(Dix heures quatre minutes)
Mme Massé : Oui. Alors,
bonjour, tout le monde, en cette journée du 6 décembre, hein, la journée de
commémoration de la tuerie de la Polytechnique. C'est un moment annuel où,
après 12 jours où les groupes de femmes à travers le Québec nous ont rappelé
que les violences faites aux femmes, ce n'est pas terminé en 2016, on se
retrouve aujourd'hui... je me retrouve aujourd'hui à l'Assemblée nationale,
entourée de femmes qui, au quotidien, dans leur groupe, font un travail de
prévention des violences faites aux femmes.
C'est d'ailleurs à l'invitation du centre
des femmes de ma circonscription, le Centre d'éducation et d'action des femmes,
où, il y a déjà plusieurs mois de cela, j'ai été interpellée pour permettre aux
centres de femmes et à leurs alliés de déposer à l'Assemblée nationale une
pétition demandant, d'une part, au gouvernement du Québec, un certain nombre
d'éléments — je vais les laisser vous en parler — et aussi
invitant l'ensemble des Québécois et Québécoises à être attentifs au fait que la
violence faite aux femmes, les agressions, les abus sexuels, ça se passe aussi
à l'intérieur des logements des personnes.
Alors, sur ce, je laisse la parole à
Marie-Ève qui va vous parler de la pétition... bien, va vous parler.
Mme Desroches (Marie-Ève) :
Donc, je vais vous entretenir un peu sur notre démarche. Donc, depuis 2015, des
militantes du Centre d'éducation et d'action des femmes sont allées à la
rencontre de locataires et de chambreuses qui ont vécu du harcèlement et des
violences sexuelles dans le contexte de leur logement. Ces femmes nous ont
raconté comment leur vie, qui était leur lieu de réconfort et de quiétude, est
devenue une source d'insécurité et d'anxiété qui mine leur bien-être mais aussi
leur santé physique et mentale.
Louise, par exemple, nous racontait que
chaque fois que son concierge est entré avec sa clé chez elle, c'était
lorsqu'elle était sous la douche. Maintenant, chaque fois qu'elle est sous la douche,
elle se sent vulnérable puisqu'elle est seule, nue et sans protection. Elle a
peur d'être épiée et agressée. Elle se demande jusqu'où son concierge ira. Elle
a toujours peur lorsqu'elle est seule chez elle, elle a d'importants problèmes
de sommeil.
Ces femmes nous ont parlé de la façon dont
elles se sont retrouvées emprisonnées dans un cercle de violence dévastateur,
duquel elles se sentaient incapables de s'échapper puisqu'elles n'avaient nulle
part où aller, n'avaient aucun moyen de déménager et aussi avaient absolument
peur de ne pas être crues, et ne savaient pas nécessairement où aller demander
de l'aide. Pour la plupart, nous étions les premières à qui elles osaient en
parler.
Nathalie, par exemple, n'avait jamais osé
parler du harcèlement que son propriétaire lui faisait vivre depuis qu'elle
avait signé son bail. Par honte, elle avait peur d'en parler à sa fille et à
son entourage et, en tant que travailleuse précaire, elle se retrouve
emprisonnée par sa condition économique. Puisqu'elle travaille au salaire
minimum, elle n'a donc pas les moyens de mettre de l'argent de côté pour
pouvoir déménager.
Plusieurs femmes immigrantes, sans statut
et à statut précaire, nous ont témoigné de leur enfer. En plus de la pauvreté,
certaines ne maîtrisent pas très bien le français et ne connaissent pas très
bien leurs droits et leurs recours. Dans ce contexte, les propriétaires et
concierges peuvent profiter de cette vulnérabilité, les menacer de les dénoncer
à l'immigration si elles ne leur obéissent pas. Cette peur de l'expulsion les
maintient dans un climat de peur, d'agression et de harcèlement. Rigorta,
Lanny, Anne, et Amina, et bien d'autres nous ont parlé de la peur de faire
valoir leurs droits. Elles étaient toutes terrorisées à l'idée de faire valoir
leurs droits de peur d'être déportées.
