(Onze heures onze minutes)
Mme Leclerc (Guylaine) :
Alors, mesdames messieurs, bonjour. Aujourd'hui, j'ai rendu publics deux tomes,
le premier s'intitule Rapport du commissaire au développement
durable alors que le deuxième comprend deux vérifications : l'une
concerne Investissement Québec et l'autre l'aide financière accordée à Premier
Tech. Cette dernière vérification fait suite à une motion de l'Assemblée
nationale.
Je suis accompagnée pour l'occasion de
M. Jean Cinq-Mars, Commissaire au développement durable, et de M. Serge
Giguère, vérificateur général adjoint.
Pour Investissement Québec, nous nous
sommes intéressés à l'information sur sa rentabilité financière et à sa
performance économique. La mission de cette société consiste principalement à
contribuer au développement économique du Québec. Elle le fait en offrant des
produits de financement aux entreprises. IQ a la responsabilité d'administrer
le Fonds de développement économique, le FDE, pour le gouvernement.
Tout d'abord, les critères visant à
déterminer si les interventions financières d'importance doivent être réalisées
par IQ ou par le FDE ne sont pas précis. Dans les faits, des interventions
menées entièrement à même les capitaux propres d'IQ correspondent davantage aux
caractéristiques d'une intervention financière du FDE. Il est donc difficile de
différencier les responsabilités et l'imputabilité qui reviennent à IQ de
celles qui incombent au gouvernement. L'information produite par IQ rend
difficile l'évaluation de sa performance tant par les administrateurs de la
société que par les utilisateurs externes. Entre autres, les résultats ne sont
pas présentés par secteur d'activité et peu d'explications accompagnent le
résultat net de l'exercice.
Ensuite, IQ ne prend pas en compte le coût
d'emprunt du gouvernement lorsqu'elle définit son objectif de rentabilité
financière, contrairement à ce qui est prévu dans sa loi. Enfin, IQ ne présente
pas un portrait adéquat de l'impact de ses interventions. À titre
d'illustration, la société mentionne que ses interventions financières de
l'exercice 2014‑2015 soutenaient des projets d'une valeur de 6,8 milliards
de dollars. Or, seulement 1,4 milliard de dollars est associé à des
projets générant des retombées économiques. De cette somme, 930 millions
sont attribuables à IQ, le reste étant lié au Programme immigrants
investisseurs.
L'autre vérification concerne l'aide financière
accordée à Premier Tech par l'entremise du FDE. Cette aide inclut un prêt sans
intérêt de 11,2 millions de dollars et une subvention de
8,5 millions. Ce type d'intervention est qualifié de mandat
gouvernemental, car il ne cadre avec aucun programme du fonds. Pour un mandat gouvernemental,
il n'existe pas de critère précis. Il est donc essentiel qu'une bonne
documentation appuie les discussions menant à la conclusion de l'entente entre
les parties. Dans les faits, la subvention qui était initialement de
7,5 millions de dollars a été augmentée à 8,5 millions. Nous n'avons
pas trouvé de documentation qui aurait expliqué cette hausse.
Par ailleurs, bien que la demande d'aide
financière soumise par Premier Tech ait suivi toutes les étapes prévues, deux
éléments ont eu un impact sur l'information appuyant le mémoire présenté au
Conseil des ministres. Premièrement, aucune analyse approfondie et documentée
de la nature des dépenses du projet de Premier Tech n'a été effectuée par le
ministère de l'Économie, de la Science et de l'Innovation conjointement avec
IQ. Une telle analyse aurait permis d'apprécier le lien entre les dépenses et
les activités associées au projet afin de pouvoir mieux en évaluer la
pertinence.
Deuxièmement, les analyses ayant permis
d'établir la valeur économique du projet comportaient des inexactitudes. Par
conséquent, contrairement à ce qui a été présenté dans le mémoire du Conseil
des ministres, le ratio de la valeur économique du projet était inférieur au
seuil de rentabilité.
Avant de passer la parole à M. Cinq-Mars,
je tiens à souligner qu'il dépose aujourd'hui son dernier rapport à titre de Commissaire
au développement durable. En poste depuis septembre 2009, il a su contribuer à
bâtir la notoriété de cette fonction par sa maîtrise des concepts associés au développement
durable et la grande qualité de ses travaux, citons par exemple la mission
relative à la gouvernance de l'eau. Je tiens donc à le remercier sincèrement et
à lui souhaiter beaucoup de succès dans ses prochains projets. M. Cinq-Mars,
je vous cède donc la parole.
