To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > News and Press Room > Press Conferences and Scrums > Point de presse de M. François Legault, chef du deuxième groupe d’opposition, Mme Sylvie D'Amours, députée de Mirabel, et M. André Lamontagne, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'économie, d'innovation et d'exportations

Advanced search in the News and Press Room section

Start date must precede end date.

Point de presse de M. François Legault, chef du deuxième groupe d’opposition, Mme Sylvie D'Amours, députée de Mirabel, et M. André Lamontagne, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'économie, d'innovation et d'exportations

Version finale

Tuesday, October 17, 2017, 11 h 30

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Onze heures trente-quatre minutes)

M. Legault : Bonjour, tout le monde. L'entente d'hier, qui prévoit la mainmise d'Airbus sur la Série C de Bombardier, c'est un jour triste pour le Québec.

M. Couillard a misé 1,3 milliard de notre argent sur cette Série C et malheureusement il a perdu. Donc, c'est très surprenant aujourd'hui de voir qu'il se réjouit de la transaction. Si j'étais à la place de M. Couillard, là, je serais déçu en tabarnouche.

Le chef libéral a négocié en amateur en risquant l'argent des Québécois. Le Québec a complètement perdu le contrôle de la Série C. L'entente prévoit même que d'ici 2025 Airbus va détenir 100 % des actions de la nouvelle compagnie de la Série C. Même le président, même le vice-président d'Airbus dit que ça ne restera pas une entente à trois, que l'intention d'Airbus est de détenir 100 % de l'entreprise.

Évidemment, il y avait 2 000 emplois à risque à Mirabel, puis il faut penser aux travailleurs de cette usine. Puis, oui, on a protégé ces 2 000 emplois jusqu'en 2041, mais, 1,3 milliard de dollars pour 2 000 emplois, c'est 650 000 $ par emploi. Ce n'est pas raisonnable. Ce n'est pas une bonne entente. Ce n'est pas comme ça qu'on peut aider l'économie du Québec.

L'an dernier, j'avais averti Philippe Couillard, lorsqu'il a fait la transaction, de demander des garanties sur l'ensemble des actifs de Bombardier. Ça aurait été possible même d'investir 1,3 milliard dans la divison de la Série C, mais tout en exigeant des garanties sur l'ensemble des actifs de l'entreprise. M. Couillard a préféré miser 100 % du montant seulement sur la division de la CSeries. Il a misé, de façon très risquée, 1,3 milliard de notre argent et il a perdu. Et c'est nous qui avons perdu. Maintenant, combien a-t-on perdu? C'est ça, la question qu'il faut poser à Philippe Couillard actuellement : Quelle est la valeur marchande de notre placement de 1,3 milliard de dollars?

Je comprends que Bombardier était dans une situation où ils n'avaient plus le choix, mais en même temps on voit qu'il n'y avait pas de rapport de force. Quand on est rendu qu'on dit : On donne la moitié de l'entreprise pour un investissement nul, c'est parce qu'on est mal pris. Et le premier ministre du Québec devrait être gêné, il ne devrait pas se réjouir ce matin de sa transaction.

En fait, Philippe Couillard a sous-évalué la force de Boeing, sa détermination à protéger le 737. Le 737, c'est une partie importante des profits de Boeing, et c'est un avion qui entre en compétition directe avec la Série C de 150 places de Bombardier. Donc, c'était à peu près écrit dans le ciel que Bombardier réagirait par une lutte de prix par tous les moyens légaux possibles, et c'est ce qui est arrivé. Donc, M. Couillard a mal évalué les risques avant d'investir 1,3 milliard de notre argent.

La direction d'Airbus nous annonce qu'elle va développer une usine de la Série C à son usine actuellement de Mobile en Alabama, où elle fabrique des appareils Airbus 320 de 180 places, là, un petit peu plus grands que la Série C. Donc, évidemment, il y a un risque important que les prochains appareils soient construits à Mobile en Alabama. On entend même ce matin que même les avions Delta, la commande de 75 appareils, pourraient être construits à Mobile en Alabama. Mais, ce qui est sûr, c'est que le Québec vient de perdre le contrôle total sur le développement de la Série C. On se retrouve avec une entreprise où le conseil d'administration a quatre membres sur sept qui viennent d'Airbus. Donc, c'est clair que toutes les décisions importantes vont être prises par Airbus. Donc, le siège social de Montréal ne devient qu'une façade. On vient de perdre un autre centre de décision au Québec.

