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Point de presse de M. François Bonnardel, leader parlementaire du deuxième groupe d’opposition, et M. François Paradis, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de santé et de services sociaux

Version finale

Monday, June 19, 2017, 11 h

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Onze heures deux minutes)

M. Paradis (Lévis) : Merci d'être là, et je serai très bref. Je serai très bref parce que j'ai envie de laisser rapidement, immédiatement la parole à ceux qui m'accompagnent aujourd'hui. Vous aurez évidemment reconnu François Bonnardel, mais aussi M. Yvon Cournoyer, M. Yvon Cournoyer qui a reçu un diagnostic de sclérose latérale amyotrophique. Et pourquoi M. Cournoyer est là? Parce qu'il porte le message aujourd'hui, encore une fois, de milliers de Québécoises et de Québécois, de milliers de familles qui souhaitent un élargissement de l'aide médicale à mourir. C'est un dossier sur lequel on continue à avancer, c'est un dossier sur lequel on continuer à presser le gouvernement d'agir, c'est un dossier sur lequel on souhaite que les oreilles soient attentives aux cris et aux besoins de ceux et celles qui nous racontent leur vécu.

M. Cournoyer, sans plus tarder, je ne prends pas plus de temps, je vous demande de prendre la parole. Merci pour votre courage, merci pour votre vision, merci, paradoxalement, et je le dirai comme ça parce qu'on s'en est parlé, merci d'aimer la vie comme vous l'aimez. Puis c'est aussi pour ça que vous venez nous parler aujourd'hui.

M. Cournoyer (Yvon) : Vous êtes bien gentil.

M. Paradis (Lévis) : La parole est à vous, M. Cournoyer.

M. Cournoyer (Yvon) : Merci. Avant de débuter, j'aimerais remercier le parti, la Coalition avenir Québec, de m'inviter ici et je voudrais aussi vous rappeler que le mois de juin, c'est le mois de la SLA. Et puis, si vous avez des dons à donner, bien, pour l'association de la SLA...

Moi, je suis atteint de la SLA. Juste pour vous donner un point de repère, l'an passé, à la même date, je marchais et puis je boitais un peu parce que ma cheville gauche était atteinte. Et, comme vous pouvez le constater, un an plus tard, je suis en fauteuil roulant. En plus, j'ai de la misère un peu à vous parler parce que mes poumons sont atteints et j'ai perdu un peu de dextérité au niveau des mains. La maladie, elle va quand même dans une vitesse assez fulgurante dans mon cas, et puis ça, ça m'inquiète.

Je voudrais m'adresser personnellement au ministre Barrette. Je demande qu'il fasse une commission parlementaire le plus tôt possible pour aider des personnes comme Mme Gladu et M. Truchon. Puis je voudrais aussi m'adresser au premier ministre du Canada, M. Justin Trudeau. Il a fait la loi C-14. J'aimerais qu'il la présente à la Cour suprême du Canada, sa loi, parce que la Cour suprême du Canada, si on s'en tiendrait seulement à cela, je pourrais avoir l'aide à mourir.

Ensuite, moi, j'ai un rêve, puis mon rêve, là, ultime, là, ça serait qu'un jour je puisse remplir mon formulaire de l'aide à mourir avec mon médecin, qu'il soit envoyé aux hautes instances et que ça soit accordé. Par la suite, je pourrais avoir choisi ma date, puis, la veille, là, que je sois entouré de Chantal, ma conjointe, ma soeur, mon beau-frère, mes nièces, les petits-enfants, tous mes amis, puis qu'on puisse prendre un goûter, prendre un verre, jaser, rire et pleurer puis, le lendemain, là, être couché dans mon lit puis partir puis... de la main. C'est tout. C'est tout ce que je demande. C'est tout. Merci.

