(Onze heures seize minutes)
M. Paradis (Lévis) : Bien,
merci d'être là, puis j'aurais manifestement préféré qu'on n'y soit pas parce
que... sans dossier pour aborder ce thème-là. Je vous dis ça parce que, le
21 mai 2015 — là j'ai mes notes d'allocution du
21 mai 2015 — plus d'un an, on abordait la notion de
l'instauration d'une norme officielle pour des bains dans les CHSLD. On
demandait, il y a un an, la bonification de l'offre des soins d'hygiène, on
essayait de répondre à une problématique soulevée par des aînés en CHSLD, on
mettait à jour une problématique et un scandale qu'on a appelé le scandale des
bains au noir. J'aurais aimé ça ne pas être ici aujourd'hui parce que tout
aurait été réglé, mais ce n'est pas le cas.
Ce matin, il y a François Marcotte, un
jeune homme de 43 ans, qui est obligé d'aller en financement public, un
sociofinancement, pour obtenir ses soins d'hygiène. Il faut quand même le
faire. Ce matin, j'ai parlé à François Marcotte, j'ai salué son audace. J'ai
été touché par son histoire parce qu'il y a quelque chose de touchant :
une maman qui s'occupe de son fils, puis son fils qui dit : Au bout du
compte, maman, tu ne peux plus faire ça, tu es en train de ruiner ta santé, tu
as perdu ta retraite pour t'occuper de moi; ils s'en vont dans le réseau
public, puis, manifestement, il fait face à un système qui ne l'accommode pas,
qui ne prévoit pas l'essentiel pour lui, alors il décidera d'aller en
financement socioéconomique.
Alors, si la passe est touchante au début,
elle est déroutante pour la suite. Puis, pour un François Marcotte qui décide
de parler, combien d'aînés silencieux souhaiteraient également avoir ce droit fondamental
à l'hygiène ce matin? Je n'ai pas été rassuré par les propos du ministre. Le ministre
dit : On a un comité d'experts qui a évalué que ça ne passait pas vraiment
par ça. Bien, voyons donc! Moi, j'ai des gens du réseau qui sont venus me voir
pour me dire : Vous savez, M. Paradis, on a du savon qui ne mousse
pas, ça fait la job. Bien, voyons donc! Est-ce qu'on peut revenir sur terre? On
entend ce matin que l'hygiène à la débarbouillette, on va le faire, mais pas
dans le dos puis pas sur les pieds, sur les zones humides. Bien, voyons donc!
Et là, quand on nous sert l'argument de
dire : Vous savez, il y a des aînés qui ont peur de l'eau, il y a des
aînés qui sont grabataires, qui ont des situations médicales ne leur permettant
pas d'avoir deux bains, personne n'est fou ici, là, c'est bien correct, on ne
plongera pas quelqu'un de force. La vraie réalité, ce n'est pas celle-là, la
vraie réalité, c'est qu'on n'a rien fait depuis un an, que le ministre se ferme
les yeux, a l'impression que ce sont toujours des cas qui sortent de nulle part
puis que ça ne représente personne. Ça représente tout le monde. Ça représente
ceux qui ne parlent pas. Et ne pensez pas que demain, dans les CHSLD, les
nouveaux arrivants demanderont moins, parce qu'on aura connu autre chose, parce
que les nouveaux arrivants, dans notre réseau public, ça sera des gens comme
vous et moi, puis on demandera davantage, puis on réclamera notre base minimale
de soins d'hygiène, on réclamera nos deux bains par semaine, ce qui n'est déjà
pas énorme, puis on se rendra compte que rien n'aura encore été fait.
Alors, arrêtons de nous fermer les yeux.
Le ministre doit agir, arrêter d'attendre d'avoir des cas comme ceux-ci et
faire semblant, soudainement, qu'il est ému et touché, mais qu'au bout du
compte les experts auront décidé autrement. Quand le ministre parle du cas par
cas, ce n'est pas comme ça que ça se règle, ce n'est pas comme ça qu'on l'a
adressé. Je pense que notre population vieillissante, les gens qui sont dans
notre réseau public ont droit à davantage et réclament davantage.
