(Neuf heures trente-deux minutes)
M. Champagne (Martin A.) :
Bonjour. Je suis ici ce matin pour exprimer ma solidarité envers les
technologistes médicaux. D'abord, il faut savoir que le laboratoire est au
coeur de la vie hospitalière. En fait, il sert pour le diagnostic et le
traitement de tous les patients. Tout le monde, dans notre vie, on a des
analyses sanguines, ou des analyses d'urine, ou des biopsies. Présentement, les
laboratoires du Québec offrent un service de qualité qui est efficace à la
grandeur du Québec.
Si on fait des changements, il faut être
sûrs que ceux-ci amènent une amélioration au niveau des services. Les médecins
spécialistes, les biochimistes cliniques, les experts de laboratoire ont mis en
garde à plusieurs reprises le ministère de la Santé contre la précipitation
dans un dossier aussi complexe qu'Optilab. Nous avons offert notre collaboration
à de multiples reprises. Présentement, le projet semble aller de l'avant, et on
exprime beaucoup d'inquiétudes parce qu'on a l'impression que les choses ne
sont pas en place encore pour assurer la sécurité de nos patients.
La Modératrice
: Merci.
Maintenant, M. Yvon Soucy, préfet de la MRC de Kamouraska et vice-président
de la FQM.
M. Soucy (Yvon) : Bonjour
à tous. Je joins ma voix aujourd'hui à celles de centaines de travailleurs en
région qui craignent de perdre leur emploi avec la réforme Optilab annoncée par
le ministre de la Santé la semaine dernière. En tant que préfet de la MRC de
Kamouraska et vice-président de la Fédération québécoise des municipalités, je
suis particulièrement inquiet de voir de telles décisions être prises sans
tenir compte des impératifs prévus à la loi pour assurer l'occupation et la
vitalité des territoires. Des décisions de ce type ont pour effet de
centraliser l'administration publique et parapublique dans des centres urbains
au détriment des communautés régionales du Québec.
La FQM demande donc au gouvernement de
mettre sur pied un comité permettant de déterminer l'impact du projet d'Optilab
sur l'occupation et la vitalité des communautés touchées. Nous tenons également
à ce que la FQM puisse y être représentée au nom des
1 000 municipalités et municipalités régionales de comté qu'elle
représente. Enfin, nous demandons que le gouvernement du Québec reporte
l'implantation du projet Optilab au moins jusqu'à ce que les travaux du comité
soient menés à terme et rendus publics.
Pour des régions comme la mienne, je suis
du Bas-Saint-Laurent, des pertes d'emplois de qualité comme celles occasionnées
par le projet Optilab peuvent avoir des conséquences lourdes et insoupçonnées.
Le ministre Barrette doit prendre acte des critiques provenant des régions du
Québec et imposer un moratoire sur le projet Optilab comme l'ont demandé
clairement des centaines de municipalités réunies en assemblée générale de la
fédération samedi dernier. Merci.
La Modératrice
: Merci.
Maintenant, Mme Carolle Dubé, présidente de l'APTS.
Mme Dubé (Carolle) :
Merci. M. Soucy et Dr Champagne viennent de vous présenter les conséquences
dans nos régions, les conséquences pour la santé de la population de ce projet
Optilab. Je vais vous parler, moi, des conséquences de ce projet-là sur les technologistes
médicaux qui oeuvrent dans les centres partout à travers la province.
Donc, vous savez probablement que le
projet Optilab, c'est dans les discussions du ministère depuis de nombreuses
années. Depuis toutes ces années-là, comme organisation syndicale, on demande
au ministère, on demande à nos employeurs de nous informer, de nous consulter
sur ce projet-là. Je vous dirais que ça a été, pendant ces années-là, à peu
près un silence radio. La semaine dernière, partout en même temps au Québec,
les établissements ont convoqué les syndicats à 11 heures pour parler aux
technologistes à 11 h 30. C'est une première, ça. Je n'ai jamais vu
ça, moi, un projet de cette envergure-là sur lequel le ministère réfléchit tout
seul dans son coin depuis plusieurs années, tout d'un coup il y a urgence en la
matière pour rencontrer, partout en même temps dans la province, les
intervenants, les syndicats.
