(Onze heures trente minutes)
Mme
Maltais
:
Bonjour. Alors, le Commissaire à l'éthique vient de déposer son rapport au
sujet de M. Laurent Lessard, le ministre des Transports. Mon premier
commentaire sera celui-ci : Le Commissaire à l'éthique est supposé être
notre chien de garde. Eh bien, le chien de garde, il est au bout de sa corde
puis il n'arrive plus à mordre.
Il y a un aveu d'impuissance dans ce
rapport. Le Commissaire à l'éthique a-t-il les outils nécessaires pour agir?
A-t-il les outils nécessaires pour régler les problèmes qui se posent avec les
élus de l'Assemblée nationale? Il dit lui-même, il le dit lui-même, qu'il n'a
pas les outils qu'il faut. Je suis soufflée, soufflée de voir que, dans ce
rapport, il y ait un constat, c'est-à-dire qu'il y a une confusion des rôles
constante dans toutes les démarches qu'entreprend M. Nadeau entre son rôle
d'attaché politique et son rôle de gestionnaire d'entreprise, mais que le
commissaire n'ait pas trouvé le moyen de nous faire aucune recommandation. Il
n'y a rien sur la confusion des rôles, sauf des constats. Et je me serais
attendue, au Commissaire à l'éthique, qu'il nous fasse une recommandation parce
qu'il soulève le problème à de nombreuses reprises.
Je vous le dis tout de suite, là, j'en
rejasais avec des collègues, jamais au grand jamais nous n'aurions accepté,
comme élus de l'Assemblée nationale, qu'un attaché politique ait trois rôles en
plus de son temps de travail comme attaché politique et accepté la confusion
que le commissaire, même, nomme sur ce qui se passait. Écoutez, je vais même le
citer, le commissaire : «...les apparences me laissent perplexe concernant
[le] cumul de fonctions par le conseiller politique...» Les apparences le
laissent perplexe. Bien, il aurait dû nous recommander quelque chose. Il dit :
«Toutefois [...] j'ai cessé d'avoir compétence à [l'exercice] de ce dernier, à
l'expiration du délai d'un an...» Voilà où je parle que le chien de garde est
au bout de sa corde. Le délai d'un an, il dit : Je ne peux plus agir. Ça
n'aurait pas dû, normalement, l'empêcher de recommander.
Écoutez, sur la confusion des rôles, il y
a de nombreux paragraphes, page 3, page 4, paragraphes 244, 245, 246. Écoutez :
«Un membre du Conseil exécutif a, à mon avis, la responsabilité de voir à ce
qu'aucune confusion ne se produise lorsqu'il autorise un membre de son
personnel à exercer simultanément une autre fonction.»
Il parle même de l'impact sur les
organisations : «...je me suis demandé si la coopérative et la
municipalité, qui dépendent du député de la circonscription et du gouvernement
pour plusieurs dossiers, prendraient le risque de nuire à leur relation avec le
député-ministre de la circonscription[...].
«[...]Ces questions sont légitimes...»
Donc, le questionnement que nous avons
tous eu, c'était sur la place publique, il est légitime, mais ça ne relève pas
de la compétence du commissaire. Au paragraphe 250, il dit :
«Je ne suis pas autorisé à intervenir dans
l'application des autres règles de droit auxquelles je fais référence au début
de ce rapport.» Il ne se sent pas autorisé.
Alors, il y a aussi quelque chose qui est
intéressant. Il y a une contradiction évidente entre le rapport du Commissaire
au lobbyisme et le rapport du Commissaire à l'éthique. Le rapport du
Commissaire à l'éthique, au paragraphe 254, dit : «Du point de vue
chronologique, M. Nadeau a commencé à recevoir une rémunération à titre de
conseiller politique le 1er septembre 2014.» Le Commissaire au lobbyisme
dit : M. Nadeau a été embauché, je l'ai ici... débute ses fonctions
en mai 2014. «Embauché» et «rémunéré», là, moi, je ne vois pas une grosse
différence. Et M. Lessard nous a toujours dit que M. Nadeau avait été
embauché à partir de mai 2014. C'est ce qu'on savait. Le problème qu'il y a,
c'est que, si on reporte l'embauche à la rémunération, en septembre, la
rencontre du 3 juillet 2014 entre Pyrobiom, et M. Nadeau, et les gens
de Technoclimat est sortie du rapport du commissaire. Là, il y a un problème.
