To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > News and Press Room > Press Conferences and Scrums > Point de presse de Mme Dominique Anglade, ministre de l’Économie, de la Science et de l’Innovation, et ministre responsable de la Stratégie numérique, et M. Luc Blanchette, ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs

Advanced search in the News and Press Room section

Start date must precede end date.

Point de presse de Mme Dominique Anglade, ministre de l’Économie, de la Science et de l’Innovation, et ministre responsable de la Stratégie numérique, et M. Luc Blanchette, ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs

Version finale

Tuesday, October 18, 2016, 10 h 30

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Dix heures trente-quatre minutes)

Mme Anglade : Alors, bonjour. Bonjour à tous. Je salue mon collègue Luc Blanchette qui est ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs. Je salue M. Raymond Chrétien et je salue également les représentants de l'industrie forestière, des représentants des associations patronales et les représentants municipaux.

Alors, nous sommes ici aujourd'hui pour vous parler du conflit de bois d'oeuvre entre le Canada et les États-Unis. Comme vous le savez, il y avait une échéance la semaine dernière, le 12 octobre, pour renégocier une entente entre le Canada et les États-Unis.

Pour vous dire également que l'industrie du bois d'oeuvre, l'industrie forestière est extrêmement importante pour le Québec. Comme vous le savez, c'est plus de 60 000 emplois dans toutes les régions du Québec. Donc, il est extrêmement crucial pour nous que le litige du bois d'oeuvre trouve une résolution qui soit porteuse pour le Québec.

Dans les derniers mois, nous n'avons ménagé aucun effort pour soutenir l'industrie. Nous avons, à plusieurs reprises, réitéré les positions du Québec.

D'abord, un petit rappel, le 18 février dernier, M. Couillard était à Washington et représentait le Québec et discutait avec les interlocuteurs américains pour présenter la position du Québec avec les interlocuteurs américains.

Le 16 mars dernier, l'ex-ministre de la Forêt et moi-même faisions une sortie pour réitérer la position du Québec, laquelle est la reconnaissance du nouveau régime forestier qui est en vigueur depuis 2013, le maintien de la part de marché américain réservée aux exportateurs québécois par l'accord 2006 et évidemment le maintien du statut d'exclusion pour une trentaine de scieries québécoises.

Le 14 avril dernier, le premier ministre du Québec envoyait une lettre au premier ministre canadien pour réitérer l'importance, encore une fois, des négociations et de l'entente que nous souhaitons avoir sur le bois d'oeuvre. Nous avons maintenu des rencontres régulières avec le cabinet de mon homologue fédéral, Mme Chrystia Freeland.

Le 28 juillet dernier, ce n'était pas seulement le gouvernement, c'était également l'industrie forestière, les représentants municipaux, les associations patronales, les syndicats qui étaient présents pour dire à quel point nous voulions qu'il y ait une entente sur le bois d'oeuvre. Le 21 juillet dernier, le premier ministre du Québec a joint sa voix à celle de ses homologues pour les provinces et les territoires encore une fois pour qu'on arrive à une conclusion de cette entente et, le 28 août dernier, M. Couillard a rappelé l'importance de cette entente avec l'ambassadeur du Canada à Washington et le consul général au Canada. Pas plus tard que la semaine dernière, nous organisions une rencontre au sein de mon ministère où plus de 100 représentants de l'industrie étaient présents pour parler de la suite des choses après le 12 octobre.

C'est dans ce contexte-là que nous jugeons important de faire une annonce aujourd'hui, parce que nous avons utilisé toutes les tribunes qui étaient offertes pour défendre les intérêts du Québec, et vous savez que le 8 novembre prochain il va y avoir un changement important aux États-Unis qui va amener des changements au niveau de la fonction publique. C'est dans ce cadre-là qu'aujourd'hui j'annonce la nomination de M. Raymond Chrétien à titre de négociateur en chef pour le Québec auprès des autorités compétentes au niveau du Canada et du gouvernement des États-Unis. La vaste expérience de diplomate et de négociateur de M. Chrétien va lui permettre de jouer un rôle clé dans ce dossier qui est stratégique et majeur pour l'économie du Québec. M. Chrétien, comme vous le savez, connaît très bien les rouages de la politique québécoise, et canadienne, et américaine, et cette expérience sera d'autant plus profitable dans un contexte où, comme je le disais tout à l'heure, il risque d'avoir plusieurs changements au sein de la fonction publique américaine à la suite des élections du 8 novembre.

Nous voulons donc nous donner toutes les chances de succès pour qu'il y ait une entente qui soit conclue et que le régime forestier du Québec soit reconnu à sa pleine mesure, à sa pleine valeur. Je remercie M. Chrétien d'avoir accepté ce rôle et je cède maintenant la parole à mon collègue Luc Blanchette.

M. Blanchette : Alors, merci, Dominique. Chers collègues, M. Chrétien, notre négociateur en chef, chers partenaires, et là vous allez être tout de même observateurs pour dire que les gens des municipalités, la FQM notamment, elle est là, les syndicats, les travailleurs, les travailleuses de l'industrie aussi, les associations patronales et gens de l'industrie, incluant le Conseil de l'industrie forestière, pour nous accompagner. Donc, c'est ensemble qu'on va affronter cette nouvelle crise sur l'industrie forestière. À titre de ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs, l'industrie forestière, elle est cruciale, elle est importante pour l'ensemble du Québec. C'est 60 000 emplois, c'est 60 000 familles, c'est dans toutes les régions du Québec. Donc, c'est important d'être tout le monde ensemble pour affronter cette nouvelle crise, la cinquième, en fait.

