(Neuf heures cinquante-deux minutes)
Mme Roy
(Montarville)
:
Bonjour, tout le monde. Merci d'être ici ce matin. Vous voyez que je suis
accompagnée d'un homme que vous connaissez peut-être déjà. On est ici pour
parler du fameux rapport sur les centres jeunesse qui a été rendu public hier,
quoique la ministre Charlebois l'avait entre ses mains depuis jeudi dernier. Et
on est très déçus, déçus du contenu parce que, pour les parents, c'est extrêmement
décevant, il n'y a pas de moyen concret. Les parents n'ont pas besoin d'un
rapport, mais ils ont besoin d'action et de moyens.
Donc, sans plus tarder, je vais vous
présenter cet homme qui est à mes côtés, qui est un papa, un père de famille
d'une jeune de 16 ans, qui a déjà fugué et que, Dieu soit loué, elle a été
retrouvée, votre fille, retrouvée à Toronto. Alors, c'est M. Éric Hauptman. Vous
l'avez probablement vu hier dans les reportages des grandes chaînes du Québec, Radio-Canada,
TVA, LCN, RDI. M. Hauptman et d'autres parents ont parlé, ils sont déçus. M.
Hauptman, il s'est levé très tôt ce matin, il a quitté Montréal à
5 h 30 pour être ici pour vous parler.
M. Hauptman, vous êtes un citoyen, vous
êtes dans la maison des citoyens, au Parlement. Alors, je vous cède la parole.
Parlez au gouvernement Couillard, on vous écoute, parce que vous avez des pistes
de solution à coût nul pour aider les enfants. Alors, on vous écoute.
M. Hauptman (Éric) : Merci.
Alors, bonjour. Aujourd'hui, je vous parle en tant que père de famille. Comme
vous le savez, on a vécu un épisode très traumatisant début février, que ma
fille, elle a fait une fugue. Et on a eu vent qu'il allait y avoir un vérificateur
qui devait se présenter au centre jeunesse pour élaborer un rapport. Hier, on a
été mis au courant du rapport et, en tant que parents, on est très inquiets et
déçus de ce rapport-là, on pense que... bien, moi, je pense, parce que je parle
pour moi, que c'est un show, un coup de vent. Il n'y a rien qui est concret
dans ce rapport-là. Nous, on aurait aimé voir des actions concrètes, des choses
qui soient mises en place immédiatement pour sauver nos enfants.
Puis je l'ai répété hier, puis je le répète
aujourd'hui, moi, je fais ça pour ma fille puis pour vos enfants parce que vos
enfants sont dans le même bateau que ma fille. Ça fait que les trois points que
j'aurais aimé voir hier dans le rapport, c'est de maintenir les portes barrées.
Puis je précise, quand je dis des portes barrées, je ne veux pas transformer le
centre jeunesse en une prison. Je comprends qu'il y a des filles qui doivent
aller à l'école, elles ont des activités, des choses comme ça. Tout ce que je
demande, c'est qu'il y ait des mises en place contrôlées, les portes soient
barrées puis qu'on mette un mécanisme pour assurer que le va-et-vient dans les
centres jeunesse n'est pas aléatoire et qu'il y a quelqu'un qui est là pour
surveiller les allées et venues de nos jeunes.
Deuxième point que j'aurais aimé voir dans
le rapport, il faut comprendre que nos enfants sont en détresse quand ils vont
au centre jeunesse. Moi, je n'ai pas mis ma fille au monde pour la mettre au
centre jeunesse. Malheureusement, je ne pouvais pas assurer sa sécurité. Elle a
des besoins psychologiques, psychiatriques. On a eu une ordonnance du juge au
mois de novembre, il n'y avait rien qui avait bougé. Grâce à vous, les médias
et le public, il y a eu des choses qui ont bougé au centre jeunesse, elle a eu
des soins récemment. Mais ce n'est pas normal, dans une société, que nos
enfants qui sont dans les centres jeunesse n'aient pas les soins adéquats immédiatement.