De toutes les femmes que nous avons
rencontrées, seules Nathalie et Anne ont porté plainte à la police. Lorsqu'Anne
a porté plainte pour harcèlement, la police ne l'a pas crue, elle a été
ridiculisée et, quelques mois plus tard, elle a été violée. Cet exemple
démontre comment les femmes peinent à être crues surtout lorsqu'il question de
harcèlement, et, pour nous, cette inaction de la police constitue un acte de
complicité avec les agresseurs. Pour ce qui est d'Anne, la police a retenu sa
plainte, mais, au moment de la comparution en cour, sa plainte n'a pas été
retenue par faute de preuve et de témoin. Et, quelques semaines plus tard,
Immigration Canada expulsait Anne du pays.
En quelques mois, nous avons récolté et
nous avons rencontré des dizaines et des dizaines de femmes dans notre quartier
qui nous ont témoigné de ces violences qui occupent encore leur quotidien. Au
fil de ces rencontres, nous avons bien compris que ces histoires n'étaient pas
anecdotiques ou encore des cas isolés à notre quartier. Lorsque nous donnons des
ateliers et tenons des kiosques ailleurs, à l'extérieur de notre quartier, dans
d'autres villes, plusieurs femmes nous témoignent avoir vécu ce même enfer au
cours de leur vie. Des centaines de femmes locataires et chambreuses vivent actuellement
dans le noir le plus total, et nous croyons que ce silence a assez duré. Nous
croyons qu'aucune femme ne devrait vivre dans la peur et l'insécurité et
surtout pas dans le contexte de leur logement.
Ensemble, avec d'autres groupes qui
agissent en logement et sur les violences faites aux femmes, nous avons
construit une coalition qui porte des revendications pour lutter contre ces
violences. Aujourd'hui, nous déposons à l'Assemblée nationale une pétition qui
a récolté plus de 5 000 appuis. Cette pétition porte trois grandes
revendications.
Premièrement, pour mieux outiller les
femmes locataires, nous voulons que certains articles du Code civil du Québec
qui protègent les droits des locataires à un environnement de vie sécuritaire
soient davantage en vue sur le formulaire du bail.
Ensuite, pour prévenir ces violences, nous
demandons à ce que la prochaine stratégie gouvernementale sur les violences
sexuelles, le gouvernement reconnaisse et dénonce la gravité des violences et
du harcèlement sexuel ciblant spécifiquement les femmes locataires et qu'il
réfléchisse à des moyens pour lutter et s'engage à mettre sur pied une campagne
publique de sensibilisation.
Et enfin, pour aider les femmes à s'en
sortir, nous demandons à ce que la liste d'infractions donnant droit à une
indemnisation aux victimes d'actes criminels soit actualisée afin d'inclure le
harcèlement et les menaces.
Nous demandons à ce que des fonds soient
réinvestis et que la nouvelle procédure demandant un rapport médical soit
retirée et que le dédommagement puisse couvrir les deux mois de loyer lorsque
les femmes veulent résilier leur bail.
En plus de cette pétition, nous déposons
une déclaration commune à laquelle plus de 200 organismes communautaires,
syndicats, associations étudiantes, regroupements ont adhéré. Cette déclaration
porte les trois mêmes revendications et, en plus, demande à ce que les
gestionnaires d'immeubles de logement social et les propriétaires sur le marché
privé reconnaissent ces violences et mettent en place différents mécanismes pour
intervenir, pour prévenir et combattre ces violences.
Ces 200 appuis soulignent l'importance de
la thématique, les questions d'organisation de tous horizons qui représentent
plus de 3 000 groupes locaux et 420 000 personnes des 17 régions du
Québec. Nous avons construit une coalition large puisque nous savons que cet
enjeu nous concerne tous. Je vous laisse avec Émilie qui va vous parler des
enjeux du logement.