Et deux choses bien importantes. C'est qu'aux États-Unis il y a une forêt privée, essentiellement, qui fait la fierté des Américains, il faut bien le reconnaître, et, au Québec, on a une forêt publique qui fait aussi la fierté des Québécois, et c'est cette différence structurelle là qui porte, dans le fond, à une concurrence déloyale, si je me mets dans la peau de l'industrie du bois d'oeuvre américain. Eux, ils jugent que ça, ça fait toute la différence. Pour le Québec, cette situation est problématique et critique. Vous savez que la moitié de toute notre production forestière québécoise s'en va à l'exportation, et, de ces exportations-là, 90 % s'en va sur le marché américain. Donc, on a avantage à y voir.

Le 1er avril 2013 est entré en vigueur un nouveau régime que le gouvernement libéral avait développé, adopté, etc., et donc cette entrée en vigueur là a fait en sorte qu'à l'échelle internationale on cherche maintenant à se distinguer. On a changé notre régime forestier pour s'adapter à ce contexte de libre-échange là, c'est-à-dire qu'on est parti d'un 25 % d'un volume de toutes nos garanties d'approvisionnement qu'on avait pour le mettre aux enchères par le Bureau de mise en marché du bois, et ce 25 % là se trouve à inspirer le prix pour l'ensemble du 100 % du bois d'oeuvre. Donc, c'est important à considérer, on a fait ces modifications-là.

Autre source de fierté qu'on a, c'est qu'on a un aménagement durable de notre forêt. On est au XXIe siècle, donc c'est important de pouvoir s'adapter à ça, et on pense avoir le régime forestier idéal pour pouvoir affronter les futures années. Donc, on peut dire que 100 % du bois qui provient des forêts publiques est alloué à sa juste valeur marchande. En d'autres mots, le bois du Québec n'est pas subventionné et, par conséquent, il ne peut d'aucune façon faire l'objet de pénalités commerciales telles que des droits compensatoires, telles que des droits antidumping, des quotas ou même toute autre mesure protectionniste. Ça fait que, donc, ce système qu'on a fixé, la mise aux enchères, est d'ailleurs inspiré de certains États américains. Ma collègue Dominique Anglade et moi-même entendons faire valoir cet argument au moment de l'éventuel litige commercial avec les États-Unis.

C'est important de le rappeler, c'est la cinquième fois que le Canada se retrouve en conflit avec les États-Unis sur la question du bois d'oeuvre, et M. Chrétien, qui en a vécu quelques-uns, moi aussi étant donné mon âge, vous pouvez être sûrs que, face aux tribunaux internationaux, on va... ils nous ont toujours donné raison, on va défendre notre point de vue et faire valoir nos arguments, qu'ils soient auprès du gouvernement américain, du gouvernement canadien et celui des autres provinces canadiennes.

Ce qu'on veut faire aussi et principalement dans cette négociation-là, c'est les conditions suivantes qu'on veut mettre de l'avant. Il y en a trois, ma collègue les a données, mais je vous les répète, elles sont essentielles : c'est de faire reconnaître notre nouveau régime forestier, c'est essentiel; c'est de maintenir la part de marché qu'on a aux États-Unis au niveau qu'on avait lors de la dernière entente, on parle d'autour de 30 %; et le maintien des exclusions pour certaines scieries québécoises frontalières qui font affaire avec les États-Unis. Ils vont chercher le bois en longueur aux États-Unis pour le ramener au Québec transformé et le retourner, une fois transformé, aux États-Unis.

Le premier ministre, M. Couillard, l'a mentionné la semaine dernière, le gouvernement du Québec est prêt à aller jusqu'au bout dans cette histoire-là, et c'est cette détermination que nous voulons réaffirmer aujourd'hui en vous conviant à cette annonce. Par ailleurs, je suis personnellement convaincu que la nomination de M. Raymond Chrétien à titre de négociateur pour le Québec fera une différence.

Je vous invite au Forum Innovation Bois, qui aura le 31 octobre à Rivière-du-Loup, où les industriels et le gouvernement seront encore une fois en partenaires pour choisir un avenir, mais on va le faire ensemble, tout le monde. Autant le monde municipal, le monde syndical, le monde patronal, on souhaite vraiment faire prendre ce virage-là à l'ensemble de notre industrie. Si nous voulons que le bois d'oeuvre du Québec trouve sa place dans le domaine de la construction, de la bioénergie, dans le domaine de la construction en bois, de la chimie des matériaux, nous devons aider l'industrie à prendre ce virage-là de l'innovation. C'est ce à quoi on va s'attaquer à Rivière-du-Loup.

Aujourd'hui, ensemble, on se donne les moyens nécessaires pour s'assurer que notre industrie soit bien représentée et que ses intérêts soient défendus. Merci beaucoup. M. Chrétien, à vous la parole.

M. Chrétien (Raymond) : Mme Anglade, M. le ministre, mesdames messieurs, d'abord, je veux remercier la ministre Anglade et le gouvernement du Québec de me faire l'honneur de le représenter dans les discussions à venir sur la possibilité d'avoir un nouvel accord sur le bois d'oeuvre.

Je remonte en arrière. J'ai été personnellement impliqué dans les longues et difficiles discussions de l'accord de 1996. Je me rappelle encore quand, au quatrième étage de l'ambassade à Washington, quand j'y étais ambassadeur, toute l'industrie était présente, les représentants des mouvements syndicaux, des provinces, etc. C'est un sujet extrêmement compliqué, mais extrêmement important. Je pense que cette importance a été très bien démontrée par les commentaires des deux ministres présents.

Je serai bref. Mon rôle, je le vois un petit peu de la façon suivante. L'objectif, c'est de négocier un nouvel accord qui sera favorable non seulement à l'industrie elle-même, mais aux milliers d'employés qu'elle engage et aussi, bien sûr, aux communautés dans lesquelles se situent plusieurs de ces compagnies. De façon plus précise, et Mme Anglade l'a mentionné, il faudra que le régime spécifique du Québec, que le grand travail du Québec des dernières années soit davantage reconnu, et par Ottawa, et par la partie américaine, de façon à obtenir une exemption de taxes et de quotas pour l'industrie forestière québécoise. Ça ne sera pas facile, mais je pense que j'y travaillerai absolument durement et je ne ménagerai aucun de mes efforts.