Je reviens sur l'aspect le plus important, c'est-à-dire la valeur marchande de notre placement de 1,3 milliard de dollars. Là, je ne veux pas entrer trop dans les technicalités, mais, quand même, il faut comprendre. Le gouvernement, initialement, avait investi 1,3 milliard en échange de 49,5 % des actions. Depuis l'investissement du gouvernement du Québec, Bombardier a continué à faire des versements de liquidités dans la division, entre autres parce qu'ils n'ont pas réussi à convaincre le gouvernement fédéral, et ça a dilué le placement du gouvernement du Québec de 49,5 % à 32 %. Avec la transaction d'hier, où on a donné 50,1 % des actions Airbus, on a dilué encore plus la participation du gouvernement du Québec, à 19 %. Si vous faites une règle de trois : 19 %, 1,3 milliard, ça veut dire que 100 % a une valeur marchande de 6,8 milliards de dollars canadiens. Ça n'a pas de bon sens. Puis ça ne s'arrête pas là. Dans l'entente, il est prévu que Bombardier pourrait être obligée, au cours des trois prochaines années, d'investir un autre 700 millions US, donc venir encore plus diluer la participation du gouvernement du Québec.

Donc, quoi qu'en dise le gouvernement libéral, pour moi c'est clair, aujourd'hui, que l'investissement des contribuables québécois ne vaut plus 1,3 milliard. Puis là on a besoin, avec la Vérificatrice générale puis avec des experts, d'évaluer la valeur marchande. Moi, je veux savoir, là, combien nous a coûté cette décision, cette erreur de Philippe Couillard d'investir seulement dans la Série C plutôt que de demander des garanties dans l'ensemble de Bombardier.

Donc, 1,3 milliard dans une compagnie européenne — c'est comme ça qu'il faut l'appeler actuellement — et M. Couillard est content d'être heureux. Moi, je ne comprends pas. Moi, je ne comprends pas. Je pense que c'est une erreur grave et j'espère que M. Couillard va la payer chèrement.

La Modératrice : Merci. Alain Laforest, TVA.

M. Laforest (Alain) : Une précision, est-ce que vous venez de demander à la vérificatrice de vérifier...

M. Legault : Oui. Oui, j'aimerais...

M. Laforest (Alain) : Pouvez-vous l'exprimer clairement, s'il vous plaît?

M. Legault : Oui. Bien, je souhaiterais que la Vérificatrice générale s'exprime sur la valeur marchande de ce placement d'Investissement Québec de 1,3 milliard. Avec toute la dilution qu'on a vue, moi, je pense que c'est important que les Québécois sachent, là, aujourd'hui, à combien peut-on estimer la perte du gouvernement du Québec.

M. Laforest (Alain) : C'est M. Trump, le gagnant, là?

M. Legault : Bien, c'est surtout M. Couillard qui est le perdant. Parce que Boeing a utilisé, pour l'instant, les lois internationales. Les fondements de la décision américaine sont faibles, et peut-être que M. Trump et l'administration américaine vont perdre, mais ça va prendre deux, trois ans.

Mais c'était clair depuis le début. Moi, je ne voyais pas comment on peut rentrer dans le marché du Boeing 737, une compagnie énorme, en pensant que Boeing va dire : Vous êtes le bienvenu. Tu sais, il fallait s'attendre à une guerre de prix, il fallait s'attendre à une guerre... Bon, en plus, il y a le protectionnisme. 30 % du marché de la CSeries est aux États-Unis. Donc, moi, je pense qu'on a pris un risque énorme.

La transaction n'est pas «closée», comme on dit, non plus, là. On parle d'un «closing» qui aurait lieu à la fin de 2018. Est-ce que la transaction va être approuvée? Est-ce qu'on va être capable de fabriquer des avions pour Delta en Alabama malgré la structure du financement initial du gouvernement du Québec dans Bombardier?

Il y a beaucoup de questions, là, sans réponse. Le placement de 1,3 milliard est très à risque aujourd'hui, plus encore qu'il y a un an.

La Modératrice : Merci. Nicolas Vigneault, Radio-Canada.

M. Vigneault (Nicolas) : Vous avez dit, M. Legault, que 650 000 $ par emploi, c'est absolument indécent. Est-ce que vous laissez tomber les travailleurs de Mirabel, si vous êtes au pouvoir?