Mme Joly (Émilie E.) : Oui,
bonjour. Bien, au FRAPRU, c'est clair qu'on croit fermement que le logement est
un droit et ne devrait pas être considéré juste comme une marchandise ou un
bien de consommation un peu comme les autres. Il existe foncièrement un droit
de se loger convenablement, de manière abordable, d'avoir un environnement
sain, mais surtout et aussi d'avoir un logement qui est sécuritaire. C'est un
droit qu'on revendique, mais c'est aussi un droit auquel le Québec s'est engagé
en ratifiant symboliquement le PIDESC qui est le pacte international des droits
économiques, sociaux et culturels. Donc, on ne demande au gouvernement que de
respecter ce qu'il s'est déjà engagé à faire.
On a besoin, de la part du Québec et au
Québec, d'avoir des mécanismes, évidemment, de contrôle sur la spéculation
immobilière pour assurer du logement abordable. On a besoin d'investissements
dans le logement social, par exemple, qui est le seul logement qui permet de
payer un loyer proportionnellement à son revenu, mais on a aussi besoin de
mécanismes pour assurer que les logements soient sécuritaires, que ça soit dans
le privé ou même dans le logement commentaire.
Il y a une réalité particulière des femmes
locataires qu'on ne peut pas nier. Les femmes, en tant que femmes, vivent des
rapports de pouvoir et des relations de pouvoir, mais, en même temps, elles
vivent aussi des relations de pouvoir avec leurs propriétaires, avec les
gestionnaires de leurs immeubles, avec leurs concierges, et, à travers ces deux
dynamiques-là, elles vont vivre différentes formes d'oppression.
On peut penser, par exemple, aux femmes en
situation de handicap qui, si elles sont victimes d'abus, n'auront pas toujours
la liberté de quitter un logement adapté parce que ceux-ci sont très difficiles
à trouver. On peut penser, comme le mentionnait ma collègue précédemment, aux
femmes immigrantes qui, parfois par barrière de langue, n'ont pas accès ou ne
sont pas en mesure de connaître leurs droits. On peut penser aussi, évidemment,
aux femmes qui sont dans un statut migratoire précaire, où elles vont être
incapables de dénoncer officiellement des abus à la police par peur d'être
déportées, comme ça a malheureusement été le cas dans le passé.
Et on voit que, dans toutes ces situations-là,
il y a un propre aux femmes qui vivent des abus quand elles sont dans des situations
de pauvreté, par exemple. Il y a une vulnérabilité propre aux femmes
locataires, entre autres quand elles n'ont pas les moyens de quitter le
logement où elles habitent. Il faut se rappeler qu'au Québec il y a quatre
femmes locataires sur 10 que le gouvernement considère qu'elles paient trop
cher pour se loger. Et il y a même une locataire sur 10 qui paie jusqu'à
80 % de son revenu pour se loger et qui est donc dans une situation de
précarité économique très grande, qui n'a pas nécessairement les moyens de
déménager ou de trouver un autre logement abordable selon ses moyens.
Et c'est pour ça que, quand on est une
femme victime de violence sexuelle ou de violence dans son logement, on vit un
abus qui est très grave, justement, parce qu'on est dans l'impossibilité de
sortir de cette situation-là. Évidemment, il y a le tabou de la violence
sexuelle, il y a la honte qui vient avec avoir été victime d'agression, il y a
la culpabilité, souvent, où on a peur d'en parler avec notre entourage, et tout
ça se multiplie par l'incapacité économique dans le cas où les femmes sont
violentées et sont victimes de violence sexuelle.
