(Quatorze heures cinquante-neuf minutes)
M. Blais : Alors, bonjour.
Merci d'être là. Tout d'abord, je veux saluer mon collègue ministre de
l'Éducation, Sébastien Proulx; ma collègue ministre de l'Immigration et de
l'Inclusion, Kathleen Weil. On est bien contents d'être ici. Aujourd'hui, le Conseil
des ministres a entériné les règlements pour Objectif emploi. Vous vous
rappelez probablement qu'Objectif emploi a été largement discuté en commission
parlementaire, près de 140 heures, là, et on en est venus à une entente avec l'opposition.
Il n'y a pas eu besoin de bâillon.
Je veux vous rappeler l'essentiel d'Objectif
emploi. Donc, pour tous les primodemandeurs, il y en a à peu près 17 000
aujourd'hui à l'aide sociale, un nouveau programme, qu'on appelle Objectif
emploi, donc près de 17 000 nouveaux demandeurs à l'aide sociale, un
tiers, souvent des personnes immigrantes; deux tiers, des jeunes de moins de 30
ans; des primodemandeurs qui sont aptes, qui n'ont pas de contrainte, disons,
physique à l'emploi, mais qui ont quand même des défis personnels à relever.
Donc, des bonifications importantes,
historiques, hein, pour eux et aussi deux obligations. La première obligation,
c'est qu'ils acceptent d'être convoqués pour une rencontre d'évaluation qui
permet de personnaliser un plan d'intervention pour ces personnes. Je le répète
souvent, ça surprend beaucoup les gens, aujourd'hui, en ce moment, nous ne
pouvons pas convoquer une personne. On peut inviter un nouveau prestataire à
l'aide sociale à nous rencontrer, mais on ne peut pas le convoquer pour faire
cette évaluation-là de sa situation, comprendre son passé, par où il est passé,
le niveau de ses études acquis et ensuite lui proposer trois cheminements
possibles.
Donc, le premier cheminement, celui que je
privilégie, celui que mon collègue Sébastien Proulx privilégie, j'en suis sûr
aussi, c'est le retour aux études ou la qualification. La plupart de nos jeunes
qui arrivent à l'aide sociale n'ont même pas terminé leur secondaire V. Donc,
on aura des sous pour les accompagner, des ressources aussi pour faire en sorte
qu'ils puissent réaliser, on l'espère, leurs rêves.
Deuxième parcours qui est possible, c'est
la recherche d'emploi et à ceux qui ne sont pas prêts immédiatement à retourner
aux études, mais qui aimeraient trouver une façon plus efficace de trouver
l'emploi qui leur convient, donc il y aura des ressources aussi à leur
disposition pour y arriver.
Le troisième parcours, il y a des
personnes qui sont dans une situation très particulière, qui ne sont pas prêtes
ni à la recherche d'emploi, ni même à un retour aux études. Pensons à des gens,
par exemple, qui ont des problèmes de drogue qui sont non résolus. À ce
moment-là, on a un troisième parcours qu'on appelle le développement des
habiletés sociales pour résoudre ces problèmes-là avant, bien sûr, d'avancer un
peu plus loin.
La durée du projet sera de 12 mois, donc
ils devront s'astreindre à participer, à collaborer au cheminement qu'eux-mêmes
auront choisi par ailleurs pendant 12 mois.
Donc, les étapes à venir maintenant devant
nous, nous avons accepté aujourd'hui, en Conseil des ministres, les règlements.
Ces règlements seront connus... rendus publics, pardon, le 12 juillet prochain.
Il y aura 60 jours de consultation, non pas 45. On est en plein été, on est
bien conscients de la situation, donc il y aura 60 jours de consultation. Bien
sûr, nous accueillerons les commentaires et, ensuite, nous espérons aller de
l'avant un peu plus tard dans l'année avec ce programme qui est important pour
nous.
Je vous rappelle qu'Emploi-Québec fait
affaire avec 400 organismes répandus un peu partout en employabilité, donc les
carrefours jeunesse-emploi, et je veux encore une fois remercier le ministre de
l'Éducation, ma collègue Kathleen Weil, parce que nous avons beaucoup travaillé
ces derniers mois pour s'assurer que ces gens-là, hein, vont trouver les
ressources nécessaires que ce soit en francisation ou encore du côté de
l'éducation. Je leur laisse d'ailleurs la parole.
Mme Weil
: Oui. Très,
très brièvement, en ce qui concerne, évidemment, l'immigration et les
immigrants, c'est un programme qui vise tous les immigrants. Donc, le ministère
de l'Immigration a la responsabilité de ce qu'on appelle les 0-5 ans, donc
c'est l'accueil, la francisation, l'intégration, mais au-delà de ça, c'est toute
la société, tous les programmes gouvernementaux qui s'adressent aux immigrants.
Et donc ce qui est particulièrement intéressant, dans ce programme, il y a à
peu près un tiers, hein, de la clientèle qui est immigrante, donc c'est
important chez mon collègue François Blais. Donc, on leur offre un plan
personnalisé. Alors, pour eux, c'est très... c'est pour les immigrants et les
personnes avec qui j'ai parlé, qui peuvent avoir de la difficulté à trouver un
emploi.