M. Cinq-Mars (Jean) : Merci,
madame. Alors, mesdames messieurs, bonjour. C'est avec plaisir que je m'adresse
aux membres de la presse pour présenter mon rapport printemps 2016. Ce rapport
contient les résultats de travaux que j'ai réalisés avec mon équipe pendant la
dernière année.
Dans le chapitre 1 de mon rapport, je
présente mes observations sur les vérifications réalisées portant sur la
conservation et la mise en valeur de la faune, les pesticides en milieu
agricole et une étude portant sur le marché du carbone.
Le chapitre 2, portant sur la
conservation et la mise en valeur de la faune... Je souligne que la faune est
une ressource renouvelable, donc la mise en valeur permet une variété
d'activités de plein air, crée des emplois et génère des retombées économiques
importantes en région. Alors que les ventes de permis de chasse et de pêche
baissent depuis 2007, nous nous serions attendus à ce que le ministère des Forêts,
de la Faune et des Parcs travaille avec énergie à maintenir, voire augmenter,
les retombées économiques de ces activités tout en assurant, bien entendu, la
pérennité des ressources. Notre vérification démontre plutôt une faible
performance du ministère à cet égard.
Par ailleurs, des lacunes importantes au
niveau de la conservation des espèces en situation précaire ont été relevées,
autant pour les espèces désignées en vertu de la loi que celles qui sont en
attente de l'être. Les mesures visant la protection des habitats fauniques sont
également insuffisantes, de même que celles qui visent à la lutte aux espèces
exotiques envahissantes.
Le chapitre 3 porte sur les
pesticides en milieu agricole. Au Québec, les ventes des pesticides et les
indicateurs de risques sont en hausse. Les pesticides sont détectés en faible concentration
dans l'eau potable, mais à de fortes concentrations dans l'eau des rivières.
Dans les aliments, les pesticides sont habituellement en deçà des normes, mais
l'impact de la présence de plusieurs pesticides est peu connu. Par ailleurs, la
biodiversité est dans un état précaire dans plusieurs des rivières. Le MDDELCC
n'a pas de portrait complet de l'utilisation des pesticides en milieu agricole.
Certains sont enrobés aux semences et ne sont pas comptabilisés. Enfin, les
mesures en place pour amener les agriculteurs à réduire leur utilisation ont eu
peu d'impact.
Le chapitre 4 traite d'une étude
menée sur le marché du carbone. En 2013, le Québec a mis en place un système de
plafonnement et d'échange des droits d'émission de gaz à effet de serre, appelé
communément marché du carbone. Le marché du carbone vise à obtenir un
changement de comportement chez les émetteurs de gaz à effet de serre et chez
les consommateurs de carburants et de combustibles fossiles afin de réduire les
émissions de GES, puisqu'il associe un coût à ces dernières. Le marché oblige
les émetteurs à détenir un droit pour chaque tonne de GES émise annuellement et
le marché interpelle de nombreux intervenants de différents milieux et son fonctionnement
est complexe. De nombreuses dispositions réglementaires s'appliquent selon la
situation.
Alors, même si des mesures de contrôle
sont prévues, de nombreux enjeux existent, notamment : les interventions
du gouvernement sur le marché ont une incidence sur la quantité de droits disponibles
et par conséquent sur le coût de ceux-ci et sur les changements de
comportements désirés; la mise en place d'un marché commun avec d'autres
administrations entraîne un risque que des réductions d'émissions de GES se
produisent à l'extérieur du Québec et donc certains bénéfices, comme
l'amélioration de la qualité de l'air, soient moindres ici.
La réglementation encadrant le marché est
complexe et elle a été modifiée plusieurs fois au fil du temps. Cette situation
pourrait entraîner des difficultés liées à son application et rendre certains
participants volontaires résistants à prendre part au marché. Un manque
d'information relative au marché, aux résultats découlant de la mise en place
ou à l'utilisation des fonds recueillis pourrait nuire à son acceptabilité
sociale. Un manque de coordination, de complémentarité et d'exhaustivité sur le
plan de la surveillance et de la vérification pourrait altérer aussi la
confiance des participants au marché, confiance qui est nécessaire à
l'efficacité de ce dernier.
