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Point de presse de Mme Manon Massé, députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques et Mme Martine Ouellet, porte-parole de l'opposition officielle en matière de transports, de stratégie maritime et d'électrification des transports

Version finale

Tuesday, August 16, 2016, 12 h 15

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Douze heures dix-sept minutes)

Le Modérateur : Bonjour, tout le monde. On va donc commencer. Bienvenue à cette conférence de presse concernant le projet de loi n° 106 sur la transition énergétique et les hydrocarbures. Les députées de Sainte-Marie—Saint-Jacques et de Vachon vont prendre la parole. Elles sont accompagnées du front pour la transition énergétique... Front commun pour la transition énergétique. Alors, je cède la parole à Mme Massé. À la toute fin, il y aura une période des questions.

Mme Massé : Oui. Alors, bonjour, tout le monde. Merci d'être là. Effectivement, le Front commun de transition énergétique, un regroupement d'une cinquantaine de groupes citoyens, écologiques, autochtones qui, à travers le Québec, depuis plusieurs mois, envoie des signaux très clairs concernant la question du projet de loi n° 106, alors, sans plus tarder, je leur laisse la parole. J'invite Mme Carole Dupuis, du réseau de Vigilance Hydrocarbures Québec, de venir vous adresser quelques mots.

Mme Dupuis (Carole) : Merci, Mme Massé. Merci à vous tous qui êtes venus nous entendre parler du projet de loi n° 106 concernant la mise en oeuvre de la Politique énergétique 2030 du Québec. Ce projet de loi, en deux mots, nous scandalise. On n'est vraiment pas contents, pour tout dire, mais on est constructifs. Alors, aujourd'hui, on vous arrive non pas avec des critiques mais avec quatre recommandations importantes qui font un consensus à travers les groupes du front commun.

Tout d'abord, je voudrais juste vous rappeler que le projet de loi n° 106 comprend cinq chapitres et, à l'intérieur de ça, deux projets de loi. Donc, deux projets de loi dans un projet de loi, plus d'autres choses, ce n'est pas archisimple. Nous, on va vous parler du chapitre I, Transition énergétique, du chapitre IV, le projet de loi sur les hydrocarbures, qui nous inquiète beaucoup.

Avec ces deux projets de loi là, qui sont complètement contradictoires, on a cherché une image, finalement : Qu'est-ce que c'est, cette affaire-là? Et ça nous a fait penser au cheval de Troie. On a un joli cheval avec des… doré et tout, mais à l'intérieur de ça, il y a une menace importante, il y a la filière pétrolière et gazière qui s'en vient de manière très officielle pour prendre sa place au Québec, comme le gouvernement de M. Couillard le préconise depuis son arrivée au pouvoir en 2013. Voilà. On ne sait pas si les auteurs de la loi pensaient qu'on ne verrait pas le subterfuge. En tout cas, on l'a vu. Alors, notre première demande, c'est de simplifier un peu les choses et de séparer ces deux questions-là. On n'est pas les seuls; maintenant, il y a une belle unanimité dans l'opposition. Donc, c'est dans ce sens-là qu'on veut aller.

On veut scinder le projet de loi, mettre de côté le projet de loi sur les hydrocarbures, non pas pour ne pas avoir de législation sur les hydrocarbures, mais pour y revenir plus tard. Il n'y a aucune urgence à faire ça. Ce qu'on veut, nous, c'est la transition énergétique. C'est urgent, ça fait consensus dans la population, c'est incontournable et, en plus, c'est attrayant pour l'économie du Québec, c'est un vecteur de création d'emplois pareil à nul autre.

Quant à la filière du pétrole et du gaz, on pense que ses perspectives économiques ne sont pas reluisantes du tout. Il n'y a pas d'acceptabilité sociale, mais pas du tout, et… c'est ça, ce n'est pas au rendez-vous.

