(Neuf heures quarante-neuf minutes)
M. Roberge : Bonjour. Merci d'être
ici aujourd'hui. Aujourd'hui, on va vous parler des centres de formation
générale aux adultes. Ce sont des écoles extrêmement importantes mais
méconnues, sous-financées et financées par des enveloppes fermées, ce qui n'a
pas de sens. D'ailleurs, ça a été la conclusion d'un congrès qui s'est appelé
Convergences pour la FGA, formation générale aux adultes, où il y avait la FAE,
la Fédération des commissions scolaires du Québec, la FSE, l'association québécoise
des intervenantes et intervenants en formation générale des adultes, et j'en
passe. Et ils sont arrivés à une conclusion qui dit, et je cite : «Le financement
par "enveloppe fermée" de l'État a des incidences restrictives dans
les CEA — c'est les centres d'éducation aux adultes — tout
comme le financement d'Emploi-Québec dédié à l'intégration en emploi.» On a un
problème de financement à la formation générale aux adultes.
On va vous présenter aujourd'hui des cas
d'espèce, des témoignages très importants qui touchent droit au coeur et qui
montrent l'importance de ces écoles et des services aux élèves. Les coupures
ont des impacts très, très néfastes. Je vais vous donner des exemples de
coupures à la formation générale aux adultes. À la commission scolaire des
Premières-Seigneuries, ce n'est pas fictif, c'est réel. Dès septembre prochain,
deux postes à 100 % à la vie étudiante, d'animation à la vie étudiante,
vont être coupés — il n'y en aura plus, de vie étudiante dans la
formation générale aux adultes aux Premières-Seigneuries; deux postes de
technicien ou technicienne en éducation spécialisée; un poste à 100 % en
orthopédagogie — il y en avait un, il n'y en aura plus,
d'orthopédagogie à la formation générale des adultes aux Premières-Seigneuries;
deux postes de conseillers en orientation; deux postes qui vont être réduits de
30 % pour la surveillance en salle d'examen, ce qui est très important. Ça
inclut les labos aussi. Et ce sont des élèves qui ont besoin de mesures
d'adaptation.
Il y a aussi le fait qu'il y a de plus en
plus d'élèves par classe. Et ce sont des élèves qui ont des parcours
personnalisés. Alors, imaginez, s'il y a une classe de 30 élèves, bien, pour
leur professeur, ça veut dire deux minutes avec chacun des élèves. On coupe
directement dans la qualité du service, dans l'encadrement, et donc on diplôme
moins de jeunes. Et c'est là que ça fait mal. Ça fait mal socialement, mais ça
fait mal aussi dans la vie des jeunes. C'est des drames humains à chaque fois.
Il y a des gens qui permettent à nos
jeunes d'obtenir ce fameux diplôme. Bien, c'est des gens qui travaillent jour
après jour pour en amener un maximum vers la réussite. On a deux témoignages
aujourd'hui de gens qui se dévouent dans les centres de formation générale aux
adultes : M. Patrick Deschênes, Mme Martine Blais. On va aussi avoir, dans
quelques minutes, Mme Marie-Ève Denis, qui est une étudiante. Mais je vais
d'abord laisser la parole à M. Patrick Deschênes, enseignant.
M. Deschênes (Patrick) :
Alors, bonjour, tout le monde. Merci. Je m'appelle Patrick Deschênes. Je suis enseignant
en français et en histoire dans le secteur des adultes. En fait, j'enseigne à
des élèves qui sont au secondaire, en troisième jusqu'en cinquième en français
puis en quatrième secondaire en histoire.
Si je suis ici aujourd'hui, c'est pour
vous parler du mode de financement dans le secteur des adultes, M. Roberge en a
parlé un peu, une enveloppe fermée, en fait. C'est un système qui est désuet,
qui n'est pas adapté à la clientèle qu'on a actuellement. Juste avant, je veux
expliquer, je veux que ça soit clair. Si je suis ici aujourd'hui, ce n'est pas
pour critiquer ma commission scolaire, ma direction ou les employés de ma
commission scolaire, c'est pour dénoncer le fait qu'actuellement le
sous-financement fait en sorte que, dans l'ensemble du Québec, les commissions
scolaires doivent faire des coupures. En fait, c'est que l'enveloppe fermée, c'est
comme une grosse tarte totale que toutes les commissions scolaires du Québec
doivent se partager. Et, lorsqu'on a plus d'élèves, bien, on va avoir moins de
financement dans les écoles, donc moins de services aux élèves.
