(Treize heures trente et une minutes)
M. Roberge : Alors,
bonjour. Je vous remercie d'être à l'écoute. Donc, aujourd'hui, je vais réagir
au nom de ma formation politique, la Coalition avenir Québec, au dépôt de la politique
de réussite éducative du ministre Proulx et du premier ministre Philippe
Couillard.
Je vais commencer par vous lire l'extrait
d'un document qui, je suis certain, va vous intéresser : «Un gouvernement
du Parti libéral — et je lis le document — intensifiera la
lutte contre le décrochage scolaire.» Un gouvernement du Parti libéral va :
«Prioriser le diagnostic hâtif [des]
jeunes montrant des difficultés d'apprentissage et l'intervention rapide dès la
petite enfance en s'assurant du nombre adéquat de spécialistes.»
Un peu plus loin, on parle de littératie,
de la qualité du français. On croirait que je suis en train de lire le document
de la politique de réussite éducative du ministre Proulx déposé aujourd'hui,
mais non, ça, ça date du 10 mars 2014, lors de la campagne électorale pour
obtenir ce mandat, et manifestement ça n'a pas été fait. C'est drôle parce
qu'aujourd'hui on recycle ces mêmes thèmes dans un document. Ils avaient trois
ans à la tête du gouvernement pour le mettre en application. Ils ont choisi de
ne rien faire et de nous resservir les mêmes termes.
Un autre document ici. Donc, je cite le
premier ministre M. Couillard qui dit : «Nous allons encourager et
reconnaître l'autonomie des écoles et des maîtres.» Ça, ça date du 21 mai
2014, lors du discours du trône, encore une fois, le premier ministre. Donc, il
y a trois ans et un mois, le premier ministre nous disait qu'il allait
encourager et reconnaître l'autonomie des écoles et des maîtres. Est-ce que ça
a été fait depuis trois ans? Je ne parle pas des discours. Des discours, il y
en a eu. Il y en a eu rien qu'en masse, il y en a eu jusqu'à plus soif. Mais
est-ce qu'il y a des gestes concrets qui ont été posés par ce gouvernement,
depuis trois ans, pour reconnaître l'autonomie des écoles? Ne perdez pas votre
temps, il n'y en a pas eu. Reconnaître l'autonomie des maîtres, donc la
valorisation de la profession, l'autonomie professionnelle des enseignants,
rien. Rien n'a été fait depuis trois ans. Il faudrait les croire aujourd'hui
alors qu'ils nous promettent la même chose. Ça fait trois ans qu'ils sont au
gouvernement. Ils avaient l'occasion de le faire.
Mais aujourd'hui on a eu droit, encore une
fois, à de superbes déclarations, à un beau spectacle, beaucoup d'annonces,
aucune réalisation. Une belle présentation, comme on dit. Et tous les mots
étaient là. Les mots, là, importants, ça avait été bien préparé par une équipe
de communication. Il y avait les mots «concertation», «transition», «littéracie»,
qui étaient là il y a trois ans, même si rien n'a été fait depuis. Ils nous
l'ont resservie aujourd'hui, la littéracie. «Intervention précoce», le mot «ensemble»,
qui revient toujours avec le Parti libéral, «réussite», «mobilisation», tous
les mots étaient là. Mais ça fait trois ans qu'ils nous disent cette même
chose. En fait, ça fait 15 ans que le gouvernement libéral est là, presque 15
ans, rien n'a été fait. Et, depuis trois ans, là, c'est le même premier
ministre qui nous dit cette même chose-là. S'ils avaient eu à bouger, ils l'auraient
fait, je crois.
Mais, essentiellement, ils ont fait
quelque chose aujourd'hui. Ils appellent ça des actions concrètes. Donc, si je
suis dans le document, c'est écrit : «Faits saillants de la politique de
réussite éducative». Ça, c'est le document du gouvernement. Les actions
concrètes. Donc, les actions concrètes du gouvernement, je vais vous les
dicter. Dans cette politique il y a... ils nous promettent quatre plans
d'action, trois stratégies, trois chantiers, deux tables de concertation et un
groupe de travail. Êtes-vous excités? Je ne pense pas. Je ne pense qu'il y ait
des parents à la maison qui disent : Aïe! Une chance, là, il y a un groupe
de travail qui s'en vient.
