(Onze heures seize minutes)
Mme Ouellet : Donc, bonjour.
Concernant tout le dossier du MTQ, donc, nous avons déposé, ce matin, une
motion pour pouvoir entendre M. Poëti, Mme Trudel, l'enquêteuse, et
pouvoir entendre M. Pierre Ouellet, qui est l'ancien chef de cabinet au ministère
des Transports.
Ce qui se passe, actuellement, au
ministère des Transports, c'est très grave. Ça fait deux fois que des documents
falsifiés ont été déposés aux parlementaires. C'est vraiment très grave, ce qui
est en train de se passer, et on doit pouvoir entendre les personnes concernées.
M. Poëti, depuis deux semaines, rencontre les médias, Mme Trudel est
obligée de s'exprimer par lettre parce qu'elle n'a pas d'autre façon de se
faire entendre, et il serait important de pouvoir entendre M. Pierre
Ouellet parce que, là, on se rend compte, là, qu'il y a une rétention de
documents. Les documents qui sont déposés sont falsifiés, et là c'est pour
protéger qui?
Et, lorsqu'on sait que le bureau du
premier ministre était au courant, à travers son chef de cabinet de
M Couillard, M. Dufresne, à travers M. Iglesias, qui était au
courant, il y a eu la démission de Mme Savoie, il y a eu la démission de
M. Pierre Ouellet, mais, clairement, il y a d'autres personnes qui sont
impliquées dans, je vous dirais, cet ensemble de rétention et de modification d'information
au niveau des parlementaires. Puis ce n'est pas juste au niveau des
parlementaires de l'Assemblée nationale, c'est même la rétention d'information
à la demande de l'ancien ministre. Donc, on doit absolument pouvoir entendre
les parlementaires.
On a ici la lettre de Mme Trudel, il y
a encore... Bien, le rapport, vous vous rappelez, le fameux rapport qui
manquait quatre pages, on n'a toujours pas d'explication autre que des
explications Word, et là, ici, le tableau, le tableau où il y a... Mme Trudel
dit clairement qu'il y a des fausses informations dans ce tableau-là et qu'il y
a sûrement d'autres irrégularités qu'il faut pouvoir valider en fonction des
informations de la clé USB. Puis, quand même assez surprenant, un tableau qui
porte la date du mois de mai — et vous vous rappelez, Mme Trudel
a démissionné le 4 avril — et, je vous dirais, il y a plus d'une
dizaine d'actions dont la responsabilité incombe à Mme Trudel. Donc, un
tableau qui a été botché, en plus d'avoir des fausses informations. C'est une
insulte aux parlementaires, de nous déposer des documents comme ceux-là.
M. Robillard (Alexandre) : Mais
est-ce que ça se peut que ce document-là, il ait été fait à partir d'éléments
qu'elle avait soumis?
Mme Ouellet : Oui.
M. Robillard (Alexandre) :
Qu'est-ce que c'est, ce document-là? Elle n'en est clairement pas l'auteure.
Mme Ouellet : Elle n'en est
clairement pas l'auteure. Ce qu'elle nous indique dans sa lettre, c'est que la
première colonne reprend ses recommandations, des recommandations qui datent de
la présentation du 9 novembre 2015, date à laquelle M. Poëti
était encore ministre, mais dont il n'a jamais eu vent et dont il n'a jamais eu
les informations et... mais Mme Trudel nous dit, dans sa lettre, qu'il y a
plusieurs fausses informations.
Donc, nous, sans pouvoir entendre
Mme Trudel, on ne peut savoir lesquelles informations, dans ce tableau-là,
sont fausses, mais on voit que le tableau a été préparé après le départ de
Mme Trudel, après le départ de M. Poëti, qu'il y a des fausses
informations à travers le tableau, et qu'en plus, dans les responsabilités, on
indique des responsabilités à cette consultante-là, alors qu'elle a déjà
quitté.