Enfin, puisque, comme le disait Mme Leclerc,
mon mandat se termine comme Commissaire au développement durable, je voudrais
souligner l'excellente collaboration que j'ai eue avec vous et l'intérêt que
vous avez porté au développement durable pendant les sept années où j'ai été en
poste comme commissaire, alors je vous remercie beaucoup de votre
collaboration. Merci de votre attention.
Le Modérateur
: On va
maintenant passer à la période de questions. On va commencer avec Alexandre
Robillard.
M. Robillard (Alexandre) :
Bonjour, Mme Leclerc. J'aimerais ça voir avec vous… Donc, vous indiquez,
dans vos documents, que les conventions ont été respectées, évidemment,
concernant la subvention et le prêt sans intérêt à Premier Tech. Donc, vous
dites que les conventions ont été respectées et que M. Hamad n'a pas
participé à la séance du Conseil du trésor, là, où il était question de cette aide
financière là, en avril 2014. J'aimerais savoir si, selon vous, ces deux
faits-là vous permettent de conclure qu'il n'y a eu aucun trafic d'influence en
faveur de Premier Tech.
Mme Leclerc (Guylaine) : Ce
que nous avons dit, c'est que toutes les étapes suivies par le projet l'ont
été. Premièrement, il faut comprendre que c'est une demande d'aide financière
qui a été soumise par Premier Tech et qui a été traitée par un mandat gouvernemental.
Donc, c'est un mandat qui n'est pas encadré ou normé comme d'autres mandats du
FDE, par exemple les programmes Essor. Donc, c'est non normé, alors, en ce
sens, il y a peu de critères. Par contre, malgré le fait qu'il y ait peu de
critères, il y a certaines étapes, donc, par exemple, préparation d'un mémoire
au Conseil des ministres, approbation ou recommandation de la part du Conseil
du trésor... Les étapes ont été réalisées. Alors, ça, ça a été réalisé.
Pour ce qui est de votre deuxième partie
de question, là, bien, je ne suis pas en mesure de répondre.
M. Robillard (Alexandre) :
Mais donc, quand vous voyez qu'il y a un avis du Secrétariat du Conseil du
trésor qui a été écarté, qu'il y a eu une surévaluation, là, de la valeur
économique du projet, des retombées fiscales... Donc, selon vous, ça, est-ce
que c'est des éléments qui permettent de croire que ça peut pointer envers un
certain favoritisme, là?
Mme Leclerc (Guylaine) : Ce
que nous avons dit, c'est que le Secrétariat du Conseil du trésor présente un
avis et présente différentes analyses, des calculs, des analyses, et vont
porter des commentaires sur le type de dépenses qui est présenté. Et, entre
autres commentaires, c'était de mentionner que, bon, bien, c'est particulier
parce que c'est juste du... c'est des transactions informatiques, acquisition
de matériel informatique... Et ils portaient ces commentaires-là, mais,
nonobstant, à la fin, mais, quand même, ils recommandaient au Conseil du trésor
d'approuver. Alors, il y a toute une série d'analyses quantitatives qui est
faite par le Secrétariat du Conseil du trésor, qui est transmise au Conseil du
trésor, comme vous l'avez dit, au moment... à la réunion où M. Hamad
n'assistait pas, mais par la suite le Conseil du trésor a approuvé les... a
recommandé, basé sur les éléments qui lui avaient été soumis par son
secrétariat.
M. Robillard (Alexandre) :
O.K. Je ne sais pas si vous savez si M. Hamad était à la réunion du
Conseil des ministres du lendemain, où il a été question de ce
financement-là...
Mme Leclerc (Guylaine) : Je ne
suis pas au courant.
M. Robillard (Alexandre) :
...ça, c'est un élément que je ne l'ai pas vu dans votre document, mais j'aimerais
ça, savoir : Est-ce que vous êtes à l'aise avec le fait qu'il n'y a...
vous n'avez trouvé aucun document sur la majoration de la subvention de
1 million de dollars? Êtes-vous à l'aise avec ça? Puis est-ce que, selon
vous, ça, ça n'ouvre pas la porte à une certaine subjectivité qu'on pourrait
associer à une forme de favoritisme politique?
Mme Leclerc (Guylaine) : Je ne
peux pas vous dire si ça ouvre la porte à une forme de favoritisme. Ce que je
peux vous dire, c'est que ce n'est pas une bonne pratique, et c'est ce que nous
avons mentionné. Alors, ce que nous recommandons, c'est qu'ils documentent les
décisions qu'ils prennent.