Mme Sarroino (Mélanie) : À
chaque commémoration de la tuerie de la Polytechnique, qui a fait victimes de 14
jeunes femmes, on se rappelle qu'elles ont été victimes parce qu'elles sont
nées femmes puis elles sont victimes d'un acte sexiste et d'un acte misogyne. À
chaque année, nous, les groupes de femmes, on se pose la question : Est-ce
que ces violences sont terminées? Est-ce que les violences sexuelles, la
violence conjugale, le harcèlement sexuel, la prostitution, la traite, la
misogynie, l'antiféminisme, les stéréotypes sexuels et j'en passe... En 2016,
où est l'égalité des droits entre les femmes et les hommes dans la sphère
privée, économique, sociale, politique et culturelle? En dépit des quelques
progrès, le constat reste généralement décourageant, et la violence envers les
femmes est encore bel et bien présente.
Comme mes collègues l'ont dit, nous sommes
ici aujourd'hui pour dénoncer plus particulièrement les violences sexuelles
faites aux femmes locataires. Les événements de cet automne, soit les
agressions sexuelles sur le campus de l'Université Laval, les rites
d'initiation sexistes sur les campus universitaires à travers la province, les
mobilisations contre la culture du viol que nous avons vues dans multiples
villes de la province aussi nous montrent et confirment que la violence
sexuelle existe toujours et représente un fléau social d'une envergure sans
précédent.
Depuis une couple d'années aussi, nous
avons salué le courage des milliers de femmes qui ont dénoncé les violences
sexuelles sur les réseaux sociaux ou dans les médias ainsi que le courage des
femmes autochtones de Val-d'Or qui ont osé briser le silence. Or, comme mes
collègues l'ont dit, la réalité est que, pour plusieurs femmes, surtout les
plus vulnérables, le silence reste un mécanisme de défense face aux mythes et
préjugés qui nourrissent le sentiment de honte et de culpabilité qu'elles
ressentent. Ce sont d'ailleurs ces mêmes mythes et préjugés qui banalisent la
violence sexuelle et qui déresponsabilisent les agresseurs.
La statistique du ministère de la Sécurité
publique nous dit qu'une femme sur trois sera victime d'une agression sexuelle
au courant de sa vie. Cette statistique est beaucoup plus élevée pour certaines
femmes qui vivent des réalités particulières qui les mettent plus à risque
d'être victimes de violence sexuelle. Je répète, nous pensons ici aux femmes
sourdes, aux femmes immigrantes et réfugiées, aux femmes autochtones, aux
femmes vivant avec un handicap, aux femmes aînées, aux femmes de la diversité
sexuelle, aux femmes en situation d'itinérance et aux prises avec la
toxicomanie. Le manque d'accessibilité, le manque d'accès aux soins et à
l'information, la méconnaissance de la langue et des ressources communautaires
rendent ces femmes davantage vulnérables. Les politiques, l'encadrement
législatif et les mécanismes gouvernementaux ne vont pas assez loin pour
assurer la sécurité des femmes.
Le gouvernement vient de sortir, cet
automne, la Stratégie gouvernementale pour prévenir et contrer les violences
sexuelles. Quoique nous pensons que c'est un bon premier pas dans la direction
pour éliminer les violences faites aux femmes, nous pensons que ce n'est pas
suffisant. Il n'y a pas de vision transversale ni intersectionnelle,
c'est-à-dire qu'on ne s'attaque pas aux causes systémiques qui rendent les
femmes davantage vulnérables. Nous espérons que le gouvernement va continuer à
collaborer et consulter les groupes experts sur le terrain pour pouvoir
améliorer sa stratégie. Le ministre Coiteux avait d'ailleurs ouvert la porte en
disant que la stratégie n'était pas fermée et qu'il y avait place à l'amélioration
et place à l'ajout d'actions concrètes. Nous espérons que le gouvernement va
écouter les demandes qui sont dans la pétition que nous déposons aujourd'hui.
Nous espérons aussi, par l'ouverture qui
est dans la stratégie, à revoir l'indemnisation pour les victimes d'actes
criminels, que la liste des actes admissibles à l'indemnisation va être élargie
pour y inclure le harcèlement criminel et les menaces. Nous souhaitons aussi,
et il y a ouverture de ce côté-là aussi, que, comme ma collègue l'a dit, le
diagnostic médical ne sera plus nécessaire pour avoir droit aux indemnisations.