Je suis très content de voir aujourd'hui aussi des représentants de l'industrie. Il doit y avoir une osmose entre ce que je fais et ce que vous faites, et j'entends bien travailler de façon très, très étroite avec les représentants de l'industrie pour toujours être en parfaite synchronisation avec leurs préoccupations et celles des négociateurs. Il faudra travailler aussi avec le gouvernement fédéral parce que, pour avoir un bon accord pour le Québec, il faut que finalement il y ait une entente nationale qui est négociée par Ottawa. Donc, c'est à la fois un effort massif pour le Québec et le besoin de travailler aussi à l'intérieur de la délégation nationale pour s'assurer que les intérêts du Québec soient bien, bien protégés.

Alors, je vais m'arrêter ici ce matin. J'aurai sûrement le plaisir de vous reparler à plusieurs reprises au cours des mois et des années à venir. Merci beaucoup.

M. Tremblay (André) : Mme la ministre, M. le ministre, M. Chrétien, l'industrie forestière ne peut qu'être très heureuse de la nomination de M. Chrétien ce matin. Je crois que ça témoigne de la volonté du gouvernement du Québec d'appuyer son industrie et de se donner les moyens de faire valoir notre nouveau régime forestier, tel qu'on l'a expliqué tout à l'heure, pour qu'en bout de piste les efforts que l'industrie a faits, de concert avec le gouvernement du Québec, soient reconnus et que dorénavant le régime soit évalué à sa juste valeur.

Donc, Mme la ministre, encore une fois, M. Blanchette, merci beaucoup, merci bien au gouvernement du Québec de nous appuyer dans cette difficile lutte qui s'amorce dans les prochains mois. Je pense que le signal que vous donnez ce matin démontre clairement que le gouvernement, tel que l'a dit M. Couillard, veut aller au bout de ce dossier-là et, pour une fois pour toutes, tenter de le régler de façon définitive eu égard aux efforts qu'on a faits, que l'industrie et le gouvernement ont faits ensemble. Merci.

Et, bien sûr, merci à tous nos partenaires qui sont présents ce matin de nous appuyer. Ça démontre l'importance du dossier tant pour le Québec que pour l'économie et toutes les régions du Québec. Merci bien.

La Modératrice : Donc, bonjour à tous. On va passer à la période des questions évidemment sur le sujet du jour. Donc, je vais commencer avec Mme Prince.

Mme Prince (Véronique) : Oui, bonjour. M. Chrétien, mes questions sont pour vous. Donc, moi, c'est Véronique Prince à TVA. J'aimerais vous entendre justement avec votre expérience et tout ça. Quelle est la difficulté que peut représenter actuellement le protectionnisme qui a été exprimé autant par le Parti démocrate que le Parti républicain?

M. Chrétien (Raymond) : C'est une difficulté très, très réelle...

Mme Prince (Véronique) : Approchez-vous un petit peu, s'il vous plaît.

M. Chrétien (Raymond) : C'est une difficulté absolument certaine et réelle. Vous suivez la campagne électorale américaine comme, je pense, je le fais. Normalement, les républicains sont moins protectionnistes que les démocrates. Or, cette fois-ci, M. Trump l'est davantage. Il est, je dirais, totalement protectionniste. Mme Clinton, elle aussi, a fait preuve de protectionnisme quand elle dit qu'elle ne signera pas, n'approuvera pas le Trans-Pacific Partnership le traité de libre-échange avec les pays du Pacifique.

Donc, il y a un vent protectionniste qui souffle non seulement aux États-Unis, d'ailleurs, mais un peu partout dans le monde, et ça va rendre cette négociation encore plus difficile parce que les Américains, croyez-moi, ne nous font jamais de cadeaux, même quand le contexte leur est très favorable. Alors, dans un contexte difficile, je m'attends à une négociation très, très difficile.

Mme Prince (Véronique) : Autre question par rapport à une difficulté que vous pouvez rencontrez étant donné qu'on est justement en pleine période électorale. Le prochain président, normalement, entre en fonction à partir de janvier. Il y a beaucoup de choses à s'occuper, beaucoup de choses à mettre en place. Alors, est-ce que vous pensez que les délais de temps vont vous nuire?

M. Chrétien (Raymond) : Il faut espérer qu'une entente soit conclue entre maintenant et l'arrivée du nouveau président en janvier, mais je pense que les étoiles ne sont pas alignées de cette façon pour l'instant. Vous avez raison de mentionner que les changements provoqués par la venue, l'arrivée d'un nouveau président, et j'espère d'une nouvelle présidente plutôt, vont amener des changements non seulement au niveau ministériel, mais au niveau sous-ministériel et jusqu'au niveau des directeurs généraux. C'est plus de 2 000 personnes clés qui vont changer. Donc, s'il n'y a pas d'entente d'ici là, et ça serait étonnant qu'il y en ait une, il va falloir recommencer un peu le travail d'éducation auprès d'une nouvelle équipe dirigeante américaine.

Mme Prince (Véronique) : Donc, vous vivez avec un ultimatum?

M. Chrétien (Raymond) : Bien, si vous voulez... Si vous appelez ça un «ultimatum»... Ce ne serait pas le mot que j'utiliserais, mais...

Mme Prince (Véronique) : Ce serait quel mot?

M. Chrétien (Raymond) : Écoutez, je ne parle jamais d'ultimatum dans ce genre de négociation. Il faut souhaiter vraiment que, dans la période entre l'élection en novembre et la prise de position de la nouvelle présidente ou du nouveau président, il y ait encore une entente possible.

Mais, croyez-moi, ce n'est pas seulement nous qui souhaitons une entente. Il y a quand même beaucoup de joueurs américains qui souhaitent en finir, finalement, avec cette guerre de... Je n'aime pas le mot «guerre»... avec ce conflit du bois d'oeuvre, si vous voulez. C'est le cinquième. J'étais là en 1996, et c'est, encore une fois, très compliqué parce que, du côté américain, leurs législateurs, à la fois les sénateurs, les membres de l'Assemblée ont un rôle presque direct, une influence presque directe sur les négociateurs.

