To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > News and Press Room > Press Conferences and Scrums > Point de presse de M. Simon Jolin-Barrette, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de justice

Advanced search in the News and Press Room section

Start date must precede end date.

Point de presse de M. Simon Jolin-Barrette, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de justice

Version finale

Wednesday, October 19, 2016, 11 h 15

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Onze heures seize minutes)

M. Jolin-Barrette : Alors, bonjour, tout le monde. Encore une fois, aujourd'hui, le gouvernement libéral ne répond pas aux questions. C'est assez simple ce qu'on demande. On demande que le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, envoie une directive claire aux hôpitaux que le contrôle et l'accès dans les chambres d'hôpital, ça va être la direction de l'hôpital qui va contrôler. Ce n'est pas normal qu'il y ait des Témoins de Jéhovah influents, on peut les associer à la police du sang comme j'ai dit en Chambre, qui contrôlent l'accès à la chambre, qui ne permettent pas aux gens qui ne sont pas membres de cette religion-là de pouvoir accéder aux patients, accéder à la chambre du patient.

Et je tiens à vous rappeler, là, que ce matin le Dr Louis Godin, le président de la FMOQ, a dit : Ce n'est pas aux médecins à juger de la liberté du consentement. Donc, ça prend en place un mécanisme avec un juge qui va pouvoir évaluer est-ce que le consentement de la personne qui refuse des soins, est-ce que son consentement est libre et éclairé de façon à avoir une tierce partie qui puisse véritablement évaluer ça, est-ce que la personne qui refuse les soins l'exprime de façon libre et éclairée.

Et je reviens sur la question des directives. Le ministre de la Santé doit prendre action et il doit envoyer un message clair aux intervenants du réseau de la santé que c'est la direction de l'établissement de la santé qui gère le contrôle, qui gère la sécurité dans les hôpitaux, et ce n'est pas des membres influents des Témoins de Jéhovah.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Donc, le groupe que vous qualifiez de police du sang aurait dû être expulsé manu militari?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, les gens qui doivent être dans une chambre d'hôpital, c'est les médecins, les infirmières, les proches de la personne. Dans le dossier de Mme Dupuis, on ne connaît pas tous les faits, mais, pour l'ensemble des Québécois puis pour l'ensemble des dossiers religieux, il faut s'assurer que les gens qui aient accès à la chambre, ça soit des proches du patient et que ça ne soit pas n'importe qui qui bloque l'accès à la chambre d'hôpital. Ce n'est pas normal qu'on bloque l'accès à des proches du patient sous des motifs religieux.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Donc, la direction de l'établissement aurait dû, pu, selon vous, expulser ces gens-là qui faisaient entrave au mouvement du personnel et de la famille.

M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas ce que je dis. Ça prend plus d'information là-dessus, mais ce que ça prend surtout, c'est une directive claire. Le ministre doit envoyer une directive claire aux établissements de santé pour dire : Je vous appuie, je vous donne le pouvoir de contrôler l'accès aux chambres d'hôpital. La famille, les proches, c'est tout à fait normal qu'ils soient présents, mais ce n'est pas normal qu'il y ait des individus qui bloquent l'accès aux chambres des patients. C'est incompréhensible.

M. Gagnon (Marc-André) : Mme Maltais du Parti québécois, en point de presse, vient de nous dire qu'elle, ce qu'elle réclame, là, ce que le Parti québécois réclame, c'est qu'un expert externe soit mandaté pour se pencher sur l'endoctrinement, donc, de groupes structurés comme ceux des Témoins de Jéhovah. Est-ce que c'est une idée que vous appuyez? Il serait souhaitable, donc, de mandater un expert externe sur cette question-là?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, je pense que la première des choses, là, c'est vraiment de mettre en place un processus où il va y avoir un juge auquel on va pouvoir faire référence lorsqu'il est question du consentement libre et éclairé. Pour les demandes de Mme Maltais, on peut les étudier, mais ce qui est urgent, c'est vraiment de doter le milieu hospitalier d'un mécanisme qui va permettre d'évaluer le consentement libre et éclairé de la personne. Mais on constate que Mme Maltais est un peu en retard sur la nouvelle 24 heures après. Le Parti québécois vient de constater que c'est important, puis c'est préoccupant, puis que ça touche les Québécois, puis surtout qu'il y a une jeune mère de famille qui est décédée, et c'est ça.

