(Onze heures quarante et une minutes)
M. Drainville
: Alors,
bonjour, tout le monde. D'abord, je veux revenir sur le rapport de la Vérificatrice
générale, qui est un rapport accablant pour un ministre actuel, M. Daoust, le ministre
des Transports, et qui est également accablant pour l'ancien ministre Sam Hamad.
On va commencer, si vous me le permettez,
puis ça va être très bref, par le cas de M. Daoust. Alors, je vous rappelle un
extrait d'entrevue qu'il a donnée à Paul Arcand le 4 février 2016. C'est sur
RONA. Arcand dit : «O.K., là, mais, comme ministre de l'Économie, on a
appris hier qu'Investissement Québec avait vendu ses actions. Étiez-vous au
courant que les actions avaient été vendues?» M. Daoust répond : «Euh,
non.» Arcand revient à la charge : «Mais le ministre ne le sait pas, ça,
quand, quand c'est qu'on vend ou qu'on achète?» Réponse de Daoust : «Non.»
Or, si on prend le rapport de la
vérificatrice à la page 12, enfin à la page 13, parce que c'est la fin du paragraphe
37, elle écrit : «...selon les procès-verbaux du conseil d'administration [d'Investissement
Québec], ils ont obtenu en décembre 2014 l'accord du ministre avant de vendre
la totalité des actions.» Alors, la Vérificatrice générale dit très clairement
que M. Daoust, il est au courant quand les actions sont vendues. Or, il nie
avoir été au courant de la vente des actions, lorsqu'il a fait cette entrevue,
donc, avec Paul Arcand. Puis peut-être que vous pourrez retrouver d'autres
réponses du même genre. Alors, M. Daoust a déclaré aujourd'hui, il a déclaré en
Chambre qu'il reviendrait avec des explications. Bien, elles sont bien mieux
d'être claires et elles sont bien mieux d'être bonnes, ces explications, parce
qu'à sa face même M. Daoust n'a pas dit la vérité sur la question des actions
de RONA.
Maintenant, M. Hamad. Alors, M. Hamad, lui
aussi, est dans le trouble, pour les raisons que j'ai expliquées pendant la
période des questions. Je ne sais pas jusqu'à quel point vous souhaitez que je
refasse la synthèse de ce que j'ai dit en période de questions, mais
essentiellement c'est clair, très, très clair dans le rapport de la VG que la
subvention, elle est augmentée de 7,5 millions à 8,5 millions,
et la seule chose qui intervient entre l'augmentation de 7,5 millions à
8,5 millions, c'est le déjeuner avec Marc-Yvan Côté. C'est la seule chose
qui intervient. Le seul élément factuel qui arrive entre 7,5 millions et
8,5 millions, c'est le déjeuner avec Marc-Yvan Côté. C'est la seule
explication qu'on a sous la main. Et, qui plus est, la Vérificatrice générale
souligne à grands traits qu'elle n'a retracé aucun document expliquant cette
hausse de 7,5 millions à 8,5 millions de la subvention de Premier
Tech.
Et puis moi, je l'ai fait en Chambre, je le
fais également devant vous aujourd'hui, là, on a finalement la réponse à la
question qu'on se posait lorsqu'on a lu l'échange de courriels entre Marc-Yvan
Côté et Sam Hamad... enfin, pardonnez-moi, entre le chef de cabinet de Sam
Hamad et Yves Goudreau de Premier Tech. Quand le chef de cabinet de Sam Hamad
dit : «On partait de loin, mais on a travaillé fort pour ne pas avoir le
statu quo, bien, on a finalement compris aujourd'hui, dans le rapport de la VG,
c'était quoi, le statu quo. Le statu quo, c'était une subvention de
7,5 millions. Ils ont travaillé fort pour ne plus avoir le statu quo, puis
effectivement la subvention est passée de 7,5 millions à
8,5 millions. Bingo! Puis là je vous fais fi également des autres éléments
que vous connaissez déjà, parce que certains d'entre vous avez déjà écrit des
papiers là-dessus, là : alors, la valeur économique du projet présenté qui
a été surévalué, le ratio de valeur économique inférieur au seuil de
rentabilité, la valeur économique du projet n'est pas rentable.
