(Quinze heures
trente-six minutes)
M. Barrette :
Merci. Alors, bienvenue à tous et à toutes pour cette annonce que nous faisons
à l'instant, à savoir l'annonce du lancement d'un projet pilote dans le cadre
du financement à l'activité. Comme vous le savez, les réformes que nous
faisons, et je l'ai toujours dit, étaient basées sur trois étapes : la loi
n° 10, qui est en application aujourd'hui; la loi n° 20 évidemment,
dont on voit déjà les effets; et évidemment le financement axé sur le patient,
si vous préférez, le financement à l'activité.
Maintenant, le
financement à l'activité, pour le faire, exige des conditions qui sont très
spécifiques, et je m'explique. Alors, le financement à l'activité exige que,
pour déterminer le coût de délivrance d'un service, nous puissions faire cette
évaluation-là dans un environnement le plus précis possible. Il est connu, et
même les administrateurs du réseau l'ont dit à plusieurs reprises, que, dans
notre réseau, il est extrêmement difficile, voire impossible, de déterminer
avec précision le coût d'un épisode de soins. Il est possible de déterminer un
certain nombre d'approximations, mais, à partir du moment où nous voulons
déterminer le coût moyen — mettons-le comme ça — d'une
activité clinique, nous devons pouvoir le faire dans un environnement fermé.
Alors, pour
faire cela, nous avons fait d'abord et avant tout certaines analyses, et vous
allez le voir à l'écran... si ça, ça fonctionne et ça ne fonctionne pas. Ça ne
fonctionne pas. Ah! non, il y en a une de trop. Voilà. Ici, je vous indique un
tableau qui vous montre des analyses préliminaires que l'on a faites avec nos
capacités actuelles, nos capacités actuelles qui nous permettent de faire des
analyses de coût d'activités en prenant en compte différents milieux : des
milieux universitaires, des milieux urbains, des milieux moins urbains, en
prenant en considération différentes situations cliniques. Et ce que vous
constatez sur ce tableau, vous constatez qu'il est possible d'évaluer le
niveau... la variation du coût d'une activité au Québec. Et, quand vous
regardez le tableau qui vous est projeté actuellement, vous constatez qu'il y
a, selon divers scénarios, une fourchette selon laquelle le coût d'un service
peut être déterminé. Et, quand vous prenez en considération les chiffres qui
vous sont projetés, vous constatez qu'il y a des économies substantielles qui
sont possibles.
Alors, évidemment,
pour nous au gouvernement, la question n'est pas de savoir si, évidemment, tout
le monde peut se retrouver au meilleur coût absolu, mais bien de faire en sorte
que les gens puissent s'améliorer lorsqu'ils sont dans des écarts qui sont trop
substantiels par rapport à une moyenne, de façon à générer ou à exercer des
services à un coût qui soit approprié. Pour déterminer ce coût-là, l'élément que
vous avez ici, qui a été fait à partir des données que nous avons, nous voulons
aller plus loin. Pourquoi? Parce que les données que vous voyez projetées ici actuellement,
dont vous avez, je pense, copie, les données que vous voyez sont des données
qui sont intrinsèques à notre réseau. Qu'est-ce que ça veut dire, ça? Ça veut
dire qu'il est possible pour nous de déterminer, dans notre réseau, qui est le
meilleur élève de la classe, mais pas nécessairement qui est le meilleur dans
l'absolu.
Si vous me permettez une image, si nous
tous et toutes ici, au moment où on se parle, nous nous mettions sur une piste
de 100 mètres et que nous décidions de faire une course, on trouverait qui
d'entre nous court le 100 mètres le plus vite, mais pas nécessairement la
personne qui court le 100 mètres le plus rapidement possible.
Alors, pour déterminer ça, la personne, ou
le groupe, ou le milieu, ou le coût qui soit le coût le plus optimal, il nous
apparaît nécessaire pour nous de pouvoir faire des évaluations dans un environnement
le plus contrôlé possible, donc dans un environnement fermé. C'est la raison
pour laquelle aujourd'hui nous annonçons un projet pilote selon lequel nous
allons inviter trois cliniques qui ont des facilités chirurgicales de niveau,
de calibre et de qualité comparables à ce qui existe dans notre réseau
hospitalier en termes d'infrastructures, entre autres, et qui accepteront,
s'ils le veulent, ces milieux-là, de fonctionner selon nos conditions, nos
conditions étant des conditions de transparence absolue. Et quand je dis
«transparence absolue», évidemment, vous aurez compris qu'on parle ici
d'ouverture complète des livres.