Je suis allé visiter des CHSLD il n'y a
pas très, très longtemps. Il y a des endroits où on m'a dit : M. Paradis,
on voudrait en donner plus, on n'a pas le temps de le faire, on n'a pas le
temps. Il y a des endroits où on m'a dit : M. Paradis, on voudrait
bien le donner, on n'a pas d'équipement. Il y a des endroits où on m'a dit :
On n'a pas l'espace.
Bien, revenons sur terre, encore une fois.
Il y a un an, on disait : On parle de choses qui sont aberrantes parce
qu'on parle de notions et de soins fondamentaux. Il n'y a pas aucune notion de
luxe là-dedans. On est dans le même discours, puis on est un an plus tard, puis
on est obligés de réagir à un individu qui, soit dit en passant, ne sera pas
seul dans les années à venir, hein? On nous a aussi signifié, dans les
préoccupations, le fait que la clientèle, de un, elle est plus lourde quand
elle arrive en CHSLD, de deux, elle arrive de partout maintenant. Il y a toute
cette notion de jeunes, de plus jeunes avec des maladies dégénératives, dont il
faudra aussi tenir compte, avec des besoins particuliers.
Revoyons l'offre, donnons une chance à nos
préposés, faisons en sorte qu'on puisse enfin adresser la situation puis
arrêter de la traiter au cas par cas en se disant qu'un comité d'experts nous a
expliqué que c'était la façon de faire. Je pense que, quand on est humain,
fondamentalement humain, ce n'est pas comme ça qu'on doit réagir.
M. Caron (Régys) : On la
règle comment, cette situation-là, M. Paradis? Vous dites : Le
ministre doit agir. Il fait quoi? Il ne peut pas...
M. Paradis (Lévis) : Oui, le
ministre, là, depuis quelques semaines, nous dit qu'on a atteint l'équilibre
budgétaire, qu'on est prêts, maintenant, puis qu'on a des sous nous permettant
d'investir dans des éléments clés de la société. Ils nous le disent, là :
On a fait l'effort, puis là on est prêts. Bien, choisissons nos combats. Ça,
c'en est un, il touche la société au grand complet. Qu'on prenne l'argent qu'on
a recueilli, là, que les citoyens ont permis au gouvernement de recueillir,
parce que ce sont eux qui ont fait les efforts, on a fouillé dans leurs poches
à qui mieux mieux. Si maintenant on a de l'argent, qu'on choisisse nos combats
et qu'on investisse.
Le ministre disait récemment, dans sa
réforme du système de santé, dans son projet de loi n° 10, qui est devenu
la loi, et la n° 20 : Dans la loi n° 10, je récupérerai 220 millions
de dollars. Il les a récupérés? Qu'il les réinvestisse où il faut. Cet argent-là,
c'est essentiel, doit aller…
Et vous savez que le problème dont on
parle image également un autre problème, c'est celui des soins à domicile, qui
n'est pas plus réglé. Et je le répète puis je l'ai dit à maintes reprises :
Le gouvernement avait promis d'investir 150 millions par année pendant
cinq ans. Aujourd'hui, il ne sait pas trop comment il investit puis il ne sait
pas combien il va pouvoir investir. La chose qu'on sait cependant, c'est que
des gens sont en attente de soins à domicile puis ils ne les ont pas en temps
requis, puis il y a des gens qui ont été évalués et qui ne font qu'attendre le
premier service puis ils ne l'ont pas non plus.
M. Marcotte, avant de s'en aller en
CHSLD, il l'a fait, l'expérience des soins à domicile. Il souhaitait davantage…
Il a adapté sa résidence, mais, devant les faits, il s'est rendu dans un réseau
public puis, dans sa tête, il pensait sûrement que ça allait répondre à ses
besoins. Je le salue pour son audace puis en même temps je me désole de voir
qu'on est rendus là, puis qu'on n'a rien réglé, puis ça fait un an. Merci.
(Fin à 11 h 22)