L'autre point que je voulais parler, c'est
lors du triage. Il faut s'assurer que, quand les enfants, ils arrivent au
centre jeunesse, qu'il y ait une évaluation qui soit faite puis de déterminer
dans quelle unité qu'on va les mettre. Exemple, si ta fille a un problème de
comportement, il ne faut pas les mettre avec des réseaux de prostitution, des
prostituées, parce qu'il y a certaines filles là-dedans qui sont des
proxénètes. Puis il faut comprendre une chose : ma fille, elle a été
retrouvée à Toronto. J'ai passé à un poil de cheveu de perdre ma fille à tout jamais.
Alors, c'est pour ça que je suis ici aujourd'hui.
Il faut arrêter de dire qu'on va se pencher, puis qu'on va réfléchir, puis
qu'on va changer nos façons de faire. C'est que... ça a été dit dans le
rapport. Moi, je m'aurais attendu que la ministre nous arrive avec un plan
d'action concret, qui ne coûte rien, parce que les portes étaient déjà barrées
depuis un mois. Là, on parle de peut-être qu'on va les débarrer. Psychologues,
psychiatres, je comprends que ça peut engendrer des coûts, mais il faut mettre quelque
chose en place. Ils les ont, les services, déjà, dans les centres jeunesse. Le
triage, ils en font déjà, du triage, quand nos enfants arrivent au centre
jeunesse. Ça ne coûte rien.
Ça fait qu'à un moment donné, là, dans la société,
là, il faut enlever nos lunettes roses, là, puis arrêter de dire que tout va
bien. Il faut agir puis aujourd'hui. C'est ça que je demande au ministre puis
au gouvernement Couillard, de prendre des actions concrètes, de se parler, de
se parler à travers tous les partis politiques, de trouver des solutions pour
sauver nos enfants.
Le dernier point que je voulais parler aujourd'hui,
là, je vais faire ça rapidement, c'est les proxénètes. Je demande au ministre
de la Justice de peut-être concerter le ministre fédéral puis les autres partis
pour trouver des solutions. Il y a Mme Mourani qui a déposé un projet de loi il
y a deux ans, ça ne bouge pas. Les proxénètes, là, ils ont une tape sur la
main, O.K., il n'y a pas de loi sévère pour eux autres. Puis il faut comprendre
qu'ils abusent de nos enfants, ils mettent la vie de nos enfants en danger.
Comme je l'ai dit tantôt, j'ai passé à un poil de perdre ma fille à tout jamais.
Ça fait que je suis ici aujourd'hui pour me battre puis demander au gouvernement,
c'est un cri du coeur, qu'il y ait des changements qui se produisent immédiatement.
Merci.
Mme Roy
(Montarville)
:
Vous avez entendu M. Hauptman, c'est assez clair. Pour nous, d'un point de vue politique,
la ministre Charlebois, bien, ce qu'elle a fait hier, c'est qu'elle s'est
cachée derrière le fait que ce rapport dit que les protocoles ont été suivis,
les protocoles ont été respectés, mais la résultante, c'est qu'il y a toujours
un nombre effarant de jeunes filles qui fuguent. C'est un problème, nous dit-on
dans ce rapport, qui n'est pas qu'à Laval, mais partout au Québec. Alors, que
le protocole ait été suivi, c'est une chose, mais quand le résultat n'est pas bon,
peut-être qu'il faut changer le protocole.
Alors, nous, ce que nous demandons et à la
lumière des entrevues que nous avons vues, des parents à qui nous avons parlé,
on voit très, très bien que les parents du Québec n'ont plus confiance en la ministre
Charlebois et nous demandons au premier ministre Couillard de retirer le
dossier des centres jeunesse des mains de la ministre Charlebois. Les parents
et nous, à la Coalition avenir Québec, nous n'avons plus confiance en elle dans
la gestion de ce délicat dossier. Je vous rappelle, ce dossier et ce rapport
nous disent carrément qu'il y a des lacunes, que de l'argent est manquant,
qu'il y a eu des compressions qui ont touché les services.
M. Hauptman nous arrive avec des
solutions. Certaines solutions comme le triage, vraiment ne pas mêler ensemble
des filles qui pourraient ne pas aider à leur situation, ça ne coûte rien, mais
ce sont les ressources qui sont là qui doivent le faire. Cela dit, sur un point
de vue politique, ce que nous venons dire, c'est que nous demandons de retirer
le dossier des mains de Mme Charlebois et de le mettre dans les mains de M.