Alors, c'est la seule façon de pouvoir
déterminer le coût d'un épisode de soins. Un : se trouver dans un
environnement contrôlé sur le plan clinique en termes de qualité, qualité qui,
évidemment, sera celle d'un hôpital, mais évidemment aussi dans un
environnement dont on connaît la totalité des coûts, de façon à ce qu'à la fin
de l'exercice nous puissions déterminer le coût d'un épisode de soins et d'en
faire la transposition dans le réseau hospitalier. C'est à cette seule
condition que l'on peut déterminer avec exactitude le coût moyen d'un certain
nombre de services.
En faisant ce projet pilote là, nous
faisons aussi une pierre, deux coups. Alors, une pierre, deux coups, et je vous
amène à la prochaine diapositive, une diapositive qui vous montre
essentiellement des données statistiques du Québec. Bon an, mal an, le Québec
fait 450 000 procédures chirurgicales au Québec, et, bon an, mal an, il y
a, grosso modo, environ 21 000 patients qui sont en attente d'une
chirurgie au-dessus de six mois et environ 7 000 au-dessus d'un an. Nous
allons profiter de cet exercice-là pour non seulement faire du financement à
l'activité précis, mais aussi saisir cette occasion-là pour diminuer les listes
d'attente, particulièrement pour ceux et celles qui sont dans des situations
d'attente au-dessus d'un an.
Alors, pour nous, il y a là une occasion
de faire, encore une fois, une pierre deux coups : déterminer le
financement à l'activité de façon précise et augmenter notre capacité
chirurgicale dans le réseau public, parce qu'on comprendra évidemment que ce
financement-là sera public. Il n'y a aucun patient qui va débourser quoi que ce
soit dans ces cliniques-là. Ce sera financé à partir du budget de l'État, mais
nous profiterons de cet exercice-là pour s'attaquer aux listes d'attente.
Dans ces cliniques seront évaluées des
procédures de chirurgie moyennes ou mineures, donc rien qui n'excède une
chirurgie d'un jour. Alors, ce ne sera que des chirurgies d'un jour et des
procédures techniques non chirurgicales, telles des endoscopies.
Encore une fois, dans la région de Montréal,
il y a des listes d'attente. Principalement, elles sont à Montréal. Nous
saisissons l'occasion d'avoir cette capacité chirurgicale supplémentaire pour faire
deux choses en même temps : l'évaluation du financement, du coût de
l'épisode de soins et de diminuer nos listes d'attente.
Alors, évidemment, probablement que vous me
direz : Est-ce que nos blocs opératoires sont utilisés à pleine capacité?
Ma réponse, c'est non. Alors, il y a un exercice qui est fait en parallèle dans
notre réseau hospitalier, particulièrement dans les grandes régions de Montréal
et Québec, de façon à ce qu'on optimise l'utilisation de nos blocs opératoires,
et la conjugaison des deux devrait nous permettre d'améliorer notre temps
d'attente en chirurgie.
Alors, nous faisons deux choses ici :
nous nous adressons aux listes d'attente pour le bénéfice de la population,
nous avons un projet pilote qui nous permet de déterminer, dans un
environnement contrôlé, le coût réel d'un service médical qui, évidemment, sera
adapté éventuellement parce que les grilles de salaire ne sont pas
nécessairement les mêmes au réseau public. Au bout de la ligne, c'est le réseau
qui en bénéficie.
Je reviens, je pense que vous en avez copie,
à la diapositive précédente. Il y a des économies substantielles à aller
chercher là. Et quand on parle évidemment d'économies, on parle de performance
et de dégagement de sommes qui peuvent être utilisées ailleurs.
Je termine sur un point, sur les données
que vous avez ici, à l'écran. Les gens ne réalisent pas, la population en général
ne réalise pas, parce que c'est rarement rapporté de cette
façon-là — ce n'est pas une critique en passant, là — alors
rarement réalise-t-on que la médiane du temps d'attente en chirurgie au Québec
est de 33 jours, la médiane, ce qui signifie que 50 % des gens au Québec
sont opérés en dedans de quatre à cinq semaines, ce qui m'apparaît très
performant. Ceci dit, vous comprendrez évidemment que, la priorisation ayant
été faite précédemment, ce sont les cas les plus urgents qui sont faits en
premier et qu'il est normal que les cas moins urgents soient faits après 33
jours. Mais 33 jours, c'est quand même performant.