M. Paradis (Lévis) : Merci, M. Cournoyer. François Bonnardel.

M. Bonnardel : Oui. Bon. M. Cournoyer, vous savez, j'ai reçu, dans les derniers mois, des centaines de témoignages, de courriels de gens qui m'écrivaient qu'ils vivaient des situations familiales, et tout ça. Puis, M. Cournoyer, aujourd'hui, bien, vous êtes le visage, comme François l'a dit, de ces milliers de gens, de ces milliers de personnes. Que ce soit l'Alzheimer, que ce soit la démence, la SLA, maladies dégénératives, vous parlez au nom de ces milliers de personnes. Des courriels qu'on reçoit, puis vous le savez, ces témoignages, vous en avez reçus aussi suite au passage que vous avez eu à Tout le monde en parle.

M. Cournoyer (Yvon) : Effectivement.

M. Bonnardel : Et je dirais une chose au gouvernement, à M. Barrette, à M. Couillard. On comprend que c'est un débat qui peut diviser. On ne s'attend pas à avoir l'unanimité, mais je leur dis, je vous dis : Ne laissez pas ces personnes de côté. Ces gens veulent parler, veulent témoigner, veulent expliquer un pan de leur vie, les aidants naturels, les papas, les mamans qui vivent ça. Et permettez à ces personnes d'expliquer comment eux souhaiteraient, un jour, peut-être utiliser l'aide médicale à mourir, ce document que vous souhaitez signer un jour. Vous avez tout mon respect, tout mon respect, M. Cournoyer.

Et, vous savez, dernier point, on a une session intensive qui s'est terminée, qui, pour moi, n'était pas intensive. On aurait eu le temps d'entreprendre ce débat. Et je souhaite, avant la prochaine élection, M. Barrette, M. Couillard, que vous permettiez, dès la fin de l'été, sinon mois de septembre, qu'on commence cette commission parlementaire, qu'on puisse entendre les témoignages de ces personnes qui vivent avec ces maladies pour qu'on soit dans un débat non partisan et qu'on soit capables, je souhaite, un jour d'ouvrir cette loi qui permettrait à des gens atteints de ces maladies de dire : Cette liberté de choix, bien, je la veux pour moi, je la veux avec ma famille, je la veux avec mon conjoint, avec ma conjointe, mes enfants. Voilà.

M. Paradis (Lévis) : Je compléterais en disant qu'on connaît la sensibilité de la question, mais, au moment où je vous parle, moi, j'ai reçu des centaines de courriels, des centaines de témoignages de gens qui me demandent : Est-ce que ça va commencer bientôt? Est-ce qu'ensemble on va pouvoir parler? On doit maintenant parler de ça. Des témoignages de patients qui sont impuissants. Alors, il faut tout simplement faire bouger les choses, presser le gouvernement d'agir. Dans un débat, et je le rappelle, transpartisan, non partisan, on ne peut pas se fermer à la volonté des Québécois et Québécoises qui vivent une situation. On doit davantage comprendre et s'amener à poser des gestes qui répondront aussi aux demandes de M. Cournoyer, que je trouve extrêmement courageux. Puis c'est parce que j'ai vraiment en mémoire le fait qu'au moment où on se parle il y a probablement des familles qui se posent des questions et qui sont dans un dilemme aujourd'hui. Travaillons pour faire en sorte qu'ici ensuite on puisse prendre des décisions qui s'imposent et qui seront le reflet de volonté de l'ensemble de la population.

 Alors, si vous avez des questions pour M. Cournoyer ou qui que ce soit.

La Modératrice : On va commencer avec Mathieu Dion, Radio-Canada.

M. Dion (Mathieu) : C'est en mars que ça a été annoncé, le début de la réflexion, création d'un comité d'experts. Encore aujourd'hui, on n'a aucune connaissance de ce comité d'experts là. Est-ce que c'est normal, selon vous, que ça prenne autant de temps, trouver des gens qualifiés pour au moins essayer de se pencher sur les enjeux juridiques et médicaux?

