To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > News and Press Room > Press Conferences and Scrums > Point de presse de Mme Véronique Hivon, porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice et de soins de fin de vie

Advanced search in the News and Press Room section

Start date must precede end date.

Point de presse de Mme Véronique Hivon, porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice et de soins de fin de vie

Version finale

Thursday, April 14, 2016, 13 h 45

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Treize heures quarante-six minutes)

Mme Hivon : Bonjour. On peut se réjouir de voir à quel point le travail de défricheur, de précurseur que le Québec a effectué au sujet de l'aide médicale à mourir permet maintenant à l'ensemble du Canada d'avancer, à l'ensemble, donc, des citoyens d'avancer sur la base d'un modèle très solide qui, au Québec, a été construit avec l'ensemble de la société. Aujourd'hui, on voit que notre loi sert d'inspiration réelle à tout le Canada. Et j'espère que toute la société québécoise est fière de ça parce que c'est beaucoup, beaucoup de personnes qui se sont investies dans ce processus, dans ce vaste débat-là au Québec, et c'est tout ce processus-là qui lui a conféré une telle légitimité.

Alors, non seulement, au Québec, on a permis aux gens en fin de vie de mourir avec plus de sérénité et de dignité, mais on a aussi permis au Canada de s'inspirer de ce qu'on a fait chez nous. Alors, ce n'est pas rien. Et il faut dire aussi qu'on a beaucoup simplifié le travail du gouvernement fédéral, qui a fait l'économie d'un débat, qui ne l'a pas fait pendant que le Québec le faisait et qui, aujourd'hui, est véritablement engagé dans une course contre la montre.

Alors, bien sûr, quand on regarde le projet de loi fédéral qui a été déposé ce matin, on voit qu'il y a très peu de différences entre le projet de loi fédéral et la loi québécoise sur les soins de fin de vie, ça peut même en être surprenant. Mais essentiellement on voit que les différences se situent au niveau des conditions qui peuvent donner ouverture à l'aide médicale à mourir ou au suicide assisté. Je pourrai y revenir parce que, bien sûr, dans la loi fédérale, le suicide assisté est permis.

Essentiellement, ce qui différencie les deux lois, c'est qu'en vertu de la loi fédérale, la personne n'a pas nécessairement besoin d'avoir une maladie. Elle peut aussi être dans une situation de handicap, ce qui est une différence majeure parce que, nous, au Québec, compte tenu qu'on était restreints par le partage des compétences, on ne pouvait pas aller jusqu'à cette situation-là, mais en même temps ça demeure assez restrictif parce qu'il doit y avoir la présence d'un déclin avancé et irréversible des capacités. Fait à noter, d'ailleurs, ce n'était pas un critère qui était prévu dans l'arrêt de la Cour suprême Carter. Donc, c'est plus restrictif que l'arrêt de la Cour suprême, mais c'est inspiré d'une des dispositions de notre loi québécoise, ce déclin avancé et irréversible.

Et, bien sûr, l'autre différence, c'est que, plutôt que de parler de personnes qui sont en fin de vie, on parle, dans la loi fédérale, d'une mort qui est raisonnablement prévisible. Alors, je ne peux pas vous dire aujourd'hui ce qu'une «mort raisonnablement prévisible» veut dire, mais on peut pressentir qu'il y a une légère différence. La fin de vie, au Québec, dans la loi, ça peut s'interpréter en jours, semaines ou mois. Moi, je dis souvent que la fin de vie, on peut se dire que c'est une période de moins d'une année de vie avant que la mort puisse survenir. Une mort raisonnablement prévisible, certainement que ça va être débattu en commission, en étude détaillée dans la loi fédérale, et c'est là qu'on va voir vraiment le sens qui veut être donné, mais on peut pressentir que c'est un peu plus large que la notion de «fin de vie», donc peut-être que ça peut se compter en plus qu'une année.

Par ailleurs, très rapidement, on voit aussi que, dans la loi fédérale, le suicide assisté est permis. C'est dans la suite logique de l'arrêt de la Cour suprême, c'est-à-dire que, plutôt que le médecin donne l'aide à mourir, il peut fournir les médicaments ou les moyens à un patient qui se donnerait lui-même, donc, la mort. C'est une différence qui est présente. Et par ailleurs on voit aussi que les infirmières peuvent être, donc, appelées à donner l'aide médicale à mourir, et ça, c'est quelque chose qui est intéressant aussi et qu'on va pouvoir regarder, assurément, au Québec.