Dans le cadre de ces rencontres-là, nos
membres ont appris plusieurs choses. Ils ont appris, entre autres, qu'à partir
du 1er avril il y aurait encore une fois un changement d'employeur. Les
gens ont appris qu'ils seraient probablement transférés, délocalisés. Et les
gens ont aussi appris que ce projet-là allait probablement occasionner des
pertes d'emploi... pas probablement, aurait apporté des pertes d'emplois de
l'ordre de 10 % à 20 %. Ça, sur 5 000 technologistes, là, ça
veut dire des pertes possibles de 500 à 1 000 postes de
technologistes médicaux.
Je vous dirais que, sur le terrain, bien,
ça crée énormément d'inquiétudes, ça crée aussi de la panique chez les
technologistes médicaux. On leur annonce qu'à partir du 1er avril il y
aura cette réforme-là, qu'ils vont changer d'employeur pour une réforme qui va
s'appliquer dans les trois et cinq prochaines années. Donc, ça, là, on inquiète
les gens aujourd'hui sur un projet qui va trouver application dans trois ans
puis dans cinq ans.
Actuellement, au Québec, on a des maisons
d'enseignement qui forment des technologistes médicaux par centaines. On a des
jeunes qui partent des régions pour venir à Québec, pour venir à Montréal
prendre une formation, et ces gens-là retournent dans leur région par la suite
pour apprendre, bien, que les possibilités d'emploi, là, à Rimouski, puis à
Gaspé ou à Chicoutimi, bien, on n'est plus dans ça. On n'est plus dans ça parce
que le ministère met en place un projet qui va totalement changer la donne dans
les services.
Je vous dirais que les gens, par
centaines, je vous dirais, plusieurs technologistes m'ont fait part de leurs
inquiétudes. Les gens sont en colère, les gens sont très inquiets. Et, vous
savez, quand on étudie pour être technologiste médical, bien, on étudie pour
travailler dans le réseau de la santé, puis on a à coeur les soins, et on a à
coeur le travail que l'on fait. Et là, actuellement, les gens se sentent totalement
dévalorisés, et on ne tient pas compte de leur expertise et de leurs connaissances,
et ça, je vous dirais que c'est pris très durement pour les gens.
Donc, M. Barrette, je vous annonce aujourd'hui
qu'on va passer dans un autre mode aussi à l'APTS. Je vous annonce qu'on ne
vous laissera pas traiter nos gens de la façon dont vous le faites. Nos gens ne
sont pas des pions qu'on peut bousculer, qu'on peut démobiliser et déplacer
comme ça sans rien dire, et on va agir, M. Barrette. À l'APTS, je vous dis,
on a pris la décision de changer de mode de contestation. En fait, on va passer
dans un mode de contestation juridique. On a des recours qui sont prévus. On a,
au Québec, une loi qui s'appelle le Code du travail, qui vient encadrer les
relations patronales-syndicales. Parce que, là, on n'est plus du tout dans ça,
là. Là, actuellement, on a un ministère puis on a des employeurs qui ne
tiennent pas compte du contexte syndical puis des lois qui nous régissent. On
va entreprendre des recours en vertu du Code du travail. M. Barrette, je
vous rappelle qu'on a une convention aussi qu'on a signée ensemble. Dans cette
convention-là, il y a des dispositions qui permettent, qui nous obligent, et
qui vous obligent, et qui obligent des employeurs à s'asseoir avec les
organisations syndicales quand on est dans une transformation, et là on est
dans ça, dans cette transformation-là. Donc, ça aussi, on a des dispositions
qui vont nous permettre de contester ça et on va l'appliquer.