Puis la recommandation est assez parlante,
quand même. La recommandation est dite évidemment dans ce langage qu'utilisent
les vérificateurs généraux dans leurs rapports, mais ce qu'elle dit essentiellement
dans sa recommandation, elle dit : Le Conseil des ministres a pris une
décision avec de la mauvaise information. Et ce qui est clair aussi, c'est que
le Conseil des ministres n'a pas été informé par Sam Hamad que la subvention
avait été augmentée de 7,5 à 8,5 millions. Alors, c'est la raison pour
laquelle, nous, on ne voit pas comment Sam Hamad peut rester comme député. Il
n'est même pas question, évidemment, qu'il réintègre le Conseil des ministres,
avec un rapport comme celui-là. Mais, franchement, on ne voit pas comment il
peut rester comme député non plus, là, parce que c'est très, très grave, en
fait, ce qu'il s'est produit, là.
Et, bien entendu, je vais prendre vos
questions. Je sais que vous avez des «deadlines» puis que vous êtes déjà rendus
à votre quatrième point de presse ce matin.
M. Caron (Régys) : Au sujet
des transports, là, vous dites que M. Daoust a menti. Est-ce que vous
demandez sa démission?
M. Drainville
: Comme
je l'ai dit, M. Caron, il est mieux d'avoir de très, très bonnes
explications. Il a dit qu'il nous reviendrait avec des explications,
M. Daoust. Elles sont bien mieux d'être très bonnes et très claires. Et on
va les écouter avec beaucoup, beaucoup d'attention. Mais, à sa face même,
M. Daoust, il a menti, M. Daoust a menti. Il a dit : Je n'étais
pas au courant de la vente des actions de RONA, bien la VG dit : Bien oui,
la vente des actions de RONA, elle a été approuvée par — je veux
juste ramener aux faits, là — le conseil... «selon les procès-verbaux
du conseil d'administration, ils — les membres du conseil
d'administration — ont obtenu en décembre 2014 l'accord du ministre
avant de vendre la totalité des actions». Pas l'accord de l'équipe du ministre,
pas l'accord du cabinet du ministre, l'accord du ministre.
Donc, M. Daoust, il a permis, il a
donné son accord pour que les actions de RONA soient liquidées. Or, il a
répondu aux questions de Paul Arcand, puis possiblement à d'autres, qu'il
n'était même pas au courant : «Étiez-vous au courant que les actions
avaient été vendues? Non. Le ministre ne le sait pas, ça, quand on vend où on
achète? Non.» Bien non seulement il était au courant, mais il l'a autorisé,
selon la Vérificatrice générale. Mettons qu'il n'est pas dans une très, très
bonne position, M. Daoust, hein?
M. Drainville
: Bien,
ce que ça change, c'est que, s'il était au courant, c'est donc qu'il aurait pu
refuser. M. Daoust dit : Je n'étais pas au courant. Mais, évidemment, il
aurait pu dire : Non, on ne vend pas le bloc d'actions. De cette façon-là,
ça aurait été possible pour l'État québécois d'empêcher la vente de RONA à
Lowe's ou, en tout cas, on aurait eu un rapport de force qu'on avait perdu en
vendant notre bloc d'actions, en liquidant les actions que l'État québécois
avait à travers Investissement Québec.
L'autre chose, en passant, M. Daoust, il
n'est pas juste dans le trouble avec le rapport du VG, là. Là, si vous me
permettez, c'est quand même important, là, puis j'ai fait sortir la rétro pour
être bien sûr de le citer, M. Daoust, là, mais le 18 mai, là, à vous,
les journalistes, en scrum, là : «Est-ce qu'on peut les avoir, ces
renseignements-là qui sont sur la clé USB?» Il dit : «On les a donnés à
l'UPAC.» Le journaliste demande : «Vous n'avez pas fait de copie?» M.
Daoust répond : «Non, moi, je n'en ai pas de copie, on a une copie
informatique, si on veut.»
C'est quoi, ça, une copie informatique?
