(Onze heures trente-neuf minutes)
M. Lisée
: Aujourd'hui,
c'est la journée écran de fumée. Le ministre Barrette est responsable de la
perte de 934 emplois dans des pharmacies partout au Québec, est responsable du
fait que, pour la moitié des pharmacies, il y a une réduction des heures
d'ouverture de six heures par semaine. Alors, comme il ne voulait pas que ce
soit la nouvelle, il a décidé d'inventer un scandale. Il a décidé que quelqu'un
était responsable de quelque chose d'autre et, dans un scrum qui a duré 30
minutes, il a décidé de salir la réputation de quelqu'un pour se protéger
contre la mauvaise nouvelle qu'il a lui-même créée, c'est-à-dire d'avoir réduit
l'accès à des services de soins, des services de santé dans toutes les villes
du Québec, dans tous les quartiers du Québec. C'est la méthode Barrette.
Alors, je suis le porte-parole du Parti
québécois pour toutes ces questions de médicaments, mais, comme Diane a été
scandaleusement accusée de façon mensongère ce matin, je lui ai demandé de
rétablir les faits et je ferai un commentaire par la suite.
Mme Lamarre : Alors, de toute
évidence, le ministre confond les rôles d'un ordre professionnel et d'un
syndicat. En fait, le syndicat, ça, je pense qu'il sait très bien ce que c'est
parce qu'il continue un peu, dans certains cas, d'agir comme s'il était encore
responsable du syndicat des médecins. Mais, peu importe, moi, comme présidente
d'ordre, j'ai toujours bien fait la distinction entre la partie de négociation
des honoraires et la partie d'un ordre professionnel.
Alors, présidente d'un ordre
professionnel, ça n'implique pas le travail, la perception ou la négociation de
quelque honoraire que ce soit. Donc, quand le ministre prétend des choses au
niveau de ristournes ou de toutes sortes d'attitudes, il est vraiment dans
l'erreur. C'est du salissage comme lui seul, je pense, sait le faire. Je pense
qu'il est vraiment le champion du salissage. Et j'ai une réputation d'une
grande intégrité comme présidente de l'ordre et, je vous dirais, depuis que je
suis députée aussi, parce que j'ai fait bien attention, moi, de ne pas me mêler
des histoires de pharmaciens et de confier ça à mon collègue Jean-François. Et
donc je connais les limites, alors que lui pousse et tire du même côté depuis
qu'il est ministre.
Alors, moi, je veux simplement vous dire
que, comme présidente d'ordre, j'ai toujours bien agi, correctement, dans ces
dossiers-là. Le processus, quand les gens ont une plainte à formuler par
rapport à un coût d'une ordonnance, par exemple, c'est de les référer aux
syndics, et les syndics sont vraiment responsables de vérifier cette mesure-là,
et c'est ce qui a été fait.
M. Caron (Régys) : Le
ministre de la Santé, Mme Lamarre, a dit ceci, en substance : À titre de
gardienne du bien commun et de présidente d'un ordre professionnel, Mme Lamarre
aurait dû rendre compte du fait que des pharmaciens compensaient le
plafonnement des honoraires à l'endroit du régime public d'assurance
médicaments pour charger plus cher vers un régime privé, et c'est les assurés
qui ont payé pour ça. Il y en avait pour plusieurs millions, a-t-il dit, donc
faute morale, même si la chose était légale.
Est-ce que... Où M. Barrette a-t-il erré là-dedans,
là? Y a-t-il eu faute morale? Auriez-vous dû dire au public : Oui, les
pharmaciens se reprennent auprès des assureurs privés?
Mme Lamarre : Les honoraires
sont fixés de différentes façons. Avec le régime d'assurance maladie du Québec,
ce sont des honoraires fixes; avec les assureurs privés, ce sont des honoraires
qui fluctuent, et ce, depuis 1997, lorsque le régime a été instauré au niveau
du régime général d'assurance médicaments. Donc, ce n'est pas nouveau, là, ça
date de 1997, cette différence entre les honoraires.
Quand il y a quelque chose qui apparaît
comme une dérive, il y a un transfert au niveau du syndic. Vous avez dû voir,
dans Le Soleil, même, M. Caron, ce matin, il y a un patient qui,
semble-t-il, a démontré qu'entre le moment où il était assuré avec son régime
privé et le moment où il passe au régime public, ça lui coûte plus cher au
régime public qu'au régime privé. Donc, il y a des cas individuels qui peuvent
se nuancer.
Maintenant, il y avait quand même un enjeu
au niveau de la transparence des prix, et nous, on pense que c'est ça qui doit
être bien démontré. Et j'ai demandé, quand j'étais présidente de l'ordre, un
rapport, qui est le rapport Montmarquette, qui a été complété et qui définit et
qui donne des règles pour améliorer la transparence des prix, rapport qui n'a
pas été remis pendant que j'étais encore présidente, qui a été remis après que
j'ai quitté la présidence de l'ordre, mais je l'avais demandé.