Vous savez, dans le réseau de la santé,
là, des réorganisations qui impliquent des mouvements de personnel, on en a
vécu plus qu'une. Je vous dirais qu'à chaque fois on a été capables de
s'asseoir, de participer à cette consultation-là, de trouver des solutions ensemble
pour faire face aux nouvelles réalités. On est capables de faire de le faire, M. Barrette.
Il faut s'asseoir avec les organisations, il faut s'asseoir avec les gens qui
travaillent sur le terrain, il faut écouter le monde. Ce matin, là, on a
quelqu'un qui vient de la Fédération des municipalités, on a Dr Champagne,
qui est ici pour parler au nom des médecins, on a nos députés qui sont ici, je
suis là pour représenter 5 000 technologistes médicaux qui travaillent
dans le réseau. M. Barrette, on vous demande de nous écouter. Merci.
La Modératrice
: Merci,
Mme Dubé. Et maintenant, député de Mercier et porte-parole en santé pour
Québec solidaire, Amir Khadir.
M. Khadir
:
Alors, très brièvement, moi, ce matin, je veux intervenir à la fois à titre de
député de Québec solidaire, mais aussi à titre de médecin spécialiste de
laboratoire. Je suis microbiologiste-infectiologue, alors, comme mon collègue
Dr Champagne, je m'occupe, comme lui, il s'occupe d'hématologie, d'une des
trois dimensions principales des laboratoires, c'est-à-dire les laboratoires de
microbiologie. Et ce qu'est en train de faire, comme on l'a vu, le ministre de
la Santé et le gouvernement libéral... Et ce qui est plus pathétique dans tout
ça, c'est que c'est deux médecins qui détiennent les principaux pouvoirs au
sein de ce gouvernement, dont le premier ministre Couillard, qui est lui-même
un médecin. Alors c'est d'autant plus révoltant de voir qu'ils agissent avec
autant d'inconsidération à la fois pour les travailleuses et les travailleurs
concernés, à la fois pour les régions touchées, comme a témoigné M. Soucy,
en termes d'accessibilité, mais à la fois également pour les principes qui
gouvernent, les principes modernes de services à la population et de services
médicaux tournés alentour de concepts comme le «point of care», qui fait que,
depuis les 20 dernières années — moi, je suis actif dans le
réseau — toute notre attention a été portée de s'assurer graduellement
de faire en sorte que les services sont organisés en fonction des patients à
l'endroit où le service est donné, le plus proche possible du patient, que ça
soit dans l'évaluation, dans le suivi, dans les traitements administrés, mais
également dans le diagnostic. En fait, l'idéal serait qu'on puisse, pour un
certain nombre de diagnostics, de manière légère, même faire les diagnostics au
chevet même des patients dans les endroits où ils habitent.
Or, Optilab, c'est quoi? Ça n'a peut-être
pas été mentionné. Optilab, c'est une terrible concentration des laboratoires
médicaux, des fois à des échelles inimaginables sur le plan du territoire,
hein? Des échantillons prélevés à Gaspé doivent maintenant se rendre, on a dit,
à Rimouski, je ne sais pas ça fait quoi, 300 kilomètres, 400 kilomètres,
sur des distances énormes, ou prenons le cas, par exemple, de la Montérégie ou
de la région de Lanaudière, Laval et Laurentides, qui sont regroupées. Je vous
rappelle, Lanaudière, Laval et Laurentides, c'est 1,3 million d'habitants.
Personne de sérieux dans le monde médical n'accepterait qu'on puisse affirmer
que concentrer le laboratoire diagnostique, les services diagnostiques de 1,4 million
d'habitants, ça correspond à la médecine moderne, ça correspond aux standards
des traitements modernes.