M. Paradis (Lévis) : C'est particulièrement étonnant. C'est étonnant puis ça... Rien n'empêche rien. Je veux dire par là que des consultations publiques, de permettre à l'ensemble des Québécois et des Québécoises, des organisations, des experts à venir échanger et... On dit un débat. Moi, je le vois comme une franche discussion pour nous permettre d'aller plus loin, d'autant plus que cette volonté de faire quelque chose, une discussion comme celle-là, qui est à point donné, là, qui doit avoir lieu maintenant, se veut non partisane. Nous avons présenté des motions pour enclencher le processus, elles ont été refusées.

Moi aussi, je me questionne. Qui sont ceux qui doivent faire partie du comité d'experts? Et, au-delà de leur bilan ou de leurs consultations, bien, la population doit être aussi partie prenante de ce grand forum là. Et ça peut se commencer maintenant. Oui, je suis étonné. Oui, j'aurais souhaité que ce soit plus rapide. Vous me parlez de mars. En février, c'était le dossier Cadotte-Lizotte, hein, qui a donné lieu au début puis à la réflexion, mais je pense que, maintenant, c'est le temps. Les gens le réclament, les gens le souhaitent, et il faut aller dans ce sens-là.

M. Dion (Mathieu) : Mais, en même temps, ne faut-il pas avoir une connaissance pleine et entière des faits juridiques, des faits médicaux qui sont associés à ça avant d'avoir un débat public en commission parlementaire? Ce ne serait pas intelligent, même, d'attendre ça?

M. Paradis (Lévis) : De l'attendre, non. Je pense qu'un n'empêche pas l'autre. Moi, je pense que les Québécois... Il faut savoir aussi, hein... M. Cournoyer vous a raconté son quotidien. Ça aussi, on a besoin de l'entendre, le cri du coeur de celui qui a reçu un diagnostic, la volonté de la famille qui accompagne, à travers des témoignages d'experts qui nous nourrissent aussi de leurs connaissances, mais on ne doit pas retarder parce que tout le temps perdu, alors qu'on est en mesure de discuter et que la volonté commune est celle-là, d'ouvrir cette consultation-là, c'est autant de semaines, de mois de drames pour des familles qui souhaitent pour le moins engager la discussion qui mènera on ne sait pas où, mais qui nous permettra pour le moins de mettre sur la table des données qui, ensemble, nous feront prendre probablement la meilleure des décisions. Oui, les experts, c'est important. Oui, le bilan est important. Oui, les statistiques sont importantes. Mais d'entendre la population dans une consultation publique élargie, ça prend toute sa place et ça peut se faire en même temps.

La Modératrice : Véronique Prince, TVA.

Mme Prince (Véronique) : Oui. Je comprends que c'est de la politique au provincial, là, mais, en même temps, les lois sont concurrentes avec le fédéral puis le provincial. Est-ce qu'il y a des représentations aussi, à ce moment-là, qui peuvent être faites auprès du fédéral?

M. Paradis (Lévis) : M. Cournoyer, hein, vous n'hésitez pas si vous avez des choses à dire, hein? Je sais que vous le vivez puis vous le pensez depuis longtemps puis avec beaucoup d'émotion et de lucidité.

Au-delà de ça, il y a des choses qui se font. Oui, il y a deux paliers. Mais notre volonté ici aujourd'hui, celle que l'on exprime à nouveau, c'est de faire en sorte qu'on puisse engager cette vaste consultation, cette vaste discussion qui implique tous les Québécois et toutes les Québécoises. On a une société vieillissante, des histoires humaines comme celle de M. Cournoyer, elles sont nombreuses. M. Cournoyer, là, et vous le savez probablement, vous parlez au nom de centaines de milliers de familles qui vivent la même chose, qui n'ont pas cette force-là, ce courage-là, puis je pense que ces gens-là vous en sont reconnaissants. Oui, il y a deux paliers, mais moi, je... en tout cas, je souhaite m'attarder à celui qui nous occupe, celui de faire en sorte qu'on est prêts à discuter, qu'on est prêts à voir comment on peut penser l'élargissement de l'aide médicale à mourir en fonctions de maladies dégénératives qui sont de plus en plus nombreuses.