M. Legault : Écoutez, ce qui est fait est fait, hein? On ne peut pas revenir en arrière, là, on ne peut pas le retirer, cet argent-là. Ça a été une erreur de Philippe Couillard. Mais moi, je suis pour aider les emplois payants dans le secteur manufacturier, mais il faut rester raisonnable, il faut que ça fasse du sens au point de vue des affaires. 650 000 $ par emploi, moi, je pense qu'on aurait pu faire mieux. On aurait pu, avec 1,3 milliard, aider la création de beaucoup plus que 2 000 emplois. Donc, c'était un mauvais choix.

Évidemment, l'argent est dépensé, on n'ira pas changer ça, là. Puis c'est garanti jusqu'en 2041. Mais ça a l'air de quelqu'un qui est désespéré de créer des emplois payants à n'importe quel prix.

M. Vigneault (Nicolas) : Mais, quand même, je reviens sur la question. Est-ce que vous, vous êtes premier ministre, vous laissez tomber ces travailleurs-là, là?

M. Legault : Non.

M. Vigneault (Nicolas) : Est-ce que c'était la meilleure décision à prendre dans le contexte actuel?

M. Legault : Non, parce que là, ce qu'on voit, c'est qu'à l'avenir on a perdu le contrôle, O.K.? Donc, ça veut dire qu'Airbus peut décider que tous les avions de la CSeries, sauf pour protéger les 2 000 emplois — il y a une entente jusqu'en 2041 — la direction d'Airbus pourrait décider que tous les nouveaux appareils de la Série C seront construits ailleurs qu'au Québec ou au Canada. On a perdu le contrôle, là.

Donc, tout ce qu'on a réussi à protéger, ce sont les 2 000 emplois jusqu'en 2041, et nous, comme contribuables, pour ça, ça nous a coûté 1,3 milliard, qui ne vaut déjà plus ça aujourd'hui puis qui est encore très à risque.

Parce qu'Airbus, là, a l'option, en 2023, d'acheter les actions du gouvernement du Québec — c'est dans cinq ans, ça, O.K.? — puis, en 2025, d'acheter des actions de Bombardier à la valeur marchande. Pensez-vous qu'Airbus va s'arranger pour que la valeur marchande soit très élevée en 2023?

Puis n'oubliez pas que, dans une entreprise qui est partenaire d'une autre entreprise, là... Il faut avoir fait des affaires un peu dans la vie pour comprendre. Les frais de transfert, là... Combien Airbus va charger à la division de la CSeries pour ses services de vente et marketing? Tu sais? Pour moi, là, c'est comme de dire : Bon, on allume des lampions en espérant qu'Airbus va bien faire.

Mais là on n'a plus aucun contrôle, là. Airbus a quatre sièges sur sept. Le siège social ne veut plus rien dire. C'est Airbus qui va tout décider ce qui se passe avec la Série C.

La Modératrice : Merci. Charles Lecavalier, Le Journal de Québec.

M. Lecavalier (Charles) : Est-ce que vous croyez Airbus? Est-ce que vous faites confiance à Airbus quand elle dit qu'elle va conserver les emplois de Mirabel jusqu'en 2041? Parce qu'il va y avoir une deuxième ligne en Alabama. Elle pourrait décider, en 2025, de tout transférer en Alabama.

M. Legault : Bien, j'ose espérer, j'ose espérer qu'au moins Mme Anglade, puis le gouvernement du Québec, s'est assurée que cette condition, qui avait été exigée de Bombardier au début, qu'elle reste là pour Airbus. J'espère. Mais ce que je comprends dans le communiqué, c'est que ces 2 000 emplois sont garantis jusqu'en 2041. Mais c'est toute l'information que j'ai.

M. Lecavalier (Charles) : Le syndicat des travailleurs, bon, a essayé de voir ça d'une façon positive en disant que, bien, c'est un nouveau joueur, Airbus, qui vient s'établir au Québec. Il y a des experts qui disent qu'Airbus profite de cette transaction-là pour venir s'implanter dans le territoire de Boeing en Amérique du Nord. Est-ce que pour, disons, les autres entreprises de l'écosystème de l'aérospatiale au Québec, ça pourrait être une bonne nouvelle qu'Airbus vienne s'établir ici?