Ceci dit, je vous laisse et je passerai à
la période de questions avec l'image suivante : il y a 410 blocs
opératoires, salles d'opération au Québec où il y a de l'anesthésie générale,
410, plus ou moins cinq. Imaginez que si nous voulions demain matin réduire
notre temps d'attente pour être opéré de six mois à trois mois, le seul chemin
possible serait de doubler le temps opératoire. Doubler le temps opératoire
exigerait qu'on travaille plus qu'un quart de travail, qu'on puisse
hospitaliser des gens dans un plus court délai, ce qui n'est évidemment pas
possible ou construire des hôpitaux pour avoir le double de salles d'opération.
Alors, à un moment donné, il faut réaliser ce qui est faisable et non faisable.
Dans l'exercice dans lequel on est engagés, qui passe, en termes de performance,
par le financement à l'activité, nous devons passer par ce projet pilote qui
implique trois cliniques : la clinique RocklandMD, la Clinique Dix30 et la
clinique Opmedic à Québec... à Laval, si elles acceptent nos conditions
évidemment. Ça doit passer par là, et, en même temps, bien, nous avons une
opportunité pour diminuer les listes d'attente au bénéfice de la population.
Ce n'est pas un exercice de privatisation.
Je sais que tout de suite vous allez... il y en a qui seront tentés de penser
qu'il y a là privatisation. Pas du tout. Nous saisissons l'occasion publique,
le financement sera toujours public, pour donner de meilleurs services à la
population et, en même temps, de mieux gérer notre réseau. Voilà, merci.
Le Modérateur
: Merci,
M. le ministre. Tommy Chouinard de La Presse m'a demandé à parole en
premier, Jocelyne Richer par la suite.
M. Chouinard (Tommy)
: Bonjour, M. Barrette. Je comprends qu'on étend
à d'autres cliniques le type de partenariat qu'il y a entre Sacré-Coeur et
RocklandMD, si je vous suis bien.
M. Barrette : Alors, c'est
non, la réponse, ou, si vous préférez, c'est un oui dépensé. Alors, il n'y a
pas plus d'entente avec Sacré-Coeur, et, comme je l'ai dit dans le passé, j'ai toujours
eu l'intention d'utiliser publiquement, sans que le patient paie, des capacités
chirurgicales mises à la disposition du réseau et non d'un hôpital. C'est le
réseau qui va gérer, c'est-à-dire nous, au ministère, qui allons gérer les
listes d'attente. Ce n'est pas un chirurgien, dans un hôpital, à qui l'on
donnerait le bénéfice d'avoir accès à un bloc opératoire supplémentaire. C'est
nous, au ministère, qui allons prendre notre liste d'attente, déterminer ce qui
est faisable parce que, dans la liste d'attente, il y a des cas qui doivent
être hospitalisés, donc ça ne s'applique pas, sélectionner les cas qui sont des
cas de chirurgie mineure ou des procédures, telles des endoscopies, qui seront
agglomérés et qui seront évalués dans ces environnements-là.
Alors, ce n'est pas la même chose, c'est
pour ça que je vous dis que c'est un oui dépassé. Ce n'est pas l'entente de
Sacré-Coeur, là, c'est une entente à la condition que ces gens-là acceptent
d'ouvrir tous leurs livres. C'est une condition sine qua non. Il faut qu'on
voie tout passer, les factures, tout, tout, tout. Alors, c'est à cette
condition-là qu'une clientèle sera envoyée là. Donc, pour la clientèle, évidemment,
c'est un bénéfice qui est assez évident.
M. Chouinard (Tommy)
:
Mais là on parle donc des... là, ça vise les chirurgies d'un jour dans tous les
établissements publics des régions concernées.
M. Barrette : Tout à fait.
Alors, quand...
M. Chouinard (Tommy)
: O.K.
Mais là qui... quand on dit : Nous allons offrir à un patient une chirurgie
d'un jour, non pas dans un établissement public, mais dans une clinique privée,
là, qui prend la décision exactement? C'est l'établissement public qui a sur sa
liste...
M. Barrette : Alors, vous
comprendrez évidemment que l'établissement que vous qualifiez de public, qui
est dans ce projet pilote là, va devenir un établissement, à toutes fins
utiles... privé c'est-à-dire, va devenir, à toutes fins utiles, un établissement
public parce que le financement est public.
Ceci dit, c'est nous, au ministère, en collaboration,
évidemment, avec les institutions, qui vont sélectionner les patients.
Autrement dit, là, pour que ce soit bien clair, il y a des listes d'attente, on
les a de façon nominative, on sait qui et avec quel médecin. Nous allons offrir
aux médecins qui ont des listes d'attente de venir faire un groupe de leurs
patients dans cet environnement-là de façon à baisser les listes d'attente et à
nous permettre, dans un environnement contrôlé, de déterminer le coût optimal.
