(Neuf heures trente-cinq minutes)
Mme Lamarre : Bonjour. Nous
sommes ici ce matin pour dénoncer les transferts unilatéraux que le ministre de
la Santé fait en ce qui concerne les travailleurs sociaux qui travaillent dans
les CLSC vers les GMF.
Je suis en compagnie de Mme Nancy
Corriveau, vice-présidente de la Fédération des professionnèles, FP-CSN; Mme
Mélissa Gaouette, vice-présidente de la Fédération de la santé et des services
sociaux, FSSS-CSN; et M. Danny Roy, président du SPSSS-CSN, syndicat de
professionnèles et de techniciens du réseau de la santé du Québec; et bien sûr
ma collègue députée de Taschereau, Mme Agnès Maltais.
Écoutez, le ministre de la Santé pose
différents gestes. Dans le cas du transfert des travailleurs sociaux, il porte
une atteinte directe à des citoyens. Il transfère des professionnels qui, actuellement,
là, aujourd'hui, prennent charge, font des suivis de citoyens particulièrement
vulnérables et il les envoie ailleurs sans plan, sans autorisation, en
démunissant vraiment les CLSC de services essentiels qu'ils rendent très bien actuellement.
Alors, il y a un impact direct cette
fois-ci. Il ne peut pas faire porter le fardeau par les CISSS ou par les CIUSSS.
C'est lui qui prend une décision et il fait perdre des ressources très importantes,
les travailleurs sociaux, dans les CLSC pour... Il prive des gens qui sont sans
voix, des gens qui ne sortiront pas dans la rue parce qu'ils n'ont pas les
ressources et l'organisation pour le faire.
Alors, nous, on dépose ce matin une
pétition qui demande un moratoire sur ce transfert parce qu'on demande au ministre
de nous faire état de ses justifications pour ces transferts, qui sont des
transferts également qui font passer des professionnels d'un système public,
les CLSC où l'accès est facile, à un système de GMF, qui est un système
médicalisé, donc médecins, alors qu'il y a des citoyens qui ont des problèmes
sociaux sans aucun problème de santé. Donc, pourquoi obliger, finalement, ces
patients-là à passer par le modèle médical, alors que leurs problèmes sont
psychosociaux? Alors, il y a déjà là quelque chose qui n'a pas été bien
expliqué, qui n'a pas été compris, et la répartition des professionnels n'est
pas justifiée. Et, on va voir, il y a même des corridors de services déjà entre
les GMF et les CLSC. Donc, quand, dans un GMF, on identifie un patient qui a vraiment
un problème, il existe déjà, ce corridor-là vers les travailleurs sociaux qui
sont en CLSC, et ça fonctionne bien.
Alors, le ministre n'est pas le
propriétaire du système de santé. Ce système, il appartient aux citoyens, et,
dans ces citoyens, il y a des citoyens d'une grande vulnérabilité. Alors, nous,
on exige qu'il y ait moratoire, que le ministre donne l'heure juste à la population
et vraiment qu'il réfléchisse correctement, qu'il nous fasse la preuve de la
valeur ajoutée de ce qu'il est en train de mettre sur pied, et à ce moment-là
on pourra regarder, mais, pour l'instant, on a une pétition qui, clairement,
indique qu'on est en désaccord avec ce mouvement improvisé par le ministre.
Alors, je laisse la parole à mes
collègues.
Mme Gaouette (Mélissa) :
Donc, bonjour. Un peu partout au Québec, les travailleurs sociaux sont très
inquiets. Il y en a plusieurs qui ont été interpellés par leur gestionnaire
pour leur annoncer qu'ils risquaient d'être transférés en GMF. Il y a des
gestionnaires actuellement qui font le tour de différents GMF pour connaître
les besoins en termes d'horaires des médecins en GMF, en frais de ressources
professionnelles.