Donc, notre deuxième demande suit la… c'est la suite logique de la première, on veut, d'ici à ce qu'il y ait une loi sur les hydrocarbures qui irait dans le sens de l'acceptabilité sociale, c'est-à-dire d'une interdiction de la fracturation hydraulique et des procédés nouveaux qui sont tout aussi toxiques, comme ceux qu'on peut voir à Gaspé... Et on veut que cette loi-là non plus ne permette pas l'accès prépondérant aux propriétés des Québécois ni à l'expropriation, bien sûr. Donc, on peut y revenir plus tard, il n'y a pas d'urgence à faire ça. D'ici là, ce qu'on veut, c'est travailler sur la transition énergétique. Patrick Bonin va vous en parler plus longuement.

Donc, la troisième demande qu'on vous fait, qu'on fait au gouvernement aujourd'hui, c'est de nous donner une loi qui n'est pas sur la transition énergétique, qui n'est pas tout simplement une loi qui crée une structure qui va gérer quelques programmes, mais bien une loi qui va créer... une loi sur la transition énergétique, finalement, qui va nous amener véritablement dans cette voie-là. On ne croit pas que la structure qui est proposée est assez... a assez de pouvoir, assez de portée pour nous amener là, mais pas du tout.

Et notre quatrième demande, bien, elle est évidente, elle devrait être évidente, mais étrangement elle n'est pas remplie à ce moment-ci, c'est que le Québec respecte ses obligations envers les Premières Nations, de consultation et... préalables, etc.

Alors, c'est le temps dont je dispose. Je laisse la parole à mes collègues. Merci.

Le Modérateur : André, de l'AQLPA.

M. Bélisle (André) : Bonjour, André Bélisle, AQLPA, Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique. Certains d'entre vous savez, ou saurez, ou avez su qu'on avait un intérêt particulier pour la fracturation hydraulique, qu'on a réveillé le Québec sur le dossier des gaz de schiste, et il y a eu une mobilisation extraordinaire de la population qui a dit : Non. Donc, en termes d'acceptabilité sociale, c'est un gros zéro.

Alors, quand on arrive dans un projet de loi où on semble vouloir ouvrir la porte à la production de gaz de schiste ou de pétrole de schiste avec toutes sortes de façons, ça va directement et de façon très claire en contradiction avec la volonté populaire. Donc, zéro acceptation sociale.

Par contre, ce qui est important, et nous, on appuie la transition énergétique, mais on en veut plus, on sait que maintenant, le Québec pourrait remplacer 100 % du gaz naturel qu'il importe par le biogaz et le biométhane. Alors, dans la transition énergétique, nous, on ne voit pas pourquoi on devrait faire de la place pour le gaz de schiste ou les combustibles fossiles quand on a tous les moyens de remplacer dès maintenant, comme le font différents pays, notamment la Suède avec qui on se compare facilement... Donc, pour nous, c'est clair, on est pour l'aspect positif de la transition énergétique, donc des énergies vertes, contre la fracturation hydraulique et le développement des énergies fossiles et, en même temps, bien, on rappelle que les hydrocarbures comme on est en train de vouloir les présenter, bien, vont à contresens de ce qu'on doit faire dans la lutte aux changements climatiques. Et, en plus, bien, nous, on avait demandé une loi sur les hydrocarbures, mais là ce qu'on a ne nous satisfait pas du tout. Donc, on va demander à ce que ça soit revu, et analysé, et étudié de façon plus précise et plus posée. Merci beaucoup. Et je...

Mme Massé : Patrick. C'est au tour de Patrick.

M. Bonin (Patrick) : Bonjour. Patrick Bonin, responsable de la campagne de Climat-Énergie à Greenpeace Canada. Évidemment, pour nous, aujourd'hui, il est très clair que ce projet de loi là sur la transition énergétique est complètement incompatible avec les engagements du gouvernement dans la lutte contre les changements climatiques.