Coiteux.
Et je vous réitère la demande que nous
faisions pour ce qui est de la lutte aux gangs de rue, de la lutte aux proxénètes,
de la traite de personnes. Il y avait un projet qui existait, qui fonctionnait,
mobiliste. Ça n'existe plus depuis deux ans, et il faut y voir, il faut que nos
représentants policiers aient les moyens d'intervenir pour contrer ce
phénomène, et c'est la raison pour laquelle on souhaite que le dossier soit
transféré des mains de Mme Charlebois aux mains de M. Coiteux.
Alors, voilà. C'était notre présentation.
Si vous avez des questions...
M. Chouinard (Tommy) : En
quoi M. Coiteux est l'homme de la situation, selon vous? Pourquoi vous accordez
votre confiance à M. Coiteux pour ce dossier-là?
Mme Roy
(Montarville)
:
Parce que M. Coiteux est responsable de la sécurité publique, et on se rend
bien compte qu'à la lecture du rapport plusieurs de ces jeunes filles... il y a
des situations qui se passent lorsqu'elles sont à l'extérieur, mais même la
ministre Charlebois, elle-même, l'avait dit : Les gangs de rue, les gangs
criminels ont infiltré les centres jeunesse. Et vous lisez le rapport qui nous
dit que la problématique, ce n'est pas juste à Laval, c'est partout. Bien, je
pense que là on est rendus à une problématique criminelle, de prostitution. La
fille de M. Hauptman, bien, c'étaient des gangs de rue, là, qui avaient mis le
grappin sur elle, qui l'avaient amenée à Toronto pour la séduire. Puis ils
étaient en train, là, de la convaincre, là, de se joindre à eux, et d'ailleurs
elle était déjà partie. Mais qu'est-ce qui aurait pu survenir de ça par la
suite?
Donc, on est rendus à un niveau où la
sécurité publique doit faire plus attention à nos jeunes filles. Les policiers
doivent avoir les moyens d'intervenir, et ce sont... C'est la traite de
personnes, et je le disais hier : Comment se fait-il que c'est au Québec qu'il
y a le plus de jeunes filles qui partent, qui sont envoyées dans les autres
provinces? Il y a un problème réel.
Donc, oui, M. Coiteux serait, pour nous,
l'homme de la situation parce que Mme Charlebois, visiblement, n'a pas la
confiance des parents, puis on n'arrive pas avec des solutions concrètes pour
protéger ces filles-là. Il n'y en a pas encore, là, de solution concrète, là.
Puis ça fait un bout qu'on l'a, ce rapport-là, puis rappelez-vous que l'année
dernière le rapport était sur le bureau et de Mme Maltais, juste avant les
élections du Parti québécois, puis par la suite dans le bureau du Parti
libéral, puis ça a pris de vos reportages pour qu'on voie qu'il y a une
problématique de fugues pour faire bouger un petit peu la ministre qui a fait
un rapport.
M. Vigneault (Nicolas) : M.
Hauptman, peut-être, qu'est-ce que vous répondez à la ministre qui dit :
On ne peut pas encadrer ou emprisonner nos jeunes parce qu'après ça ils doivent
affronter la société?
M. Hauptman (Éric) : Bien, je
suis d'accord dans un certain sens. Moi, comme j'ai dit tout à l'heure, je ne
veux pas emprisonner nos jeunes, mais je veux qu'il y ait un mécanisme
sécuritaire qui soit mis en place. On l'a déjà fait, là, début février, ils ont
enlevé le piton vert, là, puis ils ont mis le mécanisme qu'ils doivent
descendre avec le carton vert, et la réceptionniste ou la personne en charge de
la sécurité doit peser sur le bouton pour ouvrir la porte. On l'a déjà mis en
place, mais là on dit : Bien là, ça va dépendre des centres jeunesse, qu'est-ce
qu'ils vont décider, puis on va... que ce n'est pas bon pour les jeunes. Ceux
qui ont le droit de sortir, ils peuvent sortir, je n'ai pas de problème avec
ça, mais ceux qui n'ont pas le droit de sortir, peut-on mettre quelque chose en
place pour les sécuriser? Encore, je le redis, c'est la protection de nos
jeunes qui est la question aujourd'hui.