Au niveau du CLSC actuellement, il y a
des services de sans rendez-vous psychosociaux qui existent. J'ai d'ailleurs
pratiqué dans ce milieu-là. Dans le cadre de ma pratique, le type de clientèle
que j'ai rencontré, c'est des familles, par exemple, avec un jeune de 19 ans
qui avait des symptômes de psychose, qui refusait de consulter un médecin et
qu'à travers une consultation à l'accueil psychosocial on réussissait à
parvenir à convaincre d'aller voir le médecin et de collaborer. On rencontre
aussi des gens qui ont des symptômes dépressifs, qui sont suicidaires, qui
n'ont pas de médecin de famille, qu'on peut référer en suivi, dont on peut
assurer une prise en charge. Il y a une minorité seulement de gens qu'on réfère
souvent vers des médecins, et, des fois, ils n'ont même pas de médecin traitant
actuellement. Donc, on réussit à quand même pallier à ce manque-là au niveau de
l'accueil psychosocial.
Le ministre Barrette a décidé de
transférer les ressources professionnelles vers les GMF et en plus il base ce
calcul-là de transferts en fonction des besoins du GMF, des besoins en termes
de suivis médicaux et non pas en termes psychosociaux. Ce que ça signifie,
c'est qu'il y a des gens qui vont être transférés en GMF, des professionnels
qui ne pourront pas, peut-être pas, être utilisés à leur plein potentiel, alors
qu'il y a des gens vulnérables, des gens suicidaires qui vont se retrouver avec
des délais d'attente importants ou carrément aucun accès aux services. Ces
transferts-là sont dangereux pour la population, pour une clientèle qui n'a pas
de voix, qui est vulnérable. Et on demande un moratoire avant d'être mis au fait
de conséquences néfastes : des taux de suicide, des cas de santé mentale
qui s'aggravent. C'est problématique, et il faut absolument cesser ces
transferts-là et faire une étude de l'impact de ces transferts-là sur l'accès
aux services mais aussi, au niveau professionnel, sur le travail des
travailleurs sociaux en GMF.
Mme Corriveau (Nancy) : Ça a
été dit, le transfert des ressources publiques dans les GMF, c'est une autre
réforme sans consultation au profit du privé, au bénéfice des médecins qui vont
déterminer ce que les travailleurs sociaux font déjà très bien :
prévention, dépistage précoce. On va se retrouver... C'est le médecin qui va
dire quoi faire au travailleur social alors que tout le système existe déjà, il
y a déjà des corridors, tout est en place. Les travailleurs sociaux font un
excellent travail actuellement dans le réseau. Pourquoi on changerait une
formule qui fonctionne?
On est face à un ministre qui n'écoute
personne, il bouscule l'ensemble du réseau. Encore une fois, une autre réforme
improvisée. On a des craintes. On n'a pas envie, comme ça a été dit
précédemment, de se retrouver face à l'odieux, face à des gens qui ne sont pas
desservis, face à une augmentation des problématiques parce que c'est difficile
d'avoir accès aux services sociaux dans les GMF. Il faut absolument arrêter
cette réforme-là. C'est encore une fois quelque chose de fait unilatéralement.
Aujourd'hui, on est à Québec, mais partout
au Québec, dans le Bas-Saint-Laurent, en Mauricie, dans Lanaudière, il y a des
transferts qui sont prévus, puis les gens ne savent pas trop comment ça va se
faire. Puis les clientèles sont inquiètes aussi. Puis les travailleurs sociaux,
qu'est-ce qu'ils nous disent, c'est : Comment on va faire pour desservir
la population, continuer notre bon travail puis garder la clientèle qu'on a?
Parce qu'il ne faut pas oublier que les travailleurs sociaux qui sont
transférés ne seront pas remplacés. C'est de déshabiller un pour habiller
l'autre.
Aujourd'hui, on demande un moratoire pour
évaluer les impacts, pour faire pour une fois quelque chose intelligemment,
qu'on a évalué puis qu'on est capable de démontrer la pertinence. Il faut absolument
que, partout au Québec, les gens signent la pétition. Il faut qu'on mette un
arrêt à ça parce qu'on est extrêmement inquiets pour la population.