Ça, je ne comprends pas ça. Il y a une contradiction entre les deux rapports.
Puis cette date-là est importante.
L'autre, enfin, à 261, c'est technique,
mais que voulez-vous, il y a un problème concernant la déclaration de M. Lessard
et de M. Nadeau. Ils disent tous deux que, quand M. Lessard a demandé
un avis, c'était parce que M. Nadeau devait être à temps partiel. Quand il
y a eu un avis... M. Lessard a toujours dit : J'ai eu un avis du
Commissaire à l'éthique. Or le commissaire lui-même dit : Là, je ne
comprends plus. Il y a modification. Il était à temps plein, mais, moi, mes
avis étaient à temps partiel. On n'a jamais vu ses avis. Je croyais qu'on les
verrait, ses avis.
Donc, ce qui me reste, c'est un aveu
d'impuissance du Commissaire à l'éthique. Je l'ai dit, peut-être pour les
collègues qui viennent de se joindre, là, le Commissaire à l'éthique est notre
chien de garde, mais le chien de garde est au bout de sa corde. Il va falloir
lui donner les outils. Et, deuxièmement, il va falloir que les députés... si le
Commissaire à l'éthique n'a pas voulu faire de recommandation, nous en ferons,
nous en ferons pour que cette confusion des rôles n'existe plus.
M. Laforest (Alain) : Le
commissaire dit tout de même, Mme Maltais, dans le rapport, au point 271,
qu'au niveau des oppositions, là, vous êtes peut-être allées un peu fort et
qu'il faut vérifier certains faits, là, avant d'emmener des entreprises et des
individus sur la place publique. Donc, il pointe, il critique la confusion des
rôles, surtout dans le chalet du Mont-Adstock et non pas dans Pyrobiom, mais il
vous dit également : Vous avez un travail à faire avant d'amener les gens
sur la place publique, là.
Mme
Maltais
:
«Lorsque les élus et les membres de leur personnel allèguent une apparence de
conflit d'intérêts et qu'ils dirigent leurs reproches vers une personne qui
n'est pas [...] membre de l'Assemblée nationale[...], [...]impératif de
rappeler l'importance de respecter ce que le législateur a prescrit...» C'est
ce que nous avons fait.
M. Laforest (Alain) : Et
le point suivant?
Mme
Maltais
:
«Les personnes et [...] entreprises interpellées peuvent être totalement [face]
sans moyens [sans] déclarations publiques...» Le problème, ce n'est pas les
interpellations, ce ne sont pas les médias qui, tous les jours, sortaient des
événements qui nous interpellaient. Le problème, c'est la confusion des rôles
au départ, qui a entraîné ce débat, pour moi. S'il y avait matière à blâme, ce
serait écrit.
M. Gagnon (Marc-André) : En
même temps, vous avez à plusieurs reprises demandé à ce que ces gens-là soient
entendus, notamment en commission parlementaire.
Mme Maltais : Tout à fait.
M. Gagnon (Marc-André) : Est-ce
que ça n'aurait pas été une occasion, pour M. Nadeau en particulier, là,
qui est ciblé énormément dans ce rapport-là, évidemment, pour lui, de se
défendre, de prendre les moyens?
Mme Maltais : Écoutez, en
commission parlementaire à chaque fois, on est respectueux des gens. Dans
certains cas, c'est dommageable pour la personne qui vient, je pense à Mme Thibault,
mais, dans le cas de M. Charest, qui était venu dans le cas de Bruno
Fortier, tout ça, c'était eux qui étaient sortis gagnants de ça. Ça dépend.
Moi, je pense qu'on a intérêt...
M. Laforest (Alain) : Le
problème pour vous, au fond...
Mme Maltais : C'est la
confusion des rôles, des genres.
M. Laforest (Alain) :
Oui, mais c'est le Commissaire à l'éthique, là. Vous blâmez le Commissaire à
l'éthique, vous blâmez son rapport.
Mme Maltais : Non. Je
dis... Je dis...
M. Laforest (Alain) : Mais
vous dites qu'il est au bout de sa corde, il ne peut pas mordre.
Mme Maltais : Je dis
qu'il est au bout de sa corde mais à cause des règles qu'il utilise actuellement,
O.K? Il est au bout de sa corde parce qu'il dit : Je ne peux pas
intervenir à partir de tel moment. Mais je dis quand même...