Donc, je m'attends à ce que cette nouvelle configuration politique aux États-Unis, cette profonde division, rende la tâche des négociateurs américains également beaucoup plus difficile.

La Modératrice : Merci beaucoup. Donc, micro de gauche, Mme Richer.

Mme Richer (Jocelyne) : Oui, bonjour. Pour M. Chrétien aussi. J'aimerais savoir, compte tenu de l'état du dossier actuellement, à combien vous évaluez vos chances d'éviter que les États-Unis imposent des droits compensatoires au bois du Québec et quelle serait l'importance de ces droits-là.

Mme Anglade : Bien, écoutez, on va faire tout ce qui est en oeuvre pour faire en sorte qu'on ait une entente. Ce qu'il faut savoir, c'est qu'encore une fois le Québec a fait son travail, l'industrie a fait un travail. Par rapport aux autres conflits qu'il y a eu par le passé, l'industrie a fait ses devoirs, l'industrie s'est conformée pour avoir un système de libre-échange.

Alors, tous les efforts vont être mis pour que ce soit reconnu. Il n'y a aucune raison, mon collègue l'a mentionné, il n'y a aucune raison pour que notre système ne soit pas comparable à celui que l'on observe dans d'autres États américains, et c'est l'obsession que nous allons avoir dans les prochains mois.

M. Blanchette : Et peut-être compléter, à chaque fois qu'il y a eu un tel conflit, les contestations auprès des instances, qu'elles soient de l'ALENA ou de l'Organisation mondiale du commerce, on les a gagnées avec notre ancien régime. Là, on a un nouveau régime encore plus libéralisé. On pense qu'on est mieux pourvus pour pouvoir contester les affirmations des Américains là-dessus et faire valoir que notre régime, notre nouveau régime forestier adopté et mis en oeuvre grâce à la participation de l'industrie forestière là-dedans puisse tenir la route.

M. Chrétien (Raymond) : Oui, mais j'ajouterais simplement ceci. Je me rappelle la négociation de 1996, le Québec n'avait pas, à l'époque, fait tout ce qu'il a fait au cours des dernières années. Vous avez raison, M. le ministre, le régime forestier et québécois est tout à fait adopté, si vous voulez, au libre-échange qui devrait exister entre les deux pays dans tous les domaines. Malheureusement, il y a des exceptions, le bois d'oeuvre en est un.

Il va falloir, en tout les cas, dans mon poste, dans ma responsabilité, Mme Anglade me l'a indiqué rapidement, continuer un petit peu l'éducation des Américains, l'éducation des producteurs américains, des constructeurs américains sur la spécificité du régime québécois et le fait que le bois d'oeuvre canadien, finalement, n'est pas subventionné. Mais ils nous surveillent de très, très près. Toute mesure prise par le gouvernement québécois, qui peut paraître être une subvention, ils la saisissent tout de suite.

Mme Richer (Jocelyne) : Une question pour Mme Anglade. Vu l'importance de l'enjeu pour l'industrie québécoise et vu l'historique de litige perpétuel avec les États-Unis, est-ce que vous n'avez pas trop tardé à faire intervenir quelqu'un comme M. Chrétien dans le dossier pour prendre en charge les négociations?

Mme Anglade : En fait, je vous dirais que les intérêts du Québec ont été très bien représentés. Il y a eu une grande mobilisation, et tout à l'heure je réitérais toutes les positions qui ont été prises de la part du premier ministre du Québec, de la part de mes collègues également précédemment, qui ont précédé Luc Blanchette, de Luc Blanchette lui-même. Tous les intérêts du Québec ont été absolument représentés. Il faut reconnaître cependant que le contexte change.

Tout à l'heure, quand nous parlions du changement au niveau du gouvernement américain, la donne vient de changer parce qu'avec l'élection d'un nouveau président, c'est la fonction publique, ce ne sont pas seulement les hauts fonctionnaires, mais les sous-ministres adjoints, peut-être même les directeurs généraux qui vont être changés. Et là on a un gros travail de représentation à faire, et c'est pour ça qu'aujourd'hui on se donne de nouveaux moyens pour aller convaincre, pour aller parler aux gens, pour aller expliquer le régime forestier.

Donc, ce contexte-là fait en sorte qu'on ajoute une nouvelle voix autour de la table, dont on va avoir besoin. Mais je pense que les représentations ont été faites jusqu'à présent, les intérêts du Québec ont été très bien défendus, comme l'industrie l'a souligné.

La Modératrice : O.K. Donc, merci beaucoup. Je reviens au micro de droite.

M. Dutrisac (Robert) : Oui. Robert Dutrisac, Le Devoir. Ma question à M. Chrétien. Vous avez dit qu'il était improbable, là, qu'on puisse arriver à une entente d'ici... et ce serait étonnant que des négociateurs s'engagent pour le prochain président ou la prochaine administration.

Je voudrais savoir s'il est réaliste de penser que le Québec pourra éviter que des sanctions et des taxes, des surtaxes soient imposées dans la période assez longue, j'imagine, où l'accord va être négocié.

M. Chrétien (Raymond) : Écoutez, il faudrait voir... je ne sais pas si la première pétition américaine a été déposée, elle devait l'être au cours des derniers jours, elle le sera peut-être aujourd'hui. Si oui, je pense que ce sera un premier indice auquel il faudra porter attention, et, d'après ce que j'apprends, ce que l'on me dit, le fédéral a une période d'à peu près quelques semaines pour réagir à cette première pétition.

Mais, écoutez, même le dépôt d'une pétition n'empêche pas la négociation de se poursuivre. Ce que je ne sais pas, parce que je viens tout juste d'être nommé, là, c'est jusqu'à quel point les négociateurs fédéraux entendent compter, au cours des prochaines semaines, là, pour essayer ultimement d'arracher un accord. On me dit que c'est encore l'objectif. Est-ce que c'est réaliste? Enfin, on verra. Je leur souhaite, je leur souhaite d'avoir raison.