M. Robillard (Alexandre) : C'est quoi, les informations dont vous disposez sur l'ampleur de ce phénomène-là qui pourraient justifier la mise en place des mesures que vous réclamez?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, on a vu dans la littérature journalistique au cours des derniers jours, là, et il y a eu plusieurs entrevues dans les médias, qu'au cours des dernières années il y aurait eu plusieurs personnes qui auraient pu décéder en raison d'une non-transfusion sanguine. La question qui se pose, c'est vraiment : Est-ce qu'on peut institutionnaliser un mécanisme pour donner des outils aux intervenants du milieu hospitalier pour que ceux-ci puissent se tourner vers une ressource externe? Et même le milieu médical le réclame. Le Dr Godin l'a dit : Ce n'est pas à nous à juger de la liberté du consentement. Est-ce qu'on peut avoir une personne indépendante? Est-ce qu'on peut donner les outils au milieu hospitalier pour le faire?

M. Robillard (Alexandre) : Mais, dans le fond, ma question, c'est : Est-ce que ça, selon vous, c'est un phénomène isolé? Êtes-vous en mesure de donner une image claire de la situation que vous dénoncez?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, je ne suis pas un spécialiste des religions, donc je ne peux pas vous dire combien de fois ça arrive. Il faudrait questionner le milieu de la santé à ce niveau-là. Mais, chose certaine, c'est arrivé la semaine dernière et ça pourrait arriver de nouveau. Il y a des situations qui pourraient se produire, puis je pense qu'on devrait être prudents, prévoyants et prévoir ce genre de procédure là dans le cas de raisons... dans le cas de refus qui sont invoqués pour des motifs religieux.

M. Lavoie (Gilbert) : Est-ce qu'à votre avis... Vous êtes avocat, vous savez que, si un médecin décide d'aller à l'encontre de la volonté de la personne, il peut faire l'objet de poursuites. Est-ce que, selon vous, si c'est un juge qui décide que le consentement n'est pas libre et éclairé, donc qui autorise le médecin, à toutes fins utiles, à faire la transfusion sanguine, est-ce que ça protège le médecin contre une poursuite?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, il faudrait évaluer en détail, là, cette situation juridique là. Je ne peux pas donner d'avis juridique là-dessus à brûle-pourpoint, comme ça, mais une chose est certaine, c'est que je pense que la décision raisonnable qui doit être prise dans le dossier puis sur laquelle le gouvernement doit se concentrer et faire preuve de leadership, c'est de prendre action dès maintenant, même si c'est de façon temporaire, jusqu'au moment où le rapport du coroner sera déposé, pour mettre en place une structure qui va permettre à un juge de se prononcer là-dessus.

Mais, pour ce qui est du médecin, à savoir son risque de poursuite, l'évaluation, je pense que ça demande plus de réflexion. Mais généralement, lorsque vous avez un ordre de cour de faire quelque chose, vous êtes protégé.

M. Lavoie (Gilbert) : Oui. La présence du juge ou l'opinion du juge constituera une forme d'ordre de cour, selon vous?

M. Jolin-Barrette : Bien, tout à fait. Bien, en fait, comme vous l'avez dans les ordonnances de garde pour soins en matière psychiatrique, lorsqu'une personne représente un danger pour autrui ou pour elle-même, il y a une ordonnance de sauvegarde qui est prononcée du juge ou il y a une injonction. C'est à peu près l'équivalent, là. L'ordonnance de sauvegarde, c'était un 2.20.46, dans le temps, du Code de procédure civile, mais ça fait en sorte que c'est un ordre de la cour, c'est une obligation de faire. Donc, si vous avez une obligation de faire, vous respectez la loi puis vous respectez ce que le juge a mentionné.

M. Lacroix (Louis) : Mais est-ce que notre système juridique est capable d'absorber des demandes comme celle-là? Parce que, dans un cas de transfusion sanguine, on parle de questions de minutes, là, c'est-à-dire que le médecin doit prendre des décisions très rapides, à savoir si oui ou non… Alors, est-ce que, dans un cas comme celui-là, techniquement, c'est possible de demander à un juge de se prononcer en quelques minutes, à savoir si la décision est bien fondée ou non?