Donc, j'ai bien fait mes devoirs. J'ai une
réputation d'intégrité irréprochable, et, s'il y a quelque chose que j'ai
toujours très bien fait, c'est défendre l'intérêt de la population. Je pense
que j'ai également travaillé très fort au niveau de l'amélioration de l'accès
et que le ministre est peut-être un peu jaloux de ce que j'ai réussi comme présidente
de l'ordre.
M. Chouinard (Tommy) : Mais
reconnaissez-vous qu'il y a eu compensation en exigeant davantage de ristournes
de la part des assureurs privés? Est-ce qu'il y a eu...
Mme Lamarre : Depuis 1997. Il
y avait cette possibilité-là depuis 1997.
M. Chouinard (Tommy) : Oui,
mais lorsqu'il y a eu plafonnement en 2010‑2011, là, lorsqu'il y a eu le
plafonnement, est-ce qu'il y a eu effectivement des pharmaciens...
Mme Lamarre : Oui, les
assureurs privés le prétendent parfois, puis, dans d'autres cas, ce n'est pas
toujours aussi clair que ça. Alors, cette compensation-là, elle n'a pas à être
définie comme étant illégale ou immorale. C'est une compensation qui doit être
vérifiée avec l'AQPP, parce que c'est l'AQPP, le syndicat des pharmaciens
propriétaires, qui négocie avec les assureurs privés aussi et qui détermine...
M. Chouinard (Tommy) : Il dit
que vous l'avez probablement fait vous-même, c'est-à-dire que, comme il y a eu
plafonnement des allocations professionnelles de la part du gouvernement, que
vous...
Mme Lamarre : Ça, ça s'est
fait en 2010 par le ministre Bolduc.
M. Chouinard (Tommy) : ...le
ministre Bolduc, mais vous avez probablement vous-même, dit-il, fait en sorte
d'augmenter vos allocations qui sont exigées... perçues auprès des assureurs
privés.
Mme Lamarre : Je m'excuse...
M. Chouinard (Tommy) : Il dit
que...
Mme Lamarre : Les honoraires,
pas les allocations. Les honoraires, vous voulez dire?
M. Chouinard (Tommy) : Oui,
les honoraires, là, les ristournes.
Mme Lamarre : Oui. Alors, ça, il
y a des approches qui sont différentes et il y a des pharmaciens qui, effectivement,
ont pu augmenter ces honoraires-là. Les patients avaient la possibilité, quand
ils voyaient un dérapage, de le référer au syndic. Parce que les présidents
d'ordre ne s'occupent pas de facturation individuelle.
M. Chouinard (Tommy) : ...parce
que, lui, c'est ce qu'il affirme, là, vous l'avez probablement fait vous-même.
Mme Lamarre : Que moi-même?
M. Chouinard (Tommy) : Oui.
Mme Lamarre : Bien, voyons
donc!
M. Vigneault (Nicolas) :
Avez-vous augmenté vos ristournes? Avez-vous augmenté vos tarifs vous-même?
Mme Lamarre : Mais non.
Voyons! De quoi... Vraiment, il mélange tout.
M. Chouinard (Tommy) : O.K.
Mais vous dites : Ça peut être référé au syndic. Est-ce que...
Mme Lamarre : Parce que là
vous faites référence à deux...
M. Chouinard (Tommy) : Sous
votre présidence de l'ordre, est-ce que le syndic a été saisi de plaintes au
sujet d'honoraires exagérés, exigés depuis le plafonnement...
Mme Lamarre : Écoutez, le
syndic est très indépendant par rapport au président de l'ordre, mais, oui, de
temps en temps, on sait que le syndic enquête, sans savoir sur quel pharmacien.
Oui, il y a eu des dossiers qui ont été portés à son attention. Donc, ça, on le
sait. Maintenant, comment il les a réglés, je ne peux pas vous le dire, mais c'est
certain qu'il peut y avoir des enquêtes qui sont faites.
Maintenant, déterminer les honoraires d'un
médicament, ça relève vraiment... si l'honoraire est juste et raisonnable, c'est
le syndic qui peut faire ça. Donc, moi, je n'ai jamais été mêlée dans ces
éléments-là.
M. Boivin (Simon) : Mais la question
est de savoir si, dans le cas de vos pharmacies à vous, Mme Lamarre...
M. Lisée
: Elle a dit
non. Elle a dit non.
M. Boivin (Simon) : ...s'il
est arrivé que vous compensiez le plafonnement qui était payé par les fabricants
par une augmentation de ce que vous chargez aux assureurs privés?