M. Laforest (Alain) : C'est
un chien pas de dents.
Mme Maltais : À cause de
cette règle-là, et je dis qu'il est au bout de sa corde. Mais je dis aussi
qu'il aurait dû y avoir, de la part du Commissaire à l'éthique, il aurait dû y
avoir une recommandation sur la confusion des rôles. Il aurait dû y avoir une
recommandation. Je suis très étonnée de ne pas en avoir.
M. Gagnon (Marc-André) : Mais
il dit quand même, au début du rapport, qu'il y a une situation qui, selon lui,
là, devrait être corrigée, une situation qui semble devoir être corrigée, qu'il
faudra éviter à l'avenir. Est-ce que ça, ça n'aurait pas dû être une
recommandation plutôt que simplement l'observer?
Mme Maltais : Ça aurait
dû être une recommandation, et je vous répète que jamais, jamais, tous les collègues
que j'ai consultés n'auraient accepté une situation comme ce qui s'est passé.
M. Laforest (Alain) :
Donc, pour vous, M. Lessard est toujours fautif.
Mme Maltais : Non, M. Lessard
est blanchi par le commissaire. Je dois accepter le rapport du commissaire, mais
je dis que le commissaire aurait dû nous recommander quelque chose sur la
confusion des genres. Merci.
M. Gagnon (Marc-André) :
Si M. Lessard est blanchi, est-ce que M. Nadeau, lui, il l'est à la
lumière de ce qu'on peut lire?
Mme Maltais :
Présentement, ce qu'on a là, oui. Ce qu'on comprend, c'est qu'avec les outils
qu'a le commissaire, qui dit : Je ne peux aller là parce que j'ai juste un
recul d'un an, tout le monde est blanchi. Ça, je le prends comme ça. Sauf que,
je le dis, au départ, il y a un problème de confusion des rôles sur lequel il
faudrait agir. La triple fonction n'a pas de sens, en plus d'attaché politique.
M. Gagnon (Marc-André) :
M. Lessard, lui, est soulagé aujourd'hui. On voyait tantôt ses collègues
qui l'enlaçaient, qui semblaient le féliciter, tout ça. Êtes-vous inquiète aujourd'hui?
Parce que le commissaire crée quand même sa propre jurisprudence.
Mme Maltais : C'est ce
que je voulais dire quand je dis qu'il y aurait dû y avoir une recommandation
très claire. On est actuellement en comité de travail, la Commission des
institutions, sur une rénovation du code d'éthique. Croyez-moi, nous
introduirons ce problème de la confusion des rôles.
M. Chouinard (Tommy) : Est-ce
que c'est une révision qui doit être faite aux cinq ans comme d'autres types de
lois, ça?
Mme Maltais : C'est une
révision, oui, qui est faite... Il est temps, là. Je pense que c'est cinq ans.
Je ne connais plus le... On est en train de se rendre compte. Écoutez...
M. Chouinard (Tommy) :
Donc là, il y a clairement une fenêtre pour...
Mme Maltais : Oui, il y a
une fenêtre pour régler ça. C'est pour ça que la recommandation aurait été intéressante.
M. Gagnon (Marc-André) :
On s'entend que vous êtes déçue, donc?
Mme Maltais : Oui, je
suis déçue de ne pas avoir un avis du Commissaire à l'éthique précis et une
recommandation. Le Commissaire à l'éthique aurait pu nous recommander quelque
chose, aurait pu être plus précis, plus sérieux là-dessus, là-dessus.
Ceci dit, comme je le dis, je sens que le
chien de garde est au bout de sa corde puis qu'il ne peut pas aller là où on
aurait voulu qu'il aille.
M. Chouinard (Tommy) :
Est-ce que le commissaire, par ailleurs, a produit... Parce que, généralement,
quand il y a ce type de règle là, de révision aux cinq ans, il y a un rapport
quinquennal qui est fait par l'organisme en question. Est-ce que ça a été fait
de la part du Commissaire à l'éthique, ça, ce rapport quinquennal là?
Mme Maltais : Oui, ce
rapport-là, mais il parle de regarder les cumuls de fonction des députés. Mais
là on est devant les membres du personnel.
M. Chouinard (Tommy) :
D'accord. Très bien.
Mme Maltais : Merci.
M. Chouinard (Tommy) :
Merci.
(Fin à 11 h 40)