(Quatorze heures neuf minutes)
Mme David (Outremont) :
Alors, bonjour à tous. Au cours des dernières semaines, des voix se sont
élevées pour dénoncer des propos et des gestes sexuels dégradants ainsi que des
actes de violence sexuelle qui ont été commis sur des campus du Québec. Depuis
samedi dernier, c'est toute la population qui s'élève contre les gestes et les
agressions à caractère sexuel qui sont survenues à l'Université Laval.
Si j'ai tenu à être présente sur le campus
de l'Université Laval durant les derniers jours et à assister, hier soir, à la
vigile, c'est pour offrir mon soutien et celui de notre gouvernement aux
victimes ainsi qu'à toute la communauté universitaire. Les événements qui se
sont passés depuis un certain temps sur les campus universitaires choquent le
Québec. Comme vous, j'ai été touchée profondément par les révélations qui ont
été faites par les victimes d'agression.
Je souhaite maintenant que le Québec
tienne un véritable débat de société sur le grave problème que constituent les
violences sexuelles dans les cégeps, les collèges privés et les universités.
J'annonce donc aujourd'hui la tenue de quatre journées de réflexion avec les
partenaires, que ce soient les dirigeants, les professionnels des bureaux de
prévention, les associations étudiantes ainsi que toutes les communautés
collégiales et universitaires afin de convenir ensemble de moyens pour mieux
prévenir et contrer les violences à caractère sexuel sur les campus
universitaires et les collèges du Québec. Ces journées de réflexion se
tiendront à Montréal, à Québec, à Gatineau, à Saguenay d'ici le mois de
mars 2017. Pour ces journées, je serai accompagnée des partenaires des
réseaux. J'appelle tous les acteurs du milieu à travailler ensemble pour
trouver des solutions durables qui feront en sorte que les violences à caractère
sexuel seront éradiquées.
Nous désirons, par ce processus, faire en
sorte de développer des balises et des pratiques communes qui seront enchâssées
dans une politique-cadre ou dans une loi-cadre. Nous voulons devenir, avec ces
mesures, parmi les plus engagés, parmi les plus progressistes en Amérique du
Nord, en offrant à nos étudiantes et nos étudiants les meilleures conditions
pour poursuivre leurs études dans des établissements exempts de violence à
caractère sexuel. Je demande par ailleurs à tous les établissements d'organiser
leurs propres démarches de réflexion avant ces quatre journées afin de définir,
avec les membres de leurs communautés, au premier titre les étudiantes et les
étudiants, les balises et les orientations qui pourraient être recommandées au
gouvernement. Plusieurs d'entre eux ont déjà des politiques ou règlements
concernant le harcèlement sexuel. Je les invite à me soumettre les améliorations
qui devraient y être apportées en se basant sur les meilleures pratiques.
Au terme de ces réflexions que nous
mènerons ensemble, nous serons en mesure d'adopter des solutions encadrantes
qui constitueront une réponse ferme et claire à la violence à caractère sexuel
qui est perpétrée dans les établissements d'enseignement supérieur du Québec.
Je défendrai sans réserve le principe fondamental qui est la pierre d'assise de
toute société : tous les étudiants et toutes les étudiantes ont droit au
respect de leur dignité et de leur intégrité.
Je souhaite qu'aujourd'hui marque un
moment fort de notre réflexion et de notre engagement à enrayer la violence à
caractère sexuel dans les collèges et les universités du Québec. La violence à
caractère sexuel, peu importe la forme prise, est inacceptable. La réponse que
nous devons donner ensemble doit être forte et c'est à cette tâche que je nous
convie tous. Merci beaucoup.
Le Modérateur
: Merci.
On va passer à la période des questions, micro de droite, puis je vous demande
de limiter vos interventions, s'il vous plaît, à une question, sous-question.