Et c'est quand même une augmentation, une
somme importante. Ce qu'on a fait, c'est qu'on a regardé si ça se produisait
aussi dans d'autres situations. On a regardé 20 dossiers, et, des 20 dossiers
qu'on a regardés, il y en avait quatre où ça se produisait aussi et où il n'y
avait pas de documentation qui supportait. Ce qu'on nous a expliqué, c'est que,
bon, c'est des négociations, c'est des échanges et que ce n'est pas documenté.
M. Robillard (Alexandre) : Donc,
vous ne savez pas si c'est courant ou...
Mme Leclerc (Guylaine) : Bien,
ce qu'on a examiné... On a examiné 20 dossiers, et, dans quatre dossiers, il
y avait augmentation et il n'y avait pas de documentation. Donc, la documentation
n'est pas systématique.
Le Modérateur
: Patrick
Bellerose. On va essayer de respecter le nombre de questions normal.
M. Bellerose (Patrick) : Oui,
bonjour. Juste pour faire suite un petit peu, est-ce que le Conseil des
ministres avait toutes les bonnes informations en main pour prendre la décision
sur l'aide financière accordée à Premier Tech?
Mme Leclerc (Guylaine) : Non.
Le Conseil des ministres... Le mémoire qui a été présenté au Conseil des
ministres comportait une erreur. Il faut comprendre que le mémoire qui est présenté
au Conseil des ministres présente les avantages et inconvénients d'accorder ou
de ne pas accorder l'aide, en fonction de différents critères. Et on présente
des critères, par exemple l'aspect régional, l'aspect jeunesse, et on a
présenté ces aspects-là. Premier Tech est à Rivière-du-Loup, donc c'est une
entreprise régionale, ce qui peut favoriser l'emploi chez la jeunesse, mais il
y a un élément qui est aussi considéré dans le mémoire, qui est l'aspect
économique, l'avantage économique du projet, et il y avait une erreur. Donc,
l'avantage économique, tel qu'il a été présenté, mentionnait que c'est un
projet, au niveau du développement économique du Québec, qui était rentable.
Donc, l'équation est assez simple, c'est ce que ça génère comme recettes
fiscales par rapport à ce que ça coûte. Et ce que ça donnait, c'est un ratio de
1,04 %, alors que les chiffres, s'ils avaient été adéquats, si ça avait
été les bons chiffres, ça aurait donné 0,8 %. Ce qui fait
qu'économiquement, globalement, les recettes fiscales n'étaient pas suffisantes
pour couvrir l'entièreté du coût.
M. Bellerose (Patrick) :
Donc, à plus forte raison, l'augmentation de 1 million de la subvention
n'avait pas raison d'être.
Mme Leclerc (Guylaine) : Je ne
suis pas en mesure de vous dire si ça avait raison ou pas d'être parce qu'il y
a d'autres éléments qui sont considérés dans le mémoire, et c'est au Conseil
des ministres à décider.
Le Modérateur
: Martine
Biron.
Mme Biron (Martine) :
Bonjour, messieurs. Bonjour, Mme la Vérificatrice générale. Mme Leclerc,
j'aimerais ça avoir un peu plus de perspective. Vous dites : Ce n'est pas
une bonne pratique, là, cette augmentation-là. Qu'est-ce qui a pu se passer? Est-ce
que c'est un crime grave? Est-ce que c'est... Vous le... Quel type de
perspective vous pouvez mettre sur cette pratique-là, là?
Mme Leclerc (Guylaine) : Je
vous dirais... Là, je vais vous parler en termes administratifs, O.K., je ne
peux pas vous parler autre chose que ça. C'est que ce n'est pas une bonne
pratique. C'est quand même des sommes importantes. Ce qu'on a regardé, c'est
que, dans ce cas-là, c'est 1 million. Comme je vous ai dit tout à l'heure,
on a regardé 20 autres dossiers. Dans quatre cas, il y avait une
augmentation, des fois c'était encore plus substantiel et ce n'était pas non
plus documenté.