C'est une copie. Ils ont une copie actuellement au cabinet du ministre Daoust,
ils ont une copie de la fameuse clé USB qu'ils sont supposés avoir remise à
l'UPAC. Comme l'a dit le premier ministre, hier… Le premier ministre, hier, il
dit, en Chambre : On n'en a pas, nous autres, de copie. M. le Président,
on ne l'a pas, la clé USB, c'est l'UPAC qui l'a. Bien oui, tu l'as, mon ami.
Vous l'avez, au gouvernement du Québec, la clé USB. Elle est au bureau de
Jacques Daoust, qui s'en est fait une copie, comme il l'a admis.
Et là, la question qui se pose : Le
document qu'il a rendu public, hier après-midi, le fameux rapport de suivi,
est-ce qu'il provient des documents qui sont sur la clé USB? Si, effectivement,
le document qu'il a rendu public hier, en point de presse, à 16 heures,
pour essayer de discréditer Mme Trudel, si ce document-là provient de la clé
USB, bien, pourquoi nous autres, les parlementaires, puis vous autres, les
journalistes, tant qu'à ça, on n'aurait pas le droit d'avoir les documents qui
sont sur la clé USB? Si c'est possible pour le ministre de sortir un document
de la clé USB pour s'en défendre, pour s'en servir pour discréditer Mme Trudel,
bien, pourquoi ça ne serait pas bon pour les parlementaires? Pourquoi le
gouvernement aurait le droit d'utiliser le contenu de la clé USB, mais le
Parlement, lui, n'aurait pas ce droit-là? Ce qui est bon pour le gouvernement
est bon pour le Parlement, il me semble?
M. Caron (Régys) : Le
document de suivi, M. Drainville, il était sur le site de la CAP à partir du
31 mai, là. Parlez-vous de ce document-là ou du document déposé par Mme Trudel
en novembre 2015, dévoilé hier par M. Daoust?
M. Drainville
: Oui,
je parle de ce document-là, je parle de ce document qu'on voyait pour la
première fois, qui a été utilisé par Jacques Daoust dans son point de presse
hier après-midi. Si ce document-là provient de la clé USB, provient de la copie
de la clé USB qu'il s'est faite, c'est donc qu'ils utilisent, au gouvernement,
des documents qui sont sur la clé USB. Or, le premier ministre nous a
dit : On ne l'a pas la clé USB. Bien oui, tu l'as, vous en avez fait une
copie, c'est Jacques Daoust lui-même qui l'a dit. Qui plus est, ce n'est pas
impossible, vérification à faire, mais ce n'est pas impossible que le document
utilisé par Jacques Daoust provienne justement de la clé USB ou des documents
qui sont sur la clé USB.
Alors, je vous repose la question :
Si le gouvernement peut utiliser le contenu de la clé USB, qu'il n'est plus
censé avoir puis qu'il n'est pas supposé utiliser pour ne pas nuire à l'enquête
de l'UPAC, bien, si c'est bon pour lui, s'il peut l'utiliser, ce contenu-là,
pourquoi les parlementaires ne l'auraient pas, à ce moment-là? Pourquoi, nous,
on ne l'aurait pas, comme députés, à la Commission de l'administration
publique, notamment? Puis pourquoi, je vous dirais même, les journalistes ne
l'auraient pas, le contenu de la clé USB? Alors là, il pourrait répondre :
Ah non, ce document-là ne provient pas de la clé USB. Ah! Donc, vous êtes allé
voir sur la clé USB pour vous en assurer?
Parce que leur défense, depuis le début,
c'est de dire : Il ne faut pas que ces documents-là soient rendus publics,
ça pourrait nuire à l'enquête de l'UPAC. Bien, de deux choses l'une : ou
le document provient de la clé USB puis ils en ont une copie, on le sait, puis
là, à ce moment-là, c'est leur argument qui est un peu défait, parce qu'ils
disent : Il ne faut pas utiliser ces documents-là, ça pourrait nuire à
l'UPAC, ou bien ils ont vérifié, avant de le rendre public, le document, qu'il
n'était pas sur la clé USB. C'est l'un ou c'est l'autre.
M. Caron (Régys) : M. Daoust
semblait dire que ça venait du sous-ministre. Il l'a appelé hier matin, il a...
