(Quatorze heures vingt-deux minutes)
Mme Léger
: Bonjour.
Après 20 heures sans avoir dormi, j'espère que je vais être dynamique malgré
tout, parce que, tant que je n'ai pas accompli ma mission, moi, je vais
jusqu'au bout.
Alors, je veux vous dire que les juristes
de l'État vont rentrer demain, par cette loi spéciale, outrés, incompris et
méprisés par ce gouvernement libéral. Négociation de mauvaise foi parce que le
ministre nous a dit : on fait une loi spéciale, mais, en même temps, en
même temps, M. Côté va négocier. Alors, il fait rentrer les juristes de l'État
puis, en même temps, il dit : Ma porte est ouverte. Mettez-vous dans la
peau des juristes de l'État. Tu me fais rentrer par une loi spéciale, mais tu
es peut-être ouvert à une négociation.
Ça fait depuis 2015 qu'ils sont en négociation,
mais, en réalité, en 2016, ils n'ont pas été en négociation, parce qu'à partir
de juillet 2016 il n'y a pas eu de négociation. C'est pour ça qu'ils sont
entrés en... 24 octobre, hein, on se rappelle, ils ont été en grève générale
illimitée. Et ça, c'est l'arrivée de Pierre Moreau, qui devait être le deuxième
sauveur du gouvernement libéral, qui arrive pour régler... sa première priorité
était de régler le conflit des juristes de l'État. Un, aucune entente négociée;
deux, impose la loi spéciale; et trois, il vient de briser le lien de confiance
avec les juristes de l'État.
Demain matin, les juristes de l'État
rentrent et imaginez le lien de confiance avec ces ministres, et ces
sous-ministres, et la haute direction de l'État de la gouvernance du Québec.
Trois grèves, trois lois spéciales. C'est vraiment une méconnaissance du rôle
des juristes de l'État. Alors, je vais répondre à vos questions parce que c'est...
M. Boivin (Simon) : ...de la
mauvaise fois dans les négociation, les juristes préparent un recours contre le
gouvernement en vertu de cette mauvaise foi là imputée. Est-ce qu'un gouvernement
péquiste reconnaîtrait les mauvais agissements du gouvernement précédent et
compenserait les juristes pour le comportement du gouvernement dans cette négociation-ci?
Est-ce que vous pourriez les compenser financièrement si vous preniez le
pouvoir à la prochaine élection?
Mme Léger
: En tout cas,
un gouvernement du Parti québécois annulerait... enlèverait cette loi spéciale
là.
M. Boivin (Simon) : Ma
question, c'est : Est-ce que vous les compenseriez pour la mauvaise foi
que vous imputez au gouvernement dans ces négociations-ci.
Mme Léger
: Qu'est-ce
que vous voulez dire par «compenser» puis par «mauvaise foi»?
M. Boivin (Simon) : LANEQ
veut déposer un recours judiciaire contre le gouvernement de plusieurs millions
en prétextant la mauvaise foi du gouvernement dans ce conflit-ci. Vous partagez
cette analyse-là qu'il y a de la mauvaise foi?
Mme Léger
: Bien,
particulièrement, le recours qu'ils veulent faire, c'est de démontrer que c'est
inconstitutionnel, la loi qui est devant eux.
M. Boivin (Simon) : Mais, en
parallèle, ils ont aussi parlé d'un recours financier contre le gouvernement
sur la base de la mauvaise foi que vous reconnaissez ou que vous analysez de la
même façon. Est-ce que le gouvernement péquiste pourrait dire : Bien, coupons
court à cette poursuite-là, on va vous compenser financièrement?
Mme Léger
: Il y a
différentes façons de le régler. Je me rappelle que, lorsqu'il y a eu la négociation
en 2011, ils ont arrêté le recours judiciaire pour avoir une entente de
principe. Donc, pour moi, il y a toutes sortes de négociation possible. Alors
là, c'est des hypothèses que vous avez. Rendus au gouvernement, on verra les
voies de passage que nous aurons à ce moment-là.
M. Bellerose (Patrick) :
Qu'est-ce que la conclusion du conflit aujourd'hui annonce pour les prochaines négociations,
par exemple celles avec les professionnels de l'État qui sont toujours en
cours?
Mme Léger
: Il y en a
quelques autres aussi : les ingénieurs... En tout cas, là, ce que le gouvernement
nous dit depuis cette semaine, il nous dit qu'il a réglé avec les agents
correctionnels et il règle avec les autres, là. Il a l'air à régler avec tous
les autres.
Alors, c'est l'humeur que j'ai pu voir du ministre,
mais, pour moi, sa première priorité... il a échoué son premier test, qui est
celle avec les juristes de l'État. Alors, on verra les prochaines semaines. Je
serai là, au front, assurément.
M. Chouinard (Tommy) : Mais,
une petite précision, donc, un gouvernement péquiste changerait donc clairement
le régime de négociation qui s'applique actuellement aux juristes. C'est bien
ça?
Mme Léger
: Nous, ce qu'on
ferait, c'est que... On est d'accord avec la parité. La parité est salariale et
les régimes de négociation, mais sur la table, savez-vous, sur la table, si
vous avez... êtes capable de décortiquer un peu de ce qu'il y a depuis le début
jusqu'à aujourd'hui, ils sont partis avec un arbitrage... ils sont revenus
après à un comité de rémunération, je ne vais peut-être pas tout vous énumérer
ça, vous le savez peut-être, là, je ne veux pas être redondante pour vous,
mais... et là le gouvernement est arrivé avec un groupe de travail, qui est
refusé.
Alors, nous, on croit qu'il y a un régime de
négociation qui doit être fait... un régime de rémunération qui doit être fait
pour les juristes de l'État.