Finalement, nous espérons que le
gouvernement va continuer et augmenter le financement des groupes
communautaires qui travaillent sur le terrain à tous les jours avec les femmes
soit en violence sexuelle, en violence conjugale ou auprès des femmes dites de
la diversité ou des femmes plus vulnérables afin qu'elles puissent avoir un
réel accès aux services et aux ressources et qu'elles puissent trouver de
l'aide dont elles ont besoin.
Merci beaucoup d'être là aujourd'hui. Nous
vous invitons finalement à un rassemblement auquel prendront part quelques
centaines de membres d'organisations féministes, de groupes pour le droit au
logement et leurs alliés, qui aura lieu par la suite ici, devant l'Assemblée
nationale, à la fontaine de Tourny, vers l'heure du midi. Merci beaucoup.
Mme Massé : Alors, merci,
mesdames. Juste nous rappeler que combattre les violences faites aux femmes,
c'est un défi de tous les jours. C'est un défi duquel le gouvernement du Québec
a des responsabilités, je pense que les femmes l'ont bien mentionné, et c'est
un défi où chacun et chacune d'entre nous avons aussi des responsabilités. Et
nous aurons finalement gagné, je dirais, cette lutte, malheureusement trop
longue lutte, le jour où la honte ira du bon côté : non pas celui de la
victime, mais de celui de l'agresseur. Merci.
Le Modérateur
: Une
question sur le sujet de la conférence de presse?
M. Chouinard (Tommy) : Oui.
Bonjour, Tommy Chouinard, LaPresse. J'ai bien compris que
vous souhaitez que soit élargi le programme d'indemnisation des victimes
d'agressions... d'actes criminels, pardon, pour y inclure le harcèlement,
intimidation. J'aimerais...
Des voix
: Et les
menaces.
M. Chouinard (Tommy) : ...et
les menaces. Donc, une fois qu'il y a... J'aimerais comprendre le mécanisme,
là. Il faudrait qu'il y ait une autorité quelconque ou que la justice ait
démontré qu'il y a eu effectivement harcèlement, menaces, intimidation dans ces
cas-là? Vous comprenez, à partir de quel moment, dès qu'il y a allégation ou...
le mécanisme, là?
Mme Sarroino (Mélanie) : Bien,
en fait, si on se fie... bon, de ce que je connais, les agressions sexuelles,
la victime n'est pas obligée de porter plainte pour avoir... il faut juste
qu'elle prouve qu'il y a un lien entre l'acte qu'elle a subi et les
conséquences qu'elle vit aujourd'hui. Donc, on souhaiterait que ce soit
semblable. Donc, si elle est victime de harcèlement criminel et qu'elle est
victime de cauchemars ou de choc post-traumatique, on souhaite qu'elle puisse
démontrer qu'elle ait accès à l'indemnisation, dans ce cas-là.
M. Chouinard (Tommy) : Très
bien. Puis si vous pouviez préciser également les changements que vous
souhaitez au Code civil.
Mme Joly (Émilie E.) : Bien, par
rapport au Code civil, ce n'est pas tant des changements au Code civil que la
valorisation de ce qui existe déjà. Donc, c'est un problème. Justement, ce
qu'on demande au gouvernement... c'est que le gouvernement produit le
formulaire de bail unique, là, qui est le formulaire bleu qu'on connaît, qu'on
trouve facilement en pharmacie. On pense que ça serait assez facile pour y
mettre en évidence, par exemple, les droits auxquels les locataires ont accès,
parce qu'on sait qu'il y a souvent des propriétaires qui bénéficient de l'ignorance
de leurs locataires.