M. Drainville
: Oui,
mais le sous-ministre, il l'a pris où?
M. Caron (Régys) : La filière
du ministère des Transports.
M. Drainville
: Mais
oui, mais le sous-ministre, là, les documents, il les a... La clé USB, là, M.
Daoust dit : Ils se sont fait une copie. Il dit ça le 18 mai. Elle est
rendue où la clé USB?
M. Robillard (Alexandre) : M.
Daoust, il a dit ce matin que, dans la lettre du sous-ministre, là, qu'il vous
a remise hier, le document, les documents auxquels il faisait référence étaient
passés entre les mains du contentieux au MTQ et de l'UPAC. C'est la réponse
qu'il a répétée en Chambre. Ça fait que est-ce que vous pensez qu'il pourrait
avoir eu l'autorisation de l'UPAC pour utiliser ce document-là? Est-ce que
c'est ça qu'on doit...
M. Drainville
: Bien,
je vais vous dire... C'est une bonne question, M. Robillard, puis ce sera
une bonne question pour M. Lafrenière demain, qui va être en commission
parlementaire. Mais, écoutez, là, est-ce que vous avez entendu... Il a eu quand
même plusieurs occasions aujourd'hui, Jacques Daoust, de nier le fait qu'il
avait une copie, là, puis il ne l'a jamais nié, là. La question lui a été posée
et reposée, là, sur les prémisses de sa déclaration du 18 mai. Il ne s'est pas
levé en Chambre, aujourd'hui, pour dire : Excusez, je me suis mal exprimé,
là, je ne voulais pas vraiment dire qu'on avait une copie, là. Il n'a
absolument rien fait pour discréditer sa déclaration du 18 mai, or il avait
l'occasion de le faire. Moi, je pense que, le 18 mai, il a dit la vérité, il a
dit : Oui, on s'en est fait une copie.
Alors, moi, je veux savoir, s'ils s'en
sont fait une copie, elle est où cette copie-là, pourquoi ils ont une copie.
Ils sont supposés avoir tout remis ça à l'UPAC. Puis les documents d'hier,
est-ce qu'il y a une partie de ces documents-là qui proviennent de la clé USB?
Puis, si c'est bon pour le gouvernement, pourquoi ce n'est pas bon pour le Parlement,
pourquoi ce n'est pas bon pour les journalistes?
M. Robillard (Alexandre) :
Sur M. Hamad, si...
M. Drainville
: Oui.
M. Robillard (Alexandre) :
Donc, selon vous, il y a une ingérence politique qui explique la hausse de la subvention,
mais est-ce que...
M. Drainville
: Il n'y
a aucune autre explication.
M. Robillard (Alexandre) :
...mais il y a d'autres faits qui sont exposés par la vérificatrice, l'évaluation
économique. Est-ce que...
M. Drainville
: Oui,
mais ça, c'est grave.
M. Robillard (Alexandre) : Mais
je veux juste savoir votre point de vue.
M. Drainville
: Oui,
vas-y. Allez-y. Excusez-moi
M. Robillard (Alexandre) :
Est-ce que, selon vous, l'ingérence politique se limite à la hausse de la subvention,
ou si ailleurs, dans l'évaluation dans le processus, il a pu y avoir aussi un
favoritisme?
M. Drainville
: C'est
une excellente question, c'est vraiment une très bonne question. Tu sais, quand
elle dit, dans le fond, que les ratios n'étaient pas bons, quand elle dit que
le ratio de la valeur est inférieur, dans le fond, elle dit, le projet n'était
pas rentable, grosso modo, c'est ça qu'elle dit, le projet n'était pas
rentable. En fait, elle le dit, elle dit : «Si la valeur économique du
projet n'est pas rentable», c'est qu'il y a d'autres facteurs qui entrent, à ce
moment-là, en considération.
Alors, est-ce que, dans l'analyse qui a
été faite de ce projet-là, il y a une décision politique qui a été prise de
surévaluer certains critères pour contrebalancer le fait que la valeur
économique du projet ne justifiait pas son financement? Ça se peut, je ne le
sais pas, mais la question se pose très clairement parce que, tu sais...
Journaliste
: M.
Drainville...
