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Point de presse de M. Jean-François Lisée, porte-parole de l'opposition officielle en matière de services sociaux, de protection de la jeunesse, de soins à domicile, de santé publique et de prévention

Version finale

Tuesday, March 15, 2016, 15 h 02

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Quinze heures deux minutes)

M. Lisée : Bonjour. On a reçu aujourd'hui le rapport du vérificateur désigné par la ministre Charlebois pour le centre jeunesse de Laval, M. André Lebon. Je dois dire que c'est un excellent rapport qui nous donne un éclairage important, de grande qualité sur la situation à Laval — et je vais en parler — mais qui est absolument accablant pour l'action, ou l'inaction, ou la régression des actions du gouvernement libéral depuis deux ans.

Qu'est-ce que nous dit le rapport sur l'action gouvernementale? Bien, d'abord, partout dans le rapport, il nous explique que l'exemple à suivre, c'est l'escouade Mobilis, qui, en Montérégie, à Longueuil, avait réussi à intégrer les forces de police, le centre jeunesse, les organisations communautaires sur le terrain. Il trouve que c'est remarquable. Malheureusement, c'est l'équipe, l'escouade qui a été coupée d'un demi-million de dollars par le gouvernement libéral l'an dernier, et qui est passée de huit enquêteurs à deux enquêteurs, et qui, donc, ne peut plus effectuer son travail.

Et là moi, j'ai trouvé six fois, dans le rapport, où il dit : La clé, la solution, c'est Mobilis. Ça, c'est la première chose. La deuxième chose, il dit que, même dans la région de Longueuil, la désorganisation entre les intervenants de la santé et des centres jeunesse provoquée par la réforme Barrette — la loi n° 10 — fait en sorte qu'il y a eu une perte d'expertise, une perte de liant, une perte de coordination qui est — et je cite — partiellement responsable de la déstructuration qu'on a vécu ces derniers temps dans la lutte contre la traite des jeunes filles et l'exploitation sexuelle. Donc, la réforme Barrette, peut-être que c'est conjoncturel, dit-il, mais c'est sûr que ça a empiré les choses en démantelant un réseau qui était bien constitué, en plus, évidemment, la perte du demi-million de dollars.

Troisièmement, il dit : L'essentiel, aussi, dans cette coordination, c'est la présence des organismes qui, sur le terrain, en prévention, peuvent donc identifier des jeunes à risque. Et une de ces observations importantes, c'est que la plupart des fugueuses de Laval qui ont... sont allées dans des réseaux de proxénètes, étaient déjà, avant d'arriver au centre de Laval, en lien avec ces proxénètes. Alors, il dit, donc, la prévention est essentielle, et, pour ça, ça prend les organismes terrain qui travaillent là-dessus. C'est ceux dont les budgets ont été coupés de 100 % par le gouvernement libéral l'an dernier.

Ensuite, il nous dit : Il y a quelques bonnes idées. Par exemple, une unité mixte, Montréal, Laval, Longueuil, ça serait une bonne idée. Ça, c'est une idée que la police de Montréal avait proposée en 2014, s'était fait dire non par le gouvernement libéral; en 2015, non; et a réitéré en 2016; et, pour l'instant, c'est toujours non.