Ça fait que c'est pour ça que je réitère
que c'est important qu'il y ait au moins la porte d'en avant qui soit barrée.
Journaliste
: So is the Coalition avenir Québec calling for the Minister to step down or just to have this file
taking off of her plate?
Mme Roy
(Montarville)
: Just to have this file taking off her hands, because obviously, the
Minister Charlebois is not able to take care of those young girls. And we ask
Mr. Coiteux to take that file because we need action right now and we don't
have it, and the parents are really scared about it.
M. Hicks (Ryan) : Mr. Hauptman, what did your daughter tell you about the way things
were run in the group home, the way things were handled?
M. Hauptman (Éric) : Well, obviously,
she wasn't happy to be there. You know, she felt like she was controlled and
every thing, but a normal day for her, she got used to it, you know, because when
you get there it's like a shock. You're at home, you do what you want, and you
get there, they tell you what to do, what time to eat, what time to get a
shower, this and that. She never had a problem in the youth center with the
counselors or anything. She always had a good relation with everybody.
What I'm talking about
today is there is girls that have done prostitution and that have other issues,
they are mixed with my daughter. Because when my daughter went to the youth
center, she never spoke about prostitution or anything. But she's speaking to
those girls, so those girls are saying : Well, I know this guy, he's a
nice guy, he's going to take care of you. That's putting our children in
danger, OK?
And I know that we can't
be a hundred percent, but what I'm asking is : Can we separate the girls
that have the similar problems and concentrate on their needs? This is what I'm
asking today.
M. Hicks (Ryan) : Just one more question because, in the report, the auditor said that there should be a
kind of transition unit. If you're going from a locked unit instead of going
straight to an open unit, there should be something in between.
M. Hauptman (Éric) : I agree. I agree because now, what happens, she was not in a locked
unit before, there wasn't any major issue, but now she's in total lockdown. So
I think it would be safer to maybe have a transition. That, I agree with, but,
once again, there is no date, there is no specification. We just spotted the
problem and we're going to talk about it in maybe six months, three months.
Nothing is clear in that report.
Mme Plante (Caroline) : There was a reference in the report about funding. André Lebon
said… you know, deplored that there have been cuts, that the funding was
running away, as he put it. Are you asking for more funding and more means?
M. Hauptman (Éric) : I'm saying yes to that question, but to invest the money in the right place, where really we need
it, OK? Because, like we mentioned before, there are stuff that we're asking to
be put in place that don't cost anything today. But yes, there's some funding
that should be injected into that, but for now, all I'm asking : Can we
put a time of action in place with short, medium and long-term actions that
have to take place to protect our children? And funding, I think, is an issue
in that.
Le Modérateur
: Pour des raisons d'heure, peut-être une dernière question, s'il vous plaît.
Mme Fletcher (Raquel) : There were a lot of recommendations in that report yesterday, and, when the Government
spoke about the recommendations, they kind of listed them off… a list, but that
list wasn't prioritized. From your perspective and what
you've lived through, if you could tell the Government, you know, your main
priority, I mean, out of that report, what is it?
M. Hauptman (Éric) : I said my main priorities today because that list, I said it
yesterday, it's not clear. It's stuff that we have to talk about, think about.
I ask for three specific things that I mentioned today : doors that are
locked; when our daughters get to the youth center, that they're put with the
girls that are in similar situations with them; and health, mental health,
psychologists, psychiatrists.
Le Modérateur
: Dernière question, Maya.
Mme Johnson (Maya) :O.K. Mr. Hauptman,
why do you have to turn here, to the National Assembly, to align yourself with
the CAQ on this issue, versus, let's say, staying in Montréal and just speaking
to the media that way?
M. Hauptman (Éric) : I just want to specify today I didn't align myself to any political
party. They got in touch with me, they told me what kind of concerns they had,
and I had the same concerns as them. And today I'm coming as a father to speak
about my daughter and our children, because I'm not the only one who has
teenagers in the province of Québec, and I'm willing to fight... that the laws are going to change and
that our children are going to be safe. This is the main goal why I'm here and,
if I have to go to Ottawa to do it, I'll do it.
Des voix
: Merci.
(Fin à 10 h 7)