Donc, dans tout ça, le gouvernement agit
de manière tout à fait irresponsable et de manière tout à fait insensible à la
fois aux besoins de la population, de leur accessibilité, aux besoins des
régions d'avoir des emplois de qualité et une activité sociale, économique et
des services qui assurent la pérennité et la vitalité des régions, à la fois
pour les gens qui vont perdre leur emploi, comme en a témoigné Mme Dubé,
mais aussi simplement à la fois pour le simple bon sens et les principes
élémentaires de médecine contemporaine.
La Modératrice
: Merci,
M. Khadir. Et maintenant, pour conclure, la députée de Taillon et porte-parole
du Parti québécois en matière de santé et d'accessibilité aux soins, Diane
Lamarre.
Mme Lamarre : Alors,
bonjour. C'est certain que, dans le projet Optilab, de la façon dont le
ministre l'impose, avec précipitation, avec, je vous dirais, la culture du
secret, où on n'arrive pas à savoir ce qui va se passer, comment ça va se
passer, quelles sont les étapes, c'est ça qui préoccupe. Quand on entend les
gens, que ce soit Dr Champagne, que ce soit l'APTS ou que ce soit M. Soucy,
les gens comprennent qu'une certaine centralisation des laboratoires peut être
intéressante et apporter certaines économies, et on n'est pas contre ça. Mais
la façon dont le ministre l'impose, d'une façon complètement anarchique, d'une
façon où deux enjeux ne sont pas garantis, la sécurité et la traçabilité des
spécimens... On ne parle pas de transporter des petits gâteaux Vachon, on parle
de transporter des spécimens qui incarnent parfois un diagnostic, qui
représentent un diagnostic grave pour des gens ou un suivi particulier dont ils
auront besoin. Donc, cette notion de sécurité et de traçabilité des spécimens,
elle n'est pas garantie, actuellement. On n'a pas le profil, et ça, ça
préoccupe énormément les gens.
Et on se questionne aussi sur les pseudo-économies.
On a vu le ministre nous en annoncer des multitudes depuis qu'il est là sans
jamais se donner la peine après de les revalider. Alors, actuellement, il parle
parfois de 75 millions, 100 millions d'économies, mais les coûts de
transport, les pertes d'emplois, les pertes d'expertise locale dans les
régions, les délais au niveau des régions, les délais de diagnostic, le fait
qu'il y a des patients qui accompagnent… par exemple, les proches aidants qui
vont accompagner des patients vont devoir retourner deux fois pour avoir le
résultat le lendemain si l'échantillon a dû être envoyé d'Abitibi à Montréal,
eh bien, tout ça, ça n'est pas estimé, ça n'est pas évalué. Et, clairement,
nous, ce qu'on demande, c'est que l'INESSS, l'Institut national d'excellence en
santé et en services sociaux…
Vous savez, en fait, celui qui devrait
s'intéresser à ça, c'est le Commissaire à la santé et au bien-être. C'était
vraiment dans son mandat d'évaluer la pertinence des programmes, la pertinence
des décisions politiques et leur impact pour les patients, pour les citoyens,
pour les professionnels, pour les employés, pour les professionnels de la santé
qui sont impliqués, mais aussi les enjeux économiques. Et donc le ministre a
aboli le commissaire en nous promettant que, dans le fond, ses fonctions
seraient relocalisées au sein de l'INESSS ou de l'INSPQ. Alors, cette fois-ci,
c'est vraiment à l'INESSS que revient la responsabilité de documenter et de
garantir à la population, au niveau de la sécurité du transport, au niveau de
l'efficacité, au niveau des choix qui vont être faits, comment on décide que
35 % des technologues ou des examens vont continuer à se faire dans un
hôpital. On veut de la transparence à ce niveau-là. On veut comprendre les
décisions du ministre pour que les gens qui sont concernés, les professionnels
puissent guider, réorienter, corriger, et on veut donc que l'INESSS s'intéresse
à ça.
Et l'INESSS a aussi une dimension
d'évaluer les impacts économiques réels, les coûts, les coûts évités, mais
aussi les coûts ajoutés à cette façon de faire pour trouver le juste milieu et
faire en sorte qu'on ait vraiment la qualité, la sécurité des gens et des
économies réelles.