En décembre dernier, à Paris, les pays des Nations unies ont signé l'accord de Paris, se sont engagés à limiter le réchauffement planétaire à 2 °C, idéalement à 1,5 °C. C'est également à Paris que M. Couillard est arrivé et a mentionné, et je cite : «Je n'ai aucun enthousiasme pour les hydrocarbures. J'espère qu'il n'y a plus d'ambiguïté sur cette question-là. Je pense qu'ils — soit les représentants des entreprises pétrolières et gazières au Québec — doivent décoder que je n'ai pas d'enthousiasme pour développer les hydrocarbures au Québec. L'avenir du Québec ne repose pas sur les hydrocarbures. Absolument pas.» Ça, c'était M. Couillard qui disait qu'il fallait investir dans les énergies renouvelables.

Et même son ministre de l'Environnement, M. Heurtel, a clairement mentionné tout récemment que nous sommes à la fin de l'heure des combustibles fossiles, parce qu'en effet, si on veut limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C, voire 2 °C, eh bien, il faut faire le virage d'ici 35 ans au niveau mondial, se départir complètement de tous les combustibles fossiles, pétrole, gaz et charbon, donc 100 % énergies renouvelables d'ici 2050.

Le problème, c'est qu'actuellement on se dirige vers un réchauffement de 3 °C, c'est deux fois plus que le 1,5 °C auquel se sont engagés les pays à travers la planète. Et, on l'a vu tout récemment, 450 scientifiques sont sortis en disant : 2015 est la pire des années au niveau de la montée des eaux, au niveau des températures, au niveau des émissions de gaz à effet de serre, et 2016 est en voie d'être encore pire que 2015. Face à ces constats-là, il n'y a qu'une réalité, et elle est celle qui a été annoncée même déjà dès 2011 par l'Agence internationale de l'énergie, c'est que, d'ici 2017, on ne peut plus ajouter d'infrastructures pétrolières et gazières si on veut limiter le réchauffement planétaire à 2 °C. Donc, si nos gouvernements sont sérieux dans leurs intentions de lutter contre les changements climatiques, de respecter l'accord de Paris, on ne peut plus ajouter d'infrastructures pétrolières et gazières, il faut que le Québec tourne le dos aux combustibles fossiles et se lance à 100 % dans les énergies renouvelables.

Or, le projet de loi actuellement qu'on nous propose, le projet de loi... Or, le projet de loi n° 106 propose une transition énergétique et en même temps une loi sur les hydrocarbures pour permettre et ouvrir la porte à l'exploitation pétrolière et gazière au Québec. C'est pourquoi justement le front commun demande très clairement que soit retirée la dimension de la loi sur les hydrocarbures de l'intérieur du projet de loi n° 106, et ce, non pas de manière momentanée, mais bien que soient également suspendues l'exploration et l'exploitation pétrolières au Québec. Et là il va falloir que le gouvernement du Québec se dote d'une véritable loi sur la transition énergétique, pas seulement une loi qui va créer une structure et qu'il n'y aura pas nécessairement de niveau contraignant à cette structure-là. Il faut une loi qui va permettre de s'assurer que le gouvernement du Québec va atteindre ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre. Et, comme on le sait, actuellement, il n'est pas en voie d'atteindre les objectifs pour 2020, pour 2030 et pour 2050. Il va falloir que cette loi-là mette... elle ait un mécanisme de reddition très clair, qu'elle mette également à profit... et que chacun des ministères collabore, que ce soient les ministères importants de l'Énergie, des Transports, des Finances de l'aménagement urbain, et actuellement ce n'est pas le cas.

