(Quatorze heures cinquante-neuf minutes)
M. Paradis (Lévis) : Merci.
Merci à vous d'être là. C'est un moment important, une loi visant à lutter
contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation
de vulnérabilité. Vous savez, vous savez, le combat... et c'est souvent un
combat, c'est souvent un parcours du combattant, ce que l'on doit tenter
d'obtenir pour nos aînés. J'y suis et je le fais depuis deux ans. Alors,
j'attendais avec impatience le dépôt d'un projet de loi, un projet de loi qui,
à sa première lecture, est assez mince, on en conviendra. Un projet de loi qui,
malheureusement, à sa face même, ne va pas assez loin. Tout ce qui devra être
mis en place... On a aujourd'hui une ébauche, un squelette, mais on manque de
substance, on manque de contenu. Et ça, en ce sens-là, je pense qu'à ce
chapitre-là c'est, quelque part, décevant parce qu'il faut seulement se
rappeler qu'en juin 2014 le journaliste Denis Lessard indiquait déjà que le gouvernement
était à préparer un projet de loi visant à lutter contre la maltraitance. Il y
a deux ans de ça. Alors, on aurait pu s'attendre à quelque chose de plus
intense. Ce n'est pas ce que je lis à sa première lecture.
On dit que le commissaire aux plaintes
devra traiter les plaintes, mais, concrètement, quels pouvoirs aura-t-il?
Quelles sont les ressources dont on disposera? Quelles seront les façons de
faire?
J'ai été étonné de me rendre compte que,
dans le projet de loi... Il y a un dossier qui est extrêmement important et
dont on parle fréquemment, c'est les abus, l'exploitation financière faite aux
aînés. Bien, à ce chapitre-là, je me serais attendu à quelque chose. On n'a
rien concernant l'exploitation financière faite aux aînés, et pourtant, et
pourtant, c'est là des problématiques de maltraitance sérieuses.
Récemment, des gens, sur la place publique,
ont dénoncé des situations extrêmement dramatiques, et là encore on n'est pas
au chapitre ni des explications, ni des sanctions potentielles, ni du comment. On
parle d'une cellule d'intervention proposée par la ministre pour intervenir
rapidement, mais quelles seront les ressources pour ce faire? On demande aux
établissements de se doter d'une politique pour contrer la maltraitance, mais
qu'est-ce qu'on met autour et comment ça se déterminera?
Rien dans la loi pour augmenter le
pouvoir, rien non plus pour le dossier des caméras. Le dossier des caméras, ce
n'est pas d'hier non plus. C'est un combat qu'on a entrepris il y a déjà
plusieurs mois, alors qu'on a déjà des avis juridiques, du Protecteur du
citoyen également, concernant l'installation de caméras. On avait demandé au
gouvernement, qui avait répondu de bonne grâce, on avait demandé au
gouvernement de déterminer de façon claire pour que les aînés sachent, au-delà
du fait que la loi le leur permette, quelles devraient être les règles, comment
baliser l'installation de caméras pour protéger nos aînés comme pour protéger
le personnel qui intervient auprès de nos aînés. On n'a rien eu encore. Et là,
dans ce même projet de loi, bien, à ce chapitre-là, on dira qu'on va déterminer
les modalités par règlement plus tard encore. On est encore dans la notion du
plus tard. Nos aînés demandent une action concrète immédiate.
On parle de dénonciation. Écoutez, je
devrais vous dire que ce projet de loi là, honnêtement, à sa face même, est
moins contraignant, en tout cas, donne l'impression d'aller moins loin que
celui déjà présenté par Marguerite Blais. La dénonciation d'un acte de
maltraitance, c'est une obligation morale, il faudra mettre ça sur la table,
voir jusqu'où on peut aller avec ça, mais une notion extrêmement importante.