Qu'ils soient récemment arrivés ou de plus
longue date, d'avoir ce plan personnalisé... évidemment, si c'est la
francisation dont ils ont besoin, les services sont offerts par le ministère ou
aussi par les commissions scolaires, avec un guichet unique maintenant qu'on va
créer en francisation. Donc, il y a ça, mais, au-delà de ça, s'ils n'ont pas
besoin de cours de français parce qu'ils sont déjà francophones, c'est d'avoir
ce plan personnalisé. On sait que l'intégration, le facteur le plus important,
c'est l'emploi, donc c'est accueilli très favorablement par mon ministère, par
moi-même. D'ailleurs, la première fois que j'avais entendu ce programme et que
j'avais regardé tous les aspects de ce programme, j'avais déjà partagé, avec
François Blais, mes premières réactions, et ça s'est validé lorsque j'ai eu des
discussions avec des personnes immigrantes qui veulent vraiment les mettre sur
la bonne voie.
Il y a beaucoup de mesures qu'on a amenées
depuis, je vous dirais, six mois, 12 mois, pour la reconnaissance des
acquis, le projet de loi n° 98, qui a été adopté, on crée un guichet
unique, qui s'appelle Qualification Québec, qui sera en fonction dans quelques
mois, pour bien orienter les personnes. On a rajouté beaucoup de... on a
bonifié de beaucoup l'offre en francisation, augmenté les allocations en
francisation. Donc, c'est une autre mesure, je vous dirais, un autre programme
intéressant pour accompagner ces personnes immigrantes à l'emploi. Donc, j'en
suis très contente, et c'est... Évidemment, on va travailler ensemble de plus
en plus. C'est trois ministères qui sont appelés à travailler ensemble pour
bien orienter les personnes immigrantes à l'emploi par la formation,
l'éducation, évidemment la francisation, mais aussi des mesures
d'employabilité. Et c'est ça que... pour bien réussir le défi de l'immigration,
ça prend cette action transversale, horizontale du gouvernement et... Donc, ça,
c'est, je vous dirais, un programme qui va être très structurant pour les
immigrants. Merci.
M. Proulx : Très rapidement,
d'abord, remercier François pour le travail qui a été fait dans le cadre
d'Objectif emploi, mais, depuis le projet de loi n° 70, nous avions...
puis également Kathleen, pour le travail qui est fait, qu'on fait d'ailleurs
ensemble depuis un certain temps, et je l'apprécie beaucoup. Remercier François
parce que, depuis le début, nous avons travaillé ensemble avec un objectif en
tête, dans la mesure où il y a un nombre important des premiers demandeurs qui
sont des jeunes de moins de 30 ans, c'est de leur donner souvent
l'occasion de terminer leurs études secondaires, d'abord et avant tout, parce
que plusieurs d'entre eux, comme le disait François tout à l'heure, n'ont pas
terminé leur diplôme. Alors, il faut trouver des incitatifs pour leur permettre
de revenir à l'école dans certains cas et également d'augmenter leur niveau de
littératie. Vous savez que j'en fais une priorité et je pense que plusieurs en
sont également.
Dans le cadre de ces rencontres-là,
notamment de cette rencontre-là, il sera aussi l'occasion d'évaluer
sommairement le niveau de littératie des gens et être en mesure de les diriger
peut-être vers des organismes d'alphabétisation, ou de leur suggérer, ou de
leur faire prendre conscience que, dans le cadre de leur parcours scolaire à
terminer, il y aura des enjeux particuliers à cet égard. Alors, si
l'alphabétisation est au coeur de cette réflexion-là et également la diplomation
ou la qualification, bien, c'est une façon de leur permettre de reprendre une
vie active dans le milieu du travail. Et, vous savez, des gens qui sont dans
l'impossibilité, pardon, de lire et d'écrire correctement, bien, c'est une
contrainte à se trouver un emploi. Ça va de soi, mais ça n'allait pas toujours
de soi avant. Alors, c'est important de faire ces liens.
Et moi, bien, je suis très heureux de voir
qu'on aura l'occasion de travailler avec des gens qui se retrouvent, oui,
peut-être dans une période difficile de leur vie, mais qu'on pourra, peut-être
par des incitatifs, tel que le fait, Objectif emploi, de leur permettre de
retourner à l'école, leur permettre de terminer notamment leur diplôme d'études
secondaires, d'aller à l'éducation aux adultes, mais peut-être vers des
programmes préparatoires à l'emploi, qui sait. Alors, moi, je suis très heureux
de participer à cette démarche, et ça s'inscrit, bien entendu, dans notre
politique sur la réussite éducative. Lorsqu'on veut la réussite de tous, bien,
il faut trouver plusieurs moyens pour rejoindre tous les gens et tous les gens
qui ont des besoins à cet égard. Alors, merci, François, pour le travail.
M. Bellerose (Patrick) :
Quelles seront les pénalités pour les gens qui refusent de participer?
M. Blais : Bien, c'est
les mêmes pénalités qui existent déjà. Aujourd'hui, il y a des pénalités à
l'aide sociale. C'est peut-être méconnu, mais lorsque, par exemple, quelqu'un a
commis une fraude, il peut y avoir une pénalité de 56 $, de 112 $ ou
de... ça va jusqu'à 224 $. Il y a plus de 5 000 personnes
aujourd'hui à l'aide sociale qui ont une pénalité maximale.
Dans le cas d'Objectif emploi, c'est
56 $, si jamais il y a un manquement important. Il ne s'agit pas... le
but, ce n'est vraiment pas de faire des économies, mais, s'il y a un manquement
important, les gens... la personne ne répond pas, c'est 56 $. Si elle
revient dans le parcours, on efface tout, et puis elle reprend tous ses droits
et donc tous ses privilèges. Donc, ça peut aller jusqu'à 224 $ pour une
période très limitée parce qu'Objectif emploi ne dure qu'un an, alors
qu'aujourd'hui je peux vous dire, il y a des milliers de personnes à l'aide
sociale qui ont des pénalités de cet ordre-là parce qu'il y a eu des fraudes
dans le passé. Donc, les pénalités sont là simplement pour s'assurer qu'il y a
une certaine incitation, là, et maintenir.