M. Chouinard (Tommy) : Donc, vous y voyez des plus, pas des situations préoccupantes, dans le projet de loi fédéral.

Mme Hivon : Bien, en fait, j'y vois, je vous dirais, la suite du jugement de la Cour suprême. Évidemment, je dirais qu'il y a trois grands éléments, quand on légifère dans ce domaine-là : il y a les contraintes juridiques — nous, au Québec, on était contraint par le partage des compétences, ce qui explique la portée relativement limitée, quoique c'était vraiment une très grande avancée, il ne faut pas le minimiser — par ailleurs il y a le consensus social — je pense que, de ce point de vue là, malheureusement, le fédéral n'a pas pu faire le travail qu'ici on a fait, au Québec — et il y a aussi, finalement, l'acceptabilité politique, c'est-à-dire que c'est bien beau de faire la meilleure chose possible, mais il faut aussi que ça passe le test et que ça soit adopté ici, au Québec.

Même avec les critères qu'on avait, il y a quand même 22 députés libéraux qui avaient voté contre la loi. Alors, il faut être conscients de ça. Et je pense que le fédéral est un peu dans le même genre de logique, à se dire qu'il faut que sa loi passe. C'est ce qui explique peut-être qu'elle est quand même plus restrictive que ce que beaucoup d'observateurs attendaient de la loi fédérale. Mais, pour nous, il n'y a pas de surprise. La loi québécoise est très solide, elle va continuer à s'appliquer. Est-ce qu'il pourra y avoir des ajustements? Oui. Moi, je plaide pour que ce ne soit pas la loi sur les soins de fin de vie qui soit modifiée parce qu'elle est un tout. On le sait tous, elle ne comporte pas que l'aide médicale à mourir, elle comporte toute la question des soins palliatifs. Alors, je vois plus une loi, je dirais, précise, d'application de la loi fédérale, qui serait indépendante, mais qui pourrait référer au processus qui est prévu dans la loi sur les soins de fin de vie, mais l'idée, c'est de ne pas dénaturer aussi notre loi, qui se contient comme un tout, là.

M. Chouinard (Tommy) : Vous avez constaté, vous aussi, que, donc, on élargit, là, l'accès à l'aide médicale à mourir par la disposition sur la mort raisonnablement prévisible. Est-ce que cette notion-là introduit un flou, selon vous? Est-ce que le projet de loi est assez précis ou est-ce que, là, les interprétations peuvent être multiples?

Mme Hivon : En fait, c'est les débats qui vont permettre de savoir ce qu'est le véritable sens. Évidemment, là, aujourd'hui, le projet de loi, il est déposé, il n'est pas adopté. Il va y avoir un processus très expéditif, quand on compare à comment on a travaillé au Québec, de quelques semaines, mais, quand même, on souhaite que ces notions-là puissent être éclaircies. Nous, au Québec, à travers le débat, on a bien fait ressortir que la fin de vie, c'était une question pas seulement de mort imminente ou de phase terminale terminale, mais que c'était une question de jours, semaines, mois, et ça, c'est très important de le répéter parce que des fois il y a une interprétation trop restrictive qui se fait aussi de notre loi. Je pense qu'au fédéral ils ont aussi fait le choix de ne pas mettre, par exemple, six mois, un an, un délai clair parce que tous les médecins vont vous dire, comme ils nous ont dit, comme, j'imagine, ils ont dit au fédéral, que c'est excessivement difficile de poser un pronostic précis dans certaines maladies, alors il faut laisser une certaine flexibilité pour que le jugement médical puisse s'exercer en regard de l'ensemble de la situation du patient ou de la personne qui est en cause.

M. Chouinard (Tommy) : Puis le fait que le fédéral dise : Ce n'est pas seulement les médecins qui peuvent pratiquer l'aide médicale à mourir, mais aussi les infirmières praticiennes, quelles conclusions tirez-vous de cette ouverture-là? Parce que ça a quand même été tout un... bien, en fait, ça l'est encore aujourd'hui au sein de la profession médicale. Est-ce que, là, on doit s'attendre à ce qu'il y ait aussi des débats pour ce qui est de la pratique infirmière?

Mme Hivon : Bien, oui, certainement que c'est un sujet de discussion. Ici, au Québec, on était un peu plus... je dirais qu'on était dans l'audace, mais dans l'audace prudente parce qu'on ne voulait pas que notre loi soit contestée. Et donc c'est pour ça que des fois les gens disent : Pourquoi vous n'êtes pas allés là, ou là, ou là? Parce que l'important, pour nous, c'était que ce très grand pas qu'on pouvait franchir pour beaucoup de monde passe le test et soit accepté plutôt que d'embrasser trop et de faire en sorte que tout s'écroule. Alors, c'est pour ça qu'on était plus prudents.

