(Treize heures trente-cinq minutes)
Mme Lamarre : Bonjour. Nous
sommes ici ce matin pour parler d'un nouveau secteur qui est victime, dans le
fond, d'une démarche du ministre de la Santé. Cette fois-ci, il s'agit des
ambulanciers, des paramédics.
Alors, je suis accompagnée de M. Dany
Lacasse, qui est vice-président de la FSSS-CSN, et de M. Jean Gagnon, qui
est représentant du secteur préhospitalier de la FSSS-CSN.
Alors, ce qu'on constate, c'est que le ministre,
après le rapport Ouellette, qui avait été commandé, sur les services
préhospitaliers, en fait, donc tout ce qui concerne les ambulanciers, le
service des paramédics, il y avait une urgence d'agir, c'était le titre du
rapport Ouellet, qui a été déposé il y a déjà plus d'un an, et donc très peu de
suivis. Mais ce qui est frappant, c'est qu'en avril dernier le ministre de la
Santé, M. Barrette, a émis un communiqué dans lequel il y avait trois recommandations :
alors, une première recommandation qui vise à améliorer... à donner plus de redditions
de comptes — et on est d'accord avec cette recommandation-là — au
niveau des services hospitaliers... préhospitaliers; deuxième recommandation, c'est
le choix du gouvernement de dire : Nous, on va travailler à l'acquisition
des véhicules et des équipements et donc on va essayer d'obtenir de meilleurs
prix à ce niveau-là — ça aussi, je pense que ça fait référence à une
saine gestion, et c'est possible de le faire; troisième recommandation, là, par
contre, il y a vraiment une décision qui est très étonnante, c'est-à-dire que
le ministre reconnaît de façon pleine et entière l'autorité, dans le fond, le
statut des entreprises propriétaires d'ambulances de devenir les employeurs des
ambulanciers.
Alors, on voit très, très bien, là, il y a
une perte. Historiquement, l'association des ambulanciers avait des liens avec
le ministère de la Santé et des Services sociaux et des négociations, même,
avec le ministère de la Santé et des Services sociaux pour, par exemple,
apporter certaines garanties au niveau de la formation des ambulanciers, au
niveau des conditions de travail générales, je vous dirais même au niveau des
uniformes, au niveau aussi, également, de s'assurer que toutes les zones du Québec
soient bien couvertes et qu'il y ait même des possibilités de s'entraider entre
services ambulanciers. J'ai déjà fait des points de presse où on dénonçait qu'il
y avait certaines zones qui n'étaient pas bien prises en charge.
Donc, on veut optimiser tout ça, on veut
améliorer, et là ce que les ambulanciers reçoivent comme consigne, c'est que, dorénavant,
il n'y a plus de négociations entre eux et le ministère de la Santé et des
Services sociaux, donc entre le ministre, et qu'au contraire on leur dit :
Bien, les propriétaires d'ambulances deviendront vos employeurs à part entière.
Alors, ça pose vraiment un problème en termes de standardisation de qualité des
soins, des interventions, de standardisation et d'accès garanti.
Alors, je vais laisser M. Lacasse et
M. Gagnon compléter avec les informations supplémentaires, mais, pour
nous, c'est clair, c'est une autre façon... un autre secteur, je vous dirais,
qui avait été un peu épargné jusqu'à maintenant, mais le ministre a décidé de
semer la discorde partout dans le réseau de la santé, incluant même au niveau
des services ambulanciers, qui sont des services très importants, essentiels et
très appréciés de la population. M. Lacasse.
M. Lacasse (Dany) : Alors,
oui, bonjour. En effet, par rapport au rapport Ouellet, dans le fond, il était
urgent d'agir. Les rencontres ont été arrêtées au printemps 2015, et, en
lien avec ça, on voyait une vision dans ce rapport global. Mais ce que nous
présente le ministre Barrette, le 21 avril dernier, ça nous semble tout à fait...
une confusion totale, puisqu'on reprend seulement quelques recommandations qui
sont beaucoup plus pécuniaires, alors qu'il y avait une vision beaucoup plus
importante au niveau des services à la population, la reddition de comptes,
comme Mme Lamarre le disait tantôt, mais aussi sur une reddition de
qualité et de s'assurer d'un bon service.