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, deux volets à votre question. Le premier volet, supposons qu'on prend le cas de Mme Dupuis, celle-ci, elle a été une semaine à l'hôpital, donc ils auraient eu le temps. Mais je comprends, comme vous me dites, des fois, c'est vraiment des situations d'urgence.

Présentement, à la cour, il y a des juges de garde en tout temps. Donc, c'est possible de rejoindre… il y a toujours un juge de garde au palais ou il est chez lui, là, on peut dire le juge dans son bureau. Donc, il y a déjà des mécanismes qui font en sorte que, si vous avez besoin d'une injonction d'urgence ou d'une ordonnance de sauvegarde d'urgence en matière civile, c'est possible de rejoindre un juge. Il y a toujours un juge de garde. En matière criminelle, ça se fait déjà. Lorsqu'il y a des télémandats, ça se fait.

Donc, pour le système judiciaire, ce n'est pas une problématique. Les juges sont là, il y a de la disponibilité, et ils vont pouvoir le faire, surtout qu'on n'est pas dans la question des délais où c'est jugé au fond. On parle vraiment d'une injonction, on parle d'une ordonnance de sauvegarde, une ordonnance particulière. Donc, ça se fait très rapidement, et les juges sont habitués à donner ce genre d'ordonnance là ou d'injonction.

M. Lavoie (Gilbert) : Ça marcherait comment, une injonction, dans ce cas-là? L'injonction, elle fait quoi? Elle dit quoi?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, l'injonction va… Vous savez, il y a quatre critères au niveau de l'injonction. Si vous êtes dans le cadre d'une injonction provisoire, c'est plus technique, là, mais vous avez notamment la balance des inconvénients, le préjudice irréparable, l'urgence. Donc, le juge est à même de statuer en fonction des critères qui sont… des arguments qui sont présentés, des propositions. Puis ce qu'on veut, c'est vraiment avoir un second regard sur la décision.

M. Lavoie (Gilbert) : Non, je comprends, mais j'essaie de voir…  Techniquement, l'injonction dirait au médecin : Bien, vas-y, fais une transfusion?

M. Jolin-Barrette : Bien, il faudrait voir les conclusions. Mais la question et le point pour lequel on veut avoir un juge, c'est pour évaluer le consentement. Est-ce que le consentement, il est libre et éclairé? C'est vraiment la base, là, la prémisse, parce que, si le juge constate qu'elle va refuser des soins, mais elle ne donne pas un consentement libre et éclairé, bien, ça veut dire que son consentement est vicié. Donc, si on retourne à la base, là, bien, si son consentement est vicié, bien, sa décision, elle n'est pas libre, et elle ne prend pas conscience véritablement des impacts de sa décision. Donc, concrètement, oui, l'injonction pourrait mener vers cela.

Mais, ceci étant dit, notre position est très claire. On n'attaque pas la liberté de choix, la liberté de consentement. On veut juste s'assurer que, quand le consentement est donné, il n'est pas vicié et il n'y a pas des personnes qui ont fait des pressions indues sur cette personne-là, et dans le cas de Mme Dupuis.

M. Robillard (Alexandre) : Mais l'ordonnance de sauvegarde ou l'injonction à laquelle vous faites référence, elle permettrait aux personnes qui traitent ce patient-là d'aller de l'avant avec les soins requis. C'est ça?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, chaque cas est un cas d'espèce. Le juge…

M. Robillard (Alexandre) : C'est parce que la question de Louis, c'était : Est-ce que les délais médicalement requis vont être respectés? Vous, vous dites : Une ordonnance de sauvegarde va régler toute la question.

M. Jolin-Barrette : Mais ce que je dis…

M. Robillard (Alexandre) : Mais ce que je vous demande, vous, c'est : Est-ce que vous pensez que, quand il y a une ordonnance de sauvegarde, ça autorise le médecin à aller de l'avant avec les soins qui sont requis?

M. Jolin-Barrette : Bien, il faudra voir qu'est-ce que le juge ordonne. Et donc, vous savez, pour les mineurs, supposons, le juge peut ordonner ce genre de chose, ordonner de faire la transfusion sanguine. La question, c'est l'évaluation du consentement. Si la personne refuse les soins, mais qu'elle n'a pas un consentement libre et éclairé, son consentement n'est pas valide.