Alors donc, c'est assez bref. Mon
commentaire sera aussi bref que la lecture même du projet de loi. Et je vous
dirai, du côté positif, qu'à sa face même je vais travailler de manière
extrêmement concrète pour le bonifier, pour faire en sorte qu'on puisse
répondre et rassurer, faire face aux inquiétudes manifestées par ceux et celles
pour qui on travaille, c'est-à-dire nos aînés à travers le Québec. Je serai là
pour écouter extrêmement attentivement les groupes qui se présenteront. Je
serai là pour tenter de faire bonifier ce projet-là, de mettre, autour de cette
structure, de la substance parce qu'aujourd'hui on en manque. Mais sachez que
je travaillerai dans le but de faire avancer et les droits de nos aînés et la
protection qu'ils méritent.
Ceci dit, est-ce que j'oserai dire qu'on
s'ennuie un peu de Marguerite Blais à travers un projet déjà déposé qui allait,
à mon sens, plus loin que celui-ci? Je pense que nos aînés méritent des actions
concrètes rapides et les moyens d'aller de l'avant. Il faudra voir si on est en
mesure de faire en sorte de pouvoir pousser davantage et d'accomplir ce qu'il
faut. Et je serai là pour le faire. Et sachez que, depuis deux ans, je suis
constamment intervenu, constamment, sur des problématiques d'abus et de
maltraitance faits à nos aînés. Bien, à partir de ce moment-ci, tout comme il y
a deux ans et jusque ça soit accompli, je continuerai à faire ce même travail.
Merci.
Le Modérateur
: Merci,
M. Paradis. Charles Lecavalier, Journal de Québec.
M. Lecavalier (Charles) :
Bonjour, M. Paradis. Le gouvernement veut baliser l'usage des caméras. Pour
l'instant, c'est tout à fait légal, là, d'en installer. Le gouvernement veut le
baliser. Pour l'instant, l'usager a tous les droits, et là le gouvernement veut
trouver un juste milieu entre le droit à la vie privée des usagers, le droit
des employés parce que c'est leur milieu de travail. Alors, est-ce que vous
avez l'impression que le gouvernement veut restreindre l'usage des caméras?
Est-ce que c'est votre lecture?
M. Paradis (Lévis) : Vous
savez, on a souvent confronté, dans le dossier des caméras, le droit des travailleurs
versus le droit des aînés. Je vous dirai que, très personnellement, pour moi,
le droit des aînés est inattaquable. On a déjà des textes qui nous permettent,
vous venez de le dire... qui nous disent clairement qu'un aîné peut installer
une caméra sans être obligé d'en référer à qui que ce soit. C'est un droit. On
a des avis là-dessus.
Ce que je remarque dans ce document-là, c'est
qu'on tarde encore à préciser la façon de faire. Et on l'avait demandé au gouvernement.
À la suite de questions posées au salon bleu, de dossiers sur la place
publique, on a demandé : Il y a un avis, les aînés sont en droit de le
faire, mais dites-leur de façon claire les balises que vous souhaiteriez. Aidez-les
à prendre une décision. Ça fait des mois de ça, des mois. On n'a rien fait,
puis, à ce moment-ci dans ce document-là, on ne fait rien non plus. Alors, on
achète du temps. Alors, on retarde. On tarde encore une fois de permettre à nos
aînés d'avoir un outil qui pourrait et les protéger et aussi protéger le
personnel soignant autour de nos aînés. C'est à double sens. Et, dans ce
dossier-là, je suis déçu qu'on n'ait pas avancé davantage et qu'on n'ait pas eu
ces fameuses balises que l'on souhaitait déjà depuis longtemps.
M. Lecavalier (Charles) :
Concernant les établissements privés, on sait que le gouvernement, dans le projet
de loi, veut protéger, là, les plaignants et les lanceurs d'alerte qui vont
faire des plaintes au commissaire aux plaintes, mais ça, c'est dans le réseau
public. Dans le réseau privé, on leur dit : Bien, vous pourrez faire une
plainte à la police. Est-ce que vous avez l'impression qu'il y a une espèce de
deux poids, deux mesures puis que les gens du réseau privé vont être moins bien
protégés que dans le réseau public?