Donc, compte tenu que les mandats
gouvernementaux sont des mandats qui sont non normés, qu'on peut... que c'est
des décisions gouvernementales, il est d'autant plus important, quand il y a
des variations importantes entre l'origine et le final, là, bien, que ce
soit... que l'analyse soit documentée. On ne parle pas de documenter toutes les
petites négociations qui peuvent se faire au fur et à mesure, on peut
comprendre que ça pourrait être très exigeant, mais à tout le moins, quand il y
a une augmentation de ce montant-là, ce serait important que ce soit fait.
Mme Biron (Martine) : Alors,
qui est imputable pour cette mauvaise pratique?
Mme Leclerc (Guylaine) : Bien,
je vous dirais que, dans le cas du... c'est le MESI qui travaille avec Investissement
Québec : Investissement Québec va fournir les analyses financières, le
MESI prépare le mémoire pour le Conseil des ministres. Alors, c'est le MESI, en
collaboration avec Investissement Québec.
Mme Biron (Martine) : Au
niveau administratif.
Mme Leclerc (Guylaine) : Oui.
Le Modérateur
: On va
passer à Hugo Lavallée.
M. Lavallée (Hugo) : Bonjour,
Mme Leclerc. Concernant ces mandats gouvernementaux là, est-ce qu'il y
aurait lieu de mieux les encadrer ou est-ce que, même, ils ont une raison
d'être, puisque, de ce qu'on comprend, étant donné l'absence de normes, ils
ouvrent la porte à des dérapages?
Mme Leclerc (Guylaine) : Bien,
écoutez, c'est une décision gouvernementale, O.K., et je ne suis pas en mesure
de dire si ça a sa raison d'être ou pas, je veux dire, c'est... À mon avis,
c'est utile parce qu'il y a des situations où on veut protéger quelque chose
puis il faut prendre... ça n'entre pas nécessairement dans la norme. Alors,
c'est normal que ça... Par contre, vu que ce n'est pas encadré, pas normé,
bien, c'est important de mettre des critères, des critères qui vont faire en
sorte de... bien, oui, c'est dans ce cadre-là qu'on va le faire, de cette
façon-là qu'on va le faire, et voici ce qui revient à Investissement Québec et
voici ce qui revient au FDE dans le cadre de contrats... de mandats gouvernementaux.
M. Lavallée (Hugo) : Dans le
cadre de cette vérification-là, quels types d'échanges est-ce que votre bureau
a eus avec M. Hamad pour mener ces travaux?
Mme Leclerc (Guylaine) : Nous
avons réalisé l'entièreté de nos travaux sans le rencontrer. À la toute fin,
nous avons décidé de le rencontrer. Lorsque notre rapport était complété, nous
l'avons rencontré seul. C'est le vérificateur général adjoint responsable du
dossier, Serge, qui a rencontré M. Hamad. Il n'a pas vu le rapport, mais
il lui a présenté les conclusions du rapport pour voir s'il y avait des
éléments à ajouter qui feraient en sorte que ça pourrait modifier nos
commentaires ou qui devraient être tenus compte.
M. Lavallée (Hugo) : Est-ce
qu'on peut savoir ce qu'il vous a dit à ce moment-là, M. le vérificateur
général adjoint?
Mme Leclerc (Guylaine) : Il a
écouté.
M. Giguère (Serge) : Il a
écouté et il a validé notre rapport. Il a confirmé les dires que nous avions
dans le rapport.
M. Lavallée (Hugo) : Il n'a
pas présenté d'éléments d'information additionnels, là, si je comprends bien.
M. Giguère (Serge) : Vous
comprendrez que, dans le cadre de nos vérifications, on ne donne pas toute l'information.
Le résultat, ce qui est important à dire, est inclus dans le rapport que nous
avons déposé ce matin.
Le Modérateur
: Simon
Boivin.
M. Boivin (Simon) : Avez-vous
des raisons de croire que cette mauvaise pratique, cette mauvaise façon de
faire là est plus ou moins récente ou qu'elle a cours depuis toujours?
Avez-vous une idée, temporellement, ça s'inscrit… Est-ce que ça s'inscrit dans
une période ou si vous avez l'impression que c'est la façon de faire depuis toujours?
Mme Leclerc (Guylaine) : On
n'a aucune idée. Pour le savoir, il faudrait vérifier le FDE en entier, et ce
n'est pas une mission qu'on a faite, là. On a vérifié Investissement Québec, on
n'a pas vérifié le FDE.