M. Chouinard (Tommy) : Bonjour,
Mme David. Tommy Chouinard, LaPresse. D'abord, une question
qui s'impose : Que savez-vous de l'état d'avancement des vérifications qui
sont faites, au sein de la députation libérale, quant à l'identité du présumé
agresseur?
Mme David (Outremont) : Ah!
écoutez, le premier ministre s'est prononcé là-dessus, je pense qu'il a été
très, très ferme et il a été aussi ferme sur les mesures qu'il entend prendre,
si jamais il y avait des fondements aux allégations.
M. Chouinard (Tommy) : Donc,
à ce jour, personne ne s'est manifesté, à votre connaissance?
Mme David (Outremont) : À ce
jour, je pense que les travaux sont en cours.
M. Chouinard (Tommy) : D'accord.
Maintenant, sur ce que vous proposez, vous promettez donc une loi-cadre.
Mme David (Outremont) : Ça
peut aller jusqu'à une loi-cadre, une politique-cadre ou une loi-cadre...
M. Chouinard (Tommy) :
Précisément sur...
Mme David (Outremont) : Sur la
prévention pour contrer les violences à caractère sexuel dans les
établissements collégiaux et universitaires. Il y a l'Ontario, il y a le
Manitoba qui ont adopté de telles lois.
Une loi, qu'est-ce que ça veut dire? Ça
veut dire qu'il y a des grands principes émis, enchâssés dans une loi. Ça veut
dire quelque chose, une loi, ça veut dire une reddition de comptes, ça veut
dire qu'il y a des balises communes à tous les établissements collégiaux,
universitaires. Ça veut dire qu'il doit y avoir des mesures de sécurité, des
mesures de prévention, des mesures de soutien en cas d'agression sexuelle, et
ça peut aller évidemment à déférer à des avocats pour des plaintes et à la
police pour des plaintes criminelles, mais ça prend, je dirais, toute une
armature de services, autant de soutien, de prévention, parce qu'il faut aussi
faire de la prévention dans ces événements-là, dans toute la question de ce que
les gens ont dit être une culture plutôt malsaine, dans certains cas, et ça
comprend aussi toutes les questions qui entourent les initiations, l'alcool.
Alors, je veux être bien claire qu'on ne
parle pas que pour encadrer les agressions sexuelles, qui, elles, évidemment,
sont enchâssées dans d'autres lois criminelles, mais c'est aussi une loi qui va
pouvoir baliser et encadrer les activités d'accueil et d'intégration.
M. Chouinard (Tommy) : Pour
bien comprendre, est-ce que vous considérez qu'il y en a une, culture malsaine
dans nos institutions universitaires, collégiales?
Mme David (Outremont) : Écoutez,
je dirais surtout que les associations étudiantes, les bureaux, les règlements
que la plupart des universités et des collèges ont déjà marquent une
sensibilité à la situation. On ne part pas de zéro. Il y a eu un rapport remis
vendredi dernier par le Bureau de coopération interuniversitaire pour prévenir
et contrer... Il y a plusieurs recommandations déjà assez structurantes. Ce
sont des recommandations. Je veux aller beaucoup plus loin et je veux faire ce
débat, justement, dans quatre régions du Québec où il y a des pôles collégiaux
et universitaires, de là les choix. Je veux entendre les gens. Je veux que les
gens puissent s'exprimer et qu'on arrive à un encadrement significatif.
Le Modérateur
: Micro
de gauche.
M. Bellerose (Patrick) :
Bonjour, Mme David. Patrick Bellerose du Huffington Post Québec. Ce
matin, l'amie d'Alice Paquet a révélé que l'agression aurait été violente,
aurait nécessité des points de suture par la suite. En tant que députée
libérale, êtes-vous à l'aise de siéger aux côtés d'un homme sur qui pèsent de
telles allégations?
Mme David (Outremont) : Écoutez,
les choses sont en cours. Il y a des vérifications qui sont faites, et c'est
évident que, s'il y avait quelqu'un qui était accusé de quelque agression
sexuelle que ce soit, ça serait intolérable de siéger avec quelqu'un comme ça.
