(Douze heures quinze minutes)
M. Jolin-Barrette : Alors,
bonjour, tout le monde. C'est extrêmement préoccupant aujourd'hui ce qu'on
apprend sous la plume de Philippe Teisceira-Lessard. On apprend que la SQ
enquêtait sur le crime organisé, que la SQ est tombée sur des libéraux et
qu'ils se sont fermé les yeux. Donc, on invoque l'immunité diplomatique, le
principe d'immunité diplomatique pour ne pas pouvoir écouter les libéraux.
Je me questionne relativement à cette
immunité. Moi, c'est la première fois que j'entends ça. Je ne crois pas que ça
s'applique. Il y a des questions qui se posent, à savoir : Qui était au
courant? Qui a été informé au gouvernement qu'ils étaient sous écoute? Quel
ministre, s'il y avait des ministres, qui a été informé parmi ces ministres-là?
Dans l'entourage aussi, est-ce qu'il y a des membres de l'entourage des
ministres, du premier ministre de l'époque, qui étaient informés de cette
écoute électronique là?
On veut savoir qui l'était et comment ça
se fait qu'on évalue, on dit que l'écoute électronique pouvait nuire à
l'économie du Québec. Ce n'est pas aux policiers à évaluer si l'écoute
électronique peut nuire. Ça va être à un juge de paix, ça va être au magistrat,
ça va être à un juge de la Cour du Québec de caviarder des documents de preuve.
Vous savez, il existe des processus à la cour, si jamais c'est dans la preuve,
mais il faut que les policiers puissent faire leur travail librement. Il n'y a
personne au-dessus des lois, et c'est extrêmement préoccupant ce qu'on apprend
aujourd'hui.
L'autre élément, à l'époque où le Parti québécois
était au pouvoir, où M. Bergeron était ministre de la Sécurité publique, a-t-il
été informé par la Sûreté du Québec de ce genre d'information là au niveau de
l'écoute électronique? Parce que ça pose la question, encore une fois, entre le
lien entre le politique et la police. Et comment ça se fait que, lorsqu'on
tombe sur des libéraux, bien là, on se ferme les yeux?
M. Croteau (Martin) :
Qu'est-ce que ça vous dit sur la volonté réelle de la SQ d'aller au fond de ces
allégations de collusion, de corruption, présence du crime organisé dans les
appels publics? Est-ce que ça remet en cause la volonté de la SQ ou la capacité
de la SQ de faire la lumière là-dessus?
M. Jolin-Barrette : Bien,
écoutez, moi, ce que je vous dis, c'est qu'il n'y a personne au-dessus des lois
et il faut que les corps de police aient tous les moyens, tous les leviers
légaux pour réaliser leur mission, sur enquêter s'il y a des infractions
criminelles qui ont été commises. Là, c'est grave, là. Diligence, c'était pour
enquêter sur le crime organisé dans l'industrie de la construction, et on se
retrouve à entendre des conversations d'élus, de politiciens, et là on nous dit :
Ils profitent de l'immunité diplomatique.
Écoutez, moi, ça me renverse. Il faut que
les policiers puissent faire leur travail à l'abri de toute influence, et ce
qu'on apprend aujourd'hui, c'est vraiment préoccupant. Donc, il faut que la
SQ... il faut qu'il y ait un mur de Chine entre le politique et la police, et
moi, c'est pour ça que je pose les questions, à savoir : Qui était au
courant au gouvernement? À l'époque, c'était un gouvernement libéral. Qui était
au courant parmi les ministres? Est-ce que le ministre de la Sécurité publique
de l'époque était au courant? Est-ce que le bureau du premier ministre était au
courant? Ce qui semble être le cas. Et qui, dans l'entourage des ministres ou
de l'entourage du gouvernement libéral, était au courant?
M. Croteau (Martin) : Donc,
ce que vous dites, c'est que cet épisode prouve qu'il n'y a pas un mur de Chine
entre la SQ et le politique?
M. Jolin-Barrette : Bien,
écoutez, à la lumière des informations que nous avons, il y a lieu de se poser
des questions sérieuses à l'effet de comment ça se fait qu'il y a des
politiciens qui ont bénéficié d'une immunité puis qui semblent avoir été
informés. C'est inexplicable, inexplicable.