M. Chouinard (Tommy)
: Il
y avait eu une controverse sur le partenariat RocklandMD—Sacré-Coeur, entre
autres, des problèmes, il me semble, là, de la transparence, entre autres
choses. Là, vous dites, vous, est-ce que... Dois-je comprendre que vous tirez
des leçons du partenariat qu'il y a eu avec RocklandMD, mais que vous
reproduisez la formule mais améliorée?
M. Barrette : Je ne reproduis
pas la formule, mais vous pouvez dire que c'est amélioré, mais je ne reproduis
pas la formule... non, mais c'est parce que la formule était une entente avec
un groupe de médecins dans un hôpital. Alors, ça, ça n'existe pas.
Deuxièmement, vous avez raison, je l'ai
dit même, je pense, à plusieurs reprises, les analyses qui ont été faites de
l'entente ou de la collaboration Sacré-Coeur—RocklandMD avaient donné,
dépendamment de qui analysait, des résultats contradictoires. Je n'entrerai pas
dans le détail, mais ce n'était pas à ma satisfaction. Si cette clinique-là
accepte de le faire à livres totalement ouverts, ils recevront des clients, des
patients. S'ils n'acceptent pas d'être à livres totalement ouverts, ils ne
recevront pas de patients.
La problématique ici, évidemment, ce n'est
pas une question de qualité chirurgicale. Les médecins vont aller... c'est les
médecins qui... ce n'est pas des patients qui vont être opérés par un autre
médecin, c'est des patients qui vont se faire opérer par leur médecin qui vont
aller opérer là pour faire les deux choses que je vous ai dites, qui est de
faire une évaluation précise du coût de l'épisode de soins, mais aussi pour
baisser les listes d'attente.
M. Chouinard (Tommy) : Une
dernière chose, peut-être. Vous dites, c'est un projet pilote, mais ça va être
étendu à, éventuellement...
Une voix
: Tommy, ce
n'est pas une entrevue, là.
M. Chouinard (Tommy) : Mais
ça va être étendu éventuellement, donc...
M. Barrette : Non. À cette
étape-ci, là, vous verrez que ce qui sera dans la Gazette officielle est
que c'est un projet pilote qui se terminera au plus tard le 31 décembre 2018.
Le 31 décembre 2018, il y a une analyse qui sera faite, ou vers la fin du
projet, et on en tirera des conclusions. On comprendra, là, qu'ici l'objectif
est d'étalonner, parce qu'on parle ici d'étalonnage, un maximum de
procédures non chirurgicales et chirurgicales, étalonnage qui va être ensuite
appliqué à la grandeur du réseau.
Le Modérateur
:
Jocelyne.
Mme Richer (Jocelyne) : Oui,
bonjour. J'aimerais savoir : Le système de financement axé sur le patient,
en quelle année vous prévoyez que ce serait implanté dans tout le réseau, que
ça sera complété?
M. Barrette : Alors, le plus
rapidement possible. Le financement axé sur le patient va être déployé
progressivement à partir de maintenant. Alors, pour faire ce financement-là, on
doit avoir un environnement qui soit le plus contrôlé, comme je viens de vous
l'expliquer, et l'évaluation d'une procédure va se faire de façon séquentielle.
Dans une des entités que je viens de
nommer, il y en a une, par exemple, qui a six salles d'opération. Alors, il est
parfaitement possible, après évaluation, d'évaluer le coût adéquat à être
rattaché à une procédure si on concentre dans une salle d'opération une
procédure pendant deux mois. Alors, faites le calcul, progressivement, ça fait
deux mois fois six, fois six salles. On s'en va comme ça et il y a un grand
nombre de procédures qui peuvent être étalonnées.
La beauté de ça, c'est qu'évidemment, dans
le monde chirurgical, c'est un environnement qui est un peu gigogne, si vous me
le permettez. Il y a un coût de base auquel on ajoute des coûts plus
particuliers. Même dans les hôpitaux plus complexes, le coût de base d'un bloc
opératoire qu'on va certainement déterminer dans cet environnement-là, quand
arrive, par exemple, le moment d'ajouter un service supplémentaire complexe,
mais très isolé... je vous donne un exemple, perfusionniste dans une salle de chirurgie
cardiaque. Bien, perfusionniste, là, c'est facile, ça, c'est très facile à
évaluer. C'est une machine, la machine qui fait la perfusion, avec un
technicien.