M. Legault : Bien, écoutez, en Amérique du Nord il y a le Canada, mais il y a aussi les États-Unis. Puis, comme clients potentiels, évidemment qu'il y a plus de clients potentiels aux États-Unis qu'au Canada. Et on voit que l'administration Trump, que les États-Unis sont de plus en plus protectionnistes. Ils exigent entre autres, dans le transport en commun, un minimum de contenu local. Donc, c'est certain, là, que... Moi, je pense qu'Airbus va développer son usine qui est déjà en Alabama où ils font déjà l'Airbus 320.

M. Lecavalier (Charles) : Est-ce que vous avez parlé avec M. Bellemare hier soir?

M. Legault : Oui.

M. Lecavalier (Charles) : Est-ce que vous...

M. Legault : Je vais garder ça confidentiel.

M. Lecavalier (Charles) : Et, en sous-question, est-ce que vous vous inquiétez? Parce que dans le communiqué de presse Airbus disait qu'elle va mettre à profit son réseau de distributeurs de pièces. Est-ce que ça, ça vous inquiète?

M. Legault : Bien, c'est qu'Airbus devient en contrôle, hein? Puis Airbus, c'est une compagnie européenne. Son siège social est à Amsterdam. C'est une compagnie qui est très financée par les Allemands puis les Français. Et moi, j'ai l'impression qu'Airbus va faire le plus d'achats possible en Europe pour aider à créer des emplois en Europe, là. Airbus, ce n'est pas une compagnie canadienne, c'est d'abord une compagnie européenne.

La Modératrice : Merci. Hugo Pilon-Larose, LaPresse.

M. Pilon-Larose (Hugo) : Avec qu'est-ce qui se passe en ce moment, est-ce que, selon vous, c'est symptomatique, que ça marque le déclin du Québec dans cette industrie-là? Est-ce que vous craignez que c'est ça que ça veut dire?

M. Legault : Bien, on vient de perdre la Série C. Donc, moi, je pense qu'il reste les plus petits appareils de moins de 100 places. Moi, je pense que, bon, on ne reverra plus Bombardier dans des appareils de plus de 120 places.

M. Pilon-Larose (Hugo) : Sur un autre sujet, ce matin on disait qu'il y avait des commissaires de la Commission des droits de la personne qui s'inquiétaient du climat de travail à la commission, qui sortent de leur mutisme pour en parler. Est-ce que vous, en tant que chef du deuxième groupe d'opposition... on sait que la présidente est nommée par l'Assemblée nationale, est-ce qu'elle a toujours votre confiance?

M. Legault : Bien, moi, j'aimerais d'abord qu'elle s'explique, la présidente de la commission. Je pense qu'il y a des allégations inquiétantes contre elle, et elle doit d'abord s'expliquer. Mais j'ai des inquiétudes.

La Modératrice : Merci. Caroline Plante, LaPresse canadienne.

Mme Plante (Caroline) : Il y a une autre grosse nouvelle qui est tombée hier, c'est que maintenant les États-Unis réclament la fin de la gestion de l'offre. Est-ce que ça vous inquiète?

M. Legault : Oui, c'est inquiétant. Puis il faut protéger la gestion de l'offre. Ça fonctionne bien entre autres, ici, au Québec, dans le domaine du lait, des oeufs, de la volaille. Donc, il faut protéger la gestion de l'offre. Je pense que c'est consensuel au Québec, là. Puis je compte encore une fois sur M. Couillard pour exprimer, là, cette demande fortement à M. Trudeau.

Mme Plante (Caroline) : Avez-vous confiance que le gouvernement Trudeau va bien défendre la gestion de l'offre?

M. Legault : Bien, je pense qu'il s'est exprimé en faveur de la gestion de l'offre, donc il faut lui faire confiance. Mais moi, je compte sur le gouvernement du Québec, parce que, quand même, la production laitière, c'est beaucoup au Québec. Donc, c'est encore plus important pour le Québec que pour le reste du Canada. Donc, c'est au premier ministre du Québec à expliquer à M. Trudeau que ça devrait être non négociable.

Mme Plante (Caroline) : Il y a des gens qui disent qu'on pourrait utiliser la gestion de l'offre pour aller faire des gains ailleurs, comme par exemple dans le dossier du bois d'oeuvre. Est-ce que ça, ça peut être envisageable?

M. Legault : Bien non. Il ne faut pas que ça serve de monnaie d'échange contre autre chose, là.

La Modératrice : Merci. Marco Bélair-Cirino, Le Devoir.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Oui. Bonjour. Est-ce qu'Investissement Québec ou le gouvernement du Québec peut faire quelque chose pour retrouver sa mise de 1,3 milliard de dollars à partir de 2023 ou il n'y a rien à faire, selon vous?