La Modératrice
: Merci,
Mme Lamarre. Pour la période des questions, on vous demande, par respect
pour nous invités, de rester sur le sujet, et de vous présenter, et d'adresser
votre question.
Mme Prince (Véronique) :
Bonjour. Véronique Prince, TVA. Bien, ma question s'adresse peut-être aux
acteurs du milieu, M. Champagne puis Mme Dubé. Je voudrais savoir,
juste pour comprendre, comme journaliste... Parce que ce projet-là, Optilab, a
débuté en 2011. Donc, ça a débuté sous le gouvernement Charest, ça s'est
poursuivi avec le gouvernement Marois, et là ça se poursuit avec le
gouvernement Couillard. Qu'est-ce qui fait que, là, ça devient particulièrement
critique et que vous sortez, vous avez besoin d'entreprendre des moyens
juridiques? C'est-u parce qu'il y a eu un genre d'accélération ou parce que
l'entente de départ a changé? Pourquoi?
Mme Dubé (Carolle) :
Bien, il n'y a jamais eu d'entente de départ. En fait, comme je disais tout à
l'heure, ça fait plusieurs années qu'on interroge le ministère parce que c'est
des travaux qui sont faits au niveau... cette réflexion-là, elle est faite au
ministère et qu'on interroge le ministère parce qu'il y a des choses qui
circulent dans les établissements. Nos gens nous interpellent, interpellent les
gestionnaires, ont très, très peu de réponses.
Ce qui justifie aujourd'hui qu'à l'APTS on
va entreprendre des recours, bien, c'est qu'officiellement, la semaine
dernière, les employeurs ont rencontré nos gens pour leur dire qu'Optilab
allait finalement se mettre en place par un changement d'employeur au 1er avril
et par l'annonce, sans qu'on ait une vision globale de ce projet-là... mais le
ministère et les établissements ont déjà identifié un pourcentage de pertes
d'emploi. On ne sait même pas sur quelle base c'est identifié. On ne connaît
même pas, en termes d'examens, ce qui sera réellement transféré d'un
établissement. Mais, surprise, ils sont capables d'évaluer, par exemple, le nombre
de postes qui seront abolis.
Donc, on a des processus qui sont prévus
dans nos conventions collectives quand on est dans des transformations qui
impliquent des mouvements de cette façon-là. Et, à partir du moment où les
employeurs nous annoncent officiellement ces transferts-là sans que ça ait fait
l'objet de consultations et de travail syndical... On a des dispositions, on a
une loi qui oblige les employeurs à travailler avec les organisations
syndicales. Ça ne se fait pas actuellement, c'est décidé par le ministre puis
imposé aux établissements. C'est comme ça que ça fonctionne actuellement avec M. Barrette.
Mme Prince (Véronique) :
Est-ce que vous seriez d'accord qu'à certains endroits il pourrait peut-être y
avoir quand même une centralisation? Est-ce que vous avez fait, par exemple,
des propositions au ministère pour dire : À certains endroits, on vous
donne raison, peut-être qu'effectivement on pourrait regrouper des
laboratoires, mais pas partout? Tu sais, y a-tu des endroits où il pourrait?
Mme Dubé (Carolle) :
Bien, pour pouvoir faire des propositions, comme vous dites si bien, bien, il
faut pouvoir s'asseoir puis pouvoir les présenter, ces propositions-là, ce
qu'on n'a même pas la chance puis l'opportunité de faire actuellement, contrairement...