On n'en est pas là. Il y a des travaux qui se font. Le premier ministre a été
ferme, il a dit exactement la même chose. Donc, attendons, et je pense qu'ils
sont en train de travailler assez activement.
M. Bellerose (Patrick) : Est-ce
que vous souhaitez que le député se retire le temps que la lumière soit faite
sur les allégations?
Mme David (Outremont) :
Écoutez, le premier ministre a les choses bien en main. Je pense qu'il ne peut
pas être plus ferme qu'il ne l'a été. C'est inacceptable, si des faits sont
avérés, que ce soit pour n'importe qui, qu'il soit du plus riche au plus
pauvre, de celui qui a le plus de pouvoir à tous les membres de la société.
C'est inacceptable.
Alors, je voudrais répéter aussi qu'il y a
des... la grande majorité sont des femmes, il y a aussi des hommes. Je suis en
support à toutes les victimes d'agression sexuelle, hommes ou femmes, et quelle
que soit, justement, l'agression, à partir du moment où c'est une agression
avérée par l'État de droit, disons-le comme ça, c'est totalement inacceptable,
et j'appelle tous les membres de la société... Vous étiez peut-être là hier
soir, où on écoute les déclarations de tout le monde. Il faut appuyer ce
mouvement-là. Je porte fièrement le macaron Sans oui, c'est non! et j'ai
tellement... Je suis intervenue plusieurs fois depuis le mois de septembre.
Quand ce n'est pas une université, c'est une autre, une activité, une autre,
là. J'ai quitté, c'était le nouveau président de l'Université d'Ottawa qui
intervenait.
Vous savez, ce n'est pas propre au Québec,
hein? Mais pourquoi le Québec ne pourrait pas être à l'avant-scène, à
l'avant-garde, être le plus progressiste? On s'est montrés très progressistes
dans plusieurs, plusieurs dimensions de la société. On est rendus là pour les
collèges, les universités, et je vais porter jusqu'au bout cette démarche.
M. Bellerose (Patrick) : Mais
vous souhaitez que la lumière soit faite rapidement, j'imagine, dans le cas du
député?
Mme David (Outremont) :
Pardon?
M. Bellerose (Patrick) : Mais
vous souhaitez que la lumière soit faite rapidement, j'imagine, dans le cas du
député?
Mme David (Outremont) : Bien,
tout le monde souhaite que la lumière soit faite rapidement, c'est évident.
Le Modérateur
: Merci.
Micro de droite.
Journaliste
: Bonjour, Mme
David. Vous étiez présente à la vigile hier, donc vous étiez présente lors du
témoignage de la présumée victime. Comment avez-vous réagi sur le coup, là?
Mme David (Outremont) : J'étais
présente pour l'ensemble des témoignages. J'étais présente pour d'autres
témoignages. J'étais à plusieurs émissions de télévision. J'ai rencontré Mélanie,
Kimberley, Ariane, les trois qui… Demain, d'ailleurs, je serai avec elles au
lancement de leur site, de leur mouvement, Québec sans violence sexuelle. Et
donc j'ai parlé avec elles, j'ai entendu tous les commentaires. Je pense, j'ai
été assez bouleversée et que je l'ai dit assez clairement. Alors, que ça soit
une agression sexuelle ou une autre, toutes les agressions sexuelles n'ont pas
de place dans notre société.
M. Dutrisac (Robert) : Mais
le fait que ce soit un de vos collègues, présumément, est-ce que ça vous a…
Mme David (Outremont) : Il n'y
a pas de bonne agression sexuelle et de mauvaise agression sexuelle. Il y a une
agression sexuelle et que la personne...
M. Dutrisac (Robert) : Mais
vous avez dû être choquée, sur le coup, d'apprendre ça.