Et, au-delà de ça, peu importe ce qui se passe à l'autre palier, peu importe ce qui se passe au niveau juridique, je pense que la consultation populaire, le cri du coeur oblige à la réflexion, et c'est dans ce sens-là que je demande au gouvernement d'agir.

M. Bonnardel : Juste un point. L'aide médicale à mourir a été utilisée par des centaines de personnes depuis que cette loi a été adoptée, le fédéral ne l'a pas contestée. On demande d'ouvrir cette loi puis d'avoir cette discussion. Et le Collège des médecins le mentionnait dans son rapport final, on a oublié un pan important de gens comme M. Cournoyer, ceux qui sont atteints de démence, d'Alzheimer. Donc, il faut faire ce débat, il faut peut-être ouvrir cette loi avant la prochaine élection, et, par la suite, on pourra l'évaluer. Mais, si le fédéral n'a pas contesté ce qui a déjà été fait par nous, au provincial, je ne vois pas pourquoi, si on allait plus loin, ce serait un problème.

Mme Prince (Véronique) : Est-ce qu'en plus d'une consultation publique vous pourriez demander également de faire une commission parlementaire, comme ça avait été le cas dans mourir dans la dignité, là, où on avait vraiment tous les partis, c'était non partisan? Est-ce que vous faites également cette demande-là?

M. Paradis (Lévis) : Bien, la volonté est celle-là. La volonté est carrément celle-là, dans une vision non partisane, de permettre à tous ceux et celles qui souhaitent s'exprimer... Et là ça passe par les familles, ça passe par les patients, ça passe par des organisations de soutien, et la volonté elle est là. L'ouverture est très large. Mais, encore une fois, l'objectif à atteindre, c'est de faire en sorte qu'on puisse ensemble discuter d'un sujet qui aujourd'hui ne peut plus être retardé. Chaque semaine qui passe, chaque mois qui passe fait en sorte qu'il y a des drames humains, dont on n'est pas témoins mais qui se déroulent autour de nous, et c'est la volonté.

Alors, oui, vous avez raison. Mais cette commission parlementaire là ne doit pas nécessairement être itinérante, je veux dire, la forme qu'elle doit prendre, sa base première, c'est la base de la réflexion, c'est une consultation ouverte, publique, avec l'ensemble de la population prête à discuter sur cet enjeu aussi important que celui-là. Mais, oui, vous avez raison, ça dot être très large et permettre à tous ceux et celles qui veulent donner leur point de vue de le faire.

La Modératrice : Tommy Chouinard, LaPresse.

M. Chouinard (Tommy) : Oui, bonjour. M. Paradis, peut-être. Est-ce que votre demande de directive médicale anticipée... Bien, d'abord, je crois que le gouvernement du Québec pourrait l'introduire sans qu'il y ait de problème d'ordre de champ de compétence, et tout ça, c'est tout à fait possible. D'ailleurs, ça avait été écarté précédemment parce qu'il n'y avait pas consensus. Qu'est-ce qui a fait que, quelques années plus tard — ça ne remonte pas à Mathusalem, cette loi-là, qui a été adoptée à l'Assemblée nationale — qu'aujourd'hui, on serait rendus plus loin et que cette règle-là deviendrait plus acceptable?

M. Paradis (Lévis) : Bien, je pense que notre société évolue. Je pense que les gens parlent davantage. Je pense que des M. Cournoyer, qui viennent nous raconter leur quotidien, qui veulent nous exprimer la volonté qu'ils ont de vouloir continuer à vivre, mais dans un dessein qui n'est pas le vôtre, qui n'est pas le mien, avec un avenir qui est différent, je pense que, maintenant, les gens n'ont plus cette timidité-là d'exprimer leurs besoins et leur vision.

Dans un premier temps, vous le savez, je veux dire, l'aide médicale à mourir a été un grand pas vers l'avant, vous l'avez dit, qui n'a pas été facile pour le consensus. Elle a demandé des adaptations, elle a demandé de poser le frein à l'occasion, mais une société évolue. Puis je pense qu'une pensée évolutive axée sur l'humain, axée sur des témoignages comme celui-ci, fait en sorte qu'à un moment donné, bien, il faut que tu rejoignes aussi là où les gens veulent aller.