M. Bellerose (Patrick) :
...que M. Hamad aurait pu trafiquer les chiffres présentés au Conseil des
ministres?
M. Drainville
: Bien,
la Vérificatrice générale, elle dit : «...la valeur économique du projet
présenté au Conseil des ministres [et qui a servi à sa prise de décision] a été
surévaluée». La valeur économique du projet a été surévaluée dans sa
présentation au Conseil des ministres, ce n'est quand même pas rien, là. Alors,
qui l'a surévaluée, la valeur économique?
M. Bellerose (Patrick) : Vous
considérez que c'est M. Hamad?
M. Drainville
: Non,
mais je ne dis pas que c'est M. Hamad, je dis que ça s'est passé sous l'égide
de M. Hamad, qui est ministre, à ce moment-là, responsable du dossier, il est
ministre du Développement économique. Le projet est surévalué, alors il faut
demander à M. Hamad comment ça se fait que le projet a été surévalué. Est-ce
qu'il a une réponse à cette question-là? Est-ce que la Vérificatrice générale a
une réponse à cette question-là? Je ne le sais pas, je n'étais pas au point de
presse, moi, je n'étais pas au «lock-up» ce matin, mais je pense qu'il faut
quand même poser la question.
Au-delà du déjeuner qui... Le chaînon
manquant, c'est le déjeuner avec Marc-Yvan Côté, il n'y a aucune autre
explication pour justifier l'augmentation de la subvention de 7,5 à
8,5 millions, il n'y a rien d'autre. Et la Vérificatrice générale, elle ne
dit pas ça, ce n'est pas comme ça qu'elle travaille, ce n'est pas comme ça que
les vérificateurs généraux travaillent, mais elle prend la peine de dire... Au
lieu de dire «c'est le déjeuner», elle dit : «Il est noter que nous
n'avons pas retracé de document [qui explique l'augmentation à] 8,5 millions»
de la subvention. Or, la seule affaire qui peut expliquer l'augmentation de la subvention,
c'est le déjeuner avec Marc-Yvan Côté.
M. Boivin (Simon) : Puis elle
a pris un échantillon de 20 dossiers — excuse-moi — de 20
autres dossiers similaires puis elle a retrouvé le même type d'augmentation
dans quatre autres de ces dossiers-là, comme s'il y avait une façon de négocier
un peu à Investissement Québec sans que ce soit tout le temps suffisamment
documenté. Est-ce que ça veut dire que, dans tous ces dossiers-là aussi, il y a
un déjeuner qui est le chaînon manquant qui explique l'augmentation du prix?
M. Drainville
: Bien,
écoutez, moi, je pars des faits, là, O.K.? Les faits, ils ont la tête dure, là.
«Marc-Yvan. J'ai rencontré à 7 heures ce matin notre ami pour faire le point.»
Le lendemain, le chef de cabinet de Sam Hamad écrit à Premier Tech : «On a
travaillé fort, vous aurez des nouvelles bientôt via le canal régulier. Positif
ou négatif? On partait de loin mais on a travaillé fort pour ne pas avoir le
statu quo.»
Bien, depuis le début de cette affaire-là,
moi, là, je me pose la question : De quoi il parle? C'est quoi, le maudit
statu quo? Bien, là, j'ai la réponse, on a la réponse dans le rapport du VG. Le
statu quo, c'est très clair, c'est 7,5 millions.
La subvention, si vous regardez, là, ce
tableau-là, il est fascinant, là, dans ce document-là, là, si vous prenez la
chronologie, là, c'est vraiment fascinant, tout est là, toute l'histoire est là :
première lettre d'intention d'IQ le 25 janvier 2012, la subvention est à
7,5, millions; le 9 février, le jour même du déjeuner — le jour
même du déjeuner — il arrive une demande de Premier Tech au ministère
qui fait passer la subvention de 7,5 millions à 9,5 millions.