M. Blanchette : Peut-être juste, pour compléter, il y aura une séquence, inévitablement. Là, il y aura plusieurs fenêtres d'opportunité. Il y en a une avant l'élection, il y en aura une autre entre l'élection et l'assermentation, donc en janvier, et ce qu'on s'attend, c'est que, quelque part en mars 2017, que là il puisse y avoir des premières mesures temporaires. Par la suite, il y aura, entre septembre et décembre, une mesure qui pourrait devenir définitive. Donc, il y en aura plusieurs, fenêtres d'opportunité. Il va falloir toutes les saisir, et on va, croyez-moi, tenter notre chance à chacune.

M. Dutrisac (Robert) : Donc, vous dites qu'il va y avoir des mesures...

M. Blanchette : Je n'ai pas dit ça. Dans la séquence, là, dans ce qui est prévu, là, ce que les avocats embauchés par le MIDI nous ont prévu, c'est que, dans la séquence, il y aura plusieurs fenêtres d'opportunité qu'on va chercher à saisir. Si jamais il y avait une première mesure de mise, ça devrait être autour de mars 2017, temporaire celle-ci, avant qu'elle soit définitive, si jamais elle était maintenue définitive entre septembre et décembre.

M. Dutrisac (Robert) : J'ai une question. M. Couillard a mentionné que le dernier accord avait été négocié surtout en tenant compte des intérêts de la Colombie-Britannique ou de l'industrie de la Colombie-Britannique. Comment vous envisagez ça avec le gouvernement fédéral?

M. Chrétien (Raymond) : Très bonne question. Écoutez, j'ai vu, en 1996, le jeu, si vous voulez, canadien, à l'intérieur de cette négociation. Vous avez la Colombie-Britannique, qui est de loin la province la plus productrice de bois d'oeuvre. Je pense que c'est trois fois la production du Québec. Il y a aussi des provinces où il y a du bois qui est exporté, ceci dit, l'Alberta, Manitoba, Saskatchewan, Québec, très important également, mais en deuxième lieu.

Il est toujours, à l'intérieur d'une négociation fédérale, important de penser aux intérêts de tous les intéressés, mais le poids de la Colombie-Britannique est énorme simplement à cause du poids de son industrie. Ce que j'aimerais dire aujourd'hui, c'est ceci, c'est qu'il va falloir que la spécificité du Québec, que le régime forestier québécois soit mis de l'avant très fortement par la partie canadienne également. Croyez-moi, je suis nommé et très fier d'être nommé par le Québec aujourd'hui, mais, à Ottawa, ils vont m'avoir dans les pattes à l'occasion, et j'ai bien l'intention de faire en sorte que le point de vue du Québec soit regardé, étudié, et qu'on lui donne le même poids, peut-être, que celui qu'on donne à celui de la Colombie-Britannique. Alors, il faut travailler à l'intérieur et à l'extérieur, mais vous pouvez compter sur moi.

La Modératrice : Merci beaucoup. Donc, micro de gauche.

M. Vigneault (Nicolas) : Et un peu dans le même sens — Nicolas Vigneault, Radio-Canada — M. Chrétien, comment vous allez... quels arguments vous allez utiliser pour dire au gouvernement fédéral : Écoutez, il faut vraiment que le régime québécois soit reconnu? À défaut de quoi, on n'y arrivera pas, finalement.

Mme Anglade : Le gouvernement fédéral est très conscient de la réalité du régime québécois parce qu'il a été à maintes fois réitéré. Ils en sont conscients, et même que dans les négociations... j'aimerais vous rappeler que, dans les négociations, il a même été discuté le fait qu'il pourrait avoir des exemptions sur certains régimes qui seraient adaptés à un mode de libre-échange, et cette reconnaissance-là n'avait même jamais été faite auparavant. Donc, tout le monde est bien conscient du fait qu'il y a un changement qui a été fait au niveau québécois, mais, encore une fois, ce changement-là, avec le changement de régime que l'on va vivre aux États-Unis, ça va être important de le rappeler sur toutes les tribunes.

M. Vigneault (Nicolas) : Et, M. Chrétien, l'importance justement de l'appui canadien?

M. Chrétien (Raymond) : L'importance de...

M. Vigneault (Nicolas) : L'importance de l'appui du gouvernement fédéral dans ce dossier-là?

M. Chrétien (Raymond) : Absolument essentiel parce qu'ultimement, à la toute fin de la négociation, c'est le négociateur canadien face au négociateur américain. Lui, il doit refléter, dans ses positions, le point de vue de chacune des provinces canadiennes. Et je vais lui dire, il le sait déjà, mais il va sûrement l'entendre très souvent, que ce que le Québec a fait depuis quelques années était souvent remarquable. Il doit en prendre fait et cause et le mentionner constamment à la partie américaine.

Autrement dit, il faudra travailler du point de vue canadien, mais également de l'autre côté de la médaille, c'est-à-dire auprès des constructeurs américains, de ceux qui achètent, du consommateur américain, pour qu'il y ait une espèce d'entente plus naturelle entre les deux parties.

M. Lacroix (Louis) : Bonjour. Louis Lacroix de Cogeco. Ma question s'adresse à Mme Anglade. Vous disiez tout à l'heure, en termes de données, là, que la moitié de la production québécoise de bois d'oeuvre va à l'exportation, 90 % de cette moitié-là aux États-Unis. Est-ce que le Québec n'est pas trop dépendant du marché américain? Parce qu'on se retrouve, à chaque négociation, dans la même situation.