Le problème que nous avons aujourd'hui, c'est
vraiment la participation à nos programmes, hein? Pour différentes raisons, on
n'a aucun moyen de les amener, là, aussi loin que l'on voudrait, et je pense
qu'en ayant les bonifications d'un côté, mais aussi certaines pénalités...
parce qu'on nous pose souvent la question : Est-ce qu'il y a des
pénalités? Alors, en ce moment, on n'en a pas, mais on pense que ça va faire
une différence. Le but, ce n'est pas d'économiser des sommes. Je l'ai dit
souvent, c'est un programme qui va coûter environ 50 millions de dollars à
l'État tout simplement parce que l'augmentation des bonifications, la
participation aussi à des programmes, fait en sorte, là, que le coût sera
important, mais vous comprenez que c'est un investissement dans le capital humain
de ces personnes-là.
M. Bellerose (Patrick) :
Combien de personnes vous espérez sortir de l'aide sociale comme ça, disons,
dans un horizon de peut-être cinq ans, j'imagine?
M. Blais : On n'a pas fait
d'évaluation là-dessus. On pense que vraiment c'est un outil important que l'on
n'a pas pour améliorer leur situation. On verra ensuite qu'est-ce que ça donne
comme résultat.
M. Laforest (Alain) : Est-ce
que c'est la fin des Bougon?
M. Blais : Écoutez, je ne sais
pas ce que signifie l'expression «Bougon». Pouvez-vous me l'expliquer, là?
M. Laforest (Alain) : Bien,
quelqu'un qui profite du système, qui ne veut pas... Il y en a, là, je ne vous
dis pas que c'est la majorité. Pour les immigrants, c'est un peu plus
difficile, là. Il y a une question de langue, il y a une question d'intégration.
Mais quelqu'un qui est dans le système, qui profite du système, qui ne veut pas
aller travailler, est-ce que, lui, il va être pénalisé? C'est un peu ça que les
gens veulent savoir, M. Blais.
M. Blais : À vrai dire, oui, à
vrai dire, il n'y a aucun rapport entre les Bougon, ce que vous appelez les
Bougon, puis Objectif emploi. C'est vraiment... l'idée, ce n'est pas de prendre
des gens puis de les punir, les forcer, c'est... Au contraire, l'idée, c'est
que, quand ils arrivent pour la première fois à l'aide sociale, c'est le
meilleur moment pour leur donner un encadrement qu'ils n'auront peut-être pas
par la suite. Et les statistiques nous montrent, Bougon ou pas, que, si vous
restez à l'aide sociale plus de deux ans, vous risquez d'y rester beaucoup plus
longtemps.
C'est pour ça que l'intervention en amont
est importante. Objectif emploi va toucher 4 % à peine de l'ensemble de la
clientèle des assistés sociaux. Donc, bien sûr, pas ceux qui ont des
contraintes, mais seulement 4 %, mais c'est 4 % que l'on peut
vraiment mobiliser, avec lequel on peut avoir un succès.
M. Bergeron (Patrice) :
Simplement pour récapituler, M. Blais, donc on parle toujours, donc, des
premiers demandeurs qui sont touchés.
M. Blais : Oui, sans
contrainte.
M. Bergeron (Patrice) : On
sait qu'on va leur enlever, en cas de non-participation, le premier 165 $
qu'on leur donnait en prime. C'est bien ça? À la deuxième offense on enlève
56 $; à la troisième, on enlève 112 $; puis à la quatrième, on enlève
224 $. C'est bien ça?
M. Blais : Oui, on peut le
comprendre comme ça. Oui. Pendant un an, donc, le temps qu'il reste, ça va être
quelques mois à peine, hein? Mais, bien sûr, dès qu'ils reviennent dans le
parcours, quel qu'il soit, dès qu'ils reviennent, ils reprennent tous leurs
droits en même temps.
Le but, ce n'est vraiment pas de les punir
ou sauver des sommes, c'est d'avoir créé un incitant, là, chez eux, pour qu'ils
participent et maintiennent leur participation. Dans Objectif emploi, il n'y a
pas d'obligation de résultat. Vous ne devez pas être diplômé dans l'espace d'un
an ou deux. Il y a un objectif de participation parce que, quand ils
participent de façon continue, on pense que les résultats ensuite sont
positifs.
M. Bergeron (Patrice) :
...actuellement, avec l'invitation, ce n'est pas suffisant. Donc, il y a plein
de gens qui refusent l'invitation ou...
M. Blais : Oui. Le taux de
participation aux mesures est très, très faible. On pourra vous donner des
chiffres là-dessus, si vous voulez les avoir, mais c'est très faible et, quand
c'est des participations, parfois, c'est une fois ou deux, mais ensuite ils
abandonnent trop rapidement, puis il faut maintenir un incitant pour qu'ils
participent davantage et plus longuement, surtout.
M. Laforest (Alain) : Par
rapport à ce que vous nous avez annoncé il y a à peu près, je dirais, deux
mois, là, qu'est-ce qu'il y a de nouveau aujourd'hui?