M. Paradis (Lévis) : Ce
que je vous dirai, c'est que la maltraitance, peu importe où elle se passe, ça
reste de la maltraitance. La maltraitance dans une résidence privée, dans une
résidence publique, à la limite dans l'environnement de vie de l'aîné, où qu'il
soit, ça demeure de la maltraitance. Pour moi, le principe de dénonciation, il
y a une obligation morale faisant en sorte qu'on doive aussi dire aux autres
milieux d'intervenir en ce sens-là. Oui, de fait, de ne pas parler des
résidences privées par rapport aux résidences publiques à cet égard-là, tant
qu'à moi, on a une problématique, là. On a une problématique majeure parce que
ça donne l'impression qu'une action est moins importante à un endroit qu'à un
autre. Ce n'est pas ça, la réalité. Pour un aîné maltraité, un aîné qui vit de
la maltraitance, un aîné qui vit de l'exploitation, peu importe où il se
trouve, il devrait trouver, à travers les lois que l'on propose, les actions
que l'on dicte, le droit d'agir et de réagir également.
M. Lecavalier (Charles) :
Merci.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Bonjour, M. Paradis. Juste une précision. Est-ce qu'il aurait dû y avoir
une procédure universelle de dénonciation qui engloberait à la fois les
résidences privées, les CHSLD et aussi les cas de maltraitance dans des
résidences privées?
M. Paradis (Lévis) :
Écoutez, au chapitre de la dénonciation, il va falloir qu'on mette des choses
sur la table. Actuellement, je vous le disais, c'est un projet de loi qui,
malheureusement, n'a pas la substance que j'aurais souhaitée à peu près à tous
égards, à celui-là également.
Quand je vous dis qu'on devra mettre de la
substance autour du squelette, c'est ce qu'on devra faire et à ce chapitre-là
également. Et je pense qu'à travers l'audition des mémoires que nous aurons, à
travers les discussions, j'ose espérer, extrêmement constructives que je
souhaite avoir, il va falloir qu'on mette sur la table cette problématique-là,
de ne pas faire deux poids, deux mesures avec des résidences publiques et des
résidences privées au chapitre d'une notion aussi grave que la maltraitance
sous toutes ses formes, y compris celle dont je parlais il y a deux instants,
dont on parle très peu : les fraudes financières et l'exploitation
financière, qui sont aussi une forme de maltraitance et dont on nous dit qu'elles
sont exponentiellement mises au jour.
Alors, tout ça devra être mis sur la
table. Et j'ose espérer et je demande à la ministre d'avoir une ouverture peu
commune pour faire en sorte qu'on puisse mettre du mordant dans, manifestement,
un projet qui manque de crocs.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Comment vous expliquez ça... En fait, la ministre, elle est dédiée corps et âme
à la rédaction de ce projet de loi là depuis plusieurs mois. C'est sa
principale et unique responsabilité, hormis tout le dossier de l'intimidation.
Vous jugez que ça manque de coffre?
M. Paradis (Lévis) :
Bien, écoutez, il suffit d'en faire la lecture pour se rendre compte que,
manifestement... Vous avez plein d'interrogations, j'ai plein d'interrogations,
les aînés le sont également. Est-ce que les aînés vont se réjouir? Est-ce que
des groupes vont se réjouir du fait qu'on travaillera sur une loi visant à
contrer la maltraitance? On va tous se réjouir du fait qu'on ait quelque chose
sur quoi travailler.
Je vous rappelle qu'en 2014 on savait déjà,
par le biais Denis Lessard, que quelque chose se préparait. 2014 à maintenant,
c'est deux ans et demi. Deux ans et demi de réflexion. À travers ce que l'on
rapporte, ce que les médias vous rapportent, ce qu'on a mis en lumière, des
dossiers extrêmement inquiétants concernant nos aînés, on arrive avec quelque
chose qu'on devra bonifier, à défaut de quoi ça reste un peu vide. Et, en ce
sens-là, oui, c'est étonnant qu'on ait abouti à un projet de loi... Mais je me
fais le devoir de proposer constructivement de lui donner de la substance en
espérant que la ministre sera ouverte à se rendre compte qu'à bien des égards
on ne va pas assez loin.
Le Modérateur
:
D'autres questions? Merci beaucoup.
M. Paradis (Lévis) :
Merci.
(Fin à 15 h 10)