Journaliste
: À partir
de ce moment-ci, qu'est-ce qu'on fait, là, quand on a cette information-là?
Vous êtes à la tête du gouvernement. Est-ce que vous déclenchez une enquête
pour savoir ce qui s'est passé, à ce moment-là?
M. Jolin-Barrette : La
première chose à faire, là, c'est que le premier ministre nous explique quels
sont les liens qui existent entre son gouvernement et la Sûreté du Québec au
niveau des enquêtes, les processus, parce qu'il l'a dit à de multiples
reprises, on n'est jamais en contact avec la SQ ou avec l'UPAC. Le collègue de Matane-Matapédia
a déjà fait une démonstration que ce n'était pas le cas.
Donc, c'est le premier élément, le premier
ministre doit s'expliquer sur ce point-là et il doit faire une recension, au
sein de son gouvernement, à savoir qui était au courant, qui a été informé
parmi les membres de sa députation et parmi les employés politiques qui
travaillent au sein des différents cabinets et ministères avec le Parti libéral.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Quelle doit être la procédure pour mettre sous écoute un élu ou un membre du gouvernement?
Est-ce que la procédure qui implique, là, le DPCP...
M. Jolin-Barrette : Bien,
écoutez, de façon très franche, je ne suis pas un expert en droit criminel.
Donc, à mon souvenir, ça prend un mandat, donc, qui est validé. Bien, en fait,
comme n'importe quel autre citoyen, nécessairement, ça prend un mandat qui est
octroyé par la justice, par un juge de paix ou par un juge de la Cour du Québec
pour faire enquête, pour pouvoir intercepter des conversations qui sont
privées. Donc, c'est assujetti au contrôle judiciaire.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais il n'y a pas un contrôle supérieur qui doit être... ou des critères,
disons, plus importants, plus sévères qui doivent être respectés lorsqu'on veut
mettre sous écoute un membre du gouvernement du Québec?
M. Jolin-Barrette : Je crois
que c'est sujet à validation peut-être par le DPCP, mais je ne peux pas vous
confirmer, là, il faudrait que je vérifie avant de pouvoir vous répondre
adéquatement à cette question-là, là. À mon souvenir, il me semble qu'il y a peut-être
une procédure particulière, là, mais je ne peux pas vous confirmer.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Est-ce que, là, on doit lancer une enquête administrative? Vous dites que le premier
ministre doit répondre pour les actes posés durant un autre gouvernement, là,
puis, bon, expliquer les liens entre l'exécutif et la Sûreté du Québec, mais
est-ce qu'il y a une enquête indépendante qui doit être...
M. Jolin-Barrette : Bien, d'un
autre gouvernement... Le premier ministre actuel siégeait dans ce gouvernement-là.
La moitié de son Conseil des ministres siégeait dans ce gouvernement-là. C'est
pas mal la même gang. Dans un premier temps, là, ça, c'est un premier élément. Donc,
le gouvernement libéral que nous avons actuellement, ce n'est pas mal le même gouvernement
libéral qu'on a eu entre 2003 puis 2012. Ça, c'est le premier élément.
Nous, ce qu'on demande, là, pour
l'instant, c'est de savoir qui était au courant au sein du gouvernement, qui a
bénéficié de cette immunité-là, immunité qui est, ma foi, très surprenante.
Comment ça se fait qu'à partir du moment où la SQ enquête sur l'industrie de la
corruption, sur le crime organisé, la construction... puis que là ça nous amène
vers des libéraux, vers des politiciens, comment ça se fait que là, on invoque
l'immunité? Ça ne s'explique pas là.
Donc, le premier ministre a à répondre et peut-être
qu'éventuellement il devrait y avoir une enquête, mais la première chose à
faire présentement, c'est de savoir qui était au courant au niveau des élus,
mais au niveau aussi de l'entourage politique.
M. Hicks (Ryan) : What kind of questions does this raise for you?
M. Jolin-Barrette : It raises a lot of questions about who knew that situation, which member of the provincial
Parliament, of the National Assembly, knew that they were under electronic surveillance. So now we learn
this morning that the Sûreté du Québec was making an inquiry on the organized crime in the construction
industry and, during that electronic surveillance, they found some politicians,
some Liberals, and they have the benefits of diplomatic immunity.