Et il n'y a pas d'imposition là, je vous le disais il y a deux instants. On parle de consultations publiques. Il n'est pas question d'imposer quoi que ce soit. Là, pour l'instant, il est question de réfléchir pour mener à une décision qui fera consensus. Puis, encore là, hein, je veux dire, on ne peut même pas penser à la finalité de la discussion. La décision viendra au terme de cette consultation-là, mais, pour l'instant, on a le devoir d'écouter. Et je pense que plus le temps passe, plus on perd de précieuses minutes.

M. Chouinard (Tommy) : Vous savez, dans l'esprit de la plupart des gens, quand on évoque cette notion de directive médicale anticipée, les gens se disent : Bien, une fois que je vais être inapte, ils vont procéder. Ce n'est pas exactement ce qui arriverait, à moins qu'on change de façon assez importante la loi québécoise. J'aimerais savoir si, pour vous, il faut garder cette notion d'être en fin de vie, donc en avoir pour... vous savez, là, c'est six mois, un an, là, où, là, le corps ne suit plus. Il n'y a pas juste la tête, là, si je peux...

Une voix : Voulez-vous y aller, monsieur...

M. Chouinard (Tommy) : J'essaie de cadrer la chose. Oui, M. Cournoyer.

M. Cournoyer (Yvon) : Oui, c'est parce qu'actuellement la loi, comme elle est établie, là, être en fin de vie, il faut que tu sois à un an de la fin de vie. Puis moi, je dis que c'est une bonne chose. Le 5 juin, ça faisait trois ans que l'aide à mourir était établie, là, et puis moi, je dis, là : On est rendus à une ouverture, puis il faut que tout le monde mette l'épaule à la roue, qu'il n'y ait pas de partisanerie, puis il faut que ça avance parce qu'il y a des personnes, là, qui sont malades, là, puis ça, ça ne fait pas la une des journaux. Il y a du monde qui n'ont pas beaucoup de sous. Ils ne peuvent pas aller en Suisse ni en Belgique, puis en plus ils sont au désespoir puis ils souffrent. Il y en a qui vont jusqu'au suicide. Puis moi, je trouve, là, dans la société qu'on a actuellement, là, on a une belle société, c'est inacceptable.

M. Chouinard (Tommy) : Si je peux me permettre, là, vous évoquez justement... c'est un peu la prémisse de ma question, c'est que, là, vous évoquez la question du suicide assisté, qui n'est clairement pas, là, dans le champ de compétences du gouvernement du Québec, là. Mais est-ce que vous comprenez, M. Paradis ou, peut-être, M. Bonnardel, qu'au fond cette demande initiale que vous faites peut aussi... il peut y avoir un problème de perception, et c'est ce que le ministre essaie peut-être de faire en ayant d'abord un comité d'experts pour essayer de mettre des balises pour ne pas que les gens pensent de façon erronée que le gouvernement du Québec pourrait aller dans un sens qui n'est pas possible et qu'il faudrait donc que ce soit le fédéral qui bouge sur cette question-là?

M. Bonnardel : C'est une question importante. J'en ai parlé. Cette directive médicale, si moi, aujourd'hui, en mon âme et conscience, à 50 ans, je décidais — puis j'ai toute ma tête — de signer ce document parce que j'ai un exemple devant moi et je dis à mon seul fils puis mon médecin consentant que, si j'arrive, un jour, à ça puis que ce document est signé... bien, je l'ai signé en santé, je l'ai signé avec toute ma tête. M. Cournoyer donne un exemple qu'il l'aurait peut-être signé, ce document, si ce document avait existé voilà un an, voilà deux ans, voilà trois ans.