Mme David (Outremont) : Il n'y
a pas d'agression sexuelle bonne ou mauvaise, il y a une agression sexuelle,
quelle que soit la personne qui perpètre l'infraction. Alors, je le redis,
c'est extrêmement important de prendre ça très au sérieux. Que ça soit un collègue,
que ça soit dans nos milieux de travail, que ça soit dans notre famille, dans
notre entourage, il n'y a aucune raison pour ne pas dénoncer. Et je répète
encore une fois, je l'ai dit, je salue le courage de ces femmes.
Dans ce cas-ci, ce sont, je pense, à peu
près toutes des femmes, actuellement, qui ont ce courage de dénoncer. Vous
n'étiez peut-être pas là hier, mais il y en avait une autre qui parlait de
quelqu'un qui était dans la foule et qui avait été… en tous cas, elle a raconté
son épisode. Il y a eu des épisodes vraiment assez dramatiques pendant cette
soirée-là, et nous sommes de tout cœur avec ces femmes et ces hommes qui
peuvent être victimes.
M. Dutrisac (Robert) : La
décision que vous annoncez, les quatre journées, cette décision-là, ça peut…
Quand est-ce que, justement, cette décision-là a été prise, là? Ça a-tu été
ratifié par le conseil des ministres ou…
Mme David (Outremont) : Bien,
écoutez, moi, je… 22 février 2016, j'arrive au ministère de l'Enseignement
supérieur. Ça ne fait pas si longtemps, le temps passe vite, mais… et là il y a
eu plusieurs événements, les uns après les autres, ETS entre autres...
M. Dutrisac (Robert) : Oui,
les initiations…
Mme David (Outremont) : Non,
non, même avant ça, même avant ça. ETS, John-Abbott. On est au mois de mai, on
est au mois de juin, juillet… Le 12 août, je demande à mon attaché politique de
dire : Écoute, j'ai assez vécu longtemps dans les universités, là. Depuis
deux ans, là, je suis à la culture, j'ai quitté le milieu, mais le début d'année,
des fois, là, attention. Où on en est dans l'encadrement des activités
d'accueil et d'intégration, qu'on peut appeler aussi initiations?
Donc, on a le courriel. On a écrit à tous
les collèges, les universités et toutes ont collaboré, nous ont répondu : Voici
nos politiques, voici comment on fait ça. Et je suis allée, j'oserais dire, de
bonne surprise en bonne surprise, parce qu'il y a de l'encadrement, il y a la
formation des nouveaux présidents, vice-présidents, des officiers, qu'on
appelle, des associations étudiantes. Il y a des balises claires : pas de
nudité, pas de consommation excessive d'alcool, vous êtes toujours représentant
votre université si c'est une activité autour d'activités d'accueil et d'initiation.
Alors, il y a vraiment les associations...
n'oubliez pas qu'il y avait en même temps la campagne Sans oui, c'est non!, qui
a été initiée vraiment par les étudiants, la FAECUM en particulier, et les
bureaux de prévention de harcèlement. Donc, ils ont parti cette campagne-là, tout
le monde a adhéré, toutes les universités, les collèges sont en processus pour
adhérer. Et donc, dès le mois d'août, je me disais : Comment va se passer
le début d'année? Bien, j'ai été servie, savez-vous quoi, parce que je ne
pensais jamais que je me retrouverais, depuis à peu près le jour du forum des
idées...
Souvenez-vous, Philippe Lessard, qui écrit
cet article, et tout de suite j'ai réagi, j'ai donné une entrevue dès
l'après-midi et, depuis ce temps-là, écoutez, je m'aperçois que tout n'est pas
pour le mieux, et là c'est moi qui suis la ministre de l'Enseignement
supérieur, c'est moi qui ai, à tout le moins, au moins, le pouvoir de changer
un certain nombre de choses, si tant est qu'on a la possibilité, quand on
est au gouvernement, puis je ne suis pas venue en politique pour rester passive
à regarder les choses. Donc là, je me suis dit : Hélène, c'est le
temps, tu vas faire quelque chose, si tu peux laisser un petit peu ta trace de
ton rôle à l'Enseignement supérieur en disant : Ça, on va essayer
d'avancer, bien, me voilà avec ça. Donc, ça ne fait pas d'hier que je pense à
ça, mais là, vraiment, on va y aller de façon très, très, très structurante, et
je pense qu'on pourra tous être fiers d'un encadrement qui répond aux
meilleures pratiques mondiales.