Deux grands risques : les clientèles
vulnérables qui vont être laissées à elles-mêmes, puis déjà on note une
démobilisation de nos personnels parce qu'ils n'ont plus les outils
nécessaires, les ressources nécessaires, ils sont inquiets. Comment je vais
pouvoir desservir les gens qui viennent me voir si je suis dans un cadre aussi
fermé puis qu'il faut que je gère : Il y a-tu un médecin? Il n'y a–tu pas
de médecin? Donc, on vous invite en grand nombre à signer la pétition. Il faut
qu'il y ait un moratoire. On est inquiets. Puis c'est les clientèles
vulnérables, encore, qui vont en payer le prix.
M. Roy (Danny) : Bonjour.
Aujourd'hui, ce qu'on vient vous dire, c'est qu'à partir d'un mauvais
diagnostic le ministre Barrette a signé une prescription ministérielle qui met
en jeu des personnes qui sont en crise. Je m'explique.
Jour après jour, les travailleurs sociaux
accueillent des clientèles qui sont en crise. Jour après jour, les travailleurs
sociaux en CLSC préviennent des situations d'abus, préviennent des suicides,
préviennent de la maltraitance qui est faite aux femmes, aux enfants et à nos
parents. Comment peut-on répondre à cette clientèle quand, en GMF, les délais
sont énormes et que la prise de rendez-vous... les GMF sont déjà embourbés?
On vous l'a dit, on nage en pleine
improvisation. Plus de la moitié des travailleurs sociaux qui travaillent
présentement aux accueils sociaux des CLSC vont être transférés vers les
groupes de médecine familiale privés. En plus de déshabiller les CLSC pour les
envoyer vers les médecins, le ministre prend ce qui fonctionne déjà très bien;
la satisfaction de la clientèle pour les GMF... excusez, pour l'accueil social
est sans contredit très bonne. Pour rencontrer un travailleur social, je vous
l'ai déjà dit : 20 minutes. Vous vous présentez à l'accueil social et, en 20
minutes, vous allez être vu, ce qui correspond à la clientèle en situation de
crise.
Les services sociaux sont la porte
d'entrée du réseau pour une clientèle qui est en crise. La clientèle qui est
inscrite dans les GMF n'est pas la clientèle la plus vulnérable. La clientèle
que nous voyons en CLSC, c'est la clientèle la plus vulnérable. Alors, comment
le ministre peut expliquer cette situation-là et cette façon de voir là? On
sait que le Dr Barrette n'aime pas beaucoup les chercheurs qui disent ce
qu'il ne veut pas entendre, mais par contre, de grâce, il faut évaluer l'impact
du transfert sur la clientèle et sur les intervenants du réseau.
En plus de ça, les GMF ne sont pas à
proximité de la clientèle. Mon GMF est à 10 kilomètres de chez nous, mon
CLSC est à 500 mètres. Ça, ça a un impact important. La plupart des
endroits, les GMF sont dans les milieux les mieux nantis, et les CLSC sont
répartis équitablement sur le territoire. Alors, on demande au ministre
Barrette, ce ministre qui a des yeux pour ses collègues, qui est en train de
détruire quelque chose qu'il ne connaît pas, on lui demande d'évaluer l'impact
de ce qu'il est en train de mettre en place dans nos CLSC. On vous demande de
signer la pétition pour demander un moratoire en attendant qu'on puisse évaluer
l'impact sur les intervenants et sur la clientèle qui y travaille... la
clientèle. Merci.
Mme Maltais : Un dernier mot,
parce que Danny Roy vient de nous parler de la région de la
Capitale-Nationale, je sais que ça se passe partout ailleurs, mais c'est ici,
dans la Capitale-Nationale, qu'on a une première idée des chiffres de ce qui va
se passer sur le territoire.
Ce n'est pas fortuit qu'hier nous étions
ici, au même endroit, pour dire : Écoutez, vous êtes en train de
désorganiser le centre-ville de Québec et le milieu où se sont retrouvés les
plus vulnérables de la société et vous allez fermer une clinique qui est
justement une clinique sans rendez-vous la plus efficace auprès des plus
vulnérables, SABSA. On a perdu, dans le centre-ville de Québec, je le répète,
je le disais hier, 15 travailleurs sociaux, des intervenants de rue qui ne sont
plus là pour servir les plus démunis. Et puis là on m'apprend qu'en plus on va
sortir les travailleurs sociaux du centre-ville pour les envoyer dans les GMF.