Maintenant, je parle par mon cas personnel. Dans une famille où il y a deux, trois, quatre enfants, oui, il y a certainement des directives, puis tu es capable, comme papa ou maman, de dire : Écoutez, là, je m'attends à ce que vous, les enfants, vous soyez unanimes dans la décision que, si papa, maman n'est plus capable d'avoir une santé qui est digne, une tête qui est encore là, bien, c'est à vous de choisir.

Maintenant, je comprends que ce n'est pas évident, pas évident de décider ça, mais je pense qu'on est capables de le baliser et de donner ce droit à une personne de 60, 50, 40, 70 ans de dire : Moi, je suis en santé, là, mais peut-être que, si j'arrive à ça et que cette maladie se développe, bien, j'aurai signé ce document. Et, à la limite, c'est notarié, on s'en va devant un juge, mais un juge décidera si ce document est valide ou non.

La Modératrice : Caroline Plante, LaPresse canadienne.

Mme Plante (Caroline) : Bonjour, M. Cournoyer. Je voulais juste savoir pourquoi vous dites que c'est un rêve pour vous de choisir votre date. Qu'est-ce que vous craignez?

M. Cournoyer (Yvon) : Bien, c'est parce que la maladie de la SLA, déjà, je suis atteint, depuis environ cinq semaines, au niveau des poumons. Puis cette maladie-là, qu'est-ce qui arrive, c'est que, si je vais jusqu'au bout de ma maladie, je vais finir emprisonné de mon corps. Puis, moi, mes antécédents, c'est que j'ai été marqué au fer rouge, moi, par la maladie. J'ai perdu mon père, à 18 ans, d'un cancer. Moi-même, j'ai eu un cancer à 42 ans. Je m'en suis bien sorti. J'étais en pleine forme, moi, je prenais soin de moi au bout, là. Puis j'ai perdu ma mère par l'Alzheimer. Là, c'est à mon tour encore. Ça fait que deux plus deux, ça fait quatre, là, dans mon cas.

Ça fait que c'est pour ça que mon rêve... Puis la vie, là, je l'adorais, là. Moi, j'avais des projets, là. Je prenais ma retraite à... J'ai 56 ans, je prenais ma retraite à 60 ans, puis, avec ma conjointe, bon, on avait plein de projets. Mais la vie en a fait autrement. C'est pour ça que je veux partir, puis préserver aussi ma dignité, puis prendre soin aussi de mes proches parce qu'ils souffrent, ils souffrent autant que moi. Puis c'est pour ça que, moi, c'est mon désir ultime.

Mme Plante (Caroline) : Puis vous parlez, donc, d'élargir éventuellement, là, l'aide médicale à mourir. Vous ne craignez pas qu'il y ait des dérives?

M. Paradis (Lévis) : En fait, ce qu'on dit surtout aujourd'hui, c'est d'en parler. Le message aujourd'hui, c'est d'en parler.

Mme Plante (Caroline) : Mais sur le fond...

M. Paradis (Lévis) : Mais je comprends, mais, même à ça, ce serait très présomptueux de penser être en mesure de vous dire aujourd'hui que l'aboutissement de ces consultations-là va mener directement vers une façon de faire. Là, l'étape où on est, à travers des témoignages comme ceux-ci, c'est de se dire ensemble quels sont nos... on est rendus à une étape, on est en mesure d'avancer la réflexion, de proposer des choses. Et j'espère que des gens viendront poser des questions qui sont difficiles, auxquelles on n'a pas les réponses. On en a parlé il y a deux secondes, on n'a pas les réponses à tout. On ne peut pas les avoir maintenant. Et, si on les avait maintenant, bien, l'exercice devient caduc.