Puis un problème aussi, c'est que les
élèves reçoivent des cotes. Les EHDAA, les élèves qui ont des difficultés
d'apprentissage, les handicapés qui ont une difficulté d'apprentissage et
d'attention, ces élèves-là commencent leur primaire, ont une cote, on leur
donne des services. Ils poursuivent au secondaire, il y a encore un peu de
financement, la cote suit. Mais par la suite ils arrivent dans le secteur des
adultes, et la cote disparaît, le financement disparaît, mais les difficultés
demeurent. Un problème, c'est que la Loi de l'instruction publique oblige les
élèves à aller à l'école jusqu'à 16 ans, mais elle ne leur donne pas le droit d'avoir
le soutien nécessaire lorsqu'ils n'ont pas réussi leur secondaire à 16 ans.
Donc, ils arrivent dans notre secteur, ils ont moins d'aide.
Je voudrais vous parler un petit peu de la
clientèle parce que les gens ne connaissent pas beaucoup le secteur des
adultes. Nous, notre clientèle, c'est des élèves en majorité qui ont 16 à 19
ans. En 2013‑2014 dans nos centres, c'était 63 %. Et, par expérience
personnelle, à peu près 80 % des élèves ont 22 ans et moins et ce
sont des élèves qui ont des difficultés d'apprentissage.
Ensuite, je veux profiter de l'occasion
pour interpeller M. Couillard, qui prétend être le ministre de l'Éducation, M.
Proulx, qui a dit, récemment au Téléjournal, jeudi dernier, que, dès
l'an prochain, il y aurait une aide complète pour les élèves qui ont des
difficultés d'apprentissage. Bien, je leur pose la question : Est-ce que
cette aide financière là aidera aussi les centres de formation des adultes?
Est-ce que cette aide va aider les élèves qui ont des difficultés
d'apprentissage et qui se retrouvent dans nos centres? C'est important.
Je crois que c'est un débat de société. Je
vous interpelle. C'est un problème, c'est un enjeu social majeur. Et, en même
temps, ce n'est pas seulement l'éducation qui est concernée, c'est l'économie
puisqu'on se plaint constamment que le décrochage scolaire est élevé, on se
plaint que le salaire moyen au Québec est plus bas qu'ailleurs. Bien, en
investissant dans le secteur des adultes, ça va aider. Pourquoi? Parce que nos
écoles, c'est des écoles de la dernière chance. C'est le dernier rempart pour
augmenter la diplomation des élèves de 20 ans et moins, pour réduire le décrochage
scolaire puis aider les élèves qui ont des difficultés d'apprentissage.
Alors, c'est un enjeu important, c'est un
enjeu social, c'est un enjeu économique. Merci.
M. Roberge : Merci beaucoup,
M. Deschênes. Je vais céder la parole maintenant à Mme Martine Blais, aussi enseignante
à la formation générale des adultes.
Mme Blais (Martine) : Bonjour.
Moi, je suis enseignante à l'éducation des adultes depuis plus de 30 ans.
Depuis quelques années, notre centre est déficitaire à cause du mode de
financement. Et, cette année, la direction a été forcée de faire des choix
déchirants. Elle a été obligée de couper pas dans le gras, plutôt dans le
muscle, dans les os, dans le coeur, je dirais, même, les services directs aux
élèves.
