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Point de presse de M. Amir Khadir, député de Mercier

Version finale

Wednesday, March 9, 2016, 14 h

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Quatorze heures sept minutes)

M. Khadir : Alors, bonjour tout le monde, merci d'être présents. Actuellement, la commission santé siège alentour de l'étude du projet de loi n° 81. Nous avons des invités qui viennent de divers secteurs d'activité touchant, disons, la production et la consommation des médicaments au Québec. Ça fait plusieurs jours que nous entendons divers témoignages. Aujourd'hui, nous avons l'immense plaisir, à l'Assemblée nationale, de recevoir un expert économiste qui a agi à titre de P.D.G., de directeur général de Pharmac, ce qu'on appelle le Pharmaceutical Management Agency, de la Nouvelle-Zélande, une entreprise... une régie, en fait, publique, qui, en Nouvelle-Zélande, à la fin des années 90, a été instituée pour mener des processus d'appels d'offres exactement dans l'esprit de ce que le projet de loi n° 81 est appelé à être, c'est-à-dire des appels d'offres pour trouver la possibilité de faire des économies dans l'achat des médicaments du Québec.

Je signale simplement qu'au Québec on est la province au Canada qui payons les plus hauts prix à l'échelle canadienne, 40 % au-dessus de la moyenne canadienne. Il est temps de mettre fin à ça, et l'expérience nouvelle-zélandaise pourrait beaucoup nous aider, et c'est à ce titre que j'ai invité M. Matthew Brougham à nous parler de l'expérience nouvelle-zélandaise. M. Matthew Brougham est donc économiste consultant et il va donner sa présentation à 5 heures à la commission santé.

M. Brougham (Matthew) : Alors, bonjour, and thank you for bringing me here to Québec to talk about my experiences of Pharmac in New Zealand.

Today, I plan to really talk about two elements of Pharmac. One, more generally, trying to distill for the committee exactly what I think has been the key reasons for Pharmac's success in managing pharmaceuticals in New Zealand. I'm not here to proselytize about Pharmac, I just… really, I'm here to try and draw out, from my experience, what I think matters in terms of having a drug plan that works for the public good as much as for the private good.

And the second element of my presentation today will be to talk more specifically about tendering and the experience that New Zealand has had with tendering, and in particular tendering for the sole supply of a pharmaceutical or a particular presentation of a pharmaceutical.

I think it should be understood that it comes as no surprise to anyone, particularly an economist, that, if you want to harness the benefits of competition in the marketplace, we turn to tendering, governments turn to tendering to let supply contracts. This is considered the best way to do it.

And more than that, pharmaceutical manufacturers also turn to tendering when they are looking for their suppliers, for the suppliers of their ingredients and their manufacturing prices. And so it should come as no surprise to anyone that, if you want to harness the benefits of competition in the marketplace for the good of everyone, then we turn to tendering.

And so the consequences of tendering… and I'm going to talk a lot about this today in more specifics, but, well, it will tend to reduce the costs and therefore result in less revenue for some suppliers and some distributors in particular.

I'm going to tell you what it won't do. It won't lead to those suppliers disappearing. There's still going to be a sound and strong market for their products. It won't lead to pharmacists disappearing. This has been my experience in New Zealand as well. We have seen virtually no closures of pharmacies and a continuing growth in that distribution sector. It doesn't lead to more out of stocks of pharmaceuticals. What leads to out of stocks of pharmaceuticals tend to be very, very independent of the supply arrangements that are used to supply pharmaceuticals to particular markets, and that's because pharmaceutical manufacturing by its very nature is inherently brittle, and at times things go wrong. This happens independently of the way pharmaceuticals are supplied to the market. And finally it's been my experience that, when you have a sole brand of a generic compound, you have not seen a reduction in health to patients. Occasionally, you will get examples where patients experience a reaction to, say, an excipient within the product itself. And usually, under these circumstances, the organizations managing access to pharmaceuticals can take this into account, and deal with it, and make access available for specific patients. And indeed, if these issues become a problem for a greater proportion of the population, then one moves away from sole supplier tendering and goes to multisupplier tendering.

And again, what I want… the message I want to give here is that, yes, there are always issues that arise with any change to supply arrangements, but none of these are unmanageable. They are to be expected and are entirely manageable.

That's really the nature of what I'm here to talk about today, and I'm here to answer any questions as the consequence of the sorts of experiences that I've had running these sorts of processes in New Zealand.