Parce que des transformations puis de l'évolution technologique, dans notre
milieu, là, je ne dirai pas que c'est notre quotidien, là, mais c'est quelque
chose auquel on fait face régulièrement. C'est constant depuis toujours, ça
fait qu'on est dans ça. C'est pour ça que, dans nos conventions, on a des
moments de prévus pour discuter ensemble de changements technologiques, de
quand on doit se... Écoutez, dans les années 90, là, on a fermé sept
établissements à Montréal, on a transformé des établissements. Bien, on a été
capables de s'asseoir, les syndicats, pour trouver des solutions parce que
l'employeur s'est assis avec nous, nous a consultés, puis on a trouvé des
solutions pour faire face à ça. Là, on n'est pas dans ça, là. Même si ça fait
trois, quatre ans, cinq ans que ça se discute au ministère, il n'y a aucune
consultation, là. Ça fait que, oui, nos gens en ont, des choses à dire,
auraient probablement des propositions. On va en trouver, des solutions, mais,
pour ça, il faut qu'on soit consultés puis qu'on soit partie prenante.
Mme Prince (Véronique) :
Mais actuellement est-ce que vous seriez capables de dire s'il pouvait, à
certains endroits, y...
Mme Dubé (Carolle) : Sûrement.
M. Khadir
: Moi,
j'aimerais dire : Ça dépend c'est quoi, l'objectif. Si l'objectif du gouvernement
est uniquement faire des économies, oui, mais il faut admettre qu'à ce
moment-là il y a un coût, il y a un prix à payer. Le coût à payer, le prix à
payer, c'est : on diminue l'accessibilité, on diminue la rapidité de l'information,
donc on diminue la qualité du service. Parfois, la rapidité de l'information a
un impact sur le fait qu'on sauve un patient ou pas. Je pense aux hémocultures,
je pense aux INR, c'est le cas, je pense... Il y a un tas d'examens de
laboratoire qu'on a besoin de savoir le plus rapidement possible pour mieux
agir. Donc, ça dépend c'est quoi, l'objectif du gouvernement. Si c'est juste
épargner ici pour donner encore plus d'avantages à des compagnies minières, à
des banques et des rabais d'impôt, oui, c'est ça qu'il faut faire, il faut centraliser.
Si c'est pour offrir le meilleur service aux points où on offre les services
aux patients, le principe de «point of care», c'est excessivement important, puis
ça, ça entraîne des coûts, de la même manière que, comme société, on a accepté
de traiter nos patients qui ont des cancers puis à leur offrir le meilleur soin,
donc, sans égard aux coûts. On offre plein de traitements qui sont coûteux,
oui, mais ça dépend donc des priorités d'une société.
Là, le gouvernement, comme un matamore que
le ministre de la Santé est, agit sans considération pour aucun de ces
principes-là. Et sa seule vision, c'est une vision comptable. À la fin, je veux
faire des économies sans égard à tout ce qui peut arriver.
M. Vigneault (Nicolas) :
Nicolas Vigneault de Radio-Canada. En fait, Dr Barrette vient tout juste
de dire que ça va lui générer des économies de 75 millions et que, depuis
2011, il y en a, des consultations. Qu'est-ce que vous répondez?
M. Khadir
: Juste
une réponse à ça, là : Il n'est pas crédible, ce gouvernement-là. Des économies,
on lui a montré comment en faire dans le domaine de l'informatique juste dans
le domaine de la santé depuis des années. Il n'a rien fait de concret. Moi, ça
fait des années que je propose qu'on fasse des économies dans le coût des
médicaments en négociant mieux les prix. Là, il arrive avec un projet de loi
qui a un objectif 10 fois moindre que ce qui est accessible. Ce qui est
accessible comme économie, c'est 1,5 milliard. Comparez ça à ses
75 millions. Donc, la priorité du gouvernement est mal placée. On a besoin
de ces laboratoires-là dans les régions. Ça offre de bons emplois et de bons
services là où notre population vit, un point c'est tout.
M. Vigneault (Nicolas) :
Mais est-ce qu'effectivement il y en a, de la consultation?
M. Champagne (Martin A.) :
Bon, en 2011, le ministère a circulé auprès des médecins spécialistes experts
du laboratoire des listes d'analyse. Nous avons fait plusieurs recommandations.