Le Québec doit être parmi les leaders. Comme la Norvège s'est donné un objectif d'avoir tous les véhicules électriques d'ici 2030, le Danemark et la Suède se sont donné des objectifs de se départir des combustibles fossiles d'ici 2050, il faut que ça, ce soit dans le projet de loi du gouvernement du Québec : des objectifs pour 2030 dans le pétrole, dans la diminution également du gaz, choses qu'on n'a pas actuellement, et des objectifs globaux pour la consommation d'énergie. Donc, face à ça, il faut absolument que le Québec mette clairement dans sa loi qu'il y a des cibles pour 2020, 2030 et 2050 et qu'on soit rassuré qu'il les atteigne, parce qu'actuellement le projet de loi ne permet aucunement de rassurer les groupes environnementaux et les citoyens. Merci.

Mme Massé : Merci. Karel.

M. Mayrand (Karel) : Merci. Karel Mayrand, Fondation David-Suzuki. Alors, dans le fond, j'aimerais revenir à l'image du début, qui était celle d'un cheval de Troie. On est devant une situation où on a mis un projet de loi sur les hydrocarbures dans un projet de loi sur la transition énergétique, qui est un peu une situation comme si on avait adopté une loi pour lutter contre le tabagisme puis qu'en même temps on déployait des mesures pour favoriser la culture du tabac au Québec, ce qui est en soi un non-sens.

Alors, c'est pour cette raison-là qu'on doit scinder le projet de loi en deux parce qu'il y a un large consensus au Québec pour aller vers la transition énergétique autant du côté des groupes environnementaux, de la société civile, des milieux d'affaires, alors que, du côté du projet de loi sur les hydrocarbures, on se retrouve devant une situation où il n'y a pas d'acceptabilité sociale. On a un projet de loi qui est mal ficelé, qui est incomplet et qui doit être retiré et déposé en bonne et due forme. Pour l'instant, en fusionnant les deux projets de loi en un seul projet de loi, on se trouve à prendre en otage le dossier de la transition énergétique en faisant porter un débat presque entièrement sur la question des hydrocarbures, alors qu'on devrait être en train d'aller de l'avant. Il n'y a aucune urgence de passer un projet de loi sur les hydrocarbures en ce moment, et, si ça prend le temps de le faire séparément, il faut se donner le temps d'aller étudier en détail ce projet de loi là, mais ne pas retarder le projet de loi sur la transition énergétique.

Alors, je conclus en réitérant tout ce que mes collègues ont dit auparavant : Il faut scinder ce projet de loi là et il faut aller résolument vers une transition énergétique et donner du muscle au projet de loi sur la transition énergétique. Merci.

Mme Massé : Merci. Martine.

Mme Ouellet : Oui. Bonjour. Moi, je suis en appui d'une cinquantaine de groupes et une centaine de municipalités qui ont voté des résolutions municipales. Il faut absolument retirer la section des hydrocarbures du projet de loi n° 106. En fait, on parlait de cheval de Troie, moi, j'ai envie de vous parler de mammouth de Troie, parce qu'on parle de sept articles sur 10 qui sont reliés à la section des hydrocarbures, puis, dans le fond, c'est comme si Philippe Couillard tentait de faire du chantage, une espèce de marchandage de dupe, en disant : Bien, il faut que vous acceptiez... Vous voulez avoir la partie, là, sur les hydrocarbures, le bonbon, bien, il faut que vous avaliez la pilule de la loi sur les hydrocarbures. C'est inacceptable. C'est un mépris envers les citoyens et envers les groupes, et je vous parle aussi de la forme : dépôt du projet de loi au mois du juin, à la toute fin de la session parlementaire, convocation en plein milieu de l'été. Les groupes, ce sont souvent des bénévoles qui sont à l'intérieur de ces groupes-là. Ils ont à peine le temps de se préparer puis, en plus, ils n'ont même pas invité tous les groupes qui étaient intéressés à participer. Donc, une sélection très claire qui a été faite des groupes.