Le Modérateur
: Merci.
Micro de gauche.
M. Boivin (Simon) : Bonjour,
Mme David. Simon Boivin du Soleil. La situation est pire que ce à quoi à
vous vous attendiez, c'est ce que je comprends de vos propos.
Mme David (Outremont) : Bien,
c'est-à-dire que chaque année, hein, revoyez vos entrées universitaires ou
collégiales depuis 10, 15 ans, à peu près toutes les institutions, quand ce
n'est pas une association étudiante, un party ici, un party là...
M. Boivin (Simon) : Mais par
rapport à vos attentes à vous.
Mme David (Outremont) : Mais
là, moi, c'est la première fois que j'entre comme ministre de l'Enseignement
supérieur, avec, j'oserais dire, le privilège et le poids de la responsabilité.
Donc, j'ai un regard extrêmement ouvert là-dessus et vigilant et donc je me
suis dit : Là, il me semble que c'est inacceptable. Je l'ai dit dès le
samedi d'il y a trois semaines, je pense, là, le forum des idées — un
mois, ça passe vite — j'ai dit : C'est inacceptable, j'ai
l'impression qu'on n'a pas avancé, malheureusement.
M. Boivin (Simon) : Et par
rapport à hier, à partir du moment où vous avez entendu la jeune femme faire
son témoignage, qu'est-ce que vous avez fait? Est-ce que vous avez prévenu le
bureau du premier ministre de ce que vous veniez d'entendre? Qu'est-ce que vous
avez fait avec ce témoignage?
Mme David (Outremont) : Bien,
écoutez, je pense que ce n'est pas moi, là. Moi, j'étais là, devant, et on est
restés jusqu'à la fin, moi et mes collègues, et il y a certainement eu
rapidement une information qui a été envoyée. Donc, c'est tout ce que je peux
vous dire.
M. Boivin (Simon) : Et sur la
politique-cadre que vous prévoyez mettre en place, qui dit…
Mme David (Outremont) : Ou
loi, ou loi.
M. Boivin (Simon) : …ou une
loi, qui dit loi, dit souvent sanctions pour ceux qui ne la respectent pas. Je
comprends que vous pouvez déférer aux autorités policières des agissements de
nature criminelle, mais il y a d'autres choses dans les initiations qui ne sont
pas nécessairement criminelles, mais que…
Est-ce que les universités sont assez
sévères? Est-ce que c'est l'approche punitive, dissuasive que vous allez
suggérer aux universités et aux établissements d'enseignement pour…
Mme David (Outremont) : Bien,
je vais vous dire deux choses à ce sujet-là puis je vous remercie de me faire
penser à des aspects dont je voulais parler avec vous, discuter. Je vais
soutenir financièrement, ils sont déjà avertis, et je l'ai dit
publiquement, l'organisation de cette campagne Sans oui, c'est non!.