Il y a des liens étroits, précis entre les organisations communautaires, les
travailleurs de terrain, les GMF et les CLSC. Ils travaillent déjà ensemble.
Actuellement, ça prend 20 minutes, Danny Roy le répétait,
20 minutes pour voir un travailleur social. C'est fondamental pour
quelqu'un qui est en crise. On est incapable de nous dire... j'ai rencontré le
CIUSSS, et on est incapable de nous garantir le même service ou même
l'équivalent minimal du même service dans les GMF parce qu'ils n'ont aucune
idée, ils n'ont fait aucune étude sur ce transfert. Je l'ai demandé à
M. Delamarre, le P.D.G. du CIUSSS, il n'y a aucune étude sur l'impact de
ce transfert dans la région.
Alors, il y a une pétition qui va être
mise en ligne, signez-la, s'il vous plaît. Allez la voir. On demande une étude
d'impact avant qu'on fasse ce mouvement-là. Nous craignons de plus en plus pour
la clientèle la plus vulnérable. M. Barrette n'a aucune idée de ce qui se
passe actuellement sur le terrain de la Capitale-Nationale, dans le
centre-ville, là où sont les plus vulnérables, les plus marginalisés. Allez
signer la pétition. Merci.
M. Boivin (Simon) : Mesdames,
vous m'excuserez, là, ce n'est pas mon secteur généralement. Est-ce que je
comprends qu'à partir de maintenant tous les travailleurs sociaux des CLSC sont
tous transférés dans les GMF?
Mme Lamarre : Non, mais un
très grand nombre. Par exemple, dans la région de la Capitale...
Mme
Maltais
:
Capitale-Nationale, 39 sur 49. C'est ça, le chiffre, je pense...
Une voix
: 59.
Mme
Maltais
:
Sur 59. 39 sur 59. Donc, la grande majorité.
M. Boivin (Simon) : 39
travailleurs sociaux sur les 59 qui travaillent dans les CLSC...
Mme
Maltais
:
...vont être transférés dans les GMF sans avoir de ratio qui corresponde à ce
que c'est qu'une clientèle vulnérable.
M. Boivin (Simon) : Est-ce
que c'est les mêmes proportions à la grandeur du Québec sensiblement ou...
Mme Lamarre : En fait, pris
dans l'autre sens, c'est que, s'il y a 6 000 patients dans un GMF, ça
justifie un travailleur social. Donc, 6 000 patients dans un GMF
justifient le poste d'un travailleur social. Donc, le ministre a vraiment pris
ça sous l'angle du GMF.
Maintenant, on le sait, si le GMF est dans
un quartier favorisé où il y a moins de problématiques, on fait migrer des
travailleurs sociaux en dehors des zones où on a le plus besoin d'eux. On
démunit, on déshabille vraiment, on enlève toute la pertinence d'avoir des gens
dans des secteurs. Un travailleur social, il faut que ce soit là où il y a plus
de difficultés. Alors, le calcul du ministre...
M. Boivin (Simon) : Vous parliez
du corridor qui permettait d'envoyer des patients des GMF vers les CLSC. Est-ce
qu'on comprend qu'il y a beaucoup moins de gens qui arrivent des GMF vers les
CLSC que des gens qui utilisent la porte d'entrée du CLSC pour obtenir le
service?
Mme Gaouette (Mélissa) : Bien,
juste à titre d'exemple, dans la région de l'Estrie, il y avait des
travailleurs sociaux qui avaient été déplacés dans le GMF et qui étaient
sous-utilisés, qui se tournaient les pouces dans certaines plages horaires.
Donc, on a convenu de ramener le travailleur social à l'accueil psychosocial,
mais ce qui est fait, c'est que le médecin en GMF peut appeler la ligne,
l'accueil psychosocial, et référer la personne qui est dans son bureau. Donc,
il y a déjà des corridors d'accès pour la clientèle du GMF vers le CLSC.
M. Boivin (Simon) : Parce
qu'il y a genre moins de travail, règle générale... Les travailleurs sociaux,
ça a été testé, c'est ce que vous dites, puis, en Estrie...
Mme
Maltais
: À
Québec aussi.