Pour illustrer l'importance de ces
services, j'aimerais vous parler d'un jeune de 16, 17 ans qui a quitté sa
région, où il n'avait pas d'avenir, pour venir étudier à Québec. Après un
certain temps, il n'allait pas bien, il était découragé, il voulait quitter ses
études. Il n'avait pas d'ami, il était isolé, il ne faisait plus de sport, il
était dépressif, il avait des pensées suicidaires, il ne se sentait plus
capable de continuer. Avec la technicienne en éducation spécialisée, nous
l'avons soutenu. La responsable de la vie étudiante l'a invité à intégrer
l'équipe de hockey avec d'autres élèves. Et, avec beaucoup de soutien, il a
persévéré, il a terminé ses préalables pour entrer aux études professionnelles.
Après un certain temps, je l'ai croisé par hasard à son emploi où il
travaillait, et, quand il m'a vue, il est venu m'annoncer avec fierté qu'il
venait de terminer son D.E.P. en plomberie. Il pouvait enfin pratiquer son
métier.
Des histoires comme ça, j'ai peur qu'on
n'en voie plus avec les coupures qui s'en viennent. Les élèves adultes ont
presque tous vécu un parcours scolaire extrêmement difficile. À 16 ans ou plus,
plusieurs sont encore au premier cycle du secondaire. Ça veut dire qu'ils ont
vécu énormément d'échecs tout au long de leur parcours scolaire. Ils ont aussi
une variété de problèmes psychosociaux. Plusieurs ont vécu de l'intimidation,
de l'exclusion. On pourrait les énumérer, mais ça serait trop long, mais on
peut dire une variété de problèmes. Ils ont besoin de soutien et d'encadrement.
Je les entends dire : Je suis pourri.
Je suis poche. Je suis un cave. Mon premier rôle, c'est de les amener à se mettre
au travail, à sentir qu'ils peuvent réussir à se faire confiance et à faire les
efforts nécessaires. Après ça, ils doivent bûcher, mais souvent on arrive à
leur faire atteindre leur objectif. Ce n'est pas souvent un secondaire V. Souvent,
c'est une secondaire III, un secondaire IV, des fois un test de développement
général qui leur permet d'entrer en formation professionnelle.
Ensemble, avec une équipe qui appuie les enseignants,
on fait des petits miracles. On est très fiers de ce qu'on fait avec les
étudiants. Et ils viennent nous le dire de temps en temps, nous revoir pour
nous dire à quel point on a fait un changement dans leur vie. On aimerait ça
pouvoir continuer à faire la différence. Avec plus d'élèves dans les classes, c'est
moins de temps à leur consacrer. Sans orthopédagogue, sans vie étudiante, avec
beaucoup moins de techniciens en éducation spécialisée, de conseillers
d'orientation et même de direction, est-ce qu'on va être capables de s'occuper
des élèves qui n'avancent pas? Est-ce qu'on va les laisser tomber? Combien
d'entre eux allons-nous sacrifier par manque de financement? J'espère que le
gouvernement va reconnaître l'importance de l'éducation des adultes et assurer
un financement en conséquence. Merci de votre attention.
M. Roberge : Merci beaucoup,
Mme Blais. Je vais laisser la parole maintenant à Marie-Ève Denis, étudiante au
centre de formation des adultes.
Mme Denis (Marie-Ève) :
Bonjour. Je m'appelle Marie-Ève Denis. J'ai 32 ans. Je suis présentement
étudiante à l'école aux adultes. Je suis venue aujourd'hui parce que moi puis
mon conseiller étudiant, on se sent très interpellés face aux coupures qu'on va
vivre l'an prochain. Moi, je suis une personne que ça fait... mes dernières
années n'ont pas été très, très, très de tout repos. J'ai vécu des gros
problèmes, des problèmes personnels mais pas juste ça. Ça m'a amenée à aller en
thérapie. Puis mon médecin, bien, il m'a alors diagnostiqué un trouble sévère
du déficit de l'attention avec hyperactivité, TDAH. On n'en parle pas assez
souvent, mais, bon, ça existe.