Nous, en négociations... depuis plus de
30 ans qu'on négocie avec le ministère tout ce qui touche, de façon
globale, les matières nationales, particulièrement monétaires, et aussi c'est
important parce qu'on a déposé ces matières-là en avril 2015, on n'a eu
aucune rencontre avec le ministère à ce jour sur les négociations. En août
2015, on nous avise ça va être quoi, les matières négociées avec le ministère,
les matières négociées avec les entreprises privées sur les choses plus
locales, plus normatives, et en avril, le 21 avril dernier, coup de
théâtre, on apprend que, maintenant, on va devoir faire entièrement la
négociation avec nos employeurs, à laquelle nos employeurs, d'ailleurs, ne
semblent pas plus au courant ni prêts à faire ce type de négociation, puisque
ce n'est pas eux qui décident de leurs revenus, de leurs contrats, tout est
organisé par le ministère. Donc, vous voyez, c'est un système, là, présentement,
qui ne fait pas l'affaire, et ça donne la confusion pour tout le monde.
On a eu 11 rencontres, actuellement,
à ce jour, avec la principale association patronale sans être capables
seulement de finaliser une négociation sur un protocole, justement, comment
qu'on va établir la négociation. Et donc ça démontre bien comment qu'on est
dans... que tout le monde ne sait pas présentement où on s'en va.
Il y a également des choses importantes, donc,
nous avons stabilisé la main-d'oeuvre, l'emploi, nous avons professionnalisé le
secteur et modernisé la pratique. Depuis 30 ans, la CSN a été de plusieurs
combats, justement, pour s'assurer la professionnalisation des paramédics au
Québec, autant des répartiteurs médicaux d'urgence, du personnel de soutien et
on veut être utilisés, on est prêts à être utilisés, parce que, bien sûr, moi
comme M. Gagnon, on est des paramédics et on est intéressés de continuer à
servir la population, mais ce n'est pas en nous isolant dans chacune des
entreprises que la vision va être globale.
Et, dans le rapport, d'ailleurs, on voyait
même des recommandations qui allaient jusqu'à faire disparaître la notion des
zones justement pour s'assurer d'un service global. Avec l'orientation prise au
mois d'avril, c'est clair, là, que, pour nous, ce n'est pas dans cette
direction-là qu'on a fait 30 ans de lutte et on ne peut pas accepter cette
nouvelle vision du ministre. Et d'ailleurs on a demandé une rencontre, on veut
le rencontrer, on veut mettre les choses au clair avec lui et on a des bonnes
parties des trois items, d'ailleurs, qu'on a présentés en avril qu'on est
d'accord, mais, sur l'utilisation de nos ressources, il faut se parler absolument.
Je pense que c'est un droit qu'on a de s'assurer qu'on va dans la bonne
direction.
Donc, également, bien sûr, on a débloqué
des actions, on veut être sur le terrain. De plus en plus, dans les prochains
jours, vous allez nous voir arriver parce qu'il est clair pour nous qu'on
n'acceptera pas cette façon de faire, on ne veut pas revenir 30 ans en
arrière, on a trop voulu faire avancer ce secteur-là, et tout le bien que ça
apporte à la population, puis je pense que la population nous le rend bien
aussi. Donc, vous pouvez vous assurer qu'on va tout faire de notre part pour
continuer à faire avancer et non reculer nos conditions de travail, mais particulièrement
les conditions de pratique des paramédics au Québec.
Donc, je vais laisser la parole à M. Gagnon.