Mme Gaouette (Mélissa) : À
Québec aussi, ça avait été testé.
M. Boivin (Simon) : Puis les
travailleurs sociaux avaient beaucoup moins d'ouvrage que quand ils étaient
directement...
Mme Gaouette (Mélissa) : Bien,
ils pouvaient voir, par exemple, sur une plage horaire de trois heures, un
client, tandis que, quand ils sont dans le volet CLSC, ils voient peut-être
trois personnes à l'intérieur de cette plage horaire là ou deux.
M. Roy (Danny) : Il faut
savoir qu'en GMF les travailleurs sociaux qui sont là prennent des rendez-vous.
Par contre, il y a moins de plages pour accueillir la clientèle sans
rendez-vous. Toute la partie qu'on consulte entre travailleurs sociaux parce
qu'on est en crise ne concorde pas, à notre avis, avec ce qui se passe en GMF.
Et, quand on parle ici, dans la région de Québec, c'est 40 pour 60. Il y a
60 travailleurs sociaux présentement dans la région, 40 de ces
personnes-là vont transférer en GMF. Ça veut dire qu'on bloque carrément
l'entrée à la clientèle plus vulnérable. Il va ne rester que 20 travailleurs
sociaux pour l'ensemble du territoire qui va de Baie-Sainte-Catherine à
Portneuf.
M. Boivin (Simon) : Qu'est-ce
que c'est, la différence entre... Quand vous parlez, là, de l'autorité,
l'autonomie des professionnels, c'est quoi, la différence entre être un
travailleur social en GMF puis être un travailleur social en CLSC? Excusez-moi.
M. Roy (Danny) : C'est une
excellente question! Ma collègue pourra peut-être y répondre. Je peux d'entrée
de jeu vous dire qu'à l'heure actuelle tout le volet psychosocial n'est pas
dans le même champ d'expertise que le médical. Et donc un travailleur social aujourd'hui,
quand il accueille quelqu'un, il voit l'ensemble de la personne et regarde l'ensemble
de la personne. Quand on regarde au niveau médical, on a vraiment une vision
médicale de la personne. Et donc, si on doit voir le médecin, par exemple, pour
aller voir le travailleur social, la première porte d'entrée va être une vision
médicale. Et donc l'autonomie... Et le médecin va sûrement arriver au
travailleur social pour lui dire : Bien, regarde, là, cette personne-là a
telle problématique avec sa famille, règle-moi ça, et ce n'est pas l'approche
psychosociale, qu'on voit la personne dans son ensemble.
Mme Gaouette (Mélissa) :
C'est ça. En fait, ce qui est inscrit, là, dans les différents guides qui ont
été produits pour les GMF, c'est que c'est le médecin qui va faire la
description de tâches du travailleur social, alors que ce n'est pas un
travailleur social. Autre chose qu'on a observé, c'est qu'en ce moment les
travailleurs sociaux en CLSC, la demande ne doit pas passer obligatoirement par
le médecin, c'est du sans-rendez-vous. Là, il risque d'y avoir une consultation
médicale qui va être nécessaire avant. Et ce qu'on remarque pour d'autres
professionnels qui ont été transférés dans des GMF, c'est qu'il y a plein
d'actes que ces professionnels-là peuvent faire dans le volet CLSC mais qu'ils
ne font pas en GMF parce que ce que le professionnel va faire en GMF, c'est ce
qui est établi dans la description de tâches qui a été faite par le médecin.
Donc, il y a des aspects de sa profession qui peuvent ne pas être couverts, et
le travailleur social va être sous l'autorité fonctionnelle du médecin, ce qui
n'est pas le cas en CLSC.
M. Boivin (Simon) : O.K. Donc,
je comprends que la différence majeure, c'est qu'en CLSC la personne va
rencontrer d'abord un travailleur social puis, dans le GMF, elle va rencontrer
un médecin qui va prédiagnostiquer, ou je ne sais pas, puis il va référer
ensuite au travailleur social.
Mme Gaouette (Mélissa) :
C'est ça.
