(Onze heures trente-trois minutes)
M. Dutrisac (Robert) : Ce que
je voulais savoir, c'est : Quels sont les… Vous semblez reprocher quelque
chose au ministre. Le ministre a dit : Bien, moi, j'ai fait ce que je
devais faire en obtenant des lettres, etc. Manifestement, il y a un manquement
de la part de l'ex-employé. Il a violé les directives. C'est quoi, les recours?
Qu'est-ce que le ministre devrait faire?
Mme
Maltais
: Ce
que je reproche au ministre et au premier ministre, c'est qu'aujourd'hui on n'a
plus de recours. Le délai d'un an pendant lequel les règles d'après-mandat
s'appliquent est écoulé. Il aurait fallu, du moment où ils ont vu qu'il s'en
allait chez Rémabec, entreprise forestière qui a des contacts réguliers avec le
ministère, demander soit à l'employé… exiger des explications, pas trouver ça
normal. D'abord, d'après moi, l'employé n'aurait jamais dû aller là, d'après
les règles. Et ensuite, si l'employé insistait pour y aller, si l'employé
acceptait l'emploi, ce que le ministre devait faire immédiatement, c'est
demander un avis ou une enquête du Commissaire à l'éthique.
M. Dutrisac (Robert) : O.K.
Donc, c'était la responsabilité du ministre, de l'employeur.
Mme
Maltais
:
Nous-mêmes, on l'aurait su, on n'aurait pas pu le demander. La responsabilité
de demander au Commissaire à l'éthique d'agir, elle appartient au ministre et
au premier ministre. Et, quand je disais : Eux seuls peuvent le faire, c'est
véritablement ça, eux seuls pouvaient.
M. Bergeron (Patrice) :
Est-ce que vous avez la preuve, vous, que, du moment où il a quitté le cabinet
du ministre de la Forêt, il est passé directement chez Rémabec?
Mme
Maltais
:
Dans le même mois.
M. Bergeron (Patrice) : Dans
le même mois.
Mme
Maltais
: En
un mois, tout ce qui s'est passé dans ce cabinet-là est assez impressionnant.
Dans le même mois. Avril, mai, premier geste : Rémabec a une scierie, ensuite
de ça Pyrobiom obtient sa subvention de 3 millions de dollars pour aller à
un projet qui est dans la scierie de Rémabec, directement dans la scierie de
Rémabec. Alors, Yvon Nadeau quitte pour aller à Pyrobiom. Pierre-Olivier
Lussier quitte pour aller chez Rémabec. Et puis après ça, un an plus tard,
qu'est-ce qu'on apprend? Rémabec achète Pyrobiom. Donc, il y a un malaise
devant cette situation-là, puis seul le Commissaire à l'éthique peut
interpréter les règles et pourrait nous dire : C'était correct ou pas?
Puis là les délais sont finis.
M. Lecavalier (Charles) :
Pourquoi le Commissaire à l'éthique ne peut pas revoir ces situations-là,
revenir là-dessus et étudier, même s'il est trop tard pour faire une…
Mme
Maltais
:
Parce que lui-même, le Commissaire à l'éthique, doit obéir à des règles.
Lui-même obéit aux règles qui sont les règles d'après-mandat : un an.
Alors, voilà, c'est pour ça que je demande à tout le moins que M. Lessard nous
dise pourquoi il a trouvé ça normal. Quand il dit… Il a déposé une lettre, ce
matin, de la part de l'attaché de presse, qui disait : Je m'engage à
respecter les règles. C'est parce que, s'il s'engage à respecter les règles en
allant chez Rémabec, c'est qu'il considère à ce moment-là que 26.1, qui dit
qu'on ne peut pas accepter un poste, ne tient pas le coup puis qu'il tombe à
26.2, qui dit : Je n'en parlerai pas. Mais, au vu même de l'emploi qu'il a
occupé avant, quand il était au cabinet, et après, quand il est allé chez
Rémabec, à notre avis, à notre avis, c'était une infraction à 26.1.
M. Dutrisac (Robert) :
…convaincu que… Bon, moi, je comprends la règle d'après-mandat qui dit qu'il y
a une période d'un an, là, pour le personnel politique, mais ça, cette
période-là, c'est aussi une période, comment dire, de péremption, là, en tout
cas, de prescription.
Mme
Maltais
: Un
délai de prescription.