Il faut dire qu'ici l'Ordre des infirmières ne le demandait pas, même ne voulait pas cette responsabilité-là. Donc, l'Ordre des infirmières ici, au Québec, ne souhaitait pas pouvoir pratiquer l'aide médicale à mourir.

À la lumière de l'ouverture que fait le fédéral, moi, je suis vraiment d'avis que c'est de notre compétence, donc c'est au Québec qu'on va pouvoir décider si on le souhaite ou non, que ce puisse être d'autres professionnels, en l'occurrence les infirmières praticiennes. Donc, ce sera un débat, un dialogue à avoir, je vous dirais, avec ces groupes-là, mais je pense que la logique...

M. Chouinard (Tommy) : C'est une bonne chose, selon vous?

Mme Hivon : Oui, je pense que c'est intéressant de s'y pencher, parce que la logique de ça, c'est l'accessibilité, c'est l'accessibilité, par exemple, pour des communautés plus éloignées ou des personnes qui vivent plus en milieu rural. Bon, nous, c'est sûr que notre loi, elle est tellement claire, balisée, que chaque établissement a l'obligation de fournir le service. On ne retrouve pas ça dans la loi fédérale. Selon moi, c'est logique, parce que c'est du ressort des provinces. Par exemple, de dire : Est-ce que tous les hôpitaux vont y être soumis? Le Canada risque d'avoir un gros débat des hôpitaux qui, par exemple, viennent de congrégations religieuses, et tout ça. Nous, au Québec, il n'y a pas de distinction. Tous les hôpitaux sont soumis, doivent offrir l'aide médicale à mourir, comme tous les CLSC dans les soins à domicile.

Alors, c'est sûr que, de ce fait-là, je vous dirais que... peut-être que la question était moins pressante ici parce qu'il y a une obligation de fournir le service par un médecin dans l'ensemble du réseau.

M. Chouinard (Tommy) : Oui, juste une dernière chose. Dans... parce que vous dites : Qu'est-ce qui... juste pour que tout le monde comprenne, là, pour que... le fait que ce soit à Québec de déterminer si, oui, on va l'ouvrir à la pratique infirmière, là, est-ce que c'est parce qu'on est responsables de l'administration...

Mme Hivon : Des lois professionnelles...

M. Chouinard (Tommy) : ...des lois professionnelles en cette matière? D'accord.

Mme Hivon : Exactement. Mais ce qui est clair, c'est qu'une infirmière... À la lumière du projet de loi... évidemment, il n'est pas adopté, ça va faire l'objet de débats. Sûrement que ça va faire l'objet de débats aussi, l'association canadienne médicale, puis tout ça, va sûrement se prononcer, mais je dirais que... on va voir ce qui va être déterminé, mais la possibilité, elle est là, ce qui veut dire qu'une infirmière qui le ferait ne pourrait pas être poursuivie. C'est ça que ça dit, dans le fond. Et, nous, par exemple, au Québec, on peut dire comment on encadre ça. Il peut y avoir d'autres restrictions compte tenu des actes réservés à chacune des professions en vertu des lois professionnelles, et tout ça. Donc, c'est un débat qu'on pourra mener ici.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Depuis l'adoption de la Loi sur les soins de fin de vie, le consensus social, au Québec, autour de la question de l'aide médicale à mourir et plus largement... bon, ce n'est pas la question de la loi québécoise, mais du suicide...

Mme Hivon : Assisté?

M. Bélair-Cirino (Marco) : ...oui, du suicide assisté. Est-ce que ce consensus-là a évolué? Et est-ce que le projet de loi fédéral, dans le fond, a un pas d'avance, un pas de retard sur ce consensus québécois là?

Mme Hivon : Écoutez, c'est difficile à dire. Moi, je n'ai pas bâti ou travaillé sur le consensus social canadien. Déjà, on a travaillé sur le consensus québécois. C'est sûr qu'au Québec on peut être sûrs que notre loi reflète le consensus québécois, et je suis assez sûre que la loi fédérale reflète le consensus canadien.

Est-ce qu'on aurait pu aller plus loin au Québec? Je ramène toujours la même chose. Peut-être que le consensus serait allé plus loin, mais on avait des limites juridiques de partage des compétences qui faisaient en sorte que nous, on ne voulait pas fragiliser... Je veux dire, quand j'étais vice-présidente de la commission, c'était une chose. Quand je suis devenue ministre et que j'ai écrit la loi, j'ai vu à quel point il ne fallait pas, en essayant, peut-être, de mettre autre chose, se faire dire qu'on était dans le domaine du suicide assisté. Donc, ça, c'était une contrainte juridique.