M. Boivin (Simon) : L'autre
question que je me pose... je reviens un peu à la question de ma collègue
Martine, un peu plus tôt. L'opposition, le Parti québécois, tout à l'heure, a
demandé la démission du ministre Hamad, sur la base de votre rapport. Je ne
vous demande pas de vous prononcer là-dessus, mais, sur une échelle de gravité
de choses que vous constatez, les manquements que vous avez pu constater chez
Investissement Québec ou au MESI, sur une échelle de gravité, est-ce qu'ils
sont très graves, ou moyennement, ou peu?
Mme Leclerc (Guylaine) : Je ne
suis pas en mesure de répondre. Je pense que toute personne qui lit notre
rapport est en mesure de juger par lui-même.
Le Modérateur
: Je
reconnais Denis Lessard, Charles Lecavalier et Geneviève Lajoie.
M. Lessard (Denis) : Bien
simplement, là, quelle est votre réaction devant l'affirmation générale que le
rapport du vérificateur blanchit le ministre Hamad?
Mme Leclerc (Guylaine) : Moi,
mon rôle n'est pas de blanchir, ou de noircir, ou de…
M. Lessard (Denis) : …votre
rôle, là, mais est-ce que votre rapport blanchit le ministre Hamad? C'est une
question très simple.
Mme Leclerc (Guylaine) : Mon
rapport présente des faits, et c'est une des pierres qui présentent la
situation. Il y a le Commissaire à l'éthique aussi qui va venir. Il y a
beaucoup d'éléments que je ne peux pas mentionner dans mon rapport parce que je
ne les connais pas, O.K.? Donc, qui a parlé à qui? Quelles sont les
interventions, les déjeuners… Je n'ai pas regardé ça. Ça, c'est le Commissaire
à l'éthique. Et le Commissaire à l'éthique, lui, regarde l'intention. Moi, je
vous présente les faits. Alors, je crois que mon seul rapport ne peut ni
blanchir ni noircir qui que ce soit.
M. Lessard (Denis) :
Conclusion là-dessus, sur...
Mme Leclerc (Guylaine) : Je n'ai
pas de conclusion là-dessus. Ce que je dis : Les étapes ont toutes été
suivies, et il y a des lacunes dans la procédure.
Le Modérateur
: Charles
Lecavalier.
M. Lecavalier (Charles) : Sur
un autre sujet, est-ce que c'est clair et net pour vous que Jacques Daoust
était au courant qu'Investissement Québec a vendu, là, les actions de RONA?
Mme Leclerc (Guylaine) : Ce
que nous avons constaté, c'est que, dans les procès-verbaux, le... les
procès-verbaux font mention que le ministre a autorisé la vente. On ne
mentionne pas quel ministre, mais ce qui est mentionné, c'est : Le
ministre a autorisé la vente.
M. Lecavalier (Charles) :
Donc, s'il a autorisé la vente, était-il au courant? On ne peut pas le savoir?
Mme Leclerc (Guylaine) : Je...
Vous pouvez conclure autant que moi sur cette phrase-là.
M. Lecavalier (Charles) :
Merci. Sur un autre sujet, M. Cinq-Mars, je me demandais, dans votre
rapport, sur la bourse du carbone, vous dites qu'il y a une trop faible
augmentation du prix de l'essence pour diminuer les GES dans le secteur des
transports. Alors, quelle devrait être l'augmentation du prix de l'essence pour
pouvoir avoir une bonne réduction des GES? Est-ce que vous pouvez répondre à
ça?
M. Cinq-Mars (Jean) : Bien,
on est dans une situation où le prix de l'essence est... gravite autour de 1 $
depuis à peu près six mois ou un an, alors c'est certain qu'une augmentation de
0,04 $ le litre comme on a vue, ce n'est pas un incitatif assez fort pour
amener un changement de comportement chez les gens. Lorsque les prix sont plus
élevés, les gens commencent à penser à laisser le camion dans la cour ou bien
prendre le vélo pour se rendre à un endroit à proximité.
Alors, le prix actuel est un prix faible,
et alors ce qu'on dit dans le rapport, c'est qu'en ayant un prix faible le
signal de prix qu'on désire, avec le marché du carbone, pour avoir un
changement de comportement, le signal ne se manifeste pas actuellement.
M. Lecavalier (Charles) : Et
ça devrait être quoi, ce signal-là?
