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Point de presse de Mme Véronique Hivon, porte-parole de l’opposition officielle en matière de justice, et M. Pascal Bérubé, leader parlementaire de l’opposition officielle

Version finale

Friday, December 2, 2016, 9 h

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Neuf heures deux minutes)

Mme Hivon : Vous avez vu l'accumulation, depuis hier, de sorties en règle des juges, des juges en chef, autant de la Cour du Québec, chambre criminelle, que de la Cour supérieure aujourd'hui. C'est absolument du jamais-vu de voir que, face à cette crise sans précédant qu'on vit dans le milieu de la justice criminelle, que les juges en chef en soient rendus à sortir de leur réserve judiciaire, à sortir sur la place publique pour demander de toute urgence des ressources supplémentaires. Vous avez vu que, ce matin, on apprend que ce sont même des causes de meurtre et des dizaines de causes de meurtre qui sont en péril au Québec, à cause des délais déraisonnables, à cause de l'incurie et de l'inaction du gouvernement actuel, de la ministre de la Justice qui voyait cette crise arriver, pour qui c'était une crise annoncée et qui n'a pas bougé, malgré qu'on l'ait interpellée depuis des mois, depuis le début de l'année 2006, et depuis il y a eu l'arrêt Jordan.

Alors, on vient de décider, et Pascal va expliquer en détail la procédure, on vient de décider à notre caucus qu'on demandait aujourd'hui un débat d'urgence sur la crise des délais judiciaires dans notre système de justice criminelle, pour que cette hémorragie cesse, pour qu'il y ait des mesures urgentes qui soient mises de l'avant, pour que la ministre doive s'expliquer et nous dire aujourd'hui ce qu'elle va faire pour stopper l'hémorragie et pour faire en sorte que des criminels, que des accusés ne s'en sortent pas pour une question de procédure, pour une question de délais indus.

M. Bérubé : Merci, Véronique. En ma qualité de leader parlementaire de l'opposition officielle et en vertu des dispositions des articles 88 à 93 du règlement de l'Assemblée nationale du Québec, j'ai signé, ce matin, une demande pour la tenue d'un débat d'urgence portant sur le manque de ressources du système de justice. Alors, ce débat se tiendrait après la période de questions, c'est un débat restreint de deux heures. Il n'y a pas de vote, mais c'est une procédure exceptionnelle, compte tenu des circonstances exceptionnelles, compte tenu de la nature de l'enjeu. Alors, notre responsabilité, comme opposition officielle, c'est de se faire écho à toute la communauté juridique et de demander ce débat qui s'impose.

Alors, c'est déjà signé. Évidemment, ça devra passer le test de la recevabilité du président de l'Assemblée nationale, mais c'est en cours présentement.

M. Caron (Régys) : Un débat d'urgence, ça va donner quoi?

M. Bérubé : Bien, d'abord, ça démontre toute l'importance que nous y accordons et ça donne plus d'espace à la ministre pour s'expliquer là où ça compte à l'Assemblée, auprès des parlementaires. Mais soyez assurés qu'il y a beaucoup de monde qui vont écouter avec attention les propos de la ministre, et Véronique pourra compléter sur les attentes qu'on a.

Mme Hivon : Oui. Bien, écoutez, plusieurs d'entre vous étaient ici lundi, alors depuis lundi que j'ai sonné l'alarme parce qu'on voyait, et on le voit depuis des mois, les risques qui sont bien réels. Et là on l'a vu, depuis quelques semaines, avec les arrêts de procédure qui sont ordonnés, avec les accusés qui sont libérés, à quel point cette crise-là, elle est grave. On l'a dit lundi, c'est une crise sans précédent. Certains trouvaient que c'était quelque chose de gros. Eh bien, je dois vous dire que c'est sans précédent.

Dites-moi, quand vous avez vu un juge en chef de la Cour supérieure à la une d'un quotidien? Quand avez-vous vu une juge en chef, à la chambre criminelle de la Cour du Québec, donner des entrevues télé et radio? C'est du jamais-vu.