Donc, sur la forme, sur le fond, c'est totalement inacceptable et, en plus, le PLQ fait complètement fausse route. Ce n'est pas vers les hydrocarbures qu'il faut aller, c'est vers les énergies renouvelables, l'électricité verte et l'électrification des transports, et c'est là que le Québec a toutes ses compétences, et c'est là qu'on a de la création d'emplois. Donc, voilà, je pense que c'est important, l'appui aux groupes vraiment qui sont sur le terrain.

Mme Massé : Merci. Alors, effectivement, je pense qu'on n'a plus à le redire, là, il faut scinder ce projet de loi là. Il ne faut pas attendre, il faut le faire maintenant. Il faut concentrer nos énergies sur la transition énergétique, justement, pour nous assurer qu'on va aller au fond de ce qui est là-dedans, parce que là l'urgence, c'est, bien sûr, et plusieurs groupes viendront nous le dire, de dire non aux hydrocarbures, mais, en même temps, il est temps, et nous sommes même en retard, d'enclencher le processus rapidement de transition énergétique.

Alors, on est coincés. Le gouvernement Couillard nous a coincés en plein été. La commission parlementaire, les auditions ont lieu avant la reprise parlementaire. Disons qu'on n'est pas très fiers de ce gouvernement-là sur celle-là.

La question de l'acceptabilité sociale, c'est sur le processus, mais aussi, imaginez, on aborde des questions de territoires. Il est même question d'expropriation, et les autochtones n'ont même pas été consultés une minute. Ils ne sont même pas invités en commission parlementaire. Comment pouvons-nous avoir une acceptabilité sociale, alors que les traités ancestraux, il n'y a pas d'ambiguïté, quand il est question des territoires, avant d'écrire un projet de loi, tu t'assoies avec les Premières Nations, surtout quand, dans ce projet de loi là, et on le voit dans les articles concernant la loi sur les hydrocarbures... donne le droit d'expropriation? Les droits commerciaux deviennent supérieurs à nos droits collectifs. Qu'en sera-t-il face aux peuples des Premières Nations?

Alors, nous demandons au gouvernement Couillard de, dès maintenant, annoncer qu'il va scinder ce projet de loi là pour nous permettre, à nous, parlementaires, de faire notre travail avec les groupes, d'étudier la transition énergétique et donc de bonifier la dimension transition énergétique pour ramener le Québec dans le XXIe siècle et non pas dans le XIXe, tel que ce projet de loi là le maintient.

Le Modérateur : Oui, il va y avoir une période de questions sur le sujet de la conférence de presse uniquement. Les députés seront disponibles à l'extérieur pour répondre à d'autres questions. M. Cormier.

M. Cormier (François) : ...Radio-Canada. On cite souvent les pays scandinaves, à quel point ils sont avancés, à quel point ils vont de l'avant. Là, si je comprends bien, au niveau de la dépendance au pétrole, on aimerait imiter les pays scandinaves, mais est-ce qu'on est… Ma question, ce n'est pas : Est-ce qu'il le faut?, c'est : Est-ce qu'on est prêts? Est-ce qu'on est prêts au niveau des infrastructures? Est-ce qu'on est prêts à le faire? Est-ce qu'on pourrait vraiment, demain matin, fixer les mêmes objectifs aussi rapidement que les pays scandinaves? Parce qu'on n'a pas l'impression ici qu'on a les infrastructures ou même que la population nécessairement est prête à faire le pas tout de suite.

M. Bélisle (André) : Bien, écoutez, je pense qu'il faut aussi revenir un peu sur l'histoire du Québec, là. Depuis le milieu des années 90, la population du Québec a clairement dit qu'il fallait tourner le dos aux énergies redoutables et ouvrir la porte aux énergies renouvelables. Alors, ça, on le sait. Maintenant, on sait comment faire ça, on a des exemples ailleurs dans le monde, on peut le faire. Ce qui manque, c'est la volonté. Ce qui nuit, c'est aussi tous les efforts de lobbyisme qui se font derrière des portes closes pour essayer d'influencer le gouvernement dans le statu quo. On ne peut pas se payer ce luxe-là. Et, en plus, pour l'économie et le progrès au Québec, les énergies vertes, c'est incomparable. Alors, il faut aller dans ce sens-là, on a tous les moyens, on a les compétences. Le Québec a quand même développé l'hydroélectricité mieux que n'importe qui dans le monde. On peut faire la même chose avec les autres énergies. Ce n'est pas un problème. C'est la volonté qui manque. Et nous, on est là pour encourager le progrès.