Donc, quand on a le coût de base, on peut
facilement, après, ajuster ce coût-là à la grandeur du réseau et à a grandeur
des autres procédures. Donc, progressivement, à partir de maintenant, le financement
à l'activité axé sur le patient va être déployé secteur par secteur, ce qui
fait que progressivement les budgets historiques des établissements vont
devenir de moins en moins historiques. Le tableau que je vous ai montré il y a
un instant — je vais vous le remettre — ce tableau-là va
devenir le type de tableau qui va être utilisé par tous les administrateurs.
Vous savez, on a souvent parlé, dans le
passé, de concurrence. Alors, retenez ça, la concurrence dans le réseau public
est impossible. La concurrence est une notion d'entreprise privée, de marché.
Et la concurrence se mesure à deux éléments : le premier, la part de
marché — dans le réseau public, il n'y a pas de part de marché à
gagner, c'est un quasi-monopole — et évidemment le profit. Il n'y a
pas de profit dans le réseau public, ça n'existe pas. Alors, il faut introduire
dans le réseau un élément qui permet aux administrations d'avoir un effet
similaire, et cet élément-là est une mesure comparative du financement à
l'activité et de la performance. Vous voyez sur ce document-là, là, qu'il y a
des disparités extraordinaires pour les mêmes procédures d'un hôpital à
l'autre. Et on parle parfois du simple au double, parce qu'on en fait
plusieurs...
Mme Richer (Jocelyne) :, Mais
vous n'avez pas répondu à ma question...
M. Barrette : Bien oui, j'ai
répondu à votre question.
Mme Richer (Jocelyne) : Je
vous avais demandé une échéance, quand est-ce que ça serait terminé. Et j'aimerais
savoir aussi, à terme, combien d'économie vous anticipez grâce à ce
changement-là.
M. Barrette : Alors, on
anticipe des économies qui vont se calculer en centaines de millions de
dollars.
Mme Richer (Jocelyne) : Vous
ne pouvez pas être plus précis?
M. Barrette : Non,
volontairement.
Mme Richer (Jocelyne) : Des
centaines de millions de dollars par année qui vont être économisées.
M. Barrette : Oui, par rapport
à aujourd'hui, qui est le point de référence.
Mme Richer (Jocelyne) : Oui.
Et une chose que j'aimerais savoir en terminant, le financement, le changement
de financement des hôpitaux axé sur le patient, ça fait des années qu'on parle
de ça. Je me souviens d'avoir entendu M. Couillard, quand il était ministre de
la Santé, il y a une dizaine d'années, dire : Il faut aller vers ça, il
faut le faire. Si c'est la huitième merveille du monde, comment se fait-il que
ça n'a pas été déjà implanté?
M. Barrette : Bien, ce n'est
pas nécessairement la huitième merveille du monde, mais c'est la façon, à mon
avis, sensée de gouverner notre réseau. Je vais le répéter, je sais que ce n'est
peut-être pas la réponse que vous attendez, là...
Mme Richer (Jocelyne) :, Mais
pourquoi ça n'a pas été fait? Est-ce qu'il y a une résistance?
M. Barrette : Bien, il y a
toujours une résistance.
Mme Richer (Jocelyne) : Un
manque de volonté? C'est quoi?
M. Barrette : Je pourrais vous
dire : Comment ça se fait que la loi n° 10 n'a pas été faite avant?
Comment ça se fait que la loi n° 20 n'a pas été passée avant ni appliquée
avant? Alors là, on est dans une autre ère. Je vais le répéter, je l'ai dit à
plusieurs reprises, la population s'attend à des résultats. Nous sommes à une
ère où nous avons un niveau de taxation, d'impôt, des individus, des
entreprises, qui est inégalé. Il est clair, et tous les observateurs le disent,
ce n'est pas en injectant plus d'argent — de toute façon, on n'a pas la
capacité d'en injecter vraiment plus d'argent — qu'on va résoudre le
problème.
Donc, s'il y a des marges de manoeuvre à
aller chercher, elles doivent provenir d'une meilleure gestion. Pour avoir une
meilleure gestion, il faut avoir des paramètres qui nous permettent de savoir
ce qui est selon des standards, ce qui ne l'est pas en termes de coûts. Le
financement historique des hôpitaux, par définition, empêchait ça. La
diapositive que je vous montre, le document que je vous montre, là, bien, vous
montre qu'aujourd'hui, avec les données estimées que l'on a, il y a des
disparités qui sont substantielles entre deux milieux, ou trois milieux, ou quatre
milieux, avec des clientèles comparables en âge, en gravité et ainsi de suite.