Mais le consensus social, c'est ça qui est un petit peu, je vous dirais, en tout cas, regrettable dans la réalité fédérale, c'est... ils ne sont pas en train de travailler sur le consensus, ils n'ont pas le temps. Et donc comment ils le bâtissent, le consensus? D'ailleurs, c'est quelque chose qui m'avait frappée dans le rapport du comité mixte, c'est que la notion de «consensus social» n'était pas là, ce n'étaient que des notions de droit, de discrimination potentielle, de comparaison, de charte. Mais, quand on avance sur des terrains comme ceux-là, aussi sensibles, qui touchent tout le monde, le consensus social, c'est une réalité fondamentale.

Alors, pour revenir à votre question, assurément on est dans le consensus social. Est-ce qu'il est rendu plus loin? Possiblement. Et il faut aussi penser que, dans ces domaines-là, on avance à vitesse grand V, c'est-à-dire que les premiers qui franchissent le pas, le franchissent, il y a beaucoup d'opposition. Là, des fois, on se dit : Ah! ça devrait être plus large, et tout ça. Il faut se rappeler où on en était il y a encore juste deux ans, avec des gens très, très, très opposés à cette ouverture-là, avec 22 députés — je le dis, mais... — qui ont voté contre, aussi, la loi. Alors, il faut être sûrs d'avancer et de ne pas perdre les avancées qu'on peut réaliser en essayant d'aller trop vite, trop loin. Mais c'est sûr que ça s'accélère parce que les gens voient que ça se fait, voient que ça se fait bien, voient... Hier, on a eu un beau témoignage d'un médecin qui pratique l'aide médicale à mourir au Québec. C'est très rassurant. Il y a des gens qui y ont accès, ça répond à un besoin. Alors, ça démystifie les choses aussi puis ça donne un sentiment de sécurité qui peut donner plus de force au consensus social aussi.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Vous dites que le gouvernement fédéral aurait pu aller plus aller plus loin, à la lumière de l'arrêt Carter. Est-ce qu'il va suffisamment loin pour ne pas être contesté en vertu de cet arrêt-là?

Mme Hivon : Ça, c'est la grande question. Vous savez, dans ces domaines-là, les contestations sont très difficiles à prévoir. Notre loi québécoise, elle a été vraiment pensée et bâtie en vertu de notre compétence québécoise. Il y a quand même des gens qui ont essayé de la contester. Finalement, ça a été rejeté. Notre loi a été, bien sûr, validée. Donc, là, est-ce qu'il y en a qui vont dire en venant mettre, par exemple, qu'il faut qu'il y ait un déclin avancé ou irréversible, en venant mettre le critère de la mort raisonnablement prévisible? Est-ce qu'on s'éloigne beaucoup de l'arrêt Carter? On s'en éloigne, c'est-à-dire que l'arrêt Carter a mis des grandes balises qui ne présentaient pas ces restrictions-là. Est-ce que ça donne une base pour contester? Je ne sais pas avec quel succès, bien honnêtement, mais, dans ces domaines-là de droits de la personne, et tout ça, c'est certain que les contestations peuvent toujours être présentes, et ça se travaille un peu comme ça aussi.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce que le gouvernement va présenter un projet de loi qui étend l'aide médicale à mourir aux mineurs, aux demandes anticipées, notamment?

Mme Hivon : Moi, je ne sais même pas, pour être totalement honnête avec vous, si ça, c'est du ressort du fédéral. C'est-à-dire qu'eux autres ce qu'ils sont en train de faire, c'est qu'ils décriminalisent le suicide assisté, ce qu'une province ne pouvait pas faire. Nous, on est allés au maximum avec l'aide médicale à mourir. Mais je pense que c'est important que ce dialogue-là se continue, ce sont des enjeux réels.

Mais ceci dit, il y a tout le temps cette logique-là de pouvoir franchir de grands pas et avancer, et que, si on en met trop, trop vite et qu'on perd le consensus social ou qu'on perd l'acceptabilité politique et que la loi échoue, bien, on n'est pas plus avancés, même on régresse. Alors, c'est pour ça que, dans ces domaines-là, je pense qu'il faut que ça se discute, comme, au Québec, il y a des choses qui continuent à se discuter, même si on ne les a pas mises dans la loi. Je pense que ça va être la même chose puis ça va être très sain... Je pense qu'il ne faut pas voir ces lois-là comme des lois définitives qui ne bougeront jamais. Il faut les voir comme de très, très grands pas en avant, mais qui permettent aussi de continuer à construire les consensus tout autour de ces nouvelles réalités-là.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Mais il n'est pas le temps aujourd'hui de modifier la loi québécoise?