Excusez-moi. Je suis désolé.

Une voix : C'est poussiéreux ici dedans. Il y a un coup de balayeuse à passer.

M. Jolin-Barrette : Oui. Merci beaucoup.

M. Lacroix (Louis) : J'ai juste une petite… une dernière question. Est-ce que la notion de bien-être de l'enfant, dans le cas de Mme Dupuis, aurait pu être invoquée, par exemple, de dire que le préjudice… bien, en fait…

Une voix : Les intérêts de l'enfant.

M. Lacroix (Louis) : …les intérêts de l'enfant n'auraient pas pu primer sur le droit, justement, de la patiente de refuser le traitement?

M. Jolin-Barrette : Généralement, pour une décision qui concerne un individu, c'est le consentement de l'individu qui compte. À moins que je me trompe, présentement, l'intérêt de l'enfant n'est pas pris en compte dans la grille d'analyse au niveau du consentement, il me semble.

M. Lacroix (Louis) : Est-ce qu'il ne devrait pas l'être, justement? Est-ce que le bénéfice de la présence de la mère n'aurait pas été plus grand pour l'enfant?

M. Jolin-Barrette : On élargit vraiment le débat. La jurisprudence, présentement, ce n'est pas ça qu'elle dit. La loi, ce n'est pas ça qu'elle dit présentement. Pour nous, là, la priorité, c'est vraiment la question du consentement libre et éclairé de la personne qui refuse les soins. C'est vraiment là-dessus puis c'est pour ça qu'on souhaite que le gouvernement mette en place une mesure avec le juge, qu'elle soit temporaire ou permanente, mais il faut vraiment protéger la population puis s'assurer... puis on a un rôle aussi là-dedans, là, au niveau de la protection de l'intérêt public, d'agir dans ce dossier-là.

M. Lavoie (Gilbert) : Mais est-ce que c'est au Québec à faire ça? Ça ne serait pas au Canada? C'est à l'échelle nationale, ça.

M. Jolin-Barrette : Excusez-moi, je n'ai pas entendu votre question.

M. Lavoie (Gilbert) : J'ai dit : Est-ce que c'est au Québec qu'il y a à faire ça? Au fond, c'est à l'échelle nationale, cette question-là. Le problème est le même partout au pays.

M. Jolin-Barrette : Oui, le problème est le même au pays. Par contre, est-ce qu'on peut mettre en place ici, au Québec, des mécanismes? Oui, le gouvernement libéral a tous les outils pour le faire et il devrait le faire.

Mais deux choses : oui, le recours à un juge, mais, deuxièmement, est-ce que le Dr Barrette peut très clairement envoyer une indication à ces établissements de santé que ce sont eux qui sont responsables de la sécurité dans les établissements. Et il doit envoyer une directive claire pour dire : Vous ne tolérez pas des gens qui empêchent l'accès à la chambre à des individus qui sont non membres de la communauté des Témoins de Jéhovah.

M. Lavoie (Gilbert) : Juste une toute, toute, toute dernière. Vous savez comment ça se passe, ces gens-là, les avocats des Témoins de Jéhovah, ils ne rentrent pas dans la chambre, là, ils sont dans la salle d'attente puis ils disent aux parents... ils ne laissent pas rentrer telle, telle, telle personne. Ce n'est pas eux directement qui interdisent l'accès, c'est la famille, c'est la famille des Témoins de Jéhovah. Qu'est-ce que vous faites avec ça?

M. Jolin-Barrette : Bien, ce sont des situations... comme je vous dis, c'est du cas par cas. Il y a des cas d'espèce, mais, supposons, dans les témoignages que vous aviez aujourd'hui dans les journaux, très clairement, il y avait des gens qui veillaient une personne qui était opérée puis ils étaient dans la chambre du patient. Donc, c'est impossible de trancher ça, de dire : dans tel cas ou tel cas... On ne peut pas spécifier directement, mais ça prend une politique générale puis ça prend une indication claire que c'est l'établissement de santé qui contrôle l'accès et surtout que ce n'est pas admissible que des individus bloquent l'accès à la chambre. Merci beaucoup.

(Fin à 11 h 30)

Participants


Document(s) Related