Mme Lamarre : Moi, je vais
vous dire quelque chose d'encore plus précis que ça. Je suis une pharmacie
indépendante, je n'appartiens à aucune chaîne ou bannière et je n'ai jamais touché
de ristournes avant qu'elles soient autorisées par le ministre Bolduc. Et ça,
vous pouvez le vérifier, je n'ai aucune inquiétude.
Donc, de me faire salir dans ce
dossier-là, c'est encore plus sur un plan personnel. Moi, je vous avoue que je
ne savais pas qu'il m'avait attaquée même sur mon plan personnel de ma
pharmacie. C'est vraiment, vraiment très bas de sa part. Vraiment. Vous savez,
ce que je constate du ministre Barrette, là, c'est que, quand on réussit à
démontrer certaines de ses incompétences, ou peut-être, dans ce cas-ci, parce
qu'on a évoqué l'incorporation des médecins, quand on touche à de l'argent, il
se transforme, il se métamorphose en quelqu'un qui devient vraiment sans aucun
scrupule. Et là, vraiment, je vous le redis, je n'ai même jamais touché aux
allocations quand... Je n'en ai jamais reçu, moi, de ça. Pas de chaîne, pas de
bannière, indépendante, donc je n'avais que ma rémunération autorisée.
Quand le ministre Bolduc a autorisé en
2010, j'ai dit : Ah! bien là, je vais pouvoir avoir 15 %. Et je n'ai
pas eu jamais plus que ça. Alors...
M. Lisée
: Je vais
résumer. Oui. Je vais résumer. Écoutez, donc, Diane a été très, très claire et
transparente avec vous. Sur le fond des choses, une problématique sur les
honoraires des assureurs... des pharmaciens pour les assureurs privés existe
depuis 1997, est légale, a été accélérée par un plafond imposé en 2010 par un ministre
libéral qui n'a pas agi pour le reste des honoraires, pour les réguler. Il
aurait pu le faire, les rendre transparentes, il aurait pu le faire. Donc, le ministre
Bolduc ne l'a pas fait, le ministre Barrette ne l'a pas fait.
La présidente de l'ordre, elle, elle a agi
de deux façons. D'abord, lorsqu'il y avait des dérives, le syndic a fait son
travail indépendant, et elle a réclamé une étude pour voir quelle était
l'ampleur du phénomène et quel remède on pouvait y apporter, l'étude
Montmarquette, que son successeur a reçue, à l'ordre. Le travail de Diane est
exemplaire sur cette question-là comme sur les autres.
Et aujourd'hui, tout ce qu'on a, c'est un ministre
de la Santé qui est responsable de la réduction des services de pharmacie
partout au Québec et qui décide que, plutôt que de prendre ses responsabilités,
d'admettre son erreur, décide de salir une collègue parlementaire. Alors, je
pense que ça dit quelque chose sur le personnage et j'espère que vous, les
médias, vous n'allez pas tomber dans son panneau. Le scandale qu'il y a aujourd'hui,
c'est le scandale d'un ministre qui réduit les services à tous les patients du Québec
et qui essaie de s'en tirer en accusant faussement une collègue parlementaire. Je
vous remercie.
M. Gagnon (Marc-André) : Sur
l'incorporation des médecins, rapidement, le ministre Barrette réplique en vous
attaquant tous les deux, entre autres — bien, en fait, son cabinet,
là — en disant que vous êtes... Si vous pouvez peut-être retourner au
lutrin...
Des voix
: ...
M. Lisée
: Je suis en
commission parlementaire. Écoutez...
M. Gagnon (Marc-André) : Oui.
Que vous êtes tous les deux, donc, aussi incorporés.
M. Lisée
: Nous sommes
tous les deux incorporés et nous n'avons pas une clientèle captive de patients
québécois qui n'ont nulle part d'autre où aller que dans mon entreprise de
communication, qui est dormante, et que dans la pharmacie de madame.
C'est absurde. C'est absurde, c'est tout.
Mme Lamarre : Il n'y a pas de
mal à s'incorporer. Ce qui est...
M. Lisée
: Il faut que
j'aille à la commission sur les médicaments. Je...
Mme Lamarre : Alors,
l'incorporation, elle est permise et elle est souhaitée au Québec. La seule
chose qu'on dit, c'est qu'actuellement il y a certains médecins qui reçoivent
comme rémunération exclusivement de l'État un chèque qui arrive sur leur bureau
à toutes les deux semaines. Et ça, ça ne nous apparaît pas refléter l'esprit
dans lequel une incorporation doit être faite et les abris fiscaux auxquels
elle a droit. C'est tout.
M. Gagnon (Marc-André) : M. Leitão
disait encore aujourd'hui : Ça appartient aux ordres...
Mme Lamarre : Alors, bien, je
pense qu'il y a une partie qui appartient au gouvernement.
Le Modérateur
: Merci.
(Fin à 11 h 50)