Marc-Yvan puis Sam Hamad vont déjeuner; le jour même, Premier Tech soumet
une autre demande qui fait passer la subvention de 7,5 millions à
9,5 millions. Deux semaines plus tard, nouvelle analyse d'IQ qui met la
subvention soudainement à 8,5 millions. La subvention n'est plus à
8,5 millions comme dans la première analyse, elle est passée à
8,5 millions dans la deuxième analyse qui vient après le déjeuner. Puis
six jours plus tard, 29 février, une lettre d'intention d'Investissement à
Premier Tech, la subvention est rendue à 8,5 millions. Ça fait que
qu'est-ce que tu veux que je te dise? Tu sais, l'analyse est là.
M. Boivin (Simon) : Bien,
c'est parce qu'il y a d'autres...
M. Drainville
:
L'analyse est là : il y a une lettre d'intention; il y a le déjeuner; le
jour même du déjeuner, Premier Tech fait une demande, dit : Écoute, la
subvention à 7,5 millions, on aimerait mieux 9,5 millions;
finalement, ça se règle à 8,5 millions. Mais oui, mais c'est ça. «On
partait de loin mais on a travaillé fort pour ne pas avoir le statu quo.» Bien,
c'est ça, ils ne l'ont pas eu, le statu quo non plus, ils ne l'ont pas eu. Le
statu quo, c'est 7,5 millions. Ils n'ont pas eu le statu quo, ils ont eu
8,5 millions. Ils ont eu 1 million de plus. Puis le million de plus,
c'est le résultat direct de l'intervention de Sam Hamad et c'est le résultat du
déjeuner avec Marc-Yvan Côté et de l'intervention de Marc-Yvan Côté auprès de
son ami Sam Hamad.
Mme Biron (Martine) : M.
Drainville, selon vous, là, je comprends que le sort de M. Hamad est scellé
avec ce rapport-là. Est-ce que vous estimez que le rapport du Commissaire à
l'éthique et à la déontologie est plus en lien avec le cas qui nous occupe
tous? Est-ce que vous pensez que ça...
M. Drainville
: Le cas
étant... Oui?
Mme Biron (Martine) : Est-ce
que vous pensez que la situation politique, en fait le sort de M. Hamad, est-ce
que c'est le rapport au Commissaire à l'éthique qui est plus important dans l'intervention
politique ou bien si celui-ci, à lui seul, scelle le sort de M. Hamad?
M. Drainville
: Bien, c'est-à-dire,
celui-ci, à lui seul, fait la démonstration, à notre avis, de cette
intervention politique et du résultat de cette intervention politique, c'est-à-dire
l'augmentation de la subvention de 7,5 à 8,5 millions. Donc...
Journaliste
: ...
M. Drainville
:
Mais... Non, mais le rapport du Commissaire à l'éthique, il reste très important.
Mme Biron (Martine) :
Pourquoi est-ce qu'il... Quelle est l'importance... Faites-nous la différence
entre le rapport du VG, qui est quand même... la VG, c'est quand même les
enquêtes administratives, faites-nous la différence concernant le...
M. Drainville
: Mais
là je n'ai pas mon code d'éthique avec moi, mais, si vous retournez au point de
presse que j'avais fait quand j'avais demandé l'intervention du Commissaire à
l'éthique, je demandais l'intervention du Commissaire à l'éthique au regard de
deux articles du code d'éthique. Essentiellement, ça concerne l'intervention au
profit de certains intérêts ou l'obtention d'informations qu'il n'aurait pas dû
obtenir ou qu'il n'aurait pas dû partager. Donc, le Commissaire à l'éthique,
son enquête, elle reste très importante parce qu'il doit juger, il doit
décider : Est-ce que Sam Hamad est intervenu en faveur des intérêts de
Premier Tech et en faveur donc des intérêts de son ami Marc-Yvan Côté d'une
façon incorrecte? Et, deuxièmement, il doit aussi déterminer si Sam Hamad a
utilisé de l'information de façon incorrecte.
Sur ces deux plans-là, le Commissaire à
l'éthique va venir, d'une certaine façon, compléter ce que le rapport du
Vérificateur général fait aujourd'hui. Moi, je pense que le rapport du
Vérificateur général nous fait beaucoup avancer parce qu'on comprend finalement
c'était quoi, le fameux statu quo. Le statu quo, c'était la subvention à 7,5,
ils réussissent à l'augmenter à 8,5. Ça, c'est clair, la VG le démontre et elle
dit : Je n'ai aucune information, aucune documentation pour expliquer
cette augmentation-là. Et nous, ce qu'on dit : Le seul élément
d'information qu'on a, c'est l'intervention de Marc-Yvan Côté puis le déjeuner
avec Sam.