M. Dutrisac (Robert) : C'est
un délai de prescription. C'est aussi un délai de prescription pour le commissaire,
cette année-là?
Mme
Maltais
:
Oui, oui, tout à fait. Les règles ne s'appliquent que pendant un an, là. Il ne
peut pas enquêter sur des règles qui ne s'appliquent plus. Non, il ne peut pas.
Ce qu'on note clairement, c'est qu'il ne peut pas y aller vraiment.
M. Bergeron (Patrice) : Et le
ministre ne pouvait ne pas savoir?
Mme
Maltais
:
Bien, écoutez, il devait... Je ne comprends pas s'il ne savait pas, là. Quand
tu quittes un emploi, tu dis, en général, à ton employeur où tu t'en vas.
Journaliste
: Bien, ça
a l'air d'avoir mal fini entre les deux.
M. Bovet (Sébastien) : Oui, M.
Lessard dit qu'il a congédié M. Lussier.
Mme
Maltais
: Je
ne suis pas au courant des choses. Ça n'enlève pas la responsabilité à ce
moment-là, du moment où il a appris qu'il allait chez Rémabec, de faire
appliquer les règles d'après-mandat. Ça n'enlève pas à M. Lessard
l'obligation d'appliquer les règles.
M. Dutrisac (Robert) : De
toute façon, c'est une entreprise qui est connue par le ministère.
Mme
Maltais
: Tout
à fait, c'est une grosse entreprise forestière. Le ministère des Forêts
transige... c'est-à-dire, il débat, discute avec Rémabec. Puis en plus Pyrobiom
avait le projet dans Rémabec. Donc, il y avait des échanges sur ce projet-là
aussi. Yvon Nadeau était dans le coin, il y avait M. Lussier. Ça commence à
faire beaucoup.
M. Bergeron (Patrice) : Quand
vous dites que tout s'est passé dans un mois, à peu près, est-ce que vous avez
l'impression...
Mme
Maltais
: En
deux mois.
M. Bergeron (Patrice) : ...en
deux mois, est-ce que vous avez l'impression que tout était assez bien
orchestré pour que ça se passe dans cet ordre-là?
Mme
Maltais
: Je
ne sais rien. Je sais juste que je regarde les faits puis je fatigue. Puis je peux
vous dire une chose. On s'est demandé : Est-ce qu'on a des attachés de
presse qui sont allés directement dans une entreprise, dans un secteur? C'est
non parce que les règles d'après-mandat, c'est sérieux. Puis même je connais
des gens qui ont bûché pendant un an de temps, là, parce que, quand on perd le
pouvoir, là, tu as 50, 60... non, 50, 60, ça, c'est quelques cabinets, bien,
jusqu'à 200, 300 personnes qui se cherchent des emplois. Mais les règles
d'après-mandat, elles sont sérieuses, elles sont dures. Puis il y a des gens
qui ont bûché pour retrouver des salaires, retrouver des revenus. C'est pour ça
qu'il y a tant d'anciens attachés politiques qui vont dans des entreprises, en
attendant, là, de relations publiques, tout ça, parce que les règles sont très
sévères. C'est injuste pour tous ceux et celles qui suivent les règles.
M. Bovet (Sébastien) : Donc,
qu'est-ce que le Commissaire à l'éthique va nous apprendre, finalement?
Mme
Maltais
:
Bien, moi, ce qui m'intéresse, c'est qu'à la fois le Commissaire à l'éthique et
le Commissaire au lobbyisme vont travailler. Et j'espère qu'ils vont utiliser l'article 94
du code, qui dit qu'ils peuvent travailler ensemble et faire des enquêtes
communes.
M. Bovet (Sébastien) : Mais
ils ne pourront pas enquêter sur tout, là, finalement, si le délai de
prescription est passé.
Mme
Maltais
:
Bien, si tu enquêtes sur Pyrobiom, tu vas te ramasser à enquêter peut-être
aussi sur Rémabec parce que plus on dévoile des choses, plus on indique au
commissaire des endroits où il doit aller évaluer ce qui s'est passé, analyser.
Il ne peut pas donner une infraction, si c'est le cas, aux règles
d'après-mandat à M. Lussier, mais peut-être que tout ça va permettre de faire
qu'il fouille un peu plus la situation qui s'est passée autour de MM. Lessard,
Nadeau et du ministère des Forêts. Merci.
(Fin à 11 h 39)