propose le gouvernement, elle est bonne à vos yeux, c'est-à-dire de tenir vraiment
une commission, un comité interministériel? Les mesures qui ont été annoncées,
comment vous les voyez dans le contexte des informations?
M.
Spénard
:
Moi, si vous me permettez, je pense qu'on tourne en rond. C'est un autre
comité, c'est un autre rapport, alors que depuis deux ans il y en a un,
rapport. Depuis au-delà de deux ans, il y en a un, rapport sur la table, et
aucune des recommandations du rapport n'a été mise en oeuvre par soit le
gouvernement du Parti québécois ou soit le gouvernement Couillard,
actuellement.
Alors, écoutez, là, c'est rapport
par-dessus rapport, mais, d'ici ce temps-là, qu'est-ce qu'on fait concrètement?
Comment on équipe nos intervenants dans les centres jeunesse? Comment qu'on va
faire face au problème? Est-ce que... Tu sais, il y en a qui demandent de
barrer les centres jeunesse, il y en a qui demandent... On ne peut pas barrer
les centres jeunesse. Qu'est-ce qu'on fait avec tout ça? Est-ce qu'on va faire
un autre rapport? Je pense que le rapport de février 2014 était assez explicite
là-dessus, et on espère... étant donné que le Parti québécois l'a, étant donné
que le Parti libéral l'a, est-ce que tous les élus de l'Assemblée nationale
pourraient avoir accès à ce rapport? Il est supposément strictement
confidentiel, et ce rapport-là devrait être mis à la disposition du grand
public québécois.
Journaliste
: M.
Spénard, vous dites quoi pour augmenter... vous dites que vous voulez augmenter
la sécurité du centre jeunesse, mais le juste milieu... est-ce qu'il y a un
juste milieu entre : on verrouille toutes les portes ou on ne les
verrouille pas, la liberté... Qu'est-ce qu'on fait dans l'immédiat?
M.
Spénard
:
Non, non, non, ce n'est pas du tout ça que je voulais dire. Je pense qu'il y a
un juste milieu et je pense que ce juste milieu là part des intervenants
directs qui connaissent leur clientèle et qui savent qu'une telle personne va
fuguer. Quand on est rendus à six, sept, huit fugues dans un centre jeunesse,
je pense qu'il y aurait peut-être lieu d'établir un certain contrôle sur cette
personne pour dire : On va essayer de limiter les fugues. Mais là on est
rendus à la même jeune fille, qu'on la reprend, la police la rentre au centre
jeunesse, deux semaines après, elle est ressortie, elle fugue encore. Alors, ce
n'est pas l'ensemble des candidats qui sont en centre jeunesse qui fuguent, ce sont
certaines personnes qui fuguent, et les fugues sont à répétition. Alors, c'est
ceux-là qu'il faut cibler puis c'est ceux-là qu'il faut protéger.
Journaliste
: Donc, il
faudrait consulter les intervenants dans l'immédiat, que ce soit maintenant...
M.
Spénard
:
Oui, absolument. Absolument. Ça part de là.
M.
Schneeberger
:
Bien, hier, la ministre nous disait qu'elle allait consulter les directeurs des
CIUSSS. Ce n'est pas les directeurs qu'il faut consulter, c'est les gens sur le
terrain, les intervenants. Eux, connaissent leur clientèle, eux travaillent à
tous les jours avec leur clientèle. Ils sont en mesure de filtrer les
potentielles victimes de ces réseaux-là. Ce n'est pas les directeurs des CIUSSS
qui vont les filtrer.
Mme Johnson (Maya)
:
Mme Roy?
Mme Roy
(Montarville)
:
Oui?
Mme Johnson (Maya)
:
You're saying that this... what's happening now fits the criteria of human
trafficking?
Mme Roy
(Montarville)
:
Absolutely. What you're seeing right now is that young girls, 12, 13, 14
years-old… you're still a child. Even if you look like a woman, you're still a
child, and what we're seeing is that «les gangs de rue»…
Mme Johnson (Maya)
:
Street gangs.
Mme Roy
(Montarville)
:
Yes. What we are seeing is that street gangs are taking
those girls for their profit. They are making profits on those girls. They are
exploiting them sexually, and it's a reality, and it's in the Criminal Code. It's
really serious, and we're seeing it. We have to admit it because a «rapport», excuse me, a report was shown to the Parti québécois in 2014. It's
been two years. They know it, it's been two years, the PLQ knew it, the PQ knew
it, and nothing has been done yet. It's awful. We have to protect our child,
our children, our young girls and we have to act. It's not a question of
politics, it's a question of action and protection.
Mme Johnson (Maya)
:
Are you reassured by the fact that an auditor will be investigating the
procedures of this group home?
Mme Roy
(Montarville)
:
We already have the report, we already know that there is a lot of problems, we
already know that there is sexual exploitation of those young girls. We have to
act right now.
Journaliste : How
big is the problem?
Mme Roy
(Montarville)
:
It seems to be big enough that a report was made two years ago, and the PQ had
it, and the PLQ had it, and nothing has been done. But it's a real problem. Ask
the policemen, it's a real problem, and nothing has been done that works, it
seems, because we're seeing those girls being rapt, if I can say, and they've
been used for sexual profit, and it's awful. We have to do something. It's not
the time to think what should we do, it's the time to act, and we must act
right now, and there is a real problem that does exist in Québec, what we call
«la traite des personnes».
Des voix
: Merci.
(Fin à 9 h 59)