Sur l'accompagnement des jeunes, il y a un très beau portrait du fait que la majorité des jeunes ne sont pas fugueurs et que la majorité des fugueurs sont des fugueurs d'occasion, reviennent rapidement de leur propre chef. Et il ne faut pas dramatiser la fugue d'occasion. Ce qui est très grave, c'est la fugue répétitive qui est liée à l'exploitation sexuelle. Il dit : Il y a à peu près entre 17 % et 25 % des jeunes filles qui sont en réadaptation — donc, c'est déjà un sous-groupe — auxquelles il faut apporter une attention particulière. Et là il propose une série de réformes. Il dit : Bon, évidemment, les moments où on les met en isolement, ça marche parce qu'on les accompagne, ce n'est pas des cachots, mais ensuite on les remet dans le groupe général, et il n'y a pas de transition, alors il faut créer une transition. Il ne faut pas que ça passe de «tu ne peux pas sortir» à «tout est possible». Mais il dit : Ce qui est très important, c'est de bien pairer individuellement chaque jeune en difficulté avec un intervenant. Puis il y a un problème, c'est que le taux de roulement est trop élevé. Alors, on est directement sur la question des ressources. Ce n'est pas par mauvaise volonté que les intervenants dans les centres jeunesse, ils ont beaucoup de roulement, ils sont surmenés, ils quittent leurs postes. Puis il n'y a pas assez d'intervenants pour que ça soit individualisé. Et là, là-dessus, il est très clair, et il le dit, page 30, avec une formule même un petit peu... un petit peu... qui frappe, je vais vous le citer — je l'avais enlevée du lot, je crois, je ne la retrouverai pas tout de suite : «Il est futile de penser réduire les fugues ou mieux accompagner les jeunes filles en cause s'il y a en même temps fugue [...] du financement et des compétences.» Hein? Alors, il dit : C'est quoi, le problème? Il y a eu une fugue du financement et des compétences. Ce qu'il ne veut pas dire parce qu'il est trop poli, c'est que le gouvernement Couillard a coupé 20 millions de dollars par année dans les centres jeunesse. C'est ça, la fugue de compétences et de financement.

Alors, c'est clair que ces recommandations sont directement en lien... Certaines d'entre elles sont nouvelles, intéressantes, sur l'accompagnement, la transition, mais plusieurs de ses recommandations finalement, c'est dire : Bien, si le gouvernement n'avait pas coupé dans les centres jeunesse, s'il n'avait pas refusé la demande de la police de Montréal de faire une escouade mixte, s'il n'avait pas coupé le meilleur programme au Québec, celui de Mobilis, sur lequel on doit s'appuyer, s'il n'avait pas coupé les subventions aux organisations terrain qui font de la prévention — puis c'est essentiel — puis s'il n'avait pas fait une réforme pour tout chambarder dans le système de santé, ce qui a fait en sorte les gens ne sont plus à leurs postes... et là je vais vous lire le passage là-dessus : «Ces équipes ne sont toujours pas consolidées à ce stade de la réforme des CISSS.» Là, on est à un an de la réforme. Il écrit, là, aujourd'hui, le 16 mars : «Ces équipes ne sont toujours pas consolidées à ce stade de la réforme des CISSS. Cette réforme n'est malheureusement pas étrangère à une période de turbulence dans les établissements qui a accompagné la restructuration des postes-cadres. Certains joueurs clés, sur qui reposaient les liaisons, l'encadrement ou autres fonctions essentielles, se sont retrouvés dans d'autres fonctions, ou ont quitté, ou sont submergés dans de nouvelles tâches élargies. Bien que conjoncturel, tout ceci a contribué à une certaine désorganisation des services sur le terrain.»

Donc, c'est accablant pour l'action du gouvernement libéral, qui, je vous le rappelle, avait sur sa table de travail, en arrivant en avril 2014, des recommandations de ne pas faire moins, mais de faire plus, et il a décidé de faire moins, là commande un rapport, puis le rapport dit : Bien, écoutez, il y a eu une fugue des compétences et du financement, alors c'est normal que le problème soit aggravé, puis maintenant il faut non seulement rebrousser chemin, c'est-à-dire rétablir les sommes, mais faire quelques révisions supplémentaires à un système qui, dit-il, pour l'essentiel, fonctionne bien s'il était correctement financé pour aller au bout de ses compétences.

M. Chouinard (Tommy) : Justement, c'est un aspect qu'on n'a pas pu aborder avec les ministres parce que je signale que le rapport nous a été présenté alors que la conférence de presse était déjà commencée. Effectivement, on sent qu'il y a quelques reproches qui sont adressés au gouvernement là-dessus. Le gouvernement dit : C'est déjà une priorité, il y aura bientôt un plan d'action global sur tout cet enjeu de l'encadrement des jeunes. Est-ce que, selon vous... prêtez-vous foi en ces paroles?