Mme Dupuis (Carole) : Complément de réponse. Je pense, quand on aborde ces sujets-là, on pense souvent aux nouvelles énergies, aux énergies renouvelables, comme le solaire, le biogaz, le biométhane. Ça a un rôle très important à jouer, très fondamental. Mais beaucoup plus fondamental que ça encore, c'est les cibles globales de réduction de la consommation d'énergie. Et ça, ça ne passe pas par le ministère de l'Énergie, ça passe par le ministère du Transport, qui investit encore des milliards pour augmenter nos réseaux d'autoroute au lieu d'investir… alors que Montréal est complètement sous-investie en termes d'infrastructures de transport collectif. Ça passe par le ministère du Revenu. Ça passe par l'écofiscalité. Quand le pétrole, quand l'essence se vendent pour quelques sous et que les consommateurs se précipitent sur les véhicules... les gros véhicules très énergivores, ça va complètement à l'encontre de ce qu'on essaie de faire. Et c'est pour ça qu'on demande une loi sur la transition énergétique et non uniquement une structure qui soutiendrait des projets louables, intéressants, de développement des énergies renouvelables, des choses comme ça, mais ce n'est pas là qu'est le coeur du problème. Merci.

M. Cormier (François) : Au niveau parlementaire, jusqu'à quel point est-ce que vous êtes… vous pensez être capables de convaincre le gouvernement de scinder le projet de loi? Je sais que Mme Vallée l'a fait avec un projet de loi il n'y a pas longtemps, là. Dans le fond, je ne veux pas vous mettre les mots dans la bouche. Jusqu'à quel point est-ce que vous pensez être capables de convaincre le gouvernement de scinder le projet de loi?

Mme Massé : Bien, ce matin, on a débuté la commission parlementaire, et les trois partis d'opposition, on a d'entrée de jeu exigé qu'on démêle ces deux projets de loi là pour nous permettre d'aller au fond des choses. Alors, moi, je pense que… Et là vous avez au Québec un regroupement de groupes de citoyens qui sont touchés, qui sont touchés par ce projet de loi là, de groupes écologistes qui réfléchissent depuis des années sur ces questions-là, des municipalités, des groupes autochtones, vous avez donc là l'expression de l'inacceptabilité sociale de l'intégration d'un projet de loi sur les hydrocarbures dans un projet de loi sur la transition écologique. Je ne sais pas qu'est-ce que ça prend à M. Arcand pour saisir que là, ce bout-là, il ne l'a pas. Et à mon sens, et c'est la question que je vais lui poser tout le long, c'est : Mais quel intérêt, donc, représente-t-il? S'il n'entend pas ces cris du coeur, s'il n'entend pas les Premières Nations qui disent au premier ministre du Québec : Vous ne nous avez même pas parlé avant de déposer ce projet de loi là, alors je ne sais pas qui il va écouter, sinon que les intérêts des pétrolières et des gazières. Et ça, bien oui, on est en voie de constater que les intérêts des pétrolières et des gazières sont assez bien servis dans ce projet de loi là.

M. Caron (Régys) : Oui, bonjour. Jusqu'à preuve du contraire, le Québec est encore largement dépendant du pétrole. Là, dans un passé récent, il y a des gens qui ont découvert un potentiel énergétique pétrolier sur l'île d'Anticosti, en Gaspésie. Est-ce que vous dites ce midi : Le Québec doit renoncer complètement à ces ressources-là puis importer?