Ce n'est pas ça, le but de l'exercice. C'est de dire : Aujourd'hui plus que jamais, à travers les témoignages qu'on reçoit, avec la douleur exprimée, avec la volonté de familles d'accompagner, avec un monsieur qui nous dit : J'aime tellement la vie que je suis en train de me questionner sur la fin de la mienne, bien, le respect qu'on doit avoir dans la dignité, c'est de s'écouter. Puis ensuite on verra vers où ça mènera. Puis, oui, il va y avoir des questions difficiles puis, oui, il y aura peut-être des choix à poser. Puis, au bout de l'exercice, il y aura des décisions à prendre. On peut difficilement se dire maintenant : Quelles seront-elles? Il y a des volontés qui sont exprimées, mais elles doivent surtout être entendues. Je pense que le public... En fait, ce qui est très important ici, c'est de dire qu'au-delà des experts la population doit aussi se prononcer parce que ces drames humains là se vivent dans des familles, à travers des gens comme M. Cournoyer.

La Modératrice : Pascal Dugas-Bourdon, AgenceQMI.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Oui. Est-ce qu'il y a d'autres provinces canadiennes qui sont rendues plus loin, entre guillemets, dans le débat, qui pourraient nous aider à nous orienter?

M. Bonnardel : Non, il y a deux pays, si je ne me trompe pas. Il y a la Suisse et les Pays-Bas qui ont ouvert ce débat sur les maladies dégénératives, l'alzheimer, tout ça. J'ai reçu un témoignage, justement, hier, d'une maman qui a accompagné son fils à Zurich. M. Cournoyer le mentionnait.

Non, c'est sûr que c'est difficile, mais je pense qu'après trois ans où cette loi a été adoptée, le Québec est rendu là. Je pense qu'on assez grands aujourd'hui pour entreprendre cette discussion dans un contexte similaire à cette loi qui a été adoptée voilà trois ans ans. Puis c'est ce qu'on demande à M. Barrette : N'excluez pas ces gens. Tantôt, la question a été posée par M. Dion. Oui, ce comité d'experts va évaluer cette situation. Oui, ce document... Comment ce document peut être signé? Comment on peut ne pas avoir de dérives? Chaque cas, chaque famille sera différent dans cette évaluation de dire un jour : Bien, je signe ce document pour telle, telle, telle raison, avec une famille qui sera unanime, un docteur qui sera consentant.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Donc, le Québec serait la première province du Canada à aller jusque-là, possiblement.

M. Bonnardel : Tout à fait.

La Modératrice : Simon Boivin, LeSoleil.

M. Boivin (Simon) : Bonjour, messieurs. M. Cournoyer, bonjour. Qu'est-ce que vous auriez envie de dire ou comment est-ce que vous répondez aux gens qui vous disent : Non, c'est quelque chose d'immoral, ça, et ce qu'il faut, c'est des bons soins palliatifs? Comment vous auriez envie de les faire changer d'idée?

M. Cournoyer (Yvon) : Mon Dou! Je suis tellement déterminé à avoir l'aide à mourir. Votre question est pertinente. Mais ces personnes-là, je leur dirais : Change de place avec moi. Prends ma place, là, puis vis seulement qu'une journée. Si je pourrais le faire, là, je changerais avec eux. Puis, je vous dis, là, on revient, là, puis ils comprendraient ma situation.

Mais il y a des personnes, c'est côté religion. Il y en a d'autres, c'est... la plupart du temps, c'est religion ou c'est familial. Tu sais, la mort, là... Mais, tu sais, la mort, ça fait partie de la vie, hein? Tu nais, tu vis, tu meurs. Puis là, bien, la mort, moi, je dis qu'avec la loi qu'on a, moi, je dis qu'il y a de quoi à faire puis je reste accroché là-dessus. Mais, à votre question, c'est ça que je ferais si je pourrais le faire parce qu'il y a du monde, là, vraiment, là, que... il y a même des médecins qui sont contre, ça fait que, tu sais, à un moment donné, ça dépend toujours de ta personne, de ton vécu. Puis, moi, mon vécu, c'est que j'ai été marqué au fer rouge par la maladie toute ma vie. J'ai aimé la vie. Je me suis amusé. Mais là je suis rendu où ce que je dois être rendu. Puis je n'ai pas de regret, puis c'est mon point.