M. Lisée : Bien, j'ai été encore déçu de les entendre aujourd'hui faire référence à leur annonce de Laval, où ils remettaient — alors qu'ils ont enlevé, on a calculé, là, 23 millions par année — à peu près 3 % de ce qu'ils avaient enlevé, O.K.? Alors, ils appellent ça Prévention jeunesse. Bien, Prévention jeunesse, c'est un diachylon par rapport à ce qu'il y a dans ce rapport-là. Je veux dire, ça ne peut pas arriver à faire 1 % du chemin que le rapport leur recommande. Il serait très facile... il aurait été très facile, il y a un mois, pendant la crise, de dire : Bien, on rétablit tout de suite les sommes de Mobilis, nous savions déjà que c'était un grand succès, nous rétablissons les sommes que nous avons enlevées pour les programmes terrain, nous disons tout de suite que nous allons réévaluer le financement des centres jeunesse à la lumière de ce que va nous dire le rapport. Ça, j'aurais accepté ça, comme réponse. Mais, pour l'instant, on n'a aucun de ces signaux-là. Il aurait été très facile de dire au nouveau ministre de la Sécurité publique : Écoutez, ça fait trois ans que la police de Montréal demande des sous pour faire une enquête mixte, ça va être dans le prochain budget. Il ne l'a pas dit, il ne l'a pas dit aujourd'hui, je serais très surpris que ça soit là demain parce que, comme dans beaucoup d'autres dossiers, ils disent : Ah! on travaille sur un plan d'action. Ça, ça leur permet d'aller plus loin dans le temps. Pendant ce temps-là, on perd du temps. Ils nous ont fait perdre, là... ce qui ressort poliment de ce rapport-là, c'est que le Parti libéral du Québec a fait perdre deux ans à la lutte contre le proxénétisme. Ça, c'est clair. Maintenant, est-ce qu'ils veulent nous faire perdre un autre six mois, une autre année, un autre deux ans? Moi, je pense qu'il n'y a pas de temps à perdre. Il y a plusieurs indications très précises où le gouvernement peut agir dans les 24 heures. Sur Mobilis, sur l'escouade mixte, sur... ils peuvent dire : Écoutez, on va juste mettre 2 millions de plus cette année dans les centres jeunesse pour commencer à mettre en oeuvre ces recommandations-là puis on vous reviendra dans six mois avec la panoplie complète, on remet le million par année pour les organismes communautaires, c'est clair qu'ils sont indispensables. Et franchement je ne m'attends pas à ce qu'ils le disent. Ils vont prendre encore le prétexte qu'ils ont besoin de réfléchir plus longuement. Par exemple, il y a un prétexte qu'ils peuvent prendre, le rapport recommande une modification à la loi, intéressante, d'insérer dans la loi sur la jeunesse le concept d'exploitation sexuelle. Ça n'empêche pas d'agir immédiatement sur tous les autres aspects, hein?

Alors, je suis très sceptique, je suis très sceptique. Le fait qu'ils vous ont remis ce rapport sans que vous puissiez le lire avant de poser des questions, c'est bien qu'ils en ont honte. Ils ont honte du rapport qu'ils ont demandé, ils ne voulaient pas s'exposer à vos questions. Maintenant qu'on l'a lu, on comprend pourquoi.

M. Chouinard (Tommy) : Il y a une... je pense, c'est peut-être statutaire, une révision de la Loi sur la protection de la jeunesse, je ne sais pas si ça doit se faire aux cinq ans ou... mais je pense qu'il y en a une, révision de la loi qui doit se faire...

M. Lisée : C'est possible. On peut la réviser. L'Assemblée nationale peut la réviser au moment de son choix aussi.

M. Chouinard (Tommy) : O.K. Mais croyez-vous qu'il est nécessaire de rapidement modifier, réviser la loi?

M. Lisée : Moi, ce qui est de... parmi l'ordre des priorités, c'est une des plus basses, O.K.? Tout le reste qu'il dit qu'on peut faire, ça peut se faire par décision ministérielle la semaine prochaine. Donner... Tu sais, lorsqu'on dit : Il faut créer un mode de transition entre l'interdiction de sortir puis le retour dans le groupe, il faut ramener les groupes de 12 à des groupes de six, il faut s'assurer qu'il y ait moins de roulement de personnel, tout ça, ça se fait administrativement s'ils ont les ressources pour le faire.