Alors, ça, ça veut dire qu'il y en a qui
sont plus performants que d'autres. Donc, il y en a qui sont moins performants
que d'autres. Alors, il faut donner à nos administrateurs un point de référence
pour qu'ils et elles puissent s'y référer et prendre la décision. Aujourd'hui,
il n'y a pas un seul administrateur dans le réseau qui est capable de dire :
Moi, dans mon bloc opératoire, là, par exemple, ou dans ma clinique externe de
pneumologie, par exemple, ou dans ma salle d'hémodynamie en cardio, par
exemple, il n'y a pas un hôpital qui est capable de dire : Bien là, c'est
parce que je suis moins bon ou meilleur que mon voisin.
Alors, il n'y a pas de point de référence,
et le point de référence, il faut le déterminer. Et, comme je vous ai dit
tantôt, actuellement, on peut faire une détermination entre nous, mais entre
nous, est-ce que c'est la meilleure possible? Alors, l'objectif de ce projet
pilote là est de déterminer le meilleure possible sans nécessairement l'imposer
au réseau, parce que le meilleur possible, ce n'est pas toujours possible dans notre
réseau. Mais il nous faut un point de référence sur lequel bâtir, et ça, vous
avez raison, ça ne s'est jamais fait. Vous avez tout à fait raison. Ça s'est
fait ailleurs, et je peux vous dire que ça se fait partout dans le monde occidental.
Nous sommes en retard au Québec, mais, sur ce plan-là, nous allons être en
avance au Canada, parce qu'il n'y a personne qui est engagé au Canada dans un
exercice aussi élaboré que le nôtre, parce que vous comprendrez que ça, ça
s'attache au dossier clinique qui va être uniformisé au Québec, parce qu'après
on va pouvoir évaluer la performance, la qualité qu'on va attacher, greffer à
cette analyse-là.
Le Modérateur
:
Jean-Nicolas Blanchet du Journal de Québec.
M. Blanchet (Jean-Nicolas) :
Bonjour. Est-ce que la solution de Médiamed ou de Logibec est impliquée dans le
projet pilote pour coordonner tout ça?
M. Barrette : La réponse,
c'est non à cette étape-ci. Elle pourrait l'être dans le futur. Comme vous le
savez, il y a un avis d'intention qui a été publié, et je ne peux pas faire
plus de commentaires compte tenu de la situation actuelle. À la case départ,
ils ne le sont pas parce qu'on est dans un environnement... et ici, dans un
projet comme celui-là, c'est un environnement qui est très fermé, fermé et
aussi petit, là. Ce n'est pas un gros hôpital de 500 lits et de 40 salles
d'opération, là. On parle ici d'organisation avec, au maximum, six salles
d'opération, donc c'est un environnement très, très, très contrôlé, qui ne
nécessite pas nécessairement une structure informatique qui soit à ce point-là
élaborée. Par contre, ça pourrait être un avantage, le cas échéant.
M. Blanchet (Jean-Nicolas) :
Juste une dernière, là. Dans l'avis d'intention, il est écrit que Logibec,
c'est la seule alternative envisageable, selon la connaissance de marché du
réseau. Il y a une recherche sérieuse et documentée qui doit être faite, selon
la loi, pour déterminer si on peut aller de gré à gré. Ça a été fait. Je l'ai
demandée, je ne l'ai pas obtenue, mais moi, je voulais savoir : Est-ce que
vous avez eu l'assurance qu'il y a eu une analyse de toutes les solutions
comparables, exhaustive, qui a été faite par le réseau? Avez-vous cette
assurance-là?
M. Barrette : La réponse, c'est
oui. Maintenant, et ça va être ça qui va être aussi l'intérêt de l'avis
d'intention, si quelqu'un a un produit réel, opérationnalisable maintenant, bien,
on va le voir, mais moi, ce qui m'intéresse aujourd'hui, ce n'est pas de mettre
en place ou de faire une entente avec une compagnie qui va développer un
produit qui va être opérationnalisable dans cinq ans, sept ans, huit ans, là.
Moi, je suis dans un mode où je dois avancer, et, selon nos analyses, au moment
où on se parle, le produit qui fait ça de façon adéquate, c'est celui-là, d'une
part; et, d'autre part, on l'utilise, nous, au moment où on se parle, d'environ
20 % à 30 % du réseau. C'est déjà un produit, une compagnie avec
laquelle nous avons des contrats.