M. Gagnon (Jean) : Merci.
Bonjour. Écoutez, je vais simplement donner des exemples pratiques, là, parce
qu'il n'y a pas grand-chose à rajouter. Mais, je dirais, au niveau pratique, si
on parle de santé et sécurité au travail, on parle de détresse psychologique ou
de choc post-traumatique, il est important de traiter ces matières-là à un même
endroit pour l'ensemble des paramédics, des répondants médicaux d'urgence et
des employés de soutien du secteur préhospitalier, que ça soit au niveau des
horaires de faction, ce qu'on appelle les horaires 7/14, où les gens
travaillent sept jours d'affilée «on», prennent sept jours de repos... Ces
horaires-là sont désuets. Il y a des gens, même, qui ont fait des plaintes à la
CSST, il y a des décisions qui sont à la veille de sortir, et nous, on ne veut
pas se ramasser avec ses solutions imposées. C'est pour ça qu'on l'a mis dans
la négociation de la convention collective, afin d'avoir des horaires de
travail qui vont être bénéfiques, tant pour les paramédics que pour la population.
Et c'est la même chose au niveau de la
charge de travail. On sait qu'il y a des endroits où la charge de travail est beaucoup
trop élevée. On sait que, de plus en plus, nos gens sont essoufflés, et, depuis
le nombre d'années que ça dure — et ça va en augmentant — ils
ne pourront pas continuer à garder ce rythme-là. On ne voit pas comment on va
pouvoir régler le problème de la charge de travail dans les différentes régions
du Québec si on fait ça avec les entreprises privées et on ne fait pas ça avec
le ministère.
Alors, ce n'est là que quelques exemples
qui font qu'on ne peut pas décider de reconduire des contrats à budget, ne rien
nous donner comme alternative et de ne pas maintenir notre façon de négocier
qu'on fait depuis 30 ans. Pour nous, c'est un recul qui est inacceptable.
Merci.
Mme Lamarre : En conclusion, je
dirais que, dans le fond, ce qu'on perçoit actuellement — puis le ministre
peut le corriger s'il accepte de rencontrer les paramédics comme ils le
demandent — c'est qu'il essaie, dans le fond, de faire un bras de fer
avec les entreprises propriétaires des ambulances, et, dans ce moment de négociation,
eh bien, les paramédics se trouvent pris en otages, ils se trouvent coincés et
ils sont complètement isolés de leur habituel lieu de négociation, lieu qui
devrait demeurer un lieu public, puisqu'il y a des enjeux de système de santé
public dans les services que les ambulanciers offrent aux Québécois.
Alors, nous, on demande que le ministre
rencontre les ambulanciers, qu'il leur donne l'heure juste, qu'il leur explique
qu'est-ce que c'est, sa vision de leur participation et qu'il reprenne... donc
qu'il leur garantisse qu'ils pourront encore être entendus et avoir le
ministère de la Santé et des Services sociaux dans le trio qui, historiquement,
faisait en sorte que les services étaient garantis de façon universelle à la
population du Québec. Alors, c'est cet appel-là qu'ils font : Est-ce que
le ministre peut rencontrer les ambulanciers et leur donner l'heure juste alors
qu'actuellement il est en train de faire une négociation difficile avec les
entreprises ambulancières? Et on a l'impression qu'il se sert un peu des
ambulanciers en otages, finalement, entre les... dans ce contexte de
négociation.
Alors, le ministre devra rencontrer les
ambulanciers. Je pense que c'est un devoir, les ambulanciers le méritent. Je
pense qu'il y a également une opportunité, tant que le ministère reste en lien
avec les ambulanciers et non pas les confier exclusivement à des entreprises
propriétaires d'ambulances, eh bien, il y a toutes sortes de nouveaux rôles qui
sont possibles aussi pour les ambulanciers. On voit, en Ontario, où on utilise
beaucoup les paramédics, par exemple, dans le soutien à domicile, dans le suivi
de certains patients qui ont des besoins d'avoir une visite d'un professionnel
ou de quelqu'un qui vient valider certaines choses, la prise de certains
médicaments à domicile... Donc, il y a une façon de mieux utiliser, de mieux faire
en sorte que les ambulanciers contribuent à l'ensemble du système de santé et
non pas les exclure du système comme le ministre semble vouloir le faire tant
qu'il n'aura pas donné l'heure juste à ces représentants importants, ces
professionnels de la santé dans notre système. Merci.
(Fin à 13 h 47)