Mme Dupuis (Carole) : Je prends beaucoup de place, mais c'est parce que je représente 130 comités citoyens partout au Québec. Alors, vous me pardonnerez de prendre la parole. Écoutez, le Canada produit plus de deux fois le pétrole dont on a besoin. Le pétrole est transigé sur un marché international. C'est un produit de commodité qu'on n'a absolument aucun intérêt particulier à acheter chez nous, à part les quelques emplois. Et on sait que le secteur pétrolier est un secteur qui crée très peu d'emplois. C'est un secteur intensif en capital et non un secteur intensif en main-d'oeuvre. Donc, le fait… Nous, on ne dit pas : Fermons les robinets demain matin. On dit, et le gouvernement lui-même le dit de toute façon : Le Québec consomme à peu près 300 000 barils par jour de pétrole brut. En 2030, moins 40 %, si ma mémoire est bonne, ça fait 180 000 barils de pétrole brut. Ce n'est pas grand-chose. Puis à l'horizon de 2050, ça devrait être encore beaucoup moins. Pour mettre les choses en perspective, Énergie Est transporterait 1,1 million de barils de pétrole brut. Alors, si on parle de consommer 180 000 barils de pétrole brut au Québec à l'horizon 2030, on ne parle pas d'une consommation majeure qui justifierait de détruire nos milieux ruraux, et même nos milieux urbains, et nos communautés, et notre eau potable, et la capacité que les citoyens ont de jouir de leur propriété en toute tranquillité sans savoir qu'il y a des pétrolières qui ont un droit d'accès prépondérant, qui peuvent venir n'importe quand, et que, si le citoyen refuse de négocier, c'est le tribunal qui va trancher en faveur des pétrolières. Il n'y a pas de justification à aller là-dedans, ni économique, ni scientifique, ni sociale.

M. Caron (Régys) : Le ministre invoquait l'intérêt public ce matin justement en parlant d'expropriation. Donc, pour vous, l'intérêt public, là, il n'est pas là, là. On enterre la filière gaz, pétrole. C'est ça, l'intérêt public que vous dites.

Mme Dupuis (Carole) : C'est ça, l'intérêt public, exactement. Et vous... Je ne sais pas si vous avez pris connaissance de la lettre ouverte du président de la Chambre des notaires, qui est parue dans un quotidien le 11 août dernier. Il le dit textuellement, que ces mécanismes d'accès prépondérants et d'expropriation ne serviraient pas l'intérêt public, mais bien les intérêts privés de quelques compagnies.

M. Caron (Régys) : Bon. J'aurais une question pour les parlementaires maintenant.

Mme Massé : Attendez un petit peu. Il y a l'AQPL qui voudrait bonifier cette réponse-là.

M. Caron (Régys) : Oui, M. Bélisle.

M. Bélisle (André) : Chose importante. Regardez, votre question sous-entend qu'il y a peut-être un avantage économique sur la question environnementale.

M. Caron (Régys) : C'est ce qui invoqué.

M. Bélisle (André) : Il y a zéro avantage. Au contraire, on recule.

Sur l'aspect économique, bon, premièrement, on est loin, loin, loin d'avoir quelque certitude que ce soit qu'il y ait du pétrole, mais, d'un autre côté, si on réduit notre consommation de pétrole sur une base strictement économique, c'est de l'argent qu'on ne gaspille pas, c'est de l'argent qu'on ne brûle pas, c'est de l'argent qui reste disponible pour autre chose. Et, si on va vers l'électrification des transports, on changerait le pétrole pour l'électricité, et ça, c'est de l'argent du Québec qui reste au Québec pour améliorer notre environnement puis créer de l'emploi. Dans ce sens-là, c'est beaucoup, beaucoup plus intéressant.