M. Blais : Aujourd'hui, ce qu'il
y a de nouveau, c'est qu'on réitère que la priorité pour nous, hein, c'est le
retour aux études, terminer leurs études, si possible, aller ajouter une
qualification. Rappelez-vous, au tout départ, Objectif emploi, c'était très lié
à un retour sur le marché du travail de façon rapide. On parlait même qu'on
pourrait obliger, dans certains cas, des personnes à déménager. Et l'essentiel
des règlements que l'on a déposés aujourd'hui devant le Conseil des ministres,
je peux vous le dire, sont à peu près semblables aux intentions réglementaires
qu'on a longuement discutées, là, avec nos collègues de l'opposition, là, cette
année.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Quelles sont les obligations de votre ministère? Est-ce que les fonctionnaires
ou les agents d'aide à l'emploi ont un devoir de rencontrer les primodemandeurs
dans un certain délai?
M. Blais : Oui, oui, délai,
oui. On pourrait vous donner les moments, le calendrier exact, mais à
l'intérieur d'un certain nombre de semaines, la première rencontre doit être
faite de façon obligatoire par nos fonctionnaires.
M. Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce
qu'il y a des embauches prévues parce que c'est une tâche de travail supplémentaire?
M. Blais : C'est vrai. On a
obtenu 90 ETC de plus au ministère pour la mise en place d'Objectif emploi.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Donc, la mise en place devrait se faire, si tout va bien, à compter... d'ici la
fin de l'année?
M. Blais : Écoutez, là, on
dépose les règlements. Il y aura peut-être, qui sait, des changements, mais on
prévoit, là, au cours de l'hiver prochain, si possible, là, pouvoir mettre en
place Objectif emploi. Une des contraintes que nous avons, c'est que nous
devons changer nos systèmes informatiques parce qu'on va cumuler des
informations, des orientations qui n'existent pas aujourd'hui. Donc, il y a
aussi des formations que l'on doit donner aux personnes qui vont accompagner,
là, les nouveaux demandeurs.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Vous avez énuméré les trois types d'interventions. Dans le communiqué, vous
mentionnez qu'il sera déterminé en collaboration avec un agent d'aide à
l'emploi. Qu'est-ce que ça signifie? Est-ce que c'est l'agent qui va pouvoir,
après discussion avec la personne concernée, déterminer s'il y a un différend
dans le choix de l'intervention? Qui va trancher?
M. Blais : Il y a eu beaucoup
de discussions là-dessus en commission parlementaire. Disons, il y a un
triangle vertueux qu'on essaie de garder le plus vertueux possible. Il y a la
personne qui arrive avec sa situation, ses ambitions, s'il en a. Il y a la
situation dans laquelle il est, économique, je ne sais pas, s'il veut devenir
peintre, mais là où il est, il n'y a pas beaucoup de possibilités de formation,
il faut qu'il aille à l'extérieur. On a même des sommes s'il veut aller étudier
à l'extérieur, revenir ensuite chez lui. Donc, il y a l'environnement qui
montre si le projet est réaliste et il y a aussi l'agent qui doit décider
est-ce que... et en discussion avec la personne, est-ce que ce projet-là, il
est réaliste ou pas pour lui.
Donc, c'est important, quelqu'un qui
arriverait et qui dirait : Bon, je veux devenir astronaute, bien, on va
lui dire : Bien, première étape, finis ton secondaire V, première chose,
en sciences si possible. Donc, il y a une discussion, mais c'est la personne
qui, en principe, choisit, parce qu'on sait que ça fonctionne mieux si la
personne a choisi son parcours. Cependant, il y a une discussion pour que ce
soit le plus réaliste possible.
M. Bovet (Sébastien) :
Qu'est-ce qui se passe au bout d'un an?
M. Blais : Au bout d'un an, écoutez,
on espère que la personne va avoir progressé. Si elle est, par exemple, en
formation, elle peut demander de poursuivre son parcours. Donc, on peut étendre
les bénéfices d'Objectif emploi jusqu'à deux ans, c'est ce qui a été prévu, et
on pense que plusieurs vont nous le demander, surtout ceux qui sont en formation,
d'étendre les bénéfices. Nous, on a tout avantage à ce qu'ils terminent leur
formation et de pouvoir le prolonger.
M. Bovet (Sébastien) : Le
bénéfice étant le 260 $ additionnel?
M. Blais : 260 $ par
mois, oui.
M. Bovet (Sébastien) : Mais
donc, au bout de deux ans, on espère que la personne se sera raccrochée à quelque
chose et qu'elle pourra voler de ses propres ailes.
M. Blais : Oui, oui.
M. Bergeron (Patrice) : Vous
dites qu'il y a déjà 5 000 personnes qui sont touchées par une pénalité en
raison... en raison de fraude, actuellement. Il y a 17 000...
M. Blais : Oui, oui, et de la
pénalité maximale, si je me souviens bien.
M. Bergeron (Patrice) : La
pénalité maximale. Il y a 17 000 personnes, actuellement, qui sont des
primodemandeurs, à chaque année, qui s'ajoutent.Est-ce qu'on a une idée de la
répartition de ceux qui pourraient choisir le parcours emploi, le parcours
étude? Est-ce qu'on a une idée de...
M. Blais : On a une idée. Grosso
modo, mais c'est vraiment, là, à partir de l'expérience, un peu, que l'on a, on
pense 40 %, 40 %, 20 %, c'est-à-dire 40 % qui vont aller du
côté du retour aux études. On essaie de faire augmenter ça un peu, mais, vous
savez, certaines de ces personnes-là ont vécu de nombreux échecs à l'école, ne
sont pas prêtes à y retourner tout de suite, peut-être plus tard. 40 %
pourraient aller du côté de la recherche d'emploi, 20 %, là, du côté des
habiletés sociales. Mais ça, c'est vraiment...