Évidemment, nul n'est supposé ignorer la
loi, mais c'est sûr qu'on pense que le gouvernement a une responsabilité de
mettre davantage en évidence. Par exemple, les articles par rapport à l'entrée
dans le logement, un propriétaire n'a pas le droit en tout moment d'entrer dans
un logement sans raison, et ça, c'est reconnu dans le Code civil. L'article
1974.1, par exemple, qui a été un ajout plus récent, où on reconnaît aux
femmes, aux personnes victimes d'agression sexuelle ou de violence le droit de
quitter leur logement après deux mois pour résilier leur bail plutôt qu'avoir à
le maintenir, justement parce qu'elles ont été victimes, c'est un mécanisme qui
a été élaboré.
Donc, ce n'est pas tant des modifications
au code, mais que le gouvernement prenne la responsabilité d'améliorer la
connaissance des droits, et ça serait tout simple de le mettre de l'avant dans
le bail, par exemple.
M. Chouinard (Tommy) : Et
quant à la mise en application de ces articles-là du Code civil, est-ce que
vous avez constaté qu'il y avait des problèmes? Lorsque les femmes
souhaitent se prévaloir de ces dispositions-là, le processus est adéquat et ça
se fait dans les règles? Il y a un problème là aussi ou...
Mme Joly (Émilie E.) : Malheureusement,
il y a un problème dans l'application aussi. Nous, par exemple, on a beaucoup
de femmes locataires qui vont dénoncer des entrées par effraction, qu'on
considère étant des entrées par effraction, donc qui seraient un geste
criminel, mais, quand elles tentent, par exemple, de dénoncer à la police,
souvent, on leur répond : Bien, c'est parce que c'est votre propriétaire,
il a le droit de rentrer. Non, il y a des dispositions très claires, avec un
avis de 24 heures, par exemple, où le propriétaire peut demander de rentrer, à
moins qu'il y ait une urgence, et là évidemment le Code civil le prévoit déjà.
Malheureusement, ce n'est pas nécessairement
pris très au sérieux par tous les corps policiers de considérer ça comme une
entrée par effraction. Ça, c'est un exemple parmi d'autres.
M. Chouinard (Tommy) : Le
rôle de la Régie du logement...
Mme Joly (Émilie E.) : Du côté
de la régie, c'est plus facile de faire respecter, mais, en même temps, la régie
va donner une décision... Par rapport à la résiliation dont je vous parlais tout
à l'heure, ça, c'est plus appliqué parce que c'est textuellement dans le Code
civil. Par rapport aux entrées par effraction, les locataires vont en bout de
ligne... et on connaît les délais à la régie. Un dossier qui n'est pas
prioritaire peut prendre jusqu'à deux ans pour que la régie donne un certain
dédommagement pour perte de jouissance à une femme qui aurait été victime
d'entrée répétée par son propriétaire.
Donc, c'est un mécanisme qui peut
fonctionner mais c'est un mécanisme qui est très long. Donc, c'est sûr qu'on
pense qu'il faut faire du travail préventif et que le gouvernement a cette responsabilité-là
surtout.
Mme Massé : Et je ferai juste
rajouter que d'inclure sur le bail, ça ne coûte pas grand-chose au gouvernement.
Alors, ce gouvernement-là qui nous a habitués à beaucoup d'austérité dans les
deux dernières années, de faire en sorte de faire connaître aux femmes et aux
hommes, mais on sait que ça aura un impact particulier pour les femmes, ces articles
de loi, et donc de leur permettre de connaître leurs droits, ça ne coûterait
pas grand-chose, puis je pense que ça pourrait soulager plusieurs femmes.
M. Chouinard (Tommy) : Est-ce
que c'est possible, Mme Massé, de vous poser des questions sur les résultats
des élections partielles?
Le Modérateur
: On va
faire, comme je vous avais prévenu, cette discussion-là tout de suite en marge
de la conférence de presse. On va donc s'arrêter ici. Merci beaucoup. Au
revoir.
Mme Massé : Par respect pour
mes collègues. Merci.
(Fin à 10 h 25)