So why, when the Sûreté du Québec saw that, they closed their
eyes not to continue the inquiry? And what we learned about this paper this
morning is the fact that they consider that the electronic surveillance could
attend the Québec economy or
Premier Charest. There is nobody who is not… above the law. So we need that all
the rules are the same for everybody.
M. Hicks (Ryan) : Is there a concern here about also the separation or the lack of
separation between police and politicians, and police and the province, the Government?
M. Jolin-Barrette : Yes, of course. We have that kind of question before with the journalist
surveillance and now we see a clear situation that why there's not a China
wall, a firewall, between the politics and the police. We need some explication
about why the Premier's office has some link with the Sûreté
du Québec and the head of the Sûreté
du Québec, how it's going on between the two. We need
to ask that question to Mr. Couillard and we also need to ask that question to
Mr.Bergeron who has a
Public security Minister of the Parti québécois between 2012 and 2014.
So it asks some serious
question and who intervene about that electronic surveillance. Who knew that
situation in the ministers or in the political staff that were working with the
ministers at the time? And now, if there is somebody in the Government who
still seat in the Assembly, in the Chamber, is there some people who received
that kind of information? We need to know and we need to know right now. That's
really important because we need a separation between the politics and between
the police.
M.
Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce que l'interpellation de Rita de Santis
ce matin était un exercice utile?
M. Jolin-Barrette : Moi, je
pense que c'est un exercice fort utile parce que j'ai démontré à la ministre de
la Réforme des institutions démocratiques qu'il y a une problématique au niveau
de la façon dont on désigne les personnes qui relèvent de l'Assemblée
nationale. Et la ministre s'est emmurée dans le statu quo, dans l'immobilisme
des vieux partis. Le Parti québécois ne propose rien, d'ailleurs, à cet
effet-là, pour moderniser nos façons de faire.
Il faut faire en sorte d'avoir le meilleur
candidat possible pour occuper ces fonctions importantes, ces fonctions qui
visent à servir l'intérêt public et qui visent à contrôler l'action du
gouvernement, bien souvent. Mais les libéraux préfèrent continuer avec les
vieilles méthodes et de ne pas moderniser la façon de procéder. Puis c'est ce que
j'ai exposé ce matin et j'ai offert ma collaboration à la ministre de la
Réforme des institutions démocratiques, de dire : On peut s'asseoir
ensemble pour moderniser nos façons de faire, mais, s'il y a un refus puis un
immobilisme, bien, le gouvernement libéral s'entête encore une fois. Et j'ai
proposé à la ministre de désigner un commissaire à l'éthique avant la fin du
mois de juin, avant qu'on quitte, parce que le Commissaire à l'éthique actuel
va s'en aller le 30 septembre 2017, et c'est important de le remplacer le
plus rapidement possible, mais avec une liste de trois candidats.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Sinon, vous allez vous abstenir comme vous l'avez fait cette semaine pour la Protectrice
du citoyen?
M. Jolin-Barrette : Bien, on
va évaluer au cas par cas. On va évaluer au cas par cas, mais je pense que
c'est un message qu'on a envoyé cette semaine au gouvernement. La façon de
procéder actuellement n'est pas adaptée à la modernisation, à la réforme des
institutions démocratiques. Écoutez, dans le titre de la ministre, c'est
«réforme», il n'y a rien qui est réformé. Depuis qu'elle est là, on ne réforme
rien pantoute.
Donc, à un moment donné, là, il faut que
le gouvernement libéral prenne conscience que les institutions démocratiques,
c'est important. C'est la voix des Québécois. C'est eux qui sont garants de
l'intégrité, notamment, des deniers publiques, par le biais du Vérificateur
général. C'est eux qui sont garants du mode électoral, du système électoral,
par le biais du Directeur général des élections, par le biais de l'intégrité
des députés, du lobbyisme aussi. C'est super important, et il faut que la
ministre le réalise. Mais il y a des améliorations à apporter, puis ce qu'on
constate, c'est qu'il y a une fermeture du gouvernement libéral, puis qu'ils ne
sont pas prêts à moderniser les institutions, puis à les moderniser à la
hauteur de ce qui est nécessaire au XXIe siècle.
Une voix
: Merci.
(Fin à 12 h 28)