M. Bergeron (Patrice) : Donc,
ça serait uniquement les 20 % de... qui pourraient éventuellement être
touchés par des sanctions ou, non, c'est l'ensemble...
M. Blais : Non, tout le monde,
les 100 %, non. Encore une fois, deux choses. On leur demande une
rencontre, qui est obligatoire, puis ensuite de participer au parcours qu'ils
ont défini, normalement, là, avec leur agent.
C'est tout à fait possible, pendant leur
parcours, qu'ils changent d'idée, se rendent compte que, finalement, de bonne
foi, là, ce n'était peut-être pas le bon projet. À ce moment-là, il peut y
avoir une autre rencontre, dans laquelle on décide, O.K., très bien, on essaie
autre chose. À ce moment-là, encore une fois, on est dans une situation de collaboration.
La personne progresse, elle progresse autrement, mais elle continue de
progresser, donc elle a accès, bien sûr, aux bonifications dont on parlait tout
à l'heure.
M. Bergeron (Patrice) : Sur
le plan de l'acception sociale et morale, est-ce que, malgré tout, vous trouvez
que les sanctions seront bien reçues, quand on regarde, par exemple, les
premiers chiffres qui ont sorti sur le surplus du gouvernement, là, de 4 point quelques
milliards? Est-ce que c'est encore un bon contexte pour imposer des
sanctions...
M. Blais : Pour nous, ce n'est
pas un enjeu financier. Ce qu'on se rend compte, c'est, quand on regarde, au
niveau international, ce qui se fait, dans les meilleures pratiques dans le
monde — et Objectif emploi est vraiment dans les meilleures pratiques
dans le monde, hein — il y a toujours des obligations.
Alors, qu'est-ce que c'est qu'une
obligation, qu'est-ce que ça signifie si on ne respecte pas une obligation? En
général, ça a une répercussion financière. En Ontario, par exemple, si vous ne
collaborez pas, vous n'avez pas droit à l'aide sociale pendant un certain
nombre de mois. Donc, ce que l'on sait des meilleures pratiques, c'est d'éviter
d'avoir des sanctions qui sont sévères financièrement et, surtout, qui sont
facilement révocables. Dès que la personne revient, on remet ces sommes-là.
Donc, on pense qu'on est vraiment dans les bonnes pratiques et qu'on va pouvoir
hausser de façon non négligeable — on le verra par la
suite — la participation de ces personnes-là à nos mesures.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Qu'est-ce que vous faites avec ceux qui sont sur l'aide sociale depuis
plusieurs années? Parce que là vous avez un programme pour les primodemandeurs,
mais est-ce que vous pourriez élargir ce programme-là à l'ensemble des
personnes sans contrainte?
M. Blais : Toutes les mesures
que l'on peut imaginer, de soutien, hein, elles sont accessibles pour tous les
prestataires d'aide sociale, contrainte et sans contrainte, hein? La
différence, c'est qu'on fait un programme particulier pour les primodemandeurs,
dans lequel il y a une exigence de réciprocité, que l'on ne retrouve pas pour
les 96 autres pour cent, là, de bénéficiaires de l'aide sociale, là.
M. Laforest (Alain) : Il y a
combien de monde actuellement sur l'aide sociale?
M. Blais : 403 000,
404 000 à peu près, de mémoire, là.
M. Bovet (Sébastien) : Donc,
ça fait, quoi, 12 000 à 16 000 personnes qui sont touchées par…
M. Blais : Oui. 4 %, oui,
oui. C'est peut-être un peu moins. Ça a diminué, là, ces derniers temps.
M. Bélair-Cirino (Marco) : Quelle
est votre stratégie pour réduire ce nombre-là?
M. Blais : Bien, écoutez,
l'évolution de l'aide sociale, c'est parfaitement corollé avec l'évolution de
l'assurance-emploi. Au Québec, en ce moment, le taux de chômage est à 6 %
et le taux de l'aide sociale est à 6,1 %. Le chômage diminue, l'assistance
sociale diminue. En ce moment, le taux d'assistance sociale au Québec, disons,
est peut-être dans la moyenne supérieure, à peine, là, au Canada. Donc, on
pense, compte tenu de… Il n'y aurait pas d'Objectif emploi s'il y avait
20 %, 25 % de chômage chez les jeunes aujourd'hui, comme dans
certains pays européens. C'est vraiment parce qu'il y a des perspectives
d'emploi très importantes, à peu près sur tout le territoire au Québec, qu'on a
des chances de réussir davantage avec un programme comme celui-là.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais je ne comprends pas pourquoi il n'y a pas d'incitatif. Parce que là, vous
décidez, vous estimez qu'avoir un incitatif monétaire pourra changer les
choses, mais pourquoi…
M. Blais : Je ne l'estime pas.
Ça, c'est prouvé. Ça fait partie de toutes les bonnes pratiques
internationales.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Bon, si c'est prouvé, pourquoi ne pas l'élargir à l'ensemble de la clientèle,
avoir un programme incitatif?
M. Blais : Parce qu'on veut
commencer avec un groupe pour lequel on peut avoir un succès. On va colliger
des informations là-dessus et on n'a pas l'intention d'aller plus loin pour le
moment, là. Parce que, quand on s'adresse à une clientèle qui est là depuis
plus longtemps, les approches peuvent diversifier.