M. Robillard (Alexandre) :
Puis il y a plein de documents qui ont été déposés par la CAP sur le site Web
de l'Assemblée nationale, pouvez-vous nous dire un peu c'est quoi? Tout ça
vient de la clé USB, ou pas, ou... Qu'est-ce que vous avez reçu à date qui
était sur la clé USB?
Mme Ouellet : Bien, on n'a
pas encore ces informations-là parce qu'on n'a pas les... on ne sait pas ce
qu'il y a sur la clé USB. Semble-t-il que ce document-là, selon
Mme Trudel, se retrouve... pas ce document-là, mais sa présentation serait
sur la clé USB, et c'est d'ailleurs ce qu'elle demande : Pourquoi ne
rendre publics les originaux?
M. Robillard (Alexandre) :
Mais ça, ça ne vient pas de la clé USB?
Mme Ouellet : Non, pas
celui-là parce qu'il a été produit après, mais que l'original, donc la première
colonne, serait sur la clé USB. Donc, elle dit : Pourquoi ne pas rendre
public l'original plutôt qu'une copie falsifiée de ses recommandations?
Donc, on doit pouvoir poser des questions
à Mme Trudel, à M. Poëti, à M. Pierre Ouellet pour savoir
qu'est-ce qui s'est passé, qu'est-ce qu'ils ont remarqué. Et tantôt la CAP va
se réunir, là, pour aussi avoir les informations contenues sur la clé USB.
M. Gagnon (Marc-André) : Vous
faites un lien entre ces documents-là et le rapport qui a été déposé la semaine
dernière où il y avait des problèmes de pagination, selon le ministre, là, où
il manquait des pages, selon vous. Est-ce que vous croyez que ce sont les mêmes
personnes qui ont modifié les deux documents?
Mme Ouellet : On ne peut pas
du tout savoir. C'est pour ça qu'aujourd'hui on a posé la question : Qui?
Qui a, premièrement, commandé ce tableau-là? Qui l'a produit et qui l'a
falsifié? Est-ce que ce sont les mêmes personnes? Est-ce que ce sont des
personnes différentes? Nous ne pouvons pas le savoir, mais c'est extrêmement
grave de présenter à des parlementaires des informations qui sont fausses et
qui ne respectent pas l'information originale. Donc, on ne peut pas... et c'est
pour ça qu'on va demander de rencontrer les différentes personnes, pour savoir qu'est-ce
qui s'est passé.
M. Croteau (Martin) : Mais,
en Chambre, M. Gaudreault, il a avancé une hypothèse. Il a dit que les
fonctionnaires cherchaient à protéger le gouvernement. Qu'est-ce qui vous amène
à penser ça?
Mme Ouellet : Bien, pourquoi
il y aurait ces modifications-là? Et, quand c'est rendu au cabinet de M. Couillard
et qu'au cabinet de M. Couillard ils n'ont même pas jugé bon d'avertir
M. Couillard de ce qui se passait... ou bien non M. Couillard était
au courant, et ce qu'il nous a dit n'est pas exact. C'est grave, là. On parle
de...
M. Croteau (Martin) : Mais
ça, ça vous donne à penser que la haute fonction publique du MTQ cherche à
protéger le pouvoir politique, c'est ça?
Mme Ouellet : Bien, c'est
clairement une hypothèse, c'est clairement une hypothèse, et on se demande
c'est qui qui a fait les commandes, qui a fait ces commandes-là.
M. Dufresne était au courant, M. Iglesias était au courant, puis ils
n'ont pas agi, il ne s'est rien passé, et qui sont au courant depuis un certain
temps. Et Mme Trudel a été remerciée, Mme Savoie a été tassée,
M. Ouellette a été tassé, Mme Boily a été tassée et un autre monsieur
qui a signé la lettre comme quoi il disait que c'étaient des problèmes Word
pour le rapport a été également tassé. Écoutez, là, les indices s'accumulent,
là. Je veux dire, pourquoi est-ce que toutes ces personnes-là sont tassées
après avoir été impliquées dans les dossiers de la gestion des contrats du MTQ?