M. Caron (Régys) : Question pour les parlementaires. Le gouvernement nous plaidait ce matin qu'il y a eu des ententes de faites entre les partis d'opposition, le Parti québécois, la CAQ, Québec solidaire, quant aux groupes qui seront entendus. Alors, tout le monde... En plus, on a convenu de faire des consultations particulières et non pas des consultations publiques. Là, aujourd'hui, on entend : Il n'y a pas assez de groupes qui sont entendus. Il n'y a pas une contradiction là-dedans, Mme Ouellet?

Mme Ouellet : Bien, écoutez, moi, des informations que j'ai, c'est que les demandes ont été beaucoup plus larges que ce qui a été accepté, et, vous le savez, le gouvernement est majoritaire...

M. Caron (Régys) : Oui, mais les partis d'opposition ont consenti aux groupes qui sont entendus, nous dit-on.

Mme Ouellet : Bien, moi, ce que j'ai comme information, c'est que les demandes avaient été beaucoup plus larges, puis je pense que ça peut être confirmé par les groupes, et que ça n'a pas été accepté par le Parti libéral. Et donc on peut toujours proposer, mais c'est eux qui disposent.

Et, peut-être, j'aimerais ça, moi, revenir sur votre autre question, juste renchérir sur André Belisle. Quand vous parliez de projets intéressants, bien, en fait, ce qu'on se rend compte, en termes d'hydrocarbures — vous parlez de l'île d'Anticosti en particulier — ce qu'on se rend compte avec les nouvelles informations qui sont sorties, Anticosti, même économiquement, il n'y a rien à faire avec ça, là. C'est 191 $ le baril, le point, le seuil de rentabilité. Ça fait qu'il faut faire attention quand on dit «des projets intéressants». Effectivement, il n'y a aucune démonstration que ce soit rentable économiquement. On sait qu'au niveau environnemental c'est problématique et, au niveau de la création d'emplois, l'efficacité énergétique, l'économie d'énergie, les énergies renouvelables puis l'électrification des transports, c'est bien plus créateur d'emplois que n'importe quel projet d'hydrocarbures. Je pense que c'est important de le mentionner, qu'au niveau économique, les alternatives sont beaucoup plus intéressantes que le développement économique du siècle dernier.

M. Caron (Régys) : Oui, Mme Massé.

Mme Massé : Bien, absolument, là. Sur le dernier élément, puis moi, je pense qu'il faut arrêter d'acheter le discours du gouvernement, qui répète et répète que c'est la place, les hydrocarbures, le gazier, où on peut développer de l'emploi, moi, je pense qu'il y a beaucoup d'autres places, Martine l'a bien défini.

Ce que je veux dire par rapport à la présence des groupes, les groupes qui sont ici, les groupes... les 21 autres groupes qui ont demandé à être là et qui n'ont pas été acceptés, nous, à Québec solidaire, nous les avions proposés d'entrée de jeu. Mais ce gouvernement-là, il est majoritaire, que c'est que vous voulez que je vous dise? Alors, il décide puis il dit : O.K., on va faire deux jours — au début, c'était ça — deux jours d'auditions dans lesquels une majorité de ces groupes-là ne sont pas entendus et même, concernant le réseau de vigilance hydrocarbures, concernant d'autres groupes, Greenpeace, je crois... vont devoir partager, parce que le front a été invité, mais vont devoir partager la même heure à quatre groupes, parce qu'il n'y a pas assez de place pour eux autres.

Alors, moi, ce que je pense, là, c'est que le gouvernement a essayé de récupérer en cours d'été, pensant que nous ne serions pas assez vigilants et vigilantes pour débusquer ce qui était en train de se passer. On s'en est rendu compte. Quelques groupes ont été invités durant l'été, mais je pense que là tous les groupes sont clairs : on veut que ce projet-là soit scindé pour nous concentrer sur la transition énergétique.

M. Caron (Régys) : Merci.

Mme Massé : Merci beaucoup.

Des voix : Merci.

(Fin à 12 h 45)

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