Donc, pour le moment, on se concentre sur
un groupe pour lequel on a des chances d'avoir des succès. Mais, si ça
fonctionne, année, après anné,e après année, vous comprenez que ça aura un
impact positif sur l'ensemble du programme.
M. Bovet (Sébastien) : Je
présume que chacun est différent, là, mais, en moyenne, un primodemandeur qui
reçoit l'aide sociale reçoit combien par mois?
M. Blais : En ce moment, un
isolé, c'est 628 $ plus...
M. Bovet (Sébastien) : Donc,
il aura un incitatif de 260 $ en plus du...
M. Blais : Oui, il peut
recevoir aussi le crédit d'impôt de solidarité, il peut recevoir une allocation
de logement. Les sommes...
M. Laforest (Alain) : Autour
de 1 500 $ par mois.
M. Blais : Non, pas autant que
ça, mais les sommes sont importantes. Les sommes, là, quand on compare avec le
salaire minimum, c'est des sommes qui sont très intéressantes. On n'a jamais
été aussi généreux, entre guillemets, là, à l'aide sociale pour ce groupe-là.
Et ce que l'on fait encore de plus, c'est qu'on protège leur revenu pendant la
période où ils sont sous Objectif emploi, c'est-à-dire que, même s'il y a des
changements au niveau de leur statut matrimonial, etc., on fait en sorte que
leurs revenus soient maintenus pour vraiment qu'ils se concentrent sur ce
qu'ils ont à faire, c'est-à-dire développer leur capital humain.
M. Laforest (Alain) : Sans
les crédits, on est près de 900 $?
M. Blais : Ça peut être autour
de ça, oui.
M. Bovet (Sébastien) : J'ai peut-être
manqué un bout tout à l'heure, mais vous fixez-vous, vous, un objectif? Vous
dites Objectif emploi, c'est le nom du programme, mais vous, comme gouvernement,
comme... Vous savez, le Vérificateur général dénonce souvent le fait qu'il n'y
a pas de reddition de comptes sur les programmes gouvernementaux, qu'on ne fait
pas les suivis puis qu'on n'a pas des atteintes d'objectifs. Avez-vous des
objectifs?
M. Blais : Notre objectif,
c'est vraiment de mettre en place Objectif emploi, mais, pour le moment, c'est
trop difficile de...
M. Bovet (Sébastien) : Sur le
17 000, par exemple, vous n'êtes pas capable de nous dire combien vous
voulez...
M. Blais : Non. Ce n'est pas
que je ne suis pas capable, c'est que je ne veux pas vous le dire parce que sincèrement,
sincèrement, là, très clairement, il y a toutes sortes d'hypothèse là-dessus,
mais il faut faire très, très, très attention. On va voir.
M. Bovet (Sébastien) : Mais
qu'est-ce qui peut nous dire que c'est un succès ou ce n'est pas un succès?
M. Blais : On le verra dans quelque
temps, on pourra l'évaluer dans quelque temps. Alors, on nous a demandé, en commission
parlementaire, puis moi, je n'avais aucun problème avec ça, de suivre
avec une étude exactement, là, les parcours de ces gens-là, ce qu'ils vont
faire, est-ce que leur sortie de l'aide sociale est effective, est plus importante,
à quel rythme ça se fait. Puis, pour le moment, moi, je suis très, très prudent
là-dessus.
M. Bovet (Sébastien) : Sans Objectif
emploi, sur les 17 000 primodemandeurs, est-ce que vous savez combien
restent sur l'aide sociale et combien en sortent?
M. Blais : Oui, on connaît les
taux de sortie à l'aide sociale pour les primodemandeurs. Je ne les ai pas à
l'esprit, on pourrait vous donner l'information, si vous voulez. Il y a un taux
de sortie, bien sûr, qui est naturel, là, mais il y a un taux aussi de résilience,
c'est-à-dire de gens qui vont demeurer plus longtemps et qui vont... qui
risquent, disons, de s'enfermer dans une situation à plus long terme.
M. Laforest (Alain) : La
réussite scolaire, c'est 60 %.
M. Blais : Oui, c'est
intéressant comme chiffre.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Donc, la note de passage, c'est 60 %, puis pas de note gonflée, là.
M. Blais : Non, mais vous vous
rendez compte, si on réussit même pour un petit pourcentage, vous vous rendez
compte, on a changé une vie, là. Ce n'est pas rien.
M. Bovet (Sébastien) : ...même
encore améliorer la base, qui est ce qui se fait aujourd'hui.
M. Blais : Voilà. Bien sûr.
Oui, oui, bien sûr. Si on n'avait pas aucun impact, on se poserait des
questions. Mais, encore une fois, la recherche là-dessus, elle est sur la
question... les bénéficiaires de l'aide sociale, il y a une recherche
internationale qui est très importante. Il y a différentes pratiques, j'en ai
parlé souvent même en commission parlementaire, et même dans les pays
sociaux-démocrates, ils sont beaucoup plus exigeants qu'on l'est sur Objectif
emploi. S'ils le font, c'est parce que ça donne un certain nombre de résultats.
Donc, on va évaluer ça dans les prochaines années.
M. Bellerose (Patrick) :
J'aurais une question pour M. Proulx sur un autre sujet, si vous le permettez. Donc,
vous avez vu ce matin que de plus en plus d'élèves au cégep ont de la
difficulté en français. Est-ce que la formation au secondaire est adéquate pour
permettre aux élèves de bien réussir en français dans...