Mme Biron (Martine) : Ça,
c'est la déduction que vous, vous faites. Le rapport, il ne dit pas : Le
déjeuner a donné ça. Mais est-ce que...
M. Drainville
: Non,
mais Mme Biron, vous devez, avec moi...
Mme Biron (Martine) : Ma
question, c'est : Est-ce que le rapport du Commissaire à l'éthique n'est
pas plus important?
M. Drainville
: Elle
l'a dit, je... Étiez-vous au «lock-up»? Est-ce que vous étiez au lock-up?
Mme Biron (Martine) : J'étais
au point de presse.
M. Drainville
: O.K.
Mais elle a dit, apparemment — j'ai vu ça dans un des
papiers — que ce n'est pas son travail à elle d'évaluer les
courriels, les déjeuners, et tout ça, là. Ça ne rentre pas dans son analyse, la
Vérificatrice générale, alors on ne doit pas s'attendre à ce que ça se retrouve
dans son rapport. C'est à nous, comme élus, et c'est à vous, comme
journalistes, de, mettons, mettre les puzzles ensemble, mettre les morceaux
ensemble. Nous, on pense que la démonstration, elle est éloquente, on pense
qu'elle est convaincante, on pense qu'elle est factuelle, puis on ne voit pas
comment on peut continuer à avoir confiance en Sam Hamad comme député, encore
moins comme ministre, avec ce qui est dévoilé aujourd'hui.
M. Caron (Régys) : Comment
nommeriez-vous...
M. Drainville
: Est-ce
que j'ai répondu à votre question? Répétez-moi-la à ce moment-là si je n'ai pas
répondu.
Mme Biron (Martine) : Bien,
c'est parce que le VG fait un travail administratif, alors que le Commissaire à
l'éthique et à la déontologie travaille beaucoup plus sur le plan politique.
M. Drainville
: Fait
un travail... Non, je ne dirais pas ça.
Mme Biron (Martine) : Alors, est-ce
que vous n'estimez pas que ce rapport-là est plus important, là, concernant la
suite des choses concernant M. Hamad plutôt que...
M. Drainville
: Non.
Je dirais : Ils sont également importants, Mme Biron. Je dirais que
les deux sont également importants. La Vérificatrice générale fait un travail
davantage administratif, vous avez raison de le dire, et, à mon avis,
aujourd'hui, la démonstration administrative est très, très, très éloquente et
démontre que, je veux dire, la subvention a été augmentée de 1 million
après un déjeuner avec Marc-Yvan Côté. C'est clair, c'est écrit, c'est ça.
M. Caron (Régys) : Comment
nommeriez-vous ça, M. Drainville? Trafic d'influence? C'est quoi?
M. Drainville
: Moi,
je dirais, c'est de l'ingérence politique en faveur d'un ami, et ça n'a pas sa
place en politique, ça n'a pas sa place en politique.
La Modératrice
: Je
vous remercie.
M. Hicks
(Ryan) : Just a couple of questions in English.
What do you think explains or how can that 1 million dollar increase be
explained?
M. Drainville
: Well, the Auditor General doesn't have an
explanation. The Auditor General says : I have no explanation for this
increase by 1 million of the grant to Premier Tech. The Auditor General
notices there's been an increase from 7.5 to 8.5 million from the ministry
of Sam Hamad to the Premier Tech enterprise, but the Auditor General
says : I'm at a loss to explain it, there's no documentation to support
such an increase, this 1 million dollar increase, no documentation to base
it upon. The fact that's been revealed by Radio-Canada's investigative story is
that, between the first number, 7.5, and the second number, 8.5, there was a
breakfast with Sam Hamad and Marc-Yvan Côté, his friend, and we also have the
e-mails which say : We worked very hard not to
give you the status quo. That's the day after the breakfast. The day after the
breakfast, the assistant chief of cabinet of M. Hamad says: We worked very hard
for you not to have the status quo. This report today, the Auditor General's report today gives us the answer, what was the
status quo. The status quo was a grant of 7.5 million. That's very well
documented in this chronology here, right? So, you've got 7.5 million
here, that's the first analysis of Investissement Québec. You've got, la
première lettre d'intention, a grant of 7.5 million. You've got... So,
that's the first decision. And then, the day of the breakfast, the very day of
the breakfast, Premier Tech issues a second request and asks for the grant to
be increased from 7.5 million to 9.5 million. And, a few weeks later,
it is approved to go from 7.5 million to 8.5 million. So, le chaînon
manquant… How would you say that? The missing link?