M. Chouinard (Tommy) : ...de négociation?
Mme Léger
: Oui.
M. Bellerose (Patrick) :
Indépendant et exécutoire?
M. Chouinard (Tommy) :
Indépendant comme le cas des...
Mme Léger
: De rémunération.
Pas de négociation, un régime de rémunération... Un comité de... Appelez-le
comme vous voulez. Un comité...
M. Chouinard (Tommy) : Le
comité indépendant.
Mme Léger
: C'est ça. Parce
que vous comprenez qu'il y a tellement de termes, là. Un comité indépendant, on
va s'entendre.
M. Bellerose (Patrick) : Un
comité indépendant dont les recommandations seraient exécutoires.
Mme Léger
: Dont les recommandations
seraient exécutoires.
M. Bovet (Sébastien) : Est-ce
que ça se limite aux juristes et aux procureurs de la couronne, ou éventuellement
les ingénieurs, les professionnels pourraient demander le même statut?
Mme Léger
: Non. Pour
le moment, ce que... On n'a pas fait le tour de tout le monde, là, mais, pour le
moment, ce qui est important pour nous, c'est vraiment de reconnaître les juristes
de l'État comme les procureurs de la couronne.
M. Bovet (Sébastien) : Est-ce
que ça pourrait créer un précédent pour que d'autres professionnels du gouvernement
viennent cogner à la porte du gouvernement et demander le même statut?
Mme Léger
: Je ne crois
pas parce qu'il faut quand même se dire qu'il y a un rôle particulier des juristes
de l'État, et c'est... En plus de ce régime de négociation là, ils veulent, dans
le fond, qu'on puisse reconnaître leur indépendance. Et ça, ça amène vraiment...
Il y a beaucoup de littérature à ce niveau-là démontrant la particularité et le
statut particulier des juristes de l'État.
M. Bovet (Sébastien) : Donc,
l'indépendance des employés de l'État au sein du gouvernement se limiterait,
selon vous, aux juristes et aux procureurs de la couronne.
Mme Léger
: Une hypothèse
pour le moment. On verra. Vous savez que chacune des négociations, ça se fait
sur une table, alors on va négocier en temps et lieu.
Mme Biron (Martine) : Mais,
selon vos analyses à vous, quel est l'écart au niveau de la rémunération des
juristes versus celle des procureurs?
Mme Léger
: Sur 10 ans,
sur... voyons, c'est 2,4 sur quatre ans, tandis que là il est à 9,5, dans le
fond, mais à 1,5, 1,7... il a offert 1,7 comme offre sur cinq ans.
Mme Biron (Martine) : Alors,
vous, si vous aviez été au pouvoir, vous auriez offert plus?
Mme Léger
: Même chose
que les procureurs.
Mme Biron (Martine) : Même
chose. Donc, combien de...
Mme Léger
: 2,4 sur
quatre ans.
Mme Biron (Martine) : 2,4 de
plus sur quatre ans?
Mme Léger
: Comme les
procureurs, 2,4 sur quatre ans.
Mme Biron (Martine) :
...parce qu'en fait le gouvernement dit que la rémunération, elle est égale, c'est-à-dire
qu'elle est... compte tenu du régime de retraite...
Mme Léger
: Non, mais
là il y a des primes, il y a des forfaits, il y a le régime de retraite dans
ça. Il nous a embourbés de chiffres, la dernière fois, là, dans le briefing technique,
là, que c'était à s'y perdre, hein? Et c'est là qu'on a pu voir par un de vos collègues
qui a pu faire dire au gouvernement : dans le fond, c'est plus bas que le
Front commun. Alors là, ils ont réajusté de 0,1, là, pour l'offre finale et
globale, mais je vous rappelle que, dans la loi spéciale qu'on a aujourd'hui,
ce n'est pas l'offre finale et globale. Dans l'annexe de leur projet de loi,
allez voir l'annexe, et, dans l'annexe, c'est l'autre offre d'avant. Alors, le gouvernement
recule, là.
Mme Biron (Martine) : Si vous
étiez au pouvoir, vous ne tiendriez pas compte, par exemple, du régime de
retraite ou des différentes primes?
Mme Léger
: Ah! peut-être,
là. Moi, je ne m'enfarge pas dans ça pour le moment, moi. Ce qui était important
pour nous, c'est d'assurer d'avoir le même régime que les procureurs de la
couronne, et eux, ils ont 2,4 sur quatre ans. Ça fait que c'est la même chose.
Notre position, c'est vraiment comme les procureurs de la couronne.
M. Vigneault (Nicolas) : Dans
le contexte où ils retournent au travail forcés par la loi, craignez-vous, en quelque
sorte, soit des débordements ou des choses comme ça?
Mme Léger
: Bien oui.
Bien, premièrement, il y a quand même quatre mois de grève, là, alors ils vont
être débordés. On sait très bien qu'avec un climat de confiance brisé, je ne
suis pas sûre qu'il va y avoir des heures supplémentaires qu'ils vont faire, je
ne suis pas sûre qu'ils vont avoir le coeur à l'ouvrage. C'est des gens professionnels,
qui ont un code... une éthique à haut niveau quand même.
Je viens de les voir, je viens de leur
parler, ils ont le coeur brisé, là. Ça pleure, là, tu sais. Alors, ils ont le
coeur brisé parce qu'il faut qu'ils rentrent demain matin, et ils n'ont pas le
goût de rentrer demain matin, mais ils sont professionnels, puis ils vont
rentrer demain matin, puis ils vont faire leur ouvrage. Mais est-ce qu'ils vont
faire tout le petit plus qu'ils ont toujours fait? Bien, ça, il faudrait leur
demander. Merci.
(Fin à 14 h 31)