Alors, ça, ce que ça veut dire, c'est que ça fait des mois qu'ils demandent des ressources supplémentaires et ça fait des mois qu'ils ne sont pas entendus, et là ils voient l'hécatombe arriver. Ils voient que des dizaines, et des dizaines, et des dizaines... c'est des centaines de causes qui sont à risque et que les arrêts de procédure vont aller en se multipliant. Alors, c'est tout à fait justifié. On est vraiment dans l'urgence, et ce débat-là va faire en sorte que la ministre de la Justice va être obligée de nous donner des réponses. Elle va arrêter de dire que le plan d'action va faire le travail. Vous le voyez, elle a déposé au début octobre son plan d'action sans aucune ressource supplémentaire, et qu'est-ce qu'on voit depuis le début d'octobre? Bien, on voit encore plus de requêtes en arrêt des procédures, on voit encore plus d'accusés qui sont libérés.

Aujourd'hui, on voit un autre cas, quelqu'un en maltraitance qui a été libéré, question de délai, et moi, de voir que le juge en chef de la Cour supérieure nous dit qu'on parle maintenant de causes de meurtres et par dizaines, je trouve que c'est absolument scandaleux qu'on en soit rendus là dans notre système de justice.

M. Croteau (Martin) : Comment vous vous expliquez la réticence de la ministre à investir davantage d'argent?

Mme Hivon : C'est inexplicable. C'est inexplicable. Vous avez vu hier l'Ontario, l'Ontario a décidé hier d'annoncer des moyens importants. Pour qu'ils aient fait cette annonce-là hier, ça veut dire qu'ils ont dû réfléchir à ça depuis quelque temps. Déjà, c'est tardif.

Au Québec, c'est excessivement tard parce qu'on voit que les arrêts sont prononcés. On voit que le système est à bout de souffle. Alors, comment expliquer ça? Ça ne s'explique pas. Moi, pour vous dire franchement, quand j'ai fait ma sortie lundi, je m'attendais à ce que dès mardi on nous annonce des ressources supplémentaires, tellement la crise est importante. Et on a vu, cette semaine, la crise continuer. On a vu Tom Harding qui demande, pour l'accident de Lac-Mégantic, un arrêt de procédures. On voit aujourd'hui une autre cause en maltraitance. C'est des dizaines de causes, dont on n'entend même pas parler, qui bénéficient de ça.

Quand c'est rendu... Et encore ce matin j'entendais un avocat de la défense dire : Nous sommes tenus d'invoquer ça dès lors l'arrêt Jordan, dès lors que ça s'applique, parce que sinon nos clients pourraient nous le reprocher. Alors, vous vous imaginez, c'est inexplicable, surtout qu'ils nous ont annoncé, il y a quelques semaines, des surplus de milliards, donc un surplus budgétaire de milliards de dollars. Comment ça se fait qu'on n'est pas capables d'investir en justice? Comment ça se fait? En plus, nous, au printemps dernier, on a dénoncé les coupes en administration de la justice, 24 millions sur deux ans, au DPCP, 5 millions juste l'année dernière, on a aboli les équipes spécialisées. Comment ça se fait qu'il n'y a rien qui a été fait jusqu'à maintenant?

M. Croteau (Martin) : Combien ça prendrait, à vos yeux? Combien ça prendrait, à vos yeux?

Mme Hivon : C'est très difficile à dire parce que ce qu'on demande, c'est un état de situation. Donc, ce qu'on nous dit, c'est qu'il y a 222 requêtes en ce moment, mais, vous comprenez, ça, c'est le phénomène... c'est comme quand quelque chose se met à déborder, au début, c'est quelques gouttes, puis là, après, c'est les torrents. Bien là, c'est ça qui va se passer, ça va être des centaines puis ça risque d'être des milliers, parce qu'il y a un engorgement.