Ça n'a aucun sens de nous servir
aujourd'hui une annonce de consultation. Après trois années de coupures puis la
dernière année qui a allié coupures et consultations, ce gouvernement accouche
d'une politique qui nous annonce qu'ils vont consulter pour savoir ce qu'ils
vont peut-être nous annoncer lors de la prochaine campagne électorale. Et
sachez que ce qu'il y avait dans la dernière campagne électorale, ils ne l'ont
pas mis en place quand ils étaient au gouvernement. Alors, on ne sera pas dupe
encore une fois. On ne peut pas se faire avoir comme ça à répétition, toujours
avec les mêmes énoncés de principe.
Pourtant, il y a des choses à faire tout
de suite. Il y a des enseignants qui avaient beaucoup d'espoirs parce que les
attentes étaient très élevées. Pour une rare fois en éducation pour ce
gouvernement-là, les attentes étaient très élevées pour ce qui allait être
annoncé aujourd'hui. La déception est d'autant plus grande pour les parents qui
ont des enfants en difficulté, qui n'ont pas eu les services depuis trois ans,
pour les enseignants qui attendaient une vraie valorisation, une vraie
reconnaissance d'autonomie professionnelle. On nous annonce un chantier. Aussi
bien ne rien nous annoncer.
Et, quand on compare avec la démarche de
la Coalition avenir Québec, l'écart est abyssal. Ça ne rentre même pas dans
votre caméra, dans votre télé, même si vous avec une 52 pouces, ce n'est pas
assez grand. Ils nous annoncent des consultations. Ils nous parlent de
prévention et d'intervention précoce. Nous, à la Coalition avenir Québec il y a
un an, déjà, on tenait un forum qui s'appelait Objectif Réussite Québec et, déjà,
on annonçait qu'un gouvernement de la CAQ va implanter, en cinq ans, un cycle
du préscolaire, avec la prématernelle quatre ans et la maternelle cinq ans,
offert à tous mais non obligatoire, sur cinq ans, budgété, en considérant les
agrandissements d'écoles, en considérant l'aménagement des locaux, bien avant qu'un
rapport universitaire se penche sur le dossier, en considérant les ajouts de
professionnels.
Il y a un an déjà, on annonçait qu'un
gouvernement de la CAQ va mettre en place l'école jusqu'à 18 ans ou
diplomation en tenant compte d'une diversification de l'offre de formation
professionnelle, en tenant compte de l'ajout de conseillers pédagogiques et de
conseillers d'orientation pour que les jeunes sachent où s'orienter parce que,
des fois, ils décrochent parce qu'ils ne savent pas où ils vont, en tenant
compte d'un partenariat avec les carrefours jeunesse-emploi.
En réalité, il y a une énorme différence
entre un gouvernement qui est là pour gouverner, qui annonce essentiellement
des comités... On n'a plus un ministre de l'Éducation, on n'a un ministre des
comités, puis il est très bon là-dedans. Il en a fait depuis un an, il va nous
en faire encore pendant un an. Puis on a la Coalition avenir Québec, qui, elle,
est prête à gouverner, puis à prendre des décisions, puis à agir concrètement
pour faire réussir un maximum de jeunes avec des mesures très concrètes.
La Modératrice
: On va
prendre les questions.
Mme Plante (Caroline) :
Bonjour, M. Roberge. Je vais jouer à l'avocate du diable. N'est-ce pas
normal qu'une politique énonce des grandes orientations? D'habitude, on voit
des choses concrètes plus dans les plans d'action. Alors, est-ce que ce n'est
pas normal qu'une politique énonce des grands objectifs?
M. Roberge : Il devrait à
tout le moins nous annoncer des pistes d'action aussi, peut-être sans nous dire
précisément le budget, parce que je comprends que c'est au budget qu'on annonce
le budget, mais il pourrait nous dire au moins un échéancier. Quand il nous
parle d'intervention précoce, c'est quoi, l'échéancier pour implanter la
prématernelle quatre ans? Si je me fie aux actions du gouvernement et du
ministre Proulx, à leur vitesse, ça va prendre 50 ans. À 100 classes
par année, parce que le gouvernement libéral ajoute 100 classes par année
pour la prématernelle quatre ans, ça va prendre 50 ans avant de l'offrir à
tous les petits Québécois. C'est peut-être pour ça qu'ils ne veulent pas le
dire puis qu'ils se contentent de chantiers, de stratégies, de plans d'action.