Mme Anglade : C'est une bonne question. Je pense que c'est très pertinent pour notre industrie de se diversifier également, et c'est la raison pour laquelle il y a un sommet Innovation Bois qui va avoir lieu, se diversifier dans la manière de faire, d'utiliser la ressource naturelle, de un. Et la semaine prochaine, je présente également... je fais le lancement des exportations, et justement, dans toute la question des exportations, c'est de trouver tous les moyens d'aller pénétrer de nouveaux marchés.

Donc, la question, encore une fois, elle est pertinente, et c'est la raison pour laquelle on se dote d'autres outils comme le Forum Innovation Bois, comme une stratégie des exportations pour nous assurer de pénétrer d'autres marchés également, reconnaissant l'importance quand même du marché américain.

M. Blanchette : Oui, juste peut-être pour nuancer aussi, là. C'est facile pour les analystes, les critiques, à la limite les journalistes, de dire : Bon, bien, on devrait diversifier notre économie, on devrait sortir du bois d'oeuvre. Mais, dans les faits, il y a une série d'industries qui existent, d'entreprises qui existent, qui ont des équipements de sciage, et on ne peut pas reconvertir qu'en claquant d'un seul coup de doigts.

Ce qui est essentiel, c'est de permettre à ceux qui le souhaitent, les entreprises qui le souhaitent, cette diversification-là. Ça, c'est important, diversification de production, mais diversification de marchés également. Le marché, ça sera discuté là; la diversification, ce sera discuté aussi vers le Forum Innovation, et déjà on a des projets auprès d'entreprises. On fera des annonces éventuellement qui pourront venir, mais ça va dans le sens d'une plus grande diversification de notre production de bois d'oeuvre.

M. Lacroix (Louis) : M. Chrétien, je vous voyais opiner pendant que je posais la question. Est-ce que c'est...

M. Chrétien (Raymond) : Je n'ai rien à ajouter, là. Les augustes ministres ont tout dit, là.

M. Lacroix (Louis) : O.K. Mais quels seraient les...

M. Chrétien (Raymond) : Vous parlez des marchés d'exportation. Où doit-il s'exporter, le bois d'oeuvre du Québec? La Colombie-Britannique a une frontière avec le Pacifique qui lui permet d'envisager de fortes ventes de son bois vers des pays comme la Chine, par exemple. Alors, il est plus facile peut-être pour elle que pour le Québec de penser à exporter vers ce très important marché pour nous. Alors, écoutez, je ne sais pas quels sont les autres marchés, je ne fais que commencer ce matin. J'en saurai un petit peu plus plus tard, mais je sais que la Colombie-Britannique a un avantage énorme sur nous à cause de ça.

La Modératrice : M. Croteau.

M. Croteau (Martin) : Bonjour. Ma question s'adresse à qui de droit, mais pardonnez-moi de vous demander une espèce de cours 101, mais en quoi est-ce que la spécificité du régime québécois vous permet d'espérer un règlement peut-être plus favorable que la Colombie-Britannique, par exemple?

M. Blanchette : Ce que le nouveau régime forestier fait, c'est qu'on a, sur les 100 % de notre forêt publique, on a extrait 25 % qu'on a mis au Bureau de mise en marché du bois. Ce que ça veut dire, c'est que les 25 %, ce prix-là est fixé aux enchères, donc dans une façon d'offre et de demande librement sur le marché. Ce prix de juste prix là de marchand nous permet justement d'influencer l'ensemble de la forêt, et ce 25 % qu'on fixe le prix sert pour les 100 %, donc également pour les 75 % qu'il reste, ce qui fait que cette nouvelle formule là de fixation aux enchères du prix du marché du bois d'oeuvre nous permet de questionner qu'on n'est pas protecteurs. On est vraiment en situation de libre marché, libre entreprise, et ça, c'est notre plus grand argumentaire auprès de l'industrie forestière américaine pour contrer le fait que dire : Ah! vous avez un prix qui serait fixé par le gouvernement. Non, non, non, c'est vraiment aux enchères que le tout se fait, et 25 % influencent l'ensemble du 100 %.

M. Croteau (Martin) : Est-ce que l'objectif du Québec serait donc d'obtenir des accords distincts sur le bois d'oeuvre par rapport aux autres provinces?

M. Blanchette : Oui. On souhaite, parce qu'il n'y a pas un régime provincial identique à un autre, on souhaite avoir justement une exclusion à cause de notre type de régime forestier qu'on a. On veut faire reconnaître ça auprès du fédéral, et il y a possibilité parce que c'est aussi prévu dans ces accords-là.

M. Croteau (Martin) : Peut-être juste une question très pointue à M. Chrétien. Quelle élection est la plus importante pour ce dossier? Est-ce l'élection présidentielle ou l'élection au Congrès, à vos yeux?

M. Chrétien (Raymond) : Très bonne question. Les deux sont très importantes, mais ce qui se passe au Congrès est très, très important, parce qu'ultimement les négociateurs américains sont influencés par les membres de l'Assemblée américaine ou des sénateurs influents venant des États producteurs de bois. La configuration du Sénat est aussi très, très importante. Si les États producteurs de bois ne sont pas représentés par des hommes ou des femmes suffisamment puissants, leur voix est moins forte auprès des négociateurs américains.

Mais j'aimerais revenir à votre question antérieure. Est-ce que le Québec veut un accord distinct? Je ne crois pas, parce que j'ai vu ça de l'autre côté de l'équation. Arriver en ordre dispersé face aux négociateurs américains, ce serait se faire manger tout rond. Je veux dire, on ne pourrait pas y aller en ordre dispersé. Il faut vraiment y aller de façon unie, solide après avoir composé et réglé nos divergences entre nous-mêmes avant de se présenter devant les Américains. C'est la seule façon de procéder.

M. Croteau (Martin) : À quel point sont-elles importantes, ces divergences?

M. Chrétien (Raymond) : Il y en a beaucoup. Écoutez, à l'intérieur de la délégation, ce sont des discussions qui durent pendant des semaines. Enfin, chaque industrie a son point de vue, chaque compagnie a son point de vue, et ils doivent être parties prenantes à l'établissement de cette position. Donc, je dirais que c'est presque aussi difficile de s'entendre avant que pendant, mais on ne peut pas le faire sans l'industrie. C'est eux qui finalement, de notre côté en tous les cas, doivent avoir une voix très, très prépondérante et forte.