Mme Lamarre : Si je peux juste
ajouter quelque chose, le modèle GMF, avec les quotas que le ministre a imposés,
fait en sorte que, pour un médecin, prendre des patients qui sont
particulièrement lourds, je dirais, qui ont un contexte psychosocial très, très
lourd, ça ne rentre pas bien dans les quotas des médecins et de la clientèle
qui est attendue dans un GMF. Dans un GMF, un patient de cette nature-là vaut
l'équivalent de deux patients qui n'ont pas beaucoup de problèmes de santé.
Alors, vous voyez tout de suite, l'incitatif n'est pas là. Ça n'a pas été conçu
pour que ces patients, qui ont vraiment un contexte psychosocial avec des
maladies physiques, bien, ils soient là. Alors, il n'y a pas d'intérêt
nécessairement, même pour les médecins de GMF, d'avoir les situations très,
très lourdes. Peut-être qu'il y a de la place pour un travailleur social, mais,
à ce moment-là, le contexte dans lequel ça avait été prévu, ce n'était pas
d'enlever ceux qui étaient dans les CLSC, qui, eux, répondent à des besoins
urgents pour des patients et des citoyens qui ont des problèmes — parce
que je dis «patients et citoyens» parce qu'il y a des patients avec des
maladies puis il y a des citoyens qui ont juste des problèmes psychosociaux.
M. Boivin (Simon) : Je lisais
des articles, il y avait d'autres professionnels. Là, vous, c'est seulement les
travailleurs sociaux, hein? Vous êtes uniquement avec les travailleurs ou
vous...
Mme Corriveau (Nancy) : Bien,
en fait, là, présentement, c'est beaucoup les travailleurs sociaux, mais il
pourrait y avoir également des psychologues, des nutritionnistes, des
physiothérapeutes, des kinésiologues, puis c'est le même modèle. La nutritionniste
qui est en CLSC, qui va s'en aller en GMF, elle ne desservira plus les gens du
CLSC. Ça fait qu'on est inquiets. Quand on parle des services de psychologie,
c'est difficile d'accès dans le réseau. On vient encore complexifier cet
accès-là. Ça fait que c'est vraiment, vraiment quelque chose. On demande aux
médecins ce dont ils ont besoin, mais on ne demande pas aux professionnels
comment ils voient l'organisation des services puis on ne s'inquiète pas non
plus de la population, quel est le meilleur endroit pour répondre aux besoins
de façon la plus efficace. Puis nous, on pense sincèrement, puis c'est ce que
nos travailleurs sociaux puis nos professionnels nous disent, que le système
actuel, l'interdisciplinarité, c'est là, c'est présent dans les CLSC. Ça fait
qu'on ne comprend pas pourquoi on veut changer une formule qui fonctionne déjà,
sauf peut-être pour répondre à un besoin x du médecin qui, pour nous, n'est pas
basé ni sur l'exercice professionnel ni sur les besoins de la population.
M. Boivin (Simon) : Mais
est-ce que la proportion, là, du presque deux tiers, un tiers qui mute vers les
GMF, c'est la même dans les autres corps professionnels?
Mme Corriveau (Nancy) : Bien,
sur ce qu'on a entendu dans certaines... Bien, c'est principalement des
travailleurs sociaux. Mais par contre il y a possiblement... il y a d'autres...
je pense, entre autres, là, chez vous, il y en a d'autres aussi, mais c'est vraiment
une grande portion. Puis c'est sûr que les autres types d'emplois sont moins
présents, sont moins nombreux, mais Danny pourrait en parler.
M. Roy (Danny) : Bien, de un,
pourquoi on parle beaucoup de travail social, c'est que, dans le projet
ministériel, ils sont prévus et ils sont ancrés dans un chiffre, on a dit un
pour 6 000. Les autres professionnels sont moindres. Par exemple, dans la
région de Québec, on parle entre 10 et 20 professionnels autres, mis à part les
infirmières, qui sont au choix des médecins, à ce qu'eux ont comme besoins et
comme désir d'intervenant. Voilà.
M. Boivin (Simon) : Puis
juste que je sois certain, la proportion de la Capitale-Nationale, là, 40 sur
60, c'est sensiblement celle qu'on observe à la grandeur du Québec. C'est ça
que je comprends?