C'est une belle organisation, fantastique, tripartite : associations
étudiantes, responsables des bureaux de prévention et de harcèlement et les
dirigeants universitaires, et je vais demander qu'ils me donnent un rapport
rapidement sur la question des initiations. Qu'est-ce qu'on peut faire…
Parce que moi, je suis de celles qui
pensent que tu arrives à l'université, tu es jeune puis tu as le goût de
t'intégrer, de connaître tes collègues. Puis ça date de siècles, là, ça fait
très longtemps que les initiations existent. Ce n'est pas nécessaire d'être
dégradants. Ce n'est pas nécessaire d'être idiots — je le dis
vraiment — et d'avoir des activités qui sont vraiment, là, d'un
ridicule consommé, où il y a consommation d'alcool, souvent, un peu trop et où
il y a des espèces de jeux sexuels que, ma foi, je ne pensais plus qui
existaient, honnêtement. Et, bon, ça existe et, s'il y a quelque chose qu'on
aura fait cet automne et qu'on va continuer cette année par cette loi, c'est
bien de faire prendre conscience à tout le monde et que tout le monde,
collectivement, se disent : On arrête ça là, c'est terminé. On en fait, des
activités d'accueil et d'intégration, on peut appeler ça initiation, mais on le
fait dans le respect d'un certain nombre de balises, et c'est ce vers quoi je
veux aller.
M. Boivin (Simon) : Je vous
parlais de l'aspect punitif, des expulsions, des sanctions. C'est de l'aspect
punitif dont je vous parlais.
Mme David (Outremont) :
Écoutez, les associations étudiantes sont déjà très impliquées, forment les
nouveaux dans les responsables d'associations étudiantes sectorielles, parce
que tu as les associations mères, si vous voulez, comme la FAECUM, mais il y a
peut-être 48 associations étudiantes : sciences politiques, droit, psychologie,
sociologie, anthropologie. Donc, il faut les former et leur dire :
Attention, vous avez une certaine vigilance et, oui, peut-être une certaine
imputabilité. C'est peut-être le genre de chose qui pourra être mise dans les
balises, et puis à ce moment-là, à partir du moment où il y a de
l'imputabilité, bien, il peut y avoir des conséquences s'il y a des choses
malheureuses qui se passent. Et je pense que…
Ce que j'apprécie et que je trouve
extraordinaire de courage… Prenez l'exemple de la faculté de droit, il y a
toujours bien des étudiants qui sont venus se plaindre puis il y a des
étudiants qui ont accepté d'écrire dans le journal. Mais, pour ça, il fallait
que des mains se lèvent, que des voix s'élèvent pour dire : C'est
ridicule, on a été soumis à ça. Il y en a d'autres, à l'UQO, qui ont mis sur
Facebook qu'est-ce que c'était, les 12 travaux d'Hercule. Vous les avez sûrement
regardés, vous avez dit : Mon Dieu, ce n'est pas possible. On a vu, à l'Université
d'Ottawa, l'histoire des pyramides des Vet's, quelque chose, là, des... Alors,
chacun a ses choses comme ça, et c'est ce genre de choses qu'on ne veut plus
retrouver.
Le Modérateur
: Micro
de droite.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Philippe-Vincent Foisy de Cogeco. Quel message ça envoie quand un député
ex-ministre semble banaliser un peu les allégations, que le premier ministre,
qui est le patron de celui qui est présumément agressé, dit : On ne se
mettra pas à jouer aux enquêteurs ici? Quel message ça envoie?
Mme David (Outremont) : Bien,
écoutez, je ne sais pas si vous faites référence au collègue de Dubuc ou à
d'autres choses parce que c'est des propos qui sont vraiment déplorables, je le
dis. Mais il s'est excusé, et c'est tout à son honneur. Le premier ministre a
été ferme, il a dit : Je vais agir, je vais agir rapidement, et toute situation
inacceptable ne sera pas tolérée.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Juste pour m'assurer que j'ai bien compris, tantôt vous avez dit : Si un
de vos collègues devait être accusé d'agression sexuelle, ce serait intenable
ou inacceptable de siéger avec lui. C'est ça?
Mme David (Outremont) : Bien,
écoutez, s'il était accusé et trouvé coupable d'agression sexuelle, d'abord, je
pense qu'il ne serait plus député de toute façon. S'il était trouvé coupable, il
serait... vous savez, c'est une infraction au Code criminel.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Mais donc, le seuil pour l'expulsion du caucus, c'est quoi? C'est les
accusations? C'est...