Dans mon processus de réhabilitation, avec
l'aide de conseillers en orientation, de psychologues, j'ai pris la décision de
refaire un retour aux études. Bon, au début, je me croyais beaucoup trop
vieille pour ce changement dans ma vie, puis même mon père, bien, il me disait :
Marie, tu sais, ce n'est pas sûr que c'est une bonne idée. 30 ans, c'est
long, tu sais. Tu as encore une couple d'années puis... en tout cas. Finalement,
bien, c'est en avril 2015 que j'ai fait mon premier pas à l'école pour aller
chercher les préalables en vue d'aller en santé animale. Bon, bien là ma bulle
a été pétée. En côtoyant la conseillère en orientation, on s'est rendu compte
que ce n'était peut-être pas le meilleur domaine, côté placement, ça fait que
j'avais beaucoup plus de difficulté à accepter, mais elle m'a prise en charge,
elle m'a rencontrée à plusieurs reprises. On a établi un profil scolaire qui me
faisait l'affaire. J'hésitais entre deux domaines, puis elle m'a conseillé
d'aller faire des demi-journées, là, comme élève d'un jour dans ces
programmes-là. Puis, bien, à force de parler avec un prof qui m'a redonné beaucoup
de confiance en moi — parce que ce n'était pas énorme — ça
m'a permis enfin de trouver ma voie. J'ai aussi eu l'aide de l'orthopédagogue
pour apprendre à gérer mon stress. Quand on a beaucoup de problèmes des fois
dans notre vie, le stress, c'est quelque chose de... ça prend beaucoup, beaucoup
de travail pour le combattre. Puis, lorsque j'avais des moments de doute
concernant mes démarches scolaires, bien, j'allais voir souvent mes
techniciennes en éducation spécialisée, question d'éclaircir mes idées, dire :
Bon, O.K., je ne doute plus. Je doute-tu? C'est-u correct?
Il y a aussi l'importance... Dans notre
école, c'est qu'on a une technicienne en loisir, qu'on n'aura plus l'année
prochaine, qui nous accompagne, nous, le conseil étudiant, pour créer des
activités, que ça soit organiser des sorties pour les étudiants, que ça soit
pour préparer deux galas qu'on a dans l'année, ce qui fait que ça encourage les
élèves à continuer parce qu'ils reçoivent des méritas, ils reçoivent des
petites bourses, des fois, qu'on réussit à avoir. C'est valorisant. Puis, bien,
ces activités-là, bien, ça fait en sorte que ça crée de la vie dans notre
école, qu'il y a... simplement pour but de motiver les élèves à rester,
question de rester sur le chemin qu'ils ont entrepris depuis un petit bout.
Je côtoie des élèves qui sont décrocheurs,
d'anciens décrocheurs, à tous les jours. Je sais parfaitement que des services
comme l'orthopédagogie, conseiller en orientation, technicien en éducation
spécialisée et même technicien en loisirs sont des importances capitales pour les
gens comme moi, qui ont besoin d'un encadrement spécifique à chacun. À l'école
aux adultes, nous sommes tous différents et nous avons besoin d'une approche
différente pour chacun d'entre nous.
S'il vous plaît, il est absolument
nécessaire d'offrir des services d'aide et d'encadrement aux élèves en
difficulté, sinon il n'y en aura plus beaucoup, de personnes qui vont aller
jusqu'au bout de leurs projets. Merci. Marie-Ève Denis, étudiante aux adultes.
M. Roberge : Que dire de plus?
Que dire de plus? Merci énormément, Mme Blais, M. Deschênes,
Mme Denis. C'est concret, ça. C'est la vraie vie, ça. Je pense que le
premier ministre devrait arrêter de lire The Economist, puis
visiter un peu les écoles, puis écouter les témoignages qu'on vient d'entendre.
Je pense que le ministre Proulx devrait agir, devrait se mettre les deux mains
dedans, là, puis prendre une décision qui ferait une vraie différence dans la
vie des jeunes. Au-delà des beaux discours, là, on a un premier ministre puis
un ministre qui essaient de récupérer des discours et de récupérer des idées :
l'école jusqu'à 18 ans.