M. Legault : Moi, je pense qu'à ce moment-ci l'erreur a été faite puis il n'y a rien à faire. C'est peut-être la moins pire solution, mais on ne doit pas s'en réjouir, là, parce que ça vient confirmer que le pari de Philippe Couillard de développer la Série C au Québec, bien, c'est un pari perdu, parce que ça va être développé par Airbus on ne sait pas où.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Pouvez-vous préciser? Tantôt, vous avez dit qu'Airbus va s'arranger, dans le fond, pour que la valeur du placement d'Investissement Québec soit la moins importante possible lorsque viendra le moment d'acheter...

M. Legault : Bien, moi, je n'aime pas ce genre de clause là, là. La clause, en 2023, ne dit pas qu'il y a un plancher, hein? Donc, Airbus n'est pas obligée de payer 1,3 milliard pour racheter des actions d'Investissement Québec. Ce qu'il y aura, à ce moment-là, ça sera un estimé des profits futurs qu'on actualise. Mais là, à force de diluer le placement... Déjà, là, il a une valeur présumée de 6,8 milliards. Pour moi, là, c'est beaucoup d'argent. Je comprends qu'on va peut-être faire de l'argent un jour avec la Série C, mais, d'avoir une valeur marchande de 6,8 milliards, pour moi c'est déjà exagéré. Puis là, en plus, Bombardier s'engage à mettre un autre 700 millions, ce qui va venir diluer encore plus la participation du gouvernement du Québec.

Donc, ce que je dis, c'est qu'on n'est pas en contrôle. Puis la valeur marchande en 2023 peut être influencée par un paquet de choses, entre autres les coûts de transfert entre Airbus et ce qu'ils appellent le CSeries partnership.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Plusieurs ont été étonnés hier d'apprendre qu'au cours des derniers jours la participation d'Investissement Québec avait fléchi, là. Vous l'avez mentionné, là, elle est passée de 49,5 % à 32 %. Vous, est-ce que vous...

M. Legault : Oui. Moi, je l'ai appris hier. Donc, ce que j'ai compris, c'est qu'au cours des derniers mois Bombardier a dû injecter des fonds importants, là. On parle de plusieurs centaines de millions. Si on fait une règle de trois, pour maintenir à flot la Série C, on apprend qu'ils vont même devoir injecter possiblement un autre 700 millions. Donc, moi, je ne le savais pas. J'avais compris...

M. Bélair-Cirino (Marco) : ...que la participation d'Investissement Québec avait fondu.

M. Legault : Bien, il me semble, comme investisseur, on aurait dû le savoir. Parce que moi, ce que j'avais compris quand le gouvernement fédéral a dit : Je ne mettrai pas mon 1,3 milliard, j'avais comme compris que Bombardier n'en avait pas besoin. Mais là, de toute évidence, ils en avaient besoin. Bombardier a mis des liquidités dans la division de la Série C puis elle est venue diluer le placement du gouvernement du Québec. Moi, je ne le savais pas puis je l'ai appris hier soir.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Une dernière question. Vous avez dit que M. Couillard a commis une grave erreur puis qu'il devrait — je ne sais pas si j'ai bien noté, là — payer... va en payer chèrement...

M. Legault : Le prix politique, oui.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Oui. Donc, vous allez en faire un enjeu de la prochaine campagne électorale?

M. Legault : Bien oui. Écoutez, 1,3 milliard de dollars, là, c'est peut-être le plus gros investissement qui a été fait par le gouvernement du Québec.

Rappelez-vous, à l'époque, on était deux chefs de l'opposition, là, Pierre Karl Péladeau et moi, à dire : La transaction, de la façon qu'elle a été structurée, ça n'a pas de bon sens, là. À l'époque, l'investissement que faisaient le gouvernement du Québec et la Caisse de dépôt, à peu près 3 milliards les deux ensemble, c'était à peu près la valeur marchande de toute l'entreprise. Donc, pourquoi on n'a pas exigé, en échange, des garanties, entre autres sur la division de transport en commun, sur la division qui fait les jets d'affaires? On aurait très bien pu investir 1,3 milliard dans le siège social, puis le siège social aurait pu mettre le 1,3 milliard dans la division de la Cseries.