Mme Hivon : La loi... Bien, premièrement, on va attendre de voir le résultat final de la loi fédérale, parce que, même s'ils ne sont pressés par le temps, il va y avoir un débat en Chambre, et tout ça.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Ça bouge vite, ces questions-là... Sur ces questions-là, vous dites que le consensus évolue puis que ça parfois rapidement.

Mme Hivon : Exactement, ça peut bouger, et notre loi est en vigueur depuis quatre mois, alors je pense que c'est très sage de la laisser vivre aussi, et de voir, et de démystifier, et que les praticiens... parce que des fois c'est peut-être quelque chose qui est sous-estimé, c'est un changement important pour la pratique médicale. Alors, c'est important aussi de laisser la loi faire son oeuvre, les gens se l'approprier, la pratique médicale s'adapter, dans une certaine mesure, avant aussi peut-être de vouloir trop embrasser.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Dernièrement, juste pour clarifier... M. Barrette a dit que le projet de loi n'augmenterait pas les personnes qui pourraient bénéficier de l'aide médicale à mourir au Québec, mais permettrait à ces personnes-là de bénéficier de l'aide médicale à mourir plus rapidement. Est-ce qu'il a raison?

Mme Hivon : Bien, écoutez, si on part de la prémisse qu'une «mort raisonnablement prévisible» peut élargir un peu, c'est ce qu'on pressent aujourd'hui, je vous dirai, par rapport à la fin de vie, mais encore faut-il comprendre ce que le concept veut dire. Moi, je vous dirais que ça change les choses à deux égards : ça fait en sorte que ça peut arriver un peu plus tôt, mais ça veut aussi dire, de ce fait-là, que ça peut toucher plus de personnes parce que les gens vont l'obtenir plus tôt.

Alors, c'est... je ne me suis pas penché à savoir si ça a augmenté significativement le nombre de personnes, mais ce qui est certain, c'est qu'en incluant, par exemple, la notion de «handicap» et pas seulement de «maladie», ça ouvre une autre catégorie de personnes, assurément.

Mme Fletcher (Raquel) :Why do you say that you have a sense of pride today?

Mme Hivon : Well, today, I think that Québec can be proud, everybody in Québec that was involved in the process that led to the adoption of the bill concerning end-of-life care, I can share that pride because we were all involved in a process to make sure that people, at the end of their life, could die in dignity. And today what we see is that our model, all the work that we have done collectively together in the past years is now the model that is taken by Canada to really put forward a bill of its own.

Mme Fletcher (Raquel) : Would you have liked to see the federal bill or even the Québec bill go farther than it has?

Mme Hivon : It's a good question. I think, in those matters, what is very important is to be in concordance with the social consensus. And, if you go too far too soon, you risk of losing that consensus and not being able to pass the bill, so this is always a concern. I think that, in Québec, we were limited because of the sharing of powers, the division of powers so we could evolve in the field of health care matters. This is why we are talking, in our law, only about people who are ill, incurably ill, whereas the federal can talk also about people who are handicapped. So, this is different because they are in a jurisdiction concerning criminal matters and they have to… they can go as far as assisted suicide, which was not the case in Québec. So, in Québec, it's as if we saw where the consensus was, we put it in the bill. Could it have been a little bit more? I would say maybe, I would say probably, but we were limited, in Québec. So, today, when we see or we feel… because we don't know exactly what «reasonably foreseeable death» means yet, we can feel that it might be a little bit broader. So, in Québec, when we think about end of life, it's about maybe less than a year, but we will have to see if it can be more, maybe, for that criteria. So, I think it's, you know, along the line of the social consensus.

Mme Fletcher (Raquel) : Can you just briefly talk about how you're feeling personally as the one who kind of spearheaded this legislation in Québec?

Mme Hivon : I will say that I feel, of course, happy that all the work that we've done in Québec…. we've decided to, you know, be pioneers, be the first ones to take the lead, to take our responsibilities as Members of the Parliament, not to wait for the courts to decide on such a sensitive issue. So, I feel that, altogether, we should be proud of how we acted in that debate, but mostly, you know, in the last months… it's now been in effect for the last four months, now I see the difference that it makes in people's lives. Now, we see, you know, people testimonies, people saying, you know, how their loved one was able to have medical aid in dying and how it was a source of serenity, of dignity, of peace, also. And this is what, to me, gives the most sense to the work I've done with all the Québec people. Merci.

(Fin à 14 h 9)

Participants


Document(s) Related