Alors, nous n'avons pas vu, à date, de fournisseurs
qui ont quoi que ce soit d'équivalent opérationnalisable maintenant.
Le Modérateur
: Charles
Lecavalier.
M. Lecavalier (Charles) :
Bonjour, M. Barrette. Est-ce que vous avez eu des discussions avec ces
cliniques-là? Parce que, bon, vous faites l'annonce, vous les nommez, mais vous
dites : Elles n'ont pas encore accepté. C'est ça?
M. Barrette : Non. Alors, la
semaine dernière, elles ont été avisées que nous allions publier, dans la Gazette
officielle, ce projet-là. Et ce projet-là, encore une fois, c'est un
projet... vous pourriez le décrire comme ça, c'est un projet qui vise à faire
ce que j'ai dit, mais dans nos conditions. On les invite. S'ils ne veulent pas,
ils ne veulent pas. Autrement dit, s'ils ne veulent pas les ouvrir, leurs
livres, s'ils ne veulent pas nous donner la transparence absolue, il n'y en aura
pas avec eux autres, là.
Alors, au moment où on se parle, il y en a,
et je vais leur laisser le soin de terminer leurs entretiens avec nous. Il y en
a au moins une, probablement deux, et je pense qu'à la fin il y en aura trois
qui sont prêtes à le faire. Mais encore une fois, là, j'exige la transparence
absolue, absolue, absolue, là, de l'investissement initial parce qu'à un moment
donné, dans le financement à l'activité, là, il faut pouvoir séparer ce qui est
immobilisations de frais opérationnels. Il y a le personnel, il y a les
fournitures médicales et ainsi de suite. Il y a le quotidien et il y a les immobilisations
qui ont un coût. Alors, il faut pouvoir faire la séparation de ça de façon à ce
qu'on puisse correctement faire la translation avec le réseau public. Et, pour
faire cette translation-là, il faut que les équipements qui sont en place
soient de calibre comparable à ce que l'on a, et, dans les trois cliniques en
question, c'est le cas.
M. Lecavalier (Charles)
:
Et, si je comprends bien, donc ces trois cliniques-là, si le projet pilote a
lieu, vont devenir un peu l'espèce de mesure officielle de combien ça coûte des
opérations d'un jour dans la région de Montréal?
M. Barrette : Dans le Québec.
M. Lecavalier (Charles)
:
Au Québec?
M. Barrette : Alors, il est
possible... d'ailleurs, c'est possible. Il est possible que, dans cet
environnement-là contrôlé, on détermine que le public est meilleur que le
privé. C'est possible, mais on va le savoir. Je le répète, actuellement les analyses
que l'on a montrent qu'il y a des écarts substantiels dans le réseau, mais c'est
nous avec nous. Alors, le, entre guillemets, privé dit toujours : On peut
faire mieux, à meilleur coût. Parfait.
L'intérêt pour moi, là, il est de trois
ordres. Un, vous dites que vous êtes capable de faire mieux? On va aller voir.
L'environnement est fermé, contrôlé, la preuve va être faite. Le deuxième
intérêt, évidemment, c'est l'étalonnage comme je vous l'ai dit, là. Le
troisième intérêt, c'est la gestion de listes d'attente. Dans ce projet-là, le
réseau public sort gagnant sur tous les points. Il est possible, là, que je
baisse les listes d'attente? C'est sûr que je vais les baisser, les listes
d'attente. Il est possible que j'étalonne? Je suis sûr que je vais pouvoir
étalonner parce que le public, là, nous par rapport à nous-mêmes, on le fait.
Maintenant, est-ce qu'il est possible que
ça montre que le public est meilleur que le privé? Il est possible aussi que
l'inverse, mais je vais le savoir. Là, actuellement, je ne le sais pas,
comprenez-vous, et il n'y a personne au Québec qui est capable de le savoir. Nos
structures financières ne sont pas construites pour générer un niveau de
précision financière en termes de coût d'un service suffisamment précis. Alors,
si, moi, je suis pour faire du financement à l'activité, il faut que mon coût
que je vais déterminer soit le plus précis possible. Attention! on ne parle pas
ici d'un coût uniforme au Québec, mais la référence va être uniforme au Québec.
Je vous donne deux exemples. C'est bien
évident que... on va prendre un cas simple, une prothèse de hanche. Faire une
prothèse de hanche de première intention à 65 ans, là, c'est pareil au Québec.