Donc, je ne peux pas vous dire. Je ne peux pas vous dire parce qu'un autre problème du système de justice, puis là vous en voyez une pléthore, là, au-delà du fait que ce n'est pas informatisé, au-delà du fait que les greffiers prennent les procès-verbaux à la main, c'est le fait que nous n'avons pas d'information fiable dans le système et qu'on n'est pas capables de connaître l'ampleur de la situation. C'est pour ça qu'on demande à la ministre de nous le dire, mais c'est certain que ça prend des millions à être débloqués pour nommer des juges, nommer des greffiers, louer des salles s'il le faut, augmenter le nombre de procureurs de la couronne.

M. Bélair-Cirino (Marco) : S'agit-il véritablement d'une crise, dans la mesure où, vous l'avez mentionné, il y a plus de 220 requêtes en arrêt de procédure au Québec, puis en Ontario, c'est plus de 6 000?

Mme Hivon : Oui. En Ontario, ce n'est pas 6 000 en ce moment. C'est qu'ils ont fait l'évaluation, parce que visiblement, en Ontario, ils ont travaillé. C'est ce qu'on aimerait voir le gouvernement du Québec faire, on aimerait le voir travailler. À voir les chiffres, ce n'est pas normal, quand même, que mardi, quand vous avez posé la question à la ministre de la Justice... parce que moi, j'avais évoqué qu'en ce moment il y en avait autour de 150, elle vous dise : Oui, ça peut ressembler à ça puis qu'elle vous revienne quelque temps plus tard pour vous dire : Ah! finalement, c'est 222.

Comment ça se fait que la responsable de la justice, au Québec, ne sait pas, en ce moment, combien il y en a et surtout combien il va y en avoir dans un mois, dans trois mois, dans six mois. C'est ça, l'exercice qui a été fait en Ontario et qu'ici n'est pas fait.

Vous savez, des causes pour facultés affaiblies, il y en a des milliers chaque année. Et là ce qui se passe, on le voit ce matin aussi, dans une juridiction, là, il y en a une dizaine qu'on demande un arrêt de procédure. Pourquoi ces causes-là sont souvent remises et remises? Parce qu'il y a des choses qui sont plus urgentes : une agression sexuelle, des causes où il y a des voies de fait. Ça va, en quelque sorte, faire sauter du rôle ces causes-là.

Alors, quand Jordan s'applique mathématiquement, 18 mois, préparez-vous, il pourrait y avoir des centaines et des centaines de ces causes-là qui avortent.

Mme Crête (Mylène) : Est-ce que Mme Vallée a manqué de jugement?

Mme Hivon : Mme Vallée n'a pas travaillé comme elle devait travailler. Mme Vallée n'a pas vu la crise venir, Mme Vallée n'a pas pris les moyens de faire face à cette crise sans précédent et à éviter qu'on y soit plongés.

La crise, elle était déjà là en janvier dernier. Il y avait eu une sortie, une première sortie, complètement rarissime, encore une fois, de la juge en chef adjointe, cour criminelle, Mme Danielle Côté, en janvier dernier, pour dire : Ça craque de partout, je n'en dors plus la nuit. Et nous, tout de suite après, on avait fait un point de presse, posé des questions, en disant à la ministre : Écoutez, là, qu'est-ce qui se passe? Que faites-vous? Quelles ressources pouvez-vous ajouter?

Il faut, à un moment donné, là, dire : Aux grands maux, les grands moyens. La justice est sous-financée, moins de 1 % du budget global de l'État du Québec. Il me semble que, déjà, il y aurait dû y avoir de grands gestes de posés. Or, on nous parlait d'un plan d'action qui est venu, pas en février, pas en mars, pas en avril. On a eu des coupes en avril, coupes au DPCP, coupes en administration de la justice de dizaines de millions, et le plan est arrivé en octobre. Il est arrivé en octobre sans aucune ressource.

Donc, oui, c'est une incurie très, très grave. Le gouvernement est responsable de la crise dans laquelle on est. Oui, il faut changer la culture judiciaire. Oui, il faut revoir les règles de pratique. Oui, il faut mettre en place des nouvelles manières de faire, mais ça, ça ne donnera pas les résultats demain matin. Or, il y a des accusés qui sont libérés à chaque jour en ce moment.