L'école jusqu'à 18 ans, là, c'est de
financer comme du monde la formation générale aux adultes. C'est ça, la vraie
école jusqu'à 18 ans. On veut amener les jeunes jusqu'à ce premier diplôme. Mais
c'est concret, là. Il faut financer pas avec des enveloppes fermées, il faut
financer correctement la formation générale aux adultes. Il faut que les cotes
de difficulté des élèves, EHDAA — handicapés ou en difficulté
d'adaptation et d'apprentissage — suivent les élèves. Ils ne
guérissent pas par magie, là, parce qu'ils quittent l'école secondaire puis
qu'ils vont en formation des adultes. Il faut que les cotes de difficulté
suivent les élèves à la formation générale aux adultes puis il faut que les
services professionnels suivent. Je pense qu'on a eu un témoignage très
touchant, un cri du coeur qui nous montre vraiment que ces services-là font la
différence, gardent les jeunes à l'école, les amènent à réussir, à obtenir ce
premier diplôme là ou à se réorienter en formation professionnelle puis à
gagner leur vie dignement, fièrement.
J'interpelle donc le ministre de
l'Éducation et le premier ministre pour qu'ils annulent ces coupures insensées,
qu'ils revoient le financement, qui est en ce moment un financement par enveloppe
fermée, et qu'ils fassent une vraie politique de réussite scolaire à la
formation des adultes, l'école jusqu'à 18 ans et au-delà. C'est le temps de
lâcher les discours puis de passer à l'action. Merci.
La Modératrice
: Merci.
Est-ce qu'il y a des questions?
M. Caron (Régys) : Si la
clientèle aux adultes augmente, est-ce que le nombre d'enseignants augmente?
M. Roberge : Pas nécessairement.
Je vais commencer, vous pourrez compléter, mais ce que je peux dire, c'est qu'il
y a un problème aussi quand on dit : Le nombre d'élèves dans les centres
de formation aux adultes... on appelle ça les ETP, élèves à temps plein. Des
fois, le nombre d'élèves à l'air stable, mais il y a plus d'élèves dans l'école
parce qu'il y a davantage d'élèves qui sont à temps partiel. Donc, pour les
profs, pour les techniciens en éducation spécialisée, ça fait plus de cas à
suivre. Même s'ils ne sont pas tous à temps plein, c'est une surcharge de travail.
Puis il faut revoir le financement pour aider les élèves : pas juste comme
ça, par des enveloppes fermées, en tenant compte des élèves à temps plein, les
ETP.
Vous voulez ajouter?
M. Deschênes (Patrick) : Je
voudrais intervenir. Les ETP, comme ça, c'est... Globalement, l'enveloppe
fermée, c'est calculé en ETP. Donc, si on dit qu'il y a eu une réduction des
élèves dans les centres, souvent, il faut aller voir un peu plus loin parce que
le nombre d'inscriptions d'élèves distincts a peut-être augmenté parce qu'on a
de plus en plus d'élèves à temps partiel, des élèves qui ont neuf heures de
cours, neuf heures en maths, neuf heures en français, et qui ont besoin des
mêmes services. Donc, on a plus d'élèves inscrits mais moins d'élèves à temps
plein parce qu'ils sont calculés sur un horaire complet. Donc, ça prend plusieurs
élèves à temps partiel.
M. Caron (Régys) : Quel
pourcentage sont des décrocheurs, de toute la clientèle?
M. Deschênes (Patrick) : Je
vous dirais que c'est hallucinant. Je peux vous donner une idée, par exemple,
des chiffres que j'ai oublié de dire tout à l'heure, là. Il y a des statistiques
qui sont sorties dernièrement, c'est que seulement 45 % des élèves qui ont
des problèmes d'apprentissage, les EHDAA, réussissent à obtenir leur diplôme
d'études secondaires en sept ans. C'est les chiffres qu'on a entendus
dernièrement. Bien, la grosse proportion qui ne réussit pas vient dans nos
centres. Donc, on a beaucoup d'élèves qui ont besoin de mesures d'adaptation, donc
qui ont le droit d'avoir plus de temps en salle d'examen, qui ont des suivis
personnalisés, qui ont besoin d'orthopédagogues. Et là il y a des réductions à
ce domaine-là, là, au travers le Québec.