Et pourtant le ministère, malgré tout, revient toujours avec la même liste de
2011, qui n'a jamais été améliorée, malgré nos suggestions.
Alors, le projet Optilab, en fait, c'est
qu'on considère qu'un laboratoire est une usine de parapluies qui va rouler
24 heures par jour, sept jours par semaine. Mais, dans la pratique des
faits, il y a des choses qui font qu'on ne peut pas retarder une analyse. Si
vous prenez un anticoagulant... 3 % des gens de 75 ans et plus
prennent des médicaments pour éclaircir le sang en raison de leur condition médicale.
On donne comme instruction au patient : Vous prenez votre médicament en
soirée ou en fin d'après-midi. Pourquoi? Parce que le patient a son prélèvement
le matin. Et, si l'anticoagulation est excessive, je peux toujours appeler,
quand j'ai le résultat sous la main, le patient pour faire les ajustements à sa
médication. Si le tube est parti puis il est analysé en plein milieu de la
nuit, et le résultat est un résultat qu'on appelle critique, en dehors des
valeurs thérapeutiques, qui va-t-on appeler? Est-ce qu'on va appeler le médecin
responsable du laboratoire? Le médecin du laboratoire va appeler un patient de
82 ans en plein milieu de la nuit pour lui dire : Regardez, là, je
vous ai tiré du lit, il ne faudrait pas prendre votre Coumadin ce soir parce
que vous avez un résultat critique, saignez-vous, etc.? Alors, il y a des
choses, effectivement, qui peuvent être transférées, mais qui n'ont pas de sens
d'un point de vue médical.
Pour répondre à votre question,
Mme Prince, il y a des analyses qui sont déjà en ce qu'on appelle la
hiérarchisation, mais il y a des analyses même spécialisées qui doivent
demeurer de proximité. Si vous êtes un centre où il se fait du traitement de la
leucémie, vous voulez faire les analyses et avoir la réponse en dedans de
quelques heures pour commencer le traitement adéquat à votre patient
rapidement. Vous ne pouvez pas envoyer le tube à Tombouctou puis attendre
48 heures alors que le patient peut développer des complications dans
l'attente de son traitement. Alors, c'est que, nous, on a offert plusieurs fois
notre collaboration au ministère de la Santé. Ces offres-là sont restées sans
écoute, le dossier n'a pas évolué. On a une très grande préoccupation en termes
de sécurité envers les patients puis je pense que le ministre Barrette a été
très mal conseillé à cet égard dans ce dossier-là par les gens avec qui il
travaille.
M. Vigneault (Nicolas) :
Mais, pour revenir à la question de ma collègue, justement, j'entendais
Mme Lamarre, vous êtes quand même ouverts à une certaine modernisation du
système. Je parlais à des gens, et on me disait que c'est en place depuis
longtemps dans la région de Québec. À Portneuf, il y a certaines analyses qui
sont restées localement dans Portneuf, mais d'autres, transférées à Québec.
M. Champagne (Martin A.) :
Alors, il y a des préalables à ça. Si, demain matin, vous avez une biopsie pour
déterminer si vous avez un cancer, O.K., ce spécimen-là peut être analysé en
dehors de mon centre hospitalier. Ça se peut bien, oui, c'est des choses qui
peuvent se faire, mais je veux m'assurer que le spécimen ne dorme pas sur une
tablette pendant 24 heures avant d'être transporté, que le transporteur,
lui, ça n'a pas gelé dans son container parce qu'il faisait moins 40°
dehors. Je veux m'assurer qu'il y ait un système informatique qui permette de
vous identifier. Mon système informatique de mon hôpital n'est pas celui de
l'hôpital qui va recevoir votre échantillon, alors il y a les risques d'erreur
d'échantillonnage. Je veux être sûr, quand vous allez revenir me voir, que le
résultat de la biopsie, donc, il est probant, que la biopsie ne s'est pas
détériorée et que je m'adresse bien à la bonne personne. Ça, c'est le genre
d'exemple concret.