M. Boivin (Simon) : Mais j'ai une question sur un autre sujet, là, sans vouloir manquer de respect à la gravité de votre situation. Messieurs, il vient d'être annoncé par le DPCP qu'il n'y aura pas d'accusations contre Pierre Paradis. J'aurais aimé avoir une réaction de votre part là-dessus.

M. Bonnardel : Écoutez, c'est un peu court, là. Je n'ai pas vu la nouvelle. Pierre Paradis, c'est mon voisin de circonscription. Maintenant, si le DPCP a décidé de ne pas poursuivre son enquête, tout laisse croire que la gravité de la situation n'amenait peut-être pas la police à porter ce dossier beaucoup plus loin.

Donc, le DPCP ne porte pas ce dossier plus loin, donc on verra la suite. Est-ce qu'on reverra M. Paradis à l'Assemblée nationale? Il y a juste lui, je pense, qui peut répondre de cette situation-là.

La Modératrice : Merci beaucoup. On va passer aux questions en anglais. Ryan Hicks, CBC.

M. Hicks (Ryan) : Yes. Mr. Bonnardel, one of the things that you said in French was that it's been three years since the National Assembly passed medical aid and dying end-of-life care, and now is the time, because it's been three years, to have this discussion. But there are some people who would say : Well, exactly, it's only been three years. We need to wait longer to see, have more data to have a better sense of how this is actually playing out. What is your response to that?

M. Bonnardel : You know, the Collège des médecins said three years ago, when this bill was adopted, that we forgot a lot of people like Mr. Cournoyer, like people who are having a degenerative disease like dementia, like Alzheimer, and they said we forgot these people because we've not been able to have a consensus at the National Assembly. Remember the vote that we had. Even a member in the National Assembly, a Liberal MNA, said no the bill.

But I hope… And Mr. Cournoyer speaks for thousands of people today, saying : Hey! You forgot us. We hope that we can speak, explain our situation in the next weeks, next months to have a parliamentary commission. And I say to Mr. Barrette and Mr. Couillard : We are ready. Québec is ready. We will be the first province to speak about this situation, and I hope that we will be able to open this bill again before the next election.

M. Hicks (Ryan) : And so, the Health Minister has said that he is opened to that. So, why do you want him to speed up his reflection on this?

M. Bonnardel : We're okay about what Mr. Barrette said: we're going to talk with doctors, we're going to talk with specialists. But why are we forgetting people like Mr. Cournoyer? François received not thousands, but tens of mails, phones. People said to us : We're behind you. We hope that we will be able to speak, to explain our situation, our families' situation, Mr. Cournoyer situation. So, we can do this job, having the specialist who said to us what we can do to open this bill again, but, it's these people who are living with disease and say: Hey! Talk to us. We want to explain to the Government, to Mr. Barrette what we are living with.

M. Hicks (Ryan) : For you, for you personally, I saw Martine's story that she did yesterday, and it's seem like, for you, it's still not a clear… it's still not a clear…

M. Bonnardel : Yes. Like I've said a couple of months ago, maybe three years ago, we'll not be ready to sign this «demande médicale anticipée», but today I'm ready. I didn't have this discussion with my mother 10, 15 years ago, but, like we said in French, Mr. Cournoyer said: I'm ready today I'm ready. If it would be possible to sign this document, I would sign it. So, he is speaking for thousands of people, and I hope that the Government will say: Hey! They want to be heard.

M. Hicks (Ryan) : And, when we talk about just so that… When you're talking about expanding end of life care, we're specifically talking about advance consent for medical aid in dying.

M. Bonnardel : Yes.

M. Hicks (Ryan) : Is there anything else that you think is to be discussed at this parliamentary commission?

M. Bonnardel : No, no. Like in Zurich or in Pays-Bas, I hope that we will be maybe the first province in Canada to open this discussion again, and I hope that we can open this bill before the next election. But, like Mr. Cournoyer said, like we said, François and me, we hope that we can have this parliamentary commission may be at the end of the month of August or when we will be back for the next session.

Une voix : O.K. Merci.

(Fin à 11 h 32 )

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