Faire une deuxième, remplacer une vieille prothèse puis la remettre dans un
hôpital d'enseignement, ce n'est pas le même coût. Alors donc, il faut un
coefficient. Et mettre le coût d'un bloc opératoire qui performe à haut débit
et de mettre ça, par exemple, à Gaspé, ça serait une erreur parce qu'à Gaspé
ils ne sont pas capables d'utiliser le bloc opératoire cinq jours par semaine.
Alors, il doit y avoir des coefficients,
mais, dans tous les cas de figure, il faut un point de référence. Alors, l'objectif
ici est de déterminer le point de référence duquel on va partir pour ajuster
nos coûts dans le réseau. Alors, je boucle ma boucle, si le privé peut le faire
moins cher, là, qu'on fait la démonstration qu'en organisant le travail
différemment et ainsi de suite, parce que là il y aura une souplesse, bien,
c'est parfait, on l'aura montré. Si c'est équivalent, bien, on l'aura montré
aussi. Et, si c'est plus cher que dans le public, on l'aura montré aussi. Dans
tous les cas, pour le financement à l'activité, j'ai rempli la première
condition fondamentale qui est de déterminer avec précision le point de
référence. Ensuite, on l'ajuste. Par-dessus ça, je diminue les listes
d'attente.
Et, oui, au même moment, là, dans la
région de Montréal, dans la région de Québec, il y a un exercice qui est
commencé, au moment où on se parle, d'optimisation de l'utilisation des blocs
opératoires. Il y a du temps opératoire de pas utilisé au Québec. Je vais faire
une parenthèse, là. Dans la négociation que j'ai faite avec Mme Laurent à la
FIIQ, là, on l'a adressé, ça faisait partie des enjeux. Alors, des blocs
opératoires qui ferment à 2 heures, là, on va s'y adresser, là, en
collaboration avec les syndicats, de façon à ce qu'on aille chercher la marge
qu'on n'a pas. C'est ça, notre objectif. Je ne peux pas tout faire dans une
seule journée, là, mais il faut commencer quelque part. Ça, c'est la bonne
façon de commencer. Alors, ici, vous comprenez, là, qu'on ne parle pas de
privatisation, là, pour ceux qui vont s'émouvoir, là, on parle ici de saine
gestion du réseau.
M. Vigneault (Nicolas) : Dr
Barrette, où vous allez trouver les économies, là? Vous dites : Ce n'est
pas certain qu'on va pouvoir l'appliquer à la lettre, ce taux-là ou ce coût-là
qu'on va avoir déterminé. Comment vous allez l'implanter dans le réseau et
arriver aux millions de dollars d'économies dont vous avez fait mention?
M. Barrette : Alors, quand
vous regardez le tableau sur lequel vous venez de jeter un coup d'oeil, vous
constatez que, dans nos analyses internes, on constate, avec des méthodes
comparables, c'est-à-dire... je m'excuse, je me suis mal exprimé. Avec une
méthode identique pour des situations comparables, on constate qu'il y a des
écarts de coûts qui sont substantiels, qui vont du simple au double. En
partant, ça, ce n'est pas normal. Ce n'est pas normal. Alors, on ne peut pas
avoir... c'est normal d'avoir une fourchette de plus ou moins x pour cent, mais
ce n'est pas normal d'avoir une fourchette de plus ou moins 50 %, parce
que 100 %, simple au double, là, c'est une moyenne, plus ou moins...
Ce n'est pas ça, là, on ne peut vivre avec
ça. Alors, moi, je vais déterminer le point de référence, et ça sera l'outil
des administrateurs qui vont voir le Québec eux aussi, là. Ils vont voir le
Québec. Alors, les administrateurs vont dire : Voici, moi, mon niveau de
performance, il est celui-ci, et, quand je regarde les autres au Québec, je me
situe à telle place. Je suis dans le premier tiers, dans le deuxième tiers,
dans le troisième tiers. Alors, c'est bien évident, là, qu'on ne peut pas
demander à tout le monde d'être le meilleur au Québec en même temps, là. Ça ne
se peut pas. Mais évidemment on va demander à tout le monde d'être dans un
regroupement, là, qui soit plus près de la moyenne. C'est là que sont les
économies et ces économies-là évidemment, ce n'est pas pour aller dans le fonds
consolidé de l'État, là, c'est pour nous permettre de faire d'autres choses.
Alors, je le répète, là, on ne peut pas
faire tout ce qu'on a à faire au moment où on se parle au Québec en injectant à
l'infini de l'argent. Il n'y en a pas de l'argent à l'infini.
Le Modérateur
: Est-ce
qu'il y a d'autres questions? Ça met fin à cette conférence de presse. Merci,
tout le monde.
(Fin à 16 h 10)