M. Foisy (Philippe-Vincent) : Lui faites-vous confiance à Mme Vallée?

Mme Hivon : Mme Vallée, force est d'admettre qu'elle ne gère pas la situation à la hauteur de ce que les gens du milieu s'attendent. Force est d'admettre que, pour qu'on voie ces sorties-là de la bâtonnière des juges en chef, c'est qu'il y a un grave problème en ce moment à l'égard de la ministre de la Justice.

M. Lecavalier (Charles) : Mme Vallée dit qu'elle ne peut pas nommer de juge parce qu'il n'y a pas de recommandation sur son bureau. Est-ce que vous trouvez que c'est une excuse valable? Et comment expliquer que le comité de recommandation n'ait pas recommandé de juge?

Mme Hivon : Il y a un processus formel, hein? Vous vous rappelez de l'histoire Bastarache et des post-it. Donc, les choses ont changé, heureusement.

Par ailleurs, vous le voyez venir quand il y a un juge qui part à la retraite. C'est annoncé des mois à l'avance. Comment ça se fait que ces postes-là ne sont pas comblés et que les concours ne commencent pas des mois à l'avance? Hier, je suis allée faire un tour sur le site de la Cour du Québec, il y en a neuf en chambre criminelle qui ne sont pas comblés et qui sont aux premières étapes.

Est-ce que ça peut être accéléré? C'est ça qu'on lui demande. Comment ça se fait que ça n'a pas été fait avant que le poste se libère? Donc, il y a beaucoup de questions qui se posent, et on me dit que je dois...

M. Croteau (Martin) : Est-ce que Mme Vallée devrait démissionner?

Mme Hivon : Bien, comme le chef l'a dit, écoutez, hier, il y a une démission de ministre qui a été demandée. Donc, une démission par jour, je pense que c'est suffisant. Ce qu'on lui demande, c'est de se ressaisir de toute urgence, de nous annoncer des mesures de toute urgence, dès aujourd'hui.

M. Bérubé : Et on espère la tenue du débat d'urgence tout à l'heure.

M. Hicks (Ryan) : What does it say to you when we have sitting judges coming out criticizing the situation? We never see that.

Mme Hivon : Exactly. You've never seen that. I put you to test if you have ever seen a Chief Judge coming out of his or her reserve to say such things. It means that we are facing, like we said back on Monday, an unprecedented crisis in our justice system right now. It means also that there have been requests for sure, for months going on, for adding resources in the system and that those calls for help haven't been heard.

Mme Fletcher (Raquel) : Just one other question. What is your reaction to how Vallée has commented about this situation so far?

Mme Hivon : Really, it's under everything. I don't know how you say that in English, but it's really unbelievable. It's unexplainable. You know, back on Monday, when I said that we needed, you know, in a very urgent matter, to have such resources added, that we needed to have really the state of the situation, we were expecting that the following day new resources would be added, that there would be, right away, you know, explanations as to how big the crisis is, and also about new judges, new clerks, new prosecutors, new rooms to hear cases.

And, you know, it's been going on for a week now, and everybody is coming out saying : Yes, it's an unprecedented crisis. Just the fact that they are in the newspaper, on your television and on the radio means that the crisis is unprecedented. So Mrs. Vallée, like we said back on Tuesday, has to come out of her immobilism and has to act right now, the Prime Minister also, the Treasury Board President also. What are they doing with this crisis?

Mme Fletcher (Raquel) : And you said you're not sleeping at night?

Mme Hivon : Not me. I'm sleeping. I'm saying that the Judge Côté, who is the Chief Judge for the Criminal Court, back in January last year, had told a reporter of LaPresse that she was loosing sleep at night because of the undue delays in the Criminal Court system. And that's back 10 months ago, and nothing has been done since.

(Fin à 9 h 17)

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