Il y a des solutions à ça, elles existent.
Nous, on a fait une liste de préalables : un système informatique unique
pour le Québec qui permette la traçabilité des échantillons, un système de
transport adéquat, un service de proximité pour toutes les choses qui sont
pertinentes et urgentes. Mais tout ça est resté lettre morte.
On vient de définir, par les annonces du
28 septembre un contenant dont on ne connaît pas le contenu. On ne
magasine pas une auto deux portes quand on a quatre enfants. Alors là,
présentement, on ne sait pas qu'est-ce que va nous offrir le gouvernement dans
ce plan de contingence là, parce que c'est un plan de contingence. Alors, nous,
on est prêts à collaborer. Ça fait plusieurs fois qu'on offre notre
collaboration. On est toujours à l'écoute. Mais là, présentement, il y a une
précipitation qui n'est pas justifiée par ce dossier-là. Les laboratoires au
Québec sont efficaces et de qualité. Alors, il n'y a pas d'urgence en la
matière. Prenons le temps de s'asseoir et d'assumer, donc, la sécurité de nos
patients.
M. Vigneault (Nicolas) :
Est-ce que, Mme Dubé, vous allez manquer de temps dans vos recours? Parce
qu'on sait que ça peut prendre quelques années. Là, on veut mettre ça en place
d'ici trois ans. Est-ce que vous ne risquez pas de vous retrouver, par exemple,
avec une décision des tribunaux dans trois ans alors que tout est déjà en place
au Québec?
Mme Dubé (Carolle) :
Bien, écoutez, on a des processus qui sont longs, mais il y en a qui peuvent
être plus rapides aussi, en termes de recours. C'est ce qu'on est à évaluer, parce
qu'il y a quand même des annonces qui sont faites et on veut éviter,
naturellement, les impacts que ça pourrait occasionner à nos technologistes
médicaux et médicales. Donc, oui, on est en train de regarder pour ne pas que
ce soit une décision qui soit rendue dans quelques années, là.
M. Vigneault (Nicolas) :
Injonction?
Mme Dubé (Carolle) : On
est en train de regarder tout ça, là, en termes de moyens à notre disposition,
pour s'assurer de protéger les droits et que nos gens soient respectés dans ce
processus-là, parce que ce ne l'est pas du tout, actuellement.
La Modératrice
: Merci
beaucoup, Mme Dubé.
Mme Lamarre : Juste pour
finir, on est en mode solution. La proposition que nous, on fait, au Parti
québécois, c'est de dire : Donnez un mandat clair, urgent à l'INESSS pour
avoir l'heure juste et pour donner la sécurité qui est requise par les
spécialistes, les professionnels, pour donner également l'heure juste sur les
économies. Je vous le dis : Trop souvent, depuis deux ans et demi, le
ministre nous a promis des économies qui ne se concrétisent pas. Et il faut
tenir compte des coûts. Quand on va avoir des coûts de transport, quand on va
devoir maintenir... Parce que Dr Champagne a bien expliqué, on va devoir
maintenir quand même des laboratoires dans les hôpitaux régionaux, et donc il
va falloir maintenir du personnel, il va falloir maintenir les équipements.
Alors, comment le ministre justifie? Et qu'il nous décline, qu'il nous ventile
avec précision ses économies de 75 à 100 millions, parce qu'on n'y croit
plus et il doit vraiment en faire la preuve.
Alors, c'est facile de lancer des
centaines de millions, mais là il doit nous démontrer clairement qu'est-ce que
ça va donner, et, concrètement, pour les patients, encore la notion de
traçabilité. On le voit, les gens ne sont pas opposés à toute forme de
centralisation, mais la précipitation, le manque d'écoute, je vous dirais, ça
finit par se traduire par un manque de respect envers l'ensemble des citoyens
du Québec, actuellement.
La Modératrice
: Merci
beaucoup.
(Fin à 9 h 59)