Est-ce que c'est pour qu'on ne puisse plus remonter la chaîne?
M. Croteau (Martin) : Selon
vous, est-ce que le gouvernement savait déjà que ce document avait été
falsifié?
Mme Ouellet : Écoutez, c'est
à lui demander, mais clairement, si Mme Trudel le dit dans sa lettre, bien, ça
veut dire qu'il y a quelqu'un qui le savait parce que les modifications qui ont
été faites, il y a quelqu'un qui les a faites, donc c'est sûr qu'il y a
quelqu'un, en quelque part, qui est au courant. Qui? On ne le sait pas. Et
est-ce que... C'est attaché jusqu'où dans la ligne de direction? On ne le sait
pas, et c'est ça qu'il faut savoir.
M. Boivin (Simon) : Comment
pensez-vous que les députés libéraux de la CAP vont se comporter lors de la
réunion... de la séance de travail à venir? Est-ce que vous avez l'impression
qu'ils vont être ouverts à convoquer les personnes que vous avez nommées, à obtenir
le contenu de la clé USB et à faire comparaître M. Lafrenière?
Mme Ouellet : Bien, en fait,
j'espère que les députés du Parti libéral vont agir de façon non partisane,
vont agir pour le bien du Québec, vont agir pour l'intégrité. Et ils l'ont fait
la dernière fois à la Commission de l'administration publique, j'espère qu'ils
vont le poursuivre sur la même lignée. J'espère qu'ils n'ont pas reçu d'ordres.
On a essayé de savoir s'il y avait un ordre qui avait été reçu d'en haut, mais
vous avez très bien entendu M. Couillard, à la période de questions, qui
refusait à ce que les informations de la clé USB soient remises à la commission,
malgré, malgré la décision du vice-président, hier, M. Ouimet, en disant :
Oui, les députés peuvent avoir accès à cette information-là, et ça s'est déjà
fait dans le passé. Et après ça il y a un jugement qui se pose : Est-ce qu'effectivement
il y a des informations de nature sensible ou non?
Mais, vous savez, Mme Savoie nous avait
dit, en commission parlementaire, que, par exemple, la présentation PowerPoint,
il n'y avait aucune information sensible, là, c'était banal, c'était ordinaire,
c'était... Et là, tout d'un coup, on se fait dire que c'est des informations
tellement sensibles que ça ne peut pas être communiqué aux parlementaires. Il y
a quelqu'un qui ne dit pas la vérité, là. Et, vous savez, ici, à l'Assemblée
nationale, on se doit de dire la vérité, donc on a un problème.
M. Dutrisac (Robert) : Mais
entre-temps il n'en demeure pas moins que, bon, là, la motion que vous avez
présentée n'a pas eu le consentement du gouvernement, des parlementaires.
Semble-t-il, les parlementaires libéraux ne voudront pas... en tout cas, ne
semblent pas disposés à accepter que la Commission des transports et de
l'environnement siège à ce sujet-là, va entendre ces gens-là. Qu'est-ce que
vous allez faire, là? C'est quoi, votre...
Mme Ouellet : Bien, dans un
premier temps, c'est d'entendre M. Lafrenière, avec l'ensemble des informations
du côté de la clé USB, pour qu'on... parce que, là, là, on nous dit une chose
et son contraire, et il n'y a plus de confiance. Le lien de confiance est
brisé, là, il y a un bris du lien de confiance, ça, c'est très clair.
Donc, ça, c'est dans une première étape,
et j'espère que nous aurons l'appui de l'ensemble de députés de la Commission
de l'administration publique pour pouvoir atteindre cet objectif-là parce que
ça doit être une motion unanime, donc... ou majoritaire, en tout cas. Il
faudrait valider, là, mais ça prend l'appui des libéraux dans tous les cas. Et ensuite
il y a la deuxième étape, d'entendre les différentes personnes à la commission
parlementaire des transports et de l'environnement, on va être obligés de
revenir à la charge.