Mme
Maltais
: Bien,
c'est parce que c'est pour ça que tu as... Simon, si tu permets, c'est pour ça
qu'on est un peu prudents. C'est que le premier endroit où les chiffres sont
sortis, c'est la Capitale-Nationale. C'est pour ça que, la pétition, on voulait
la lancer ici. C'est le premier endroit où on a les chiffres. Il est fort
probable que le ratio soit le même partout, mais le premier ratio qui est
sorti, où on vient de l'apprendre et où on est un peu sous le choc, c'est les
deux tiers qui sortent des CLSC, 40 sur 60.
M. Boivin (Simon) : Donc,
avez-vous un objectif de signatures?
Mme
Maltais
: Je
regarde le...
M. Boivin (Simon) : C'est le
plus possible, évidemment, là.
Mme
Maltais
: Le
plus possible, oui. En fait, on appelle aux gens.
Mme Gaouette (Mélissa) : Puis
aussi, peut-être juste la... au niveau de la pétition, on touche tous les
transferts de professionnels, donc pas juste les travailleurs sociaux. On
parlait des autres types d'emploi. Les psychologues, il y en a très peu dans le
réseau actuellement, il y a énormément de problématiques. Ça fait que, si je
transfère seulement trois psychologues à Québec, c'est dramatique parce que je
n'ai pas une multitude de psychologues dans les différentes régions.
Mme Lamarre : Puis on a des
citoyens qui sont très vulnérables, qui sont actuellement pris en charge par
les travailleurs sociaux, et on n'a pas d'information sur qu'est-ce qui va
arriver. Quand on va dire à 39 des 59 travailleurs sociaux : Vous quittez
le CLSC et, à partir de lundi matin, vous vous retrouvez dans un GMF, qu'est-ce
qui arrive avec les 1 000 patients, 1 500 patients que ce travailleur
social là pouvait accompagner actuellement? On ne peut pas improviser, on ne
peut pas faire ça d'une façon aussi brutale que ça, et il faut être sûr qu'on
justifie bien les choses et qu'il y a vraiment un support adéquat. S'il reste
juste 20 personnes pour faire le travail de 60, c'est sûr qu'il y a des gens
qui vont se retrouver en détresse en urgence.
M. Boivin (Simon) : C'est
quoi, la date à laquelle c'est censé être en application, ça? C'est d'ici...
Mme
Maltais
: Juin.
M. Boivin (Simon) : 1er juin?
Mme
Maltais
:
Aussi vite que ça.
Mme Lamarre : Très vite.
M. Boivin (Simon) : 1er juin?
Mme Lamarre : Très, très vite.
Mme
Maltais
:
1er juin.
M. Boivin (Simon) : Au mois
de juin.
Mme
Maltais
: En
juin, sans étude d'impact.
M. Boivin (Simon) : Au mois
de juin. O.K.
Mme
Maltais
:
Les patients ne sont pas des boîtes de dossiers, c'est des humains. Ils ne sont
pas faciles à transférer, eux.
M. Boivin (Simon) : Et vous
n'avez pas de garantie sur la façon dont le suivi va être assuré entre un
endroit et l'autre pour les patients déjà pris en charge?
Mme Lamarre : Bien, on a clairement
entendu le président de la FMOQ dire : Il faudra que les travailleurs sociaux
prennent les patients que les médecins leur recommanderont. C'est ça qu'on a
entendu comme réaction de la FMOQ. Donc...
M. Roy (Danny) : Le nombre de
personnes à la pétition répond aussi à quelque chose d'autre. Dans chacun des établissements
avant, nous avions le pouvoir d'influencer ce genre d'enlignement là. Présentement,
si on est à demander une pétition, c'est que nos établissements, nos dirigeants
n'ont pas le pouvoir de prendre un temps d'arrêt pour évaluer, et ça, c'est
superimportant. On est rendus à demander l'appui de la population pour arriver
à cette question-là parce que, dans nos établissements, les dirigeants n'ont
plus ce pouvoir-là. C'est M. Barrette qui a ce pouvoir-là.
M. Boivin (Simon) : Merci
beaucoup.
Mme
Maltais
:
Merci.
Mme Lamarre : Merci.
(Fin à 10 heures)