M. Foisy (Philippe-Vincent) : Bonjour. Philippe-Vincent Foisy de Cogeco. M. Chrétien, sentez-vous que ce que les Américains pourraient faire, c'est une stratégie? Parce que ça fait cinq fois que le Québec est reconnu comme étant acceptable selon les standards de l'Organisation mondiale du commerce, alors que là on va encore dans cette guerre-là. Est-ce que c'est une stratégie pour essayer d'affaiblir les producteurs québécois, au fond, d'étirer les négociations, après ça d'envoyer ça devant les tribunaux du commerce pour que les plus petits, après s'être vus imposer des tarifs douaniers, bien, finalement, plient le genou puis décident de plier bagage et de changer d'industrie?

M. Chrétien (Raymond) : Là, je ne peux pas répondre pour un Américain, ,ais ce qui est certain, c'est qu'ils pensent à leurs intérêts. Leurs producteurs voient leurs parts de marché diminuer de façon importante à cause des importations canadiennes. Donc, c'est simplement la loi du marché qui joue. Ils cherchent à réduire la concurrence qui vient de leurs voisins et amis du Nord. Je pense que c'est vraiment du capitalisme pur qui n'est pas, à mon avis, corrigé par un accord comme l'accord de libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, qui aurait dû, devrait régler ce problème-là.

Mais, encore une fois, mon expérience m'a appris qu'aux États-Unis, et ça je ne le dis pas… En fait, je vais le dire, vous en ferez ce que vous voudrez, les Américains sont puissants, sont forts. Quand un accord ne fait pas leur affaire, ils l'ignorent.

M. Foisy (Philippe-Vincent) : Et, Mme Anglade, pour éviter cette saignée-là, s'il n'y a pas d'entente, le gouvernement peut faire quoi pour les entreprises forestières?

Mme Anglade : Bien, écoutez, premièrement, nous avons rencontré plus de 100 personnes de l'industrie la semaine dernière pour parler des prochaines étapes. Il y a différentes choses qui sont considérées, et on va vous revenir. Le forum de l'Innovation Bois va être une belle opportunité pour nous de vous revenir plus en détail. La stratégie des exportations va être un bon forum pour nous aussi pour en parler plus amplement.

Il faut être prudent également parce que toute intervention peut être considérée comme une intervention. Et justement, ce que l'on ne veut pas, c'est que les Américains remettent en question le fait que nous ayons un système de libre-échange. Encore une fois, je pense que tout le monde ici est en arrière pour dire que ce système-là, à l'intérieur d'une négociation canadienne évidemment, bien, doit être reconnu. Puis le message de l'industrie est unanime à ce niveau-là, unanime par rapport à la reconnaissance de l'exemption dont devrait faire l'objet le Québec.

M. Blanchette : Et il y aura certainement des mesures qui vont venir, mais, comme c'est la semaine prochaine, l'annonce, et le forum sur l'innovation, c'est le 31 octobre, c'est quand même assez court terme, vous verrez un certain nombre de mesures pour soutenir l'industrie. Mais on ne les dévoile pas tout de suite.

Une voix :

M. Blanchette : Non. On ne peut pas, absolument pas, avoir une aide directe, pas dans un contexte où on nous accuse de subventionner notre industrie. Donc, on ne pourrait pas jamais aller sur l'aide directe.

Mme Anglade : Il faut faire attention. Il faut être prudent.

La Modératrice : M. Lecavalier

M. Lecavalier (Charles) : Bonjour, M. Blanchette. Une précision, là. Vous dites qu'en mars 2017, il pourra y avoir des mesures temporaires. Ça, ça veut dire quoi? C'est à ce moment-là qu'il pourra y avoir l'imposition de frais?

Mme Anglade : En fait, ce qui se produit, c'est qu'à partir du 12 octobre, à partir de la semaine dernière, il pouvait y avoir une plainte qui a été formulée par le gouvernement américain. Il n'y en a pas eu jusqu'à hier. Ça se peut qu'il y en ait une aujourd'hui, on n'en a pas eu jusqu'à hier. À partir de de moment-là, il y a six mois qui s'écoulent avant qu'il y ait des droits compensatoires qui soient donnés. Donc, on a jusqu'au mois de mars, en fait, avant qu'il y ait des droits compensatoires. Donc, il faisait référence à mars et, à partir de ce moment-là, en mars, bien, il y a de nouvelles méthodes juridiques, en fait, des nouvelles négociations qui s'entament également. Donc, on a différentes fenêtres, et c'est ce à quoi il faisait référence.

M. Blanchette : C'est ça, puis il y aura possiblement des enquêtes où que, nous, on pourra défendre notre régime auprès des Américains pour faire la preuve qu'on n'est pas protectionnistes, on n'est pas protégés, on ne joue pas illégalement, etc. Donc, notre nouveau régime forestier tient la route pour pouvoir affronter et favoriser ce libre-échange-là.

M. Lecavalier (Charles) : M. Tremblay — c'est ça, oui — une petite question pour vous. Est-ce que vous vous attendez à ce que le gouvernement du Québec compense l'industrie forestière, si jamais il y a des droits compensatoires qui sont imposés? Ça a été fait, je pense, par le passé.

M. Tremblay (André) : Oui, ce à quoi on s'attend, évidemment, si on veut aller au bout du processus judiciaire dans lequel on risque de se retrouver malgré nous, il va falloir avoir les outils pour se rendre au bout du processus judiciaire. En 2006, le gouvernement fédéral avait mis en place un programme de garantie de prêt qui permettait à l'industrie d'avoir... pas une compensation, mais de pouvoir décaisser des argents et avoir une garantie que le gouvernement, donc un banquier, pour pouvoir avancer des argents à l'industrie avec une garantie du gouvernement fédéral.