M. Cinq-Mars (Jean) : Bien,
ça dépend des situations économiques. Je vous dirais que, dans une situation
récessionnaire, à ce moment-là, si on augmentait de 20 %, ça aurait un
impact énorme. Si on avait un plein emploi puis une situation économique qui
était en plein développement, à ce moment-là ça serait un montant plus élevé.
Alors, c'est un montant qui est relatif par rapport à la situation économique.
Je ne peux pas vous donner un chiffre exact.
Le Modérateur
:
Mme Lajoie.
Mme Lajoie (Geneviève) :
Mme Leclerc, vous avez dit tout à l'heure : Nous avons réalisé
l'entièreté de nos travaux sans le rencontrer, vous parlez de M. Hamad.
Comment est-ce possible d'avoir fait ce mandat-là sans parler au ministre qui
était là à l'époque?
Mme Leclerc (Guylaine) : Bien,
on a examiné le processus. On l'a fait ainsi. Les documents... On a rencontré
les gens au ministère, les gens à IQ, au Conseil du trésor. Ce n'était pas
nécessaire de rencontrer le ministre. Et, si même... Je vous dirais que c'est...
depuis que je suis en poste, on n'a jamais rencontré le ministre. Et même je me
demande si, avant moi, ils ont déjà rencontré un ministre, là.
Mme Lajoie (Geneviève) : Dans
ce cas-ci, vous l'avez dit plus tôt, c'est un mandat gouvernemental, donc c'est
le gouvernement qui prenait la décision et non pas Investissement Québec.
Mme Leclerc (Guylaine) : Oui.
Mme Lajoie (Geneviève) : O.K.
Vous avez dit tout à l'heure, à la question de mon collègue, vous avez dit, sur
la gravité de ce que vous constatez : Les gens sont en mesure de juger de
ce que contient mon rapport. Mais encore? Je veux dire, on aimerait savoir
vraiment ce que vous... la gravité de ce que vous présentez. Les gens, juger...
C'est vous, la vérificatrice, on aimerait savoir ce que vous, vous pensez de la
gravité de ce que vous avez constaté.
Mme Leclerc (Guylaine) : Ce
que je peux vous dire, c'est qu'au niveau administratif, c'est quelque chose
qui est important. Ce qui n'est pas important, on n'en fait pas mention dans
notre rapport, on ne fait surtout pas de recommandation. Donc, au niveau
administratif, c'est important. Lorsqu'on parle de gravité, bien là il y a
peut-être d'autres choses qui entrent en ligne de compte, et je ne suis pas en
mesure de juger, puis c'est aux personnes de juger et d'évaluer en lisant le
rapport.
Le Modérateur
: On va
passer... Il n'y a pas d'autre question en français?
Journaliste
: Bien, je
veux juste essayer de bien comprendre pourquoi vous précisez... vous avez tenu
à préciser que M. Hamad n'était pas à la réunion du Conseil du trésor,
mais vous ne précisez pas s'il était à la réunion du Conseil des ministres du
lendemain. Pourquoi c'est important de faire cette distinction-là?
Mme Leclerc (Guylaine) : Bien,
parce que, un, je ne sais pas s'il était à la réunion du Conseil des ministres.
Journaliste
: Mais
pourquoi vous avez vérifié... Pourquoi c'est plus important de savoir qu'il n'était
pas au Conseil du trésor, mais que ce n'est pas important de savoir s'il était
au Conseil des ministres du lendemain où la décision finale a été prise?
Mme Leclerc (Guylaine) : On ne
l'a pas fait. Je ne peux pas vous dire pourquoi, là, on ne l'a pas fait.
Le Modérateur
: On va
passer aux questions en anglais avec Ryan Hicks.
M. Hicks
(Ryan) : Why didn't you meet Mr. Hamad?
Because everybody sees him as a big player in this story. Why didn't you meet
with him? People are going to be surprised to hear that you didn't meet with
him.
Mme Leclerc (Guylaine) :
Yes, yes. We met him at the end, OK…
M. Hicks (Ryan) : …investigation.
Mme Leclerc (Guylaine) :
…to review our conclusion and just to be sure that we were OK, but what we
looked was some administrative facts. So, it was not a political issue we
looked at. We looked if the process was properly executed. So, we didn't feel
that we had to meet him.
M. Hicks (Ryan) : How significant is this $1 million and the fact that this
grant jumped $1 million without any justifications?