M. Proulx : Bien, il y a deux
choses. D'abord, le français, il ne s'apprend pas au secondaire, il devrait être
acquis bien avant. C'est la raison pour laquelle, dans le cadre de la politique
sur la réussite éducative et dans le cadre de chacune des interventions que
j'ai faites, j'ai toujours dit qu'il fallait travailler en littératie dès le
jeune âge, c'est-à-dire dès les premières années, préscolaires, primaires. Dès
la deuxième année terminée, pour moi, on devrait avoir acquis les bases de la
langue maternelle. Ça, c'est une chose.
La deuxième, c'est qu'il faut aussi se
rappeler que nous avons, puis j'ai entendu beaucoup de commentaires aujourd'hui
et à juste titre, que nous avons de plus en plus d'élèves avec des besoins
particuliers qui se retrouvent autant à terminer leur secondaire qu'en
enseignement supérieur, notamment du niveau collégial. C'est du jamais-vu.
Pourquoi? Bien, parce que les façons de travailler avec eux ont évolué, parce
qu'on fait du dépistage précoce déjà, parce qu'on les accompagne par toutes
sortes de moyens. Alors, il y a effectivement des défis.
Maintenant, il y a aussi le fait que, et
sans parler pour eux mais pour avoir entendu notamment M. Tremblay aujourd'hui,
il se fait beaucoup d'efforts dans les différents cégeps, et localement il se
fait des efforts par eux pour soutenir leurs élèves en littératie et en
apprentissage de la langue. Alors, moi, je vois comme une bonne nouvelle que
nous souhaitons travailler en amont et que d'autres le fassent tout le long du
parcours. Là où j'ai une préoccupation, puis il faudra toujours l'avoir, c'est
de s'assurer d'avoir une langue de qualité parlée et écrite pour l'ensemble des
concitoyens, et ça commence à l'école.
M. Bellerose (Patrick) :
Donc, pour vous, s'il y a plus de gens qui ont de la difficulté au cégep, c'est
parce qu'il y a plus de gens en difficulté qu'on a réussi à faire monter, à
faire passer au cégep?
M. Proulx : Je dirais qu'il y
a deux choses. La première, c'est qu'il y a encore des gens qu'on n'accompagne
pas correctement. Je pense l'avoir dit à plusieurs occasions. La réussite,
actuellement, à mon avis, elle n'est pas pour tous, hein? C'est la raison pour
laquelle il faut travailler spécifiquement avec des gens. Mais il y a aussi le
fait qu'on accompagne des gens qui autrement ne seraient pas allés plus loin à
l'école jusqu'à maintenant. C'est vrai avec la science, c'est vrai avec la
médecine, c'est aussi vrai dans les pratiques pédagogiques. Alors, il y a ce
constat-là à faire, que des besoins particuliers, maintenant, il y en a dans
toutes les étapes d'une vie éducative, et c'est à nous de travailler avec eux
tout au long de leur parcours.
Mais ça me rappelle aussi puis ça me
permet de réitérer que le plus important, je pense, le geste le plus
significatif que nous pouvons poser, c'est de travailler dès le début de
l'entrée à l'école. Si on investit temps et ressources en littératie dès le
jeune âge, bien, on aura des acquis pour plusieurs et pour tout le monde
presque jusqu'à la fin du parcours. Alors, ces événements-là, ou ces
éléments-là, ou ces constats-là, ne seront plus les mêmes ensuite.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Vous étiez tous les trois présents hier soir sur cette annonce-là. Est-ce que
l'examen ministériel de français secondaire V est une passoire comme l'ont dit
certains spécialistes?
M. Proulx : Non, je ne crois
pas qu'il est une passoire. Maintenant, ce sont des examens ministériels qui
sont faits, vous le savez peut-être, par des pédagogues, par des professeurs en
lien avec le ministère. Est-ce qu'il ne faut pas revoir des choses dans
l'avenir? Peut-être. Vous avez peut-être vu que, dans le cadre de la politique,
j'ai insisté sur le fait que nous devions porter une attention particulière,
par exemple, à l'examen de mathématiques... de français, pardon, en quatrième
année. Pourquoi? Bien, parce que j'ai dit tout à l'heure qu'il fallait investir
temps et ressources pour améliorer l'apprentissage de la littératie en bas âge.
Alors, ces examens-là de français, notamment de mesures d'évaluation globale,
là, si vous me prêtez l'expression, du ministère sont importants.
Mais c'est clair qu'on a des défis, là, et
on a des défis avec la langue française dans l'ensemble de la société et, à
l'école, oui, il faut améliorer tout ça. Moi, je demeure préoccupé par la
situation de la langue, et par la qualité de la langue également, et par la
façon dont nos jeunes l'utilisent lorsqu'ils sont devenus adultes. Alors, moi,
je pense qu'il faut travailler à chacune des étapes. Il n'y a pas un lieu
d'échec, mais il y a plusieurs éléments de réussite à mettre à la suite de
l'autre pour pouvoir y arriver.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Alors, hier soir, vous étiez tous les trois présents lors d'un souper avec des
membres des communautés musulmanes de Québec. Est-ce que ça a été l'occasion de
prendre un engagement particulier ou c'était essentiellement pour...
M. Proulx : Je peux parler
peut-être pour moi et au nom des collègues. D'abord, beaucoup de ces gens sont
localisés dans ma circonscription, le centre islamique qui a été touché est
également dans ma circonscription. Moi, j'étais très heureux d'y être hier
soir. Ce n'est pas la première fois que nous les revoyons depuis les
événements, mais c'était une autre occasion de discuter avec eux.