J'ai expliqué ça à Philippe Couillard. Soit qu'il ne comprenait pas ou il ne voulait pas comprendre, mais il a fait une erreur grave. Il a fait perdre beaucoup d'argent aux Québécois par le fait qu'il ne connaît pas l'économie, il ne connaît pas les finances, il ne connaît pas l'investissement. Et, bien, écoutez, les Québécois vont devoir prendre ça en considération lorsqu'ils vont élire le nouveau gouvernement l'année prochaine.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Rapidement, est-ce que vous, personnellement, vous y avez déjà cru, au programme de la Série C ou Bombardier était tout simplement trop petit pour développer un tel programme, n'avait pas...

M. Legault : Moi, je pense que c'était un dossier beaucoup trop risqué pour qu'on puisse investir 1,3 milliard, le gouvernement du Québec, sans garanties dans les autres divisions.

Tu sais, si on aurait pu au moins avoir des garanties dans les autres divisions, on aurait pu réduire le risque, mais c'était un risque énorme. Pour moi, là, aller se battre contre Boeing, là, un géant... En tout cas, moi, je n'aurais pas mis de mon argent personnel pour aller me battre contre le 737.

Le 737, c'est vrai qu'il consomme un petit peu plus de carburant, là, mais c'est un avion qui est adoré par toutes les compagnies aériennes, c'est un avion avec lequel Boeing fait beaucoup d'argent. Ça fait que de penser que Boeing va dire à Bombardier : Vous êtes le bienvenu, rentrez dans le marché... De la naïveté ou... Je ne comprends pas.

La Modératrice : Merci beaucoup. Angelica Montgomery, CBC.

Mme Montgomery (Angelica) : Hello, Mr. Legault. You are someone who has had direct business experience when it comes to working with airlines. You were talking a little bit about what you would have done with your own money. Can you explain a little bit what, because of your own experience, you are able to draw, in terms of lessons for this deal?

M. Legault :OK. I think that it was very risky, last year, when Mr. Couillard decided to invest $1.3 billion only in the CSeries division. If I was Premier, I would have looked at least to get some guarantees in other divisions that are working well. And Mr. Couillard thought that this division would be able to compete with Boeing, and especially with the Boeing 737. And I was sure, at that point, that it would be very, very tough to get into this important market for Boeing. So, we saw what happened legally in the last few months. But also I'm sure that there will be a kind of a loss leader competition between the two of them. But it was very risky with no guarantee.

And today we have the proof that Mr. Couillard made an error, because today the CSeries has been sold to Airbus. We don't have any more control over this division. Airbus announces that they will, in the future, build this aircraft in Alabama, in United States, so it means that we cannot expect more than the actual 2,000 jobs in Mirabel. And $1.3 billion for 2,000 jobs, it means $650,000 per job. It doesn't make any business sense.

So, I think Mr. Couillard made an important error. And I would like to know, from the General Auditor, what is the actual market value of this investment.

I'm convinced that $1.3 billion for 19% of the company... I don't believe that the total actual value of the company is $6.8 billion. I don't believe that, personally. So, I would like to know how much we lost already. And, in the deal, in 2023 Airbus will have the option to buy back the 19% at market value. So, at that time, the market value may be $100 million, we don't know. But there is no incentive for Airbus to increase the market value before 2023.

Mme Montgomery (Angelica) : Is it possible that, if they're able to sell more CSeries, then Québec would be able to get its money back with that 19%? What do you think are the chances that Quebeckers would get that money?

M. Legault : I think that there are chances that they sell some aircrafts from the Série C, because over the last five years Airbus wasn't able to sell any of the Airbus 319, which is in competition with the CSeries. So, now they'll have this aircraft, OK, they have the Airbus 320 that is working well, with a 180 seats, so now they have the CSeries. So, I think they'll sell some, but $7 billion for a company, it's a lot of money, it's a lot of profit. And, even if you sell hundreds of aircrafts, still, you don't make enough money to justify this market value.

Mme Montgomery (Angelica) : But if you were able to get the money back through selling the CSeries, we're not actually paying $640,000 per job.

M. Legault : That's right, but we don't know at this point what will be the market value. Will it be $100 million? We don't know at this point. And there's no guarantee in the deal that we'll get back any percentage of this $1.3 billion.

La Modératrice : Merci beaucoup.

M. Legault : Thank you. Merci, tout le monde.

(Fin à 12 h 2)