Je pense que ce genre d'outils financiers là vont être nécessaires, si on veut se rendre au bout d'une lutte juridique avec les Américains, qui peut durer deux, ou trois, ou quatre ans, et on parle d'une taxe qui pourrait être de l'ordre de 20 % à 25 %. Pour l'industrie du Québec, on parle de plusieurs centaines de millions de dollars. Donc, si on veut être en mesure de faire reconnaître le statut particulier du Québec par les instances judiciaires, comme on l'a fait au cours des quatre premiers conflits, je crois qu'il va falloir se pencher sérieusement sur la façon dont les gouvernements vont appuyer leur industrie.

M. Lecavalier (Charles) : Et par rapport à...

La Modératrice : Charles, peut-être une dernière question, étant donné...

M. Lecavalier (Charles) : Oui, une sous-question. Par rapport à l'industrie générale au Québec, là, vous me parlez de droits compensatoires qui pourraient être de plusieurs centaines de millions. L'industrie, ça ne va pas nécessairement bien aujourd'hui au Québec, il y a toujours des histoires de scieries qui ferment. Alors, est-ce qu'il n'y a pas des petits joueurs qui pourraient finalement faire faillite dans ce conflit-là?

M. Tremblay (André) : Écoutez, je ne pense pas que ce soit une question de grosseur, il y a des petits joueurs qui sont très efficaces. Mais je voudrais simplement tout à l'heure ramener sur une question qui a été posée, en parlant de diversification, simplement vous rappeler que le Québec est un leader en termes de deuxième et troisième transformation. Il n'y a aucun endroit en Amérique du Nord où il se fait autant, dans l'industrie du bois d'oeuvre, de deuxième et de troisième transformation de différents produits. Si on parle de construction en hauteur, si on parle d'utilisation du bois dans la construction, regardez des projets, comme il se fait à Griffintown actuellement, 450 condos en bois.

Le Québec a été un leader, et le gouvernement du Québec nous a appuyés là-dedans en termes de modification du Code du bâtiment. On a accéléré les processus de modification au code pour nous permettre justement que l'industrie puisse se diversifier. Donc, on travaille beaucoup, on travaille très fort pour essayer de trouver des nouveaux marchés, des nouveaux produits, des produits évidemment plus écologiques, plus environnementaux, bon, et j'en passe, mais il faut comprendre que l'ampleur du marché américain oblige qu'on doive y aller sur le marché américain. On va continuer à construire des maisons en bois en Amérique du Nord, c'est ce qu'on fait. On construit en bois. Donc, on va continuer à le faire, et il faut comprendre, la grosseur de notre industrie, c'est 62 000 emplois, pour réaliser qu'on ne peut pas, du jour au lendemain, trouver des nouveaux produits de niche qui vont faire en sorte qu'on va pouvoir se dispenser du bois de construction. Donc, c'est un créneau dans lequel on va continuer à oeuvrer et qui est porteur pour le Québec.

M. Salvet (Jean-Marc) : Bonjour, Mme Anglade. Une dernière question, si vous permettez. J'anticipe que vous allez me dire que la nomination de M. Chrétien vise à maximiser les chances du Québec d'obtenir satisfaction, mais est-ce qu'en même temps elle ne témoigne pas d'une confiance mitigée que vous avez à l'égard d'Ottawa dans ses négos?

Mme Anglade : Écoutez, on a eu de très bons échanges avec Ottawa. Tout le long, depuis les six derniers mois, sur le conflit du bois d'oeuvre, on a eu des appels répétés. Je pense qu'il y a une très bonne compréhension, de la part d'Ottawa, de la position québécoise.

Ce que cela dit, par contre, dans le contexte actuel du changement de régime au niveau américain, la compréhension... les manières d'intervenir au niveau américain vont bénéficier non seulement au Québec, mais également à Ottawa.

M. Salvet (Jean-Marc) : Mais Ottawa n'était pas en mesure de faire cet argumentaire-là puisque c'est lui qui est le signataire en bout de ligne?

Mme Anglade : Ottawa a définitivement fait l'argumentaire, et c'est lui qui est signataire, mais, encore une fois, on ajoute aujourd'hui une pierre supplémentaire pour le Québec.

M. Blanchette : J'ajouterais juste à la blague : On ne prend pas de chance. On ajoute...

La Modératrice : Donc, on termine en anglais.

Mme Fletcher (Raquel) : Good morning. Can you just tell us what you're announcing today and give us a summary in English?

Mme Anglade : A short summary. In the last months, we've been very present and active in order for the federal Government and… in the dealing with the United States regarding soft wood lumber. We've done a number of representations saying that the new regime that we have in Québec is really a regime that should be exempt of all taxes and all quotas because it's really comparable to regimes that are in place right now in the United States. We have done again a number of representations in the U.S. and here, in Canada, in general, but right now, with the changes that are happening in the United States, we want to make sure that we are in a really good position to do further representations with the members… the new officials in the United States.

So therefore we decided to go ahead with the nomination of Raymond Chrétien as the chief negotiator for Québec, and, in his position, he well be representing our interest in the United States as well as with federal Government. Is it critical for us that the new regime that has been put in place in 2013 be recognized in the United States and again with the new players that will be there after the election of November 8.

Mme Fletcher (Raquel) : And what do you expect that will mean for Québec after the new changes are in place?

Mme Anglade : What we expect is that people understand the impact of the changes that have been made in Québec, they understand that, the way it is structured today, it is really equivalent to free trade, and there is no subsidies from the Government going into that industry. Therefore, we shouldn't be taxed or we shouldn't have any quotas that are imposed on Québec because of the new regime. I'd like to say that the regime that we have in Québec is again comparable to that of many other States in United States. So what we want do it to make sure that people understand that and really can act upon this understanding.

Mme Fletcher (Raquel) : Thank you.

Des voix : Merci.

(Fin à 11 h 16)