M. Khadir : I think we have a question there.

M. Lavallée (Hugo) : Yes, but I have a question for you, actually.

M. Khadir : OK, it's good, it's good.

M. Lavallée (Hugo) : Qu'est-ce que vous pensez, donc, du projet de loi qui est devant nous? Parce que ça fait longtemps que vous parlez du coût des médicaments. Pensez-vous véritablement qu'il y a une réelle volonté de la part du ministre d'aller dans la direction que vous proposez de…

M. Khadir : Je l'espère bien. C'est ce que me dit Gaétan Barrette. Gaétan Barrette m'a sollicité, à peu près en novembre, pour lui fournir, même, la documentation sur les processus d'appels d'offres en Nouvelle-Zélande, parce que c'est un processus très, je dirais, ordonné et qui commence quelque part à chaque année à la fin du mois d'août. Les différents partenaires sont avisés, ils ont un mois pour répondre, pour… disons, les réactions au nouvel appel d'offres qui va venir, pour ajuster, disons, les appels d'offres. Donc, je lui ai fourni toute cette documentation-là.

J'espère bien que M. Barrette a un plan réel de réduction du coût des médicaments par un processus d'appel d'offres qui va très large. Mais, avant de pouvoir juger de ça... bien, avant de pouvoir juger de la pizza qui est annoncée, comme je l'ai dit tout à l'heure, j'attends de goûter la pizza. Pour le moment, on m'annonce qu'on va nous livrer de la pizza. Il va falloir la manger, la goûter pour savoir si vraiment c'est ce qu'on nous promet, s'il y a de la chair alentour de l'os.

Le problème, c'est qu'un document retrouvé sur le site du ministère de la Santé, qui est un peu l'étude d'impact… c'est ce qu'on appelle les impacts réglementaires, hein, les impacts des mesures réglementaires ou quelque chose comme ça… qui n'a pas été rendu disponible à la commission. Je ne sais pas pourquoi le ministre ne l'a pas déposé. Dans ce document-là, sur lequel on est tombés par hasard, régulièrement ceux qui font l'analyse pour le ministère rassurent le marché qu'il n'y aura pas beaucoup d'impacts sur eux, qu'il n'y aura pas beaucoup de changements pour leur structure industrielle. Bien, alors, s'il n'y a pas beaucoup d'impacts sur eux, qui est-ce qui va…

On vient d'entendre Matthew Brougham, qui a dirigé Pharmac, de dire : Oui, il y a des gens qui vont y perdre. Les grands fabricants de pilules, ils vont y perdre. Les grossistes ou ceux qui touchaient des ristournes de 15 % à 30 %, ils vont y perdre. Donc, il va y avoir un impact si ça doit être sérieux. Si ça doit être sérieux, si ça doit rencontrer le succès de la Nouvelle-Zélande, offrir des économies aux contribuables, il faut que ça ait un impact. Donc, c'est pour ça que je suis réservé et je ne peux pas applaudir encore le ministre, malgré la demande qu'il m'a faite hier après-midi en commission.

Je ne sais pas si c'est pour ça que vous posez la question. Parce qu'hier, en commission, après une intervention, il disait : Bien, j'attends encore tes applaudissements. J'ai dit : Oui, mais j'applaudirai la pizza quand je goûterai à la pizza. Pour le moment, c'est juste une annonce.

M. Lavallée (Hugo) : Et une autre question pour vous. Vous avez peut-être vu notre série de reportages sur les difficultés des médecins étrangers à se tailler une place dans le système de santé québécois. M. Barrette a commenté ça. J'aimerais avoir votre vision de cette chose-là. Est-ce que votre... Premièrement, est-ce que vous voyez qu'il y a vraiment un problème actuellement?

M. Khadir : Oui, il y a un problème. Ce n'est pas nouveau.

M. Lavallée (Hugo) : C'est quoi, le noeud du problème, selon vous?

M. Khadir : Moi, quand j'étais résident, déjà, je me rappelle — j'étais à Saint-Luc — que des médecins étrangers ont fait une grève de la faim à l'Église unie sur... ou un édifice proche de l'Église unie sur Sainte-Catherine. Ça, ça doit être au début des années 90. En 2007, j'ai eu, disons... il y a eu toute une campagne qu'on a menée, puis j'ai eu un affrontement, si vous voulez, sur la scène publique avec le président d'alors du Collège des médecins, M. Lamontagne, qui prétendait qu'on n'en avait pas besoin, alors que le Québec en avait besoin.

Il a été démontré qu'il y a des dizaines de places en résidence en médecine familiale et en spécialités qui sont laissées vacantes. Il y a, par ailleurs, plusieurs dizaines de médecins étrangers qui ont passé toutes les étapes, tous les examens, y compris l'examen de l'Office de la langue française, donc, dont le dossier est recevable par la CREPUQ pour qu'ils puissent postuler sur ces postes-là, mais on ne les associe pas, on laisse les... on préfère laisser ces postes-là vacants.

J'espérais que M. Réjean Hébert, qui était un de nos alliés à l'époque où il y avait ce problème-là, une fois ministre, règle le problème. Il ne l'a pas fait. Le ministre Couillard, avant lui, m'a répondu — je me rappelle, on était au Centre des congrès lorsque je l'ai rencontré à ce sujet — que : Écoute, le problème, c'est que les transferts fédéraux pour la reconnaissance des diplômes puis pour l'intégration des immigrants sont détournés vers le fonds consolidé plutôt que d'être alloués à ça; si on nous donnait cet argent-là, on pourrait le donner aux facultés pour les besoins qu'ils ont pour accompagner.

Donc, on a ces problèmes-là qui font qu'on n'a pas réussi à intégrer les médecins étrangers. Les gens en région en ont besoin. Sur la rue, je suis sûr, à Québec, allez vous promener sur la rue, ici même, alentour de l'Assemblée nationale, vous allez rencontrer plusieurs personnes qui disaient : Moi, je serais plus qu'heureux d'adopter un de ces médecins puis d'en faire un médecin pour vous. Que les facultés, l'ordre des médecins du Québec... le Collège des médecins du Québec et le ministère arrêtent de se renvoyer la balle puis prennent les décisions qu'il faut pour que ça se passe.

M. Lavallée (Hugo) : Donc, le noeud, c'est quoi? C'est un manque de volonté politique ou c'est que vraiment les facultés de médecine?

M. Khadir : C'est un manque de volonté. C'est un manque de volonté politique évident parce que les facultés disent, avec le sous-financement chronique des programmes, ils n'ont pas les ressources pour le six mois à neuf mois supplémentaires qu'en moyenne ça prend pour la mise à niveau et l'adaptation des médecins étrangers lorsqu'ils viennent pour les programmes de résidence. Six mois sur un programme de deux ans à cinq ans, d'accord, ça demande des sous. Puis rappelons-nous, dans leurs négociations pour leur augmentation de la rémunération, c'est un levier de négociation pour les fédérations médicales. Ils ont dit aux médecins de ne pas accepter d'offrir de temps supplémentaire pour leur formation.

Donc, c'est là, le noeud du problème. Tout le monde utilise, à différents niveaux, les médecins, soit comme otages, ces médecins étrangers, en les utilisant comme levier de négociation ou bien c'est simplement parce que... l'autre possibilité — mais là je suis dans la théorie du complot, entre guillemets — c'est que l'establishment des fédérations voit très bien que, si on accepte des médecins étrangers, c'est la tarte qui se divise.

M. Lavallée (Hugo) : Donc, vous, vous disiez que vous aviez vous-même eu une période... de votre histoire.

M. Khadir : Oui, si vous regardez, en 2007‑2008, j'ai fait campagne...

M. Lavallée (Hugo) : Non, mais je parle de votre expérience personnelle comme médecin, vous, avez-vous eu des...

M. Khadir : Non, non, non. Moi, j'ai grandi ici, là, j'ai étudié ici, je n'ai pas eu ce problème-là.

M. Lavallée (Hugo) : Mais peut-être vos proches, ou je ne sais pas.

M. Khadir : Mais, non, je n'ai jamais eu de proches qui étaient affectés par ça, mais il y a des dizaines de médecins formés en Afrique, en Afrique du Nord, dans les pays latino-américains ou même d'Europe qui ne sont pas reconnus ici parce qu'il y a une chasse gardée qui est orchestrée de différentes manières, et tout le monde se renvoie la balle. Vous allez voir le Collège des médecins, ils disent : C'est la faute du ministère. Vous allez voir le ministère, il va dire : Ah! c'est les facultés qui ne sont pas capables de les accompagner, ils ne veulent pas les accepter, hein? Le CREPUQ, la conférence des recteurs des universités qui, à chaque année, doit décider... Quand tu vas voir les facultés, ils disent : Bien, c'est parce que le gouvernement ne nous donne pas l'argent nécessaire pour assumer la formation supplémentaire.

Vous avez une question pour M. Brougham? Non.

Journaliste : Non, ça va. Merci. J'ai pris connaissance...

M. Khadir : Est-ce qu'il y a une question sur d'autres sujets?

Journaliste : Bien, peut-être en ce qui regarde le projet de loi n° 81, là. Quelles sont vos observations et vos attentes?

M. Khadir : Bien, j'aimerais que le projet de loi n° 81 soit à la hauteur des promesses. M. Barrette dit, d'une part, qu'il veut aller chercher des économies pour le public. Moi, j'applaudis ça. Quand je vais le voir, je vais l'applaudir quand ça va se matérialiser. Pour le moment, le hasard... seulement par hasard parce que le ministère ne l'a pas mis à la disposition de la commission, mais on est tombés sur un document d'analyse des impacts de ce projet de loi, de ce projet réglementaire qui est sur le site du ministère —mes collaborateurs ici pourront vous le fournir — où le ministère s'emploie à dire aux partenaires économiques, aux fabricants qu'il n'y aura pas d'impact sur vous. Mais ce n'est pas possible. Si on doit avoir des économies importantes, ça va avoir un impact sur les fabricants de médicaments génériques, surtout sur les grossistes, les distributeurs, sur les pharmaciens qui touchaient des ristournes importantes. Ça va avoir un impact parce que, si on veut avoir le meilleur médicament au meilleur coût pour les patients, bien, il y a quelqu'un qui va devoir se passer des privilèges passés et des prix gonflés qu'il y avait avant. C'est pour ça que je suis un peu plus prudent. Je ne peux pas applaudir le ministre tant que je n'aurai pas vu concrètement combien de médicaments il va mettre en appel d'offres et quelle est l'ambition qui accompagne ça. Si c'est pour des pinottes, non, ça ne nous intéresse pas.

Journaliste : On constate, actuellement, qu'il y a une levée de boucliers, là, de l'industrie face au projet de loi.

M. Khadir : Je vous invite à écouter M. Brougham tout à l'heure.

Journaliste : Oui, oui, certainement.

M. Khadir : Il est très clair là-dessus : c'est normal. Comment il pourrait en être autrement si ce projet de loi doit avoir un sens? Si on doit aller chercher de l'économie... Je l'ai maintes fois démontré, dépendamment de l'ampleur et de l'ambition, on peut aller chercher jusqu'à 1,5 milliard d'économies pour la facture de la RAMQ et l'équivalent pour ceux qui paient de leur poche — d'accord? — pour les contribuables. Ça veut dire qu'il y a de l'argent, une marge bénéficiaire qui allait dans la poche de certaines personnes qui n'ira plus dans la poche de ces personnes-là, vont être des rabais obtenus par le public et par les contribuables — d'accord? — par les fonds publics.

Donc, c'est normal que ceux qui en bénéficiaient, ceux qui mettaient les ristournes dans leur poche, les grossistes qui mettaient de grosses, grosses marges bénéficiaires dans leur poche, surtout les fabricants, les multinationales des génériques qui font beaucoup d'argent, lèvent le bouclier et disent : Non, non, on n'en veut pas. Il faut savoir garder son calme, garder sa détermination, aller au-delà de ces résistances-là parce qu'en pratique, pour la Nouvelle-Zélande, ce que ça a donné : réduction de deux tiers du coût de leurs médicaments, pas de diminution de consommation, pas de diminution d'accès. Tous les facteurs de santé continuent à être aussi bons qu'avant. Et, même, vous savez quoi? Les ruptures de médicaments dont on nous fait craindre, il y en a moins maintenant qu'avant, et il y en a moins en Nouvelle-Zélande qu'ici, au Canada ou aux États-Unis. Les facteurs qui expliquent les ruptures de médicaments sont tout à fait indépendants, comme l'a démontré M. Brougham tout à l'heure, des causes... Les causes qui sont en place pour les ruptures de médicaments sont tout à fait indépendantes de la manière dont vous vous organisez le «supply», les appels d'offres et les arrangements pour la structure du prix des médicaments.

Journaliste : Donc, le modèle néo-zélandais serait un modèle, en tout cas, à suivre ou à adapter à notre contexte.

M. Khadir : C'est un modèle-phare sur le plan international. Tout le monde en parle parce que les chiffres sont là. Si, mettons, il y a 10 ans, il y avait encore des réserves, bien, après 20 ans, c'est clair. Et vous savez quoi? Même les médecins qui étaient ceux qui... les médecins et les pharmaciens qui résistaient beaucoup à ce modèle-là pendant des années, aujourd'hui, devant le Partenariat transpacifique, qui risque de faire du dumping de beaucoup de médicaments qui viennent d'un peu partout puis une diminution, si vous voulez, du contrôle des Néo-Zélandais sur le marché, là ils sont à la défense du modèle Pharmac puis ils disent... et le modèle Pharmac, c'est un modèle qui a eu énormément de bénéfices pour la Nouvelle-Zélande. Il ne faut absolument pas y toucher puis il ne faut pas y renoncer pour des arrangements pour le Partenariat transpacifique.

Journaliste : D'accord. Merci.

(Fin à 14 h 24)

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