M. Hicks
(Ryan) : The missing link, yes.
M. Drainville
: Yes, exactly. The missing link between the first
decision granting 7.5 million and the second decision granting 8.5 million
is the breakfast between Sam Hamad and Marc-Yvan Côté. That's the only
explanation. Even the Auditor General says: I have no documentation, I do not know
why they increased the grant. All I have is an increase of the grant. And she
also says: The project was overestimated, it was not… How would you say
«rentable»?
M.
Hicks (Ryan) : Viable.
M. Drainville
:
Profitable, viable, yes. So, the Auditor General says the
economic value of the project was overestimated. She says the project was not
viable, and in spite of that, the money was given, and the increase of the
grant, I cannot explain, she says, there is no documentation. Well, we know
what happened, and what happened was Marc-Yvan Côté convincing his friend Sam
Hamad to increase the value of the grant. And that happens, it's… really, it's
quite something, right? Cause the very day of the breakfast, you have the
company asking for an increase of the grant, the very, very, very day they have
their breakfast, the company asks for an increase of the grant from 7.5 million
to 9.5 million, and, a few weeks later, they find they get 8.5 million.
M. Hicks
(Ryan) : So, what do think — quickly — what
do you think when you hear Sam Hamad talking about… and the Premier acting as
though Hamad has been cleared? And even leaving caucus this morning, the
Premier left with Sam Hamad and patted him on the shoulder.
What do you think of
that?
M. Drainville
: I think that the Premier has
a very, very elastic conception of ethics and integrity. How can you… How can
the Premier… Jeez, man, I don't give… enough into using English… Not
«collaborate» but «cautionner»?
M. Hicks
(Ryan) : Condone.
M. Drainville
: «Condone», thank you. How can the Premier condone such
behavior? I matter lost to explain. How can the Premier forgive Sam Hamad for
what he did and leave caucus, you know, with his arms around the shoulders and all is forgiven? This
sounds such a very, very bad signal to the public as to the kind of level of
ethics and the kind of standards of integrity this Government has. But it also sends a very bad signal to the other ministers
around the table.
See, if the Premier wants
to forgive Sam Hamad, he's going to have to explain how come the grant was
increased from 7.5 to 8.5 millions without any justification or
argumentation. He's going to have to explain that to the public. And he's going
to have to convince the public that it has nothing to do with the breakfast
that Sam Hamad and Marc-Yvan Côté had, which was followed a few weeks after by
an increase of 1 million of the grant? This was a 1 million dollars
breakfast, that's what it was, a 1 million dollars breakfast. That's the
tab Québec taxpayers had to pay for that breakfast. And there is not economic
justification to justify this increase.
This is precisely what
the Auditor General says. She says: The project was vastly overestimated, the
economic value was not demonstrated. The project was not... «rentable»…
Journaliste
: …
M. Drainville
: …viable. She also says: The
project was not viable. And we know there was this breakfast, and, after the
breakfast, the grant was increased by 1 million. I mean, how much more
does the Premier need to be convinced that Sam Hamad should not be
congratulated and that his behavior should not be condone? How much more does
the Premier need? How much more does the Premier need? It was increased after a
breakfast without justification for a project that was not viable, that was
vastly overestimated. What else do you need to say «Nay, nay»? No, I don't
believe in Sam Hamad and he should be put aside. This is what the Premier
should say about Sam Hamad, not put his arm around his shoulder and say: Hey,
buddy, you came out of it clean. He did not come out of it clean, I'm sorry. O.K.
Merci beaucoup, tout le monde.
(Fin à 12 h 12)