M. Caron (Régys) : J'ai cru
entendre de votre collègue, tout à l'heure, qu'il y a une proportion importante
d'élèves aux adultes qui sont au niveau primaire. Est-ce qu'on peut quantifier?
Mme Blais (Martine) :
Quantifier, je ne serais pas capable, je n'ai pas de chiffre là-dessus. Il n'y
en a pas nécessairement tant que ça qui sont au niveau primaire. J'en ai, dans
ma classe, qui sont… on dit présecondaire à ce moment-là, mais j'en ai beaucoup
au premier cycle du secondaire. Il y a d'autres centres où ils ont plus
d'élèves.
M. Caron (Régys) : Ils ont
quel âge?
Mme Blais (Martine) : C'est
16 ans et plus. J'ai une élève dans la vingtaine qui a commencé le niveau
présecondaire. Elle a terminé son secondaire I. Là, elle commence son
secondaire II. Donc, en les accompagnant, on est capables de leur faire
faire un bout, mais c'est des élèves en grande difficulté d'apprentissage qui
ont vécu énormément d'échecs.
Et, pour répondre à votre question,
tantôt, j'aurais quelque chose à ajouter sur le nombre d'élèves dans les
classes. Est-ce qu'il y a plus de professeurs quand il y a plus d'élèves? On
n'a pas de nombre maximal d'élèves dans les classes à l'éducation des adultes.
M. Caron (Régys) : Ça va
jusqu'à combien?
Mme Blais (Martine) : Ça
dépend des centres, ça dépend des décisions de la direction. Dans ma classe,
qui est une classe d'élèves en difficulté premier cycle du secondaire, ça va
jusqu'à 20, ce qui a été décidé par la direction, le maximum prévu est 20,
parfois ça va à 21. Dans les classes régulières de notre centre actuellement,
ça va à 30, parfois 32 et plus. Et on prévoit, pour l'année prochaine, d'avoir
plus d'élèves. Il y a des centres où ça peut être 38, 40. Puis, quand il y a
trop d'élèves, on fait venir un prof remplaçant qui vient répondre aux
questions des autres élèves. Ça varie d'un centre à l'autre, mais il n'y a pas
de maximum. Donc, on peut facilement accepter qu'il y ait énormément d'élèves.
Dans certains centres, on compte sur les absences pour faire en sorte que ça
rentre dans la classe. Quand on a 40 élèves prévus dans un cours, ça ne rentre
pas nécessairement.
M. Caron (Régys) : Est-ce que
c'est fréquent, 40 élèves?
Mme Blais (Martine) : Pas dans
notre centre.
M. Deschênes (Patrick) :
Est-ce que je pourrais intervenir, Martine, pour t'aider un peu là-dessus?
Mme Blais (Martine) : Oui.
M. Deschênes (Patrick) : C'est
que le mode de financement est tellement inadéquat que les commissions
scolaires vont souvent augmenter le nombre d'élèves par classe. Puis là je ne
vise aucune… c'est dans l'ensemble du Québec, hein? Donc, je parle de
l'ensemble du Québec. Donc, les commissions scolaires, pour avoir du
financement, vont bourrer les classes — excusez mon terme — vont
remplir les classes puis elles vont se dire que la règle ministérielle, c'est
que l'élève doit se présenter une fois aux cinq jours. Donc, si l'élève est
présent une fois aux cinq jours, on va avoir la subvention. Malheureusement, c'est
un peu en contradiction avec la réussite scolaire. Ça fait que c'est un
problème aussi. On comprend que ça coûte moins cher si l'élève n'est pas en
place, mais c'est un problème aussi du mode de financement. Donc, on bourre les
classes, on remplit les classes au maximum en espérant…
M. Caron (Régys) : Puis on
compte sur les absences…
M. Deschênes (Patrick) : On
compte sur les absences pour avoir le financement puis on se dit : Bien,
ils vont réussir, nos profs, nos enseignants. Notre personnel est bon pour les aider.
La Modératrice : Merci.
M. Roberge : Merci beaucoup.
(Fin à 10 h 9)