Moi, le seul engagement, je pense, qu'il
faut prendre à leur égard, c'est de continuer à travailler avec eux et c'est de
continuer à les soutenir dans une épreuve comme celle-là, épreuve qui n'est
peut-être plus sur le radar dans l'espace public, mais qui demeure dans la
communauté. Je pense que les collègues peuvent l'exprimer également. Les
tensions sont vives pour eux dans la mesure où certains vivent encore des
conséquences fortes de ce drame, et nous, on a à travailler, à continuer à
faire évoluer le vivre-ensemble, à le consolider. Moi, j'ai des préoccupations
sur l'école avec eux, sur des éléments qui s'y passent. Alors, c'est la
poursuite d'un dialogue extrêmement important, et moi, j'ai vu des gens hier
extrêmement heureux de se retrouver avec nous pour avoir une discussion franche
sur beaucoup de choses et pas seulement sur l'événement.
Et moi, j'ajoute et je termine là-dessus
en disant : C'est important de parler de ce qui s'est passé et des
conséquences de, mais il faut aussi parler d'autres choses avec eux,
c'est-à-dire de leur implication, de leur intégration, de leurs enfants qui
sont nés ici, en passant, et qui ne sont pas moins Québécois que les miens.
M. Laforest (Alain) : Est-ce
qu'on les a oubliés un petit peu depuis l'attentat?
M. Proulx : Moi, écoutez, je
vais peut-être passer le... Ah non! Moi, je... Pas du point de vue du
gouvernement. En tout cas, je ne pense pas qu'on peut dire qu'ils ont été
oubliés depuis. Posez-leur la question, je pense qu'ils vous diront qu'ils se
sentent bien soutenus. Très sincèrement, je pense que c'était une occasion à
l'extérieur de ce qui s'est passé et après ce qui s'est passé et tout
l'événement médiatique qui a entouré l'événement.
M. Laforest (Alain) : Mais
est-ce qu'ils sont revenus sur le fait que le premier ministre ait dit la
semaine passée que les musulmans avaient une part de responsabilité de
condamner l'islam radical?
M. Proulx : Non, écoutez, il
y a eu des discussions très agréables sur bien des sujets, et très sérieuses,
et même philosophiques. Je pense que tout le monde saisit bien et en tant
que... lorsque des gens posent des gestes au nom d'une religion, surtout des
gestes violents, on a tous à être préoccupés lorsqu'on est de cette confession.
Je pense que c'est...
M. Bovet (Sébastien) : ...fait
part de leur intention de prendre plus de place dans l'espace public pour
expliquer, faire la pédagogie de l'islam tel qu'ils la conçoivent?
M. Proulx : Je ne veux pas
prendre la place de tous mes collègues, mais moi, j'ai entendu des gens vouloir
effectivement s'impliquer davantage et encore dans notre société pour faire la démonstration
qu'ils sont avec nous, et ils sont parmi nous, et ils sont cette société
extraordinaire que nous avons ici, à Québec, et qu'ils y contribuent à tous les
jours.
M. Laforest (Alain) : Mme
Weil, avez-vous un point de vue là-dessus, vous? Est-ce qu'on vous en a parlé,
vous?
Mme Weil
: Vous savez,
il y avait différentes tables, hein? Alors, dépendant de qui était à la table,
je dirais...
M. Blais : À ma table, on a
parlé de la supériorité du couscous tunisien par rapport au couscous marocain.
Ça a duré quand même un bon 20 minutes.
Mme Weil
: Et nous, on
a parlé de la différence entre un Algérien, un Marocain et un Tunisien,
imaginez-vous. C'était vraiment convivial. C'est sûr que mon ministère, on est
en lien avec les familles. On les accompagne en immigration et très
étroitement. Alors donc, on n'a pas perdu le contact, on garde un lien avec
eux. Mais il y avait beaucoup d'amitié, beaucoup de plaisir à se revoir. En
fait, les conversations à notre table étaient d'un autre... moins sérieux, dans
le sens qu'on n'était pas dans : c'est quoi votre rôle et leurs
impressions de la société québécoise. Honnêtement, c'est des Québécois très,
très heureux.
On a parlé de l'emploi, on a parlé de la
reconnaissance des acquis, des choses comme ça. Évidemment, ça continue à être
une frustration, une grande frustration, de voir leurs concitoyens de
confession musulmane qui ont de la difficulté à se faire reconnaître.
M. Laforest (Alain) : Qui
font du taxi, souvent.
Mme Weil
: Absolument,
donc des exemples comme ça. Alors, j'ai pu quand même expliquer toutes les
mesures qu'on a prises, mais que c'est un travail de longue haleine, qui a
commencé il y a déjà plusieurs années, et on continue. Mais je vous dirais
rapidement, c'était à un autre niveau, certains qui ont beaucoup de réussites
aussi dans la vie, un entrepreneur qui est branché un peu partout dans le
monde.
Donc, il y avait de tout, de toutes sortes
de conversations aux différentes tables, mais le premier ministre a bien dit,
c'est que suite aux événements tragiques, donc ici, à Québec, il leur avait dit :
On va se revoir, on va se revoir à un moment où on sera plus reposés et quand
on pourra simplement avoir une soirée ensemble agréable. Et donc c'est le
bureau du premier ministre, c'est vraiment le premier ministre qui a initié
cette rencontre qui a été très appréciée, et c'est vrai que le repas était très
bon aussi.
M. Blais : Le repas était très
bon. Alors, le quota de questions est dépassé? Ça va?
(Fin à 15 h 33)