Vous savez, pour l'enquête de la
commission Charbonneau, combien de fois il a fallu revenir à la charge.
J'espère que ce sera moins long et je ne peux pas concevoir que le Parti
libéral, après toutes les questions de corruption, de collusion et tout ce qui
est ressorti des enquêtes de l'UPAC menant même jusqu'au financement du Parti
libéral, qu'on se retrouve encore dans les mêmes dossiers. C'est l'ère Charest
qui revient, avec Philippe Couillard qui refuse d'ouvrir les livres, qui refuse
la transparence, qui n'arrête pas de répéter. Ça, c'est assez choquant pour des
parlementaires, de l'entendre toujours parler de transparence, mais, quand
vient le temps d'agir, il refuse toujours. Donc, moi, j'ai beaucoup de
difficultés à accepter ce genre d'attitude là. Puis il osait même référer à
M. Parizeau sur sa façon de répondre en période de questions. En tout cas,
il aurait des leçons à prendre, très clairement.
M. Dutrisac (Robert) : Est-ce
qu'il y a une possibilité d'une procédure d'outrage au Parlement? Parce que,
là, manifestement, il y a des documents… en tout cas, ce que Mme Trudel
dit, c'est que les documents ont été falsifiés. Donc, comme parlementaires, est-ce
que vous pourriez, justement, soulever cette question-là?
Mme
Ouellet
: Tout
à fait. Il y a plusieurs procédures qui sont possibles, et nous aurons des
discussions au sein du caucus du Parti québécois pour examiner chacune de ces
avenues.
Mme Plante
(Caroline) : Mrs. Ouellet, can you
explain why your party is talking about a cover-up?
Mme
Ouellet
: How come we cannot have access to all the information? And we have a letter here from Mrs. Trudel who says that,
from this report, we have false information, and it's the second time. We also had false information related to the report that was deposited
last week to the commission, so,
how come? Who they want to protect? It really looks like a cover-up. And that's
why we're asking to hear Mr. Poëti, Mme Trudel
and Mr. Pierre Ouellet in the Transport Environmental
Commission. I think it's really
important. And this afternoon
we'll also ask to have access to all the information on the USB key and also to be able to have the analysis from M. Lafrenière,
which is clearly the opposite of what we heard from Mme Savoie in the commission. And both are supposed to say the
truth and they are not saying the same thing, so we have, clearly, a problem
here.
Mme Plante (Caroline) : Your motion was defeated in the House, so what does that mean? Will
we hear these people? Will there be a commission?
Mme
Ouellet
: But, for the moment, we need to have the «consentement»
of the Liberal Party, and today it's the second time that they refuse. So, of
course, we will come back and we'll have to talk about it at the caucus this
afternoon… we have this different way we'll have to look at, but we'll come
back because we cannot accept that false information are deposited to the
parliamentarians. That's not acceptable in our system. People that come to us
to give us information, they have to say the truth, and, clearly, it wasn't the
case. And, you know, that's really, really an
important, «grave»… serious problem that we have here related to all the governmental affairs because it's not only
the Transport Minister, it's also related to the
cabinet of the Prime Minister, who were aware of what was going on, and they
didn't do nothing about it, and that's not explicable.
Mme Plante (Caroline) : And we're talking of possible contempt of Parliament here, so this
is pretty serious.
Mme Ouellet : That's really serious and it's serious because we don't have the
right information. And it's also serious because we are talking about billions
of dollars, it's contracts related to billions of dollars. You know, it's not… it's
not «par hasard»… it's not out of the blue that problems are inside the
Transport Ministry, it's because there is a lot of money there. And that lot of
money has to be well managed because it's the money of all Quebeckers, and
that's really important. And, with the refusal of the consent of the Liberal Party,
we're really asking the question : Who they want to protect? Who they want
to protect? And that's not acceptable in our system.
(Fin à 11 h 32)