Donc, une politique de réussite éducative,
avec peut-être un horizon plus lointain, ç'aurait été normal après peut-être
six mois au gouvernement. Mais là, à même pas 18 mois des élections, c'est
rire du monde, surtout de savoir qu'ils recyclent les mêmes thèmes qu'ils nous
servaient en campagne électorale en 2014 et au discours du trône une fois au
gouvernement. Ils nous repromettent encore de rebrasser les mêmes intentions,
mais sans mesure concrète pour les appliquer, parce que les thèmes sont
corrects, là. Un objectif de diplomation, c'est intéressant, agir auprès des
plus jeunes, c'est intéressant, mais, à un moment donné, il faut agir,
justement, il ne faut pas juste dire qu'on va penser à agir. Sur l'école
jusqu'à 18 ans, le ministre annonce une réflexion suite à une annonce d'action
de la CAQ il y a un an. Il a pris un an pour penser, puis sa conclusion, c'est
qu'il faudrait qu'il réfléchisse. On n'est pas sortis du bois, là.
Mme Plante (Caroline) :
Trouvez-vous qu'il y a quand même un peu de concret dans la politique? Quand on
parle d'un groupe de travail pour créer l'institut, on annonce l'intention de
créer l'institut d'excellence. Une possibilité de créer aussi un ordre
professionnel pour les orthopédagogues, poursuivre le déploiement des maternelles
quatre ans, ça, est-ce que c'est assez concret pour vous?
M. Roberge : L'institution
nationale d'excellence en éducation, c'est une idée de la Coalition avenir
Québec. On en a fait une annonce très claire il y a quelques mois. Moi, je pense
qu'il faut un engagement. C'est correct, il faut le faire correctement, mais il
pourrait déjà nous dire à tout le moins : Bien, ça va être en place à
partir du 1er janvier 2018. Qu'il nous donne un horizon parce qu'il peut
nous dire qu'il réfléchit puis qu'il est en chantier pendant quelques années,
là. Si on se fie aux trois dernières années, ça fait longtemps qu'ils
réfléchissent à leur plateforme électorale de 2014. Ils n'ont pas décidé de
l'implanter encore, la plateforme électorale de 2014. Donc, on ne peut pas leur
faire confiance. De comités en chantiers en plans d'action, ça tourne en rond,
ça tourne en rond. C'est un gouvernement usé à la corde.
Mme Lévesque (Catherine) :
Un taux de diplomation de 85 % d'ici 2030, est-ce que c'est réaliste, à
votre avis?
M. Roberge : Oui, c'est
réaliste. C'est ambitieux, mais c'est réaliste à condition qu'on prenne des
actions pour y arriver, encore une fois. Moi, je pense qu'on peut y arriver,
mais pas en créant des chantiers, en embauchant des professionnels.
Quand le ministre annonce l'ajout de
personnes dans les écoles, il ne veut pas trop, trop définir parce que ce qu'il
nous a fait l'année passée, c'est qu'il a ajouté des personnes dans les écoles.
Il n'y a même pas 10 % de ces personnes qui sont des professionnelles, il
n'y a même pas 10 %, là, d'orthophonistes, d'orthopédagogues,
psychoéducateurs.
Très souvent, il ajoute des gens parce
qu'il ouvre des nouvelles classes, donc il embauche des enseignants, des
enseignantes, des secrétaires d'école, des directions d'école. On a besoin de
ces gens-là, mais ça n'améliore pas les services. C'est juste que, comme on
agrandit des écoles, on embauche des enseignants. Donc, de se fixer un objectif
de taux de diplomation, c'est intéressant, mais il faut prendre des vrais
moyens pour les atteindre. Et ce n'est certainement pas en gonflant les notes
qu'on va réellement atteindre un vrai taux de réussite.
La Modératrice
:
D'autres questions? Merci.
M. Roberge : Je vous
remercie.
(Fin à 13 h 42)