Mme Leclerc (Guylaine) :
Yes, well, I was preoccupied too by that fact, that's why we decided to review
20 others files to see if it happened in the other files too, and we found
that, to have a such increase and more increase for... there were four other
files where there were some increase and, in some, it was more than $1 million.
And we looked for those files that… and there was no justification or analysis
to explain why, so that's it.
M. Hicks (Ryan) : So, then… Did you ask people to explain this and then they just
said : Oh! we have no explanation.
Mme Leclerc (Guylaine) : Yes, yes, of course, we asked and we asked many times by e-mail, by
phone, by… directly, you can be sure, and they… we said :
Look it in your e-mails, look everywhere, OK? So, that's for sure that we
absolutely wanted some analysis and some documentation, and what they said :
It's the way it is. That's what they said. They told us : Well, you know,
it's a negotiation, and we negotiate between one and one, and so, at the end,
there is an increase and it is the result of the negotiation.
M. Hicks (Ryan) : So, should there be due… Are you making a recommendation that there
should be some guidelines in place to be able to justify this moving forward?
Mme Leclerc (Guylaine) :
Yes, there should be. We have some recommendations regarding what we verified,
but, if it is the way that the ETF works all the time, we should do an audit of
ETF and see if they have always done that, the way they do that and doing such
a deal, but we haven't done that. So, that's why we don't have a specific
recommendation regarding when there is an increase, that there should be documentation.
Le Modérateur
:
Je vais accepter une dernière question de Simon Boivin.
M. Boivin (Simon) : Juste une
petite, je m'excuse, en lien avec la vérification administrative que vous avez
faite. Vous avez rencontré M. Hamad à la fin, mais, dans votre
vérification administrative, est-ce que vous demandiez aux gens qui étaient là
tout au cours des étapes s'il y avait eu des interventions ou des rapports avec
le cabinet politique?
Mme Leclerc (Guylaine) :
Absolument, oui, oui.
M. Boivin (Simon) : Cette
question-là était posée?
Mme Leclerc (Guylaine) : Oui,
oui, oui, elle était posée, puis, quand on regarde ce qui est dans la
documentation, bien, on regarde la documentation à l'intérieur des ministères
et des agences, mais aussi avec l'externe. Ce qu'on n'a pas fait, c'est d'aller
voir d'externe à externe, là, comme une autre organisation, comme le
Commissaire à l'éthique peut faire.
M. Boivin (Simon) : O.K. Mais
il n'y a rien, dans les communications avec le cabinet politique et la machine
administrative, qui donne à penser qu'il y a eu des interventions pouvant aller
dans un sens ou dans l'autre?
Mme Leclerc (Guylaine) : Aucun
indice.
M. Boivin (Simon) : Aucun
indice.
Journaliste
: Le courriel
du chef de cabinet adjoint qui communique avec Premier Tech pour dire : On
a eu au-delà du statu quo, est-ce que vous retrouvez ça dans votre...
Mme Leclerc (Guylaine) : Ça,
je ne le verrai pas à moins qu'il se retrouve dans le dossier. Mais ça, c'est
du personnel politique, je vous dirais. Avec l'entité, ça, je ne l'ai pas.
Journaliste
: Donc, il
n'y a pas eu... les communications du cabinet ne vous sont pas ouvertes?
Mme Leclerc (Guylaine) : Non.
Par contre, le Commissaire à l'éthique, lui, va les regarder.
Journaliste
: Oui,
d'accord, O.K. De votre réponse, j'avais compris que vous aviez accès. Là, vous
n'avez pas accès.
Mme Leclerc (Guylaine) : Non.
M. Boivin (Simon) : Vous
n'avez pas de communications entre le cabinet politique et l'administration?
Mme Leclerc (Guylaine) : Entre
le cabinet politique et l'administration oui, mais entre le cabinet politique
et une entité externe, non.
M. Boivin (Simon) : O.K.
Le Modérateur
: Alors,
comme j'ai accepté une dernière question en français, je vais en prendre une
dernière en anglais.
M. Hicks (Ryan) :Just following up on Denis' question earlier, does this report clear Sam Hamad?
Mme Leclerc (Guylaine) : No, it doesn't clear and it doesn't unclear, OK? Am I clear? We just present the facts. I think all the elements
have to be added to that report. And the most important piece that will come
over my report is the Commissaire à l'éthique.
Le Modérateur
:
Merci beaucoup, mesdames messieurs.
(Fin à 11 h 43)