Mme David (Outremont) :
Écoutez, un, ce n'est pas moi, le premier ministre; deux, on a un premier
ministre qui prend les choses très au sérieux, qui travaille, en ce moment même,
à regarder, à faire un peu enquête, et il prendra les décisions, et je pense
que les lignes directrices qu'il a partagées avec vous ce matin étaient assez
fermes. En tout cas, je vous...
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
C'est parce que tantôt vous avez dit «accusé». Là, vous dites «reconnu
coupable». Juste m'assurer... C'est quoi, votre position?
Mme David (Outremont) :
Reconnu coupable, reconnu coupable.
M. Foisy (Philippe-Vincent) :
Pour quitter le caucus.
M. Lecavalier (Charles) :
Bonjour, Mme David. Charles Lecavalier, Journal de Québec. Comme
ministre, est-ce que vous croyez qu'il y a une culture du viol sur les campus,
comme certains groupes féministes le disent?
Mme David (Outremont) : Bien,
écoutez, on parle de violence à caractère sexuel. Vous allez dire «violence»,
il y a le mot «viol», mais ce ne sont pas tous des viols et heureusement. Mais
j'inclus dans les violences à caractère sexuel... «À caractère sexuel», c'est toute
cette hypersexualisation de certaines activités où il y a carrément des gestes
dégradants. Il y a eu des exemples de gens qui ont témoigné d'ailleurs à Tout
le monde en parle ou à d'autres émissions, à J.E., etc.
Donc, ça, ce sont des violences à caractère
sexuel, qui ne sont pas nécessairement des viols, on s'entend, mais c'est aussi
inacceptable. C'est inacceptable d'avoir des comportements comme ça, et je
pense qu'en 2016, bientôt 2017, on pourra se dire qu'on ne l'accepte plus
jamais.
M. Lecavalier (Charles) : Et
je ne sais pas si vous abordez cette question-là, mais un débat qui fait
rage... je sais qu'aux États-Unis, par exemple, il y a des universités qui ont
interdit des professeurs d'avoir des relations même consentantes avec leurs
étudiantes, parce que, bon, parfois, on donne les bourses, on est employeurs,
il peut y avoir une relation malsaine. Est-ce que ce ne serait pas une
réflexion qu'on devrait avoir au Québec?
Mme David (Outremont) :
Écoutez, peut-être que c'est quelque chose qui va arriver. Moi, j'étais
professeur à l'université, dans les années où les gens commençaient à en parler
plus, des étudiantes commençaient à dévoiler, ou des étudiants, c'étaient plus
des étudiantes, encore une fois. Mais ça concerne toutes les relations de
pouvoir, et être un professeur, c'est être en pouvoir. Tu évalues ton étudiant,
tu lui fais passer son doctorat ou pas, sa maîtrise. Tu es vraiment dans une
relation où il faut faire attention parce que les étudiantes, disons, ou
étudiants sont majeurs, mais, quand on est dans une relation de pouvoir, disons
qu'on doit se garder... pas une petite gêne, une grosse, grosse gêne.
Et il y a carrément des lieux, comme les
ordres professionnels, par exemple, les médecins... Il y a un article d'Yves
Boisvert, récemment, là, sur un... dans le Collège des médecins, un médecin qui
a été radié, qui avait une réflexion là-dessus. Quand on est un professionnel
avec une relation de pouvoir, bien, il y a des choses qui ne se font pas et il
y a des radiations et des sanctions. Ça, ce sont les ordres professionnels.
Quand on est à l'université, c'est une
relation de pouvoir qui n'est pas sanctionnée par un ordre, ce sont des adultes
dits consentants ou pas consentants, mais il y a quand même une relation de
pouvoir, donc, je dirais, prudence, grande prudence. Merci.
(Fin à 14 h 32)