M. Caron (Régys) : Ce ne serait pas plus simple de fermer les portes puis d'empêcher les sorties? Ce n'est pas tellement cher, là, barrer des portes, là.

M. Lisée : Non, parce que... et je vous invite à lire le rapport, puis vous expliquer que... Et ça qui est un peu paradoxal, il dit : Écoutez, la majorité des gens ne fuguent pas, 70 % ne font aucune fugue. Alors, barrer les portes pour ces gens-là, c'est leur dire : On ne te fait pas confiance. Parmi ceux qui fuguent, l'immense majorité vont fuguer une fois et revenir d'eux-mêmes dans les 24 heures, souvent dans les quatre heures. Et ce truc d'avoir testé la limite et d'être revenu fait partie de leur autonomisation puis de leur acceptation des règles après une fugue. Dans certains cas, ça fait partie du processus. Alors, pour ceux qui ont fugué une première puis une deuxième fois, bien, à ce moment-là, oui, tu barres leur porte à eux, tu as le droit de les barrer pour 30 jours, et, pour certains, 30 jours suffisent parce que, là, tu les accompagnes, etc. Mais là tu ne peux pas les rentrer dans le système normal avec les portes ouvertes pour tout le monde, tu devrais avoir une phase de transition, c'est ça qui manque. Également, il y en a pour qui 30 jours, ça ne suffit pas, ça prend 40 jours, ça prend 60 jours, et là ce n'est pas adapté. Le système, c'est comme plusieurs fois 30 jours. Il faut l'adapter de façon plus fluide avec les intervenants, leur faire plus confiance sur ces trajectoires-là.

La Modératrice : En anglais.

Mme Fletcher (Raquel) :Yes. I'm wondering if you could elaborate a little bit more on the point that you made about the fact that most of the runaways who are involved in or who end up with pimps actually have had a past experience with them or know these people in this environment. What does that mean? What kind of action, then, do we need to take?

M. Lisée : Well, what the report states and documents is that the majority of young women in Laval who... La fugue, c'est quoi?

Mme Fletcher (Raquel) : Run away.

M. Lisée : Run away, OK. The report states that the majority of these young women in Laval who ran away actually had contact with pimps before they became residents at the youth center, and so they were just continuing a contact they had with them. And so, he says it's very important to fund the grassroots organizations that prevent, at the high school, in the streets, the contact between pimps and young women. And, in Longueuil, where there was an excellent squad working with police, grassroots organizations and the youth center, the impact was very, very positive until the Couillard Government cut its funding by half a million and they lost six out of their eight police specialists. And so, he says all of these aspects are important and prevention, in that sense, is key.

Mme Fletcher (Raquel) : What do you make of the reaction from the ministers, today, to the report? I mean, they didn't announce anything new.

M. Lisée : Well, I think the ministers were stunned by the indictment that the report is on the action of the Liberal Government in the last two years because, basically, the report says : You should have done the reverse of what you did, you should have better funded the youth centers to have a more individual accompaniment of these young women, you should have not only funded the Longueuil pilot program, but you should have expanded it, you should have said yes to the Montreal police when they asked for a regional task force, you should never have stopped funding the grassroots organizations, who are key for prevention.

So you run down the list and, at some point, he says, and I'm going to try to translate : It is futile to think that you will reduce runaways or better accompany the young women if, at the same time, there is a runaway of financing and staff. That's what he says.

Mme Fletcher (Raquel) : I was wondering if you could comment on… Lucie Charlebois today said that her Government has invested a billion dollars a year into youth protection. What is your reaction to that statement?

M. Lisée :Sadness. I mean, she defunded the tools that we had to try and prevent the runaways and try to make life harder for pimps. She defunded that. So, maybe she should take responsibility, read the report